jeudi 31 mai 2012

MUSIQUE MAESTRO !


Un esthète, sensible au cadre qui l'entourait, ne pouvant composer ou même simplement vivre que dans un décor artistiquement choisi et disposé selon ses goûts, tel était le Debussy que nous décrit en 1910 un journaliste du New York Times venu l'interviewer. "Une maison délicieuse, une atmosphère de paix et de travail, pleine de céramiques antiques et d'objets orientaux. Les murs aux boiseries légères sont peints de blanc, dans le plus simple style colonial. Dans son studio, monsieur Debussy a peu d'images mais de nombreux livres. Le piano est dans un angle ..." Vallery-Rabot, quant à lui, précise de sont côté "la table de travail sur laquelle se trouvait, à côté de grandes feuilles de papier à musique, un énorme crapaud chinois en bois ... une sorte de fétiche qui ne le quittait jamais". Pas plus que ne l'a jamais quitté la valse que lui offrit Camille Claudel, un exemplaire en plâtre ciré qui trônait sur son piano. "Aux murs, des livres, des instruments de musique d'Extrême Orient, des reproductions en couleurs de tableaux de Whistler et de Turner, des estampas japonaises dont l'une, La Vague, fut représentée sur la couverture de la partition de La Mer. Il y avait encore un panneau de laque chinois qui inspira Poissons d'or..."
Les familiers du musicien sont bien sûr des confrères, Satie, Stravinsky et Chausson, avec lequel il se brouilla quelque peu. Mais aussi des peintres (Vuillard, Degas, Whistler ...) des écrivains (Maeterlink, Toulet...) et tant d'autres artistes. Il fréquentait les salons, autant celui bon enfant et presque familial d'Henry Lerolle que les plus snobs jeudis de Mallarmé. Il s'éprit nous dit-on de Camille Claudel, sans qu'on puisse pour autant savoir s'ils eurent ou non une liaison. En un mot il était pétri d'amour du beau et cette exposition organisée ( et qui se terminera malheureusement bientôt : le 11 juin) par l'Orangerie sur le thème "Debussy, la musique et les Arts" est le parfait reflet de sa culture plurielle : curieux, ouvert, prêt à se passionner pour toutes les nouveautés, n'hésitant pas à braver les modes pour s'affirmer novateur, prêt à susciter des scandales pour imposer sa vision moderniste et audacieuse.


J'avais soigneusement lu, avant de partir, le charmant livre de Dominique Bona, "Deux Soeurs", qui m'avait ouvert les clés de ce petit monde vibrionnant et en perpétuelle invention, au sein duquel Debussy aimait à vivre. Le livre a le mérite de vous mettre "en condition", et, visitant l'exposition vous croisez des noms connus, des "amis" lointains que vous avez vu vivre à l'orée du XIXème siècle et à l'aube du suivant.

Deux délicates scènes d'intérieur de Lerolle, où l'on admire, aux murs, les nombreuses oeuvres dont cet esthète aimait à s'entourer et, au fond, son épouse en train de jouer du piano.

On admire ainsi quelques jolies compositions d'Henry Lerolle, le papa des deux jeunes filles qui sont le prétexte du roman. Christine et Yvonne, que Debussy aima beaucoup et qu'on découvre au passage, en photo ou peintes par Renoir, Vuillard ou Denis.

Le triple portrait d'Yvonne Lerolle, celle qui figure aussi sur le tableau des deux soeurs au piano peint par Renoir, par Maurice Denis. Debussy dédia à la jeune fille ses "images oubliées" pour piano, en 1894. Le tableau de Denis est un hommage au charme ensorceleur de cette jeune femme qu'il admirait beaucoup. Yvonne, présentée dans trois positions hiératiques, devient une véritable icône de la féminité, une allégorie de LA femme que Debussy appelait "la petite soeur de Mélisande"

On visite un intérieur reconstitué, parsemé des objets chers à Debussy, Gallé somptueux, estampes japonaises rares, lampes, vases, panneaux de laque.


On assiste à la mise en image de pages célèbres, comme le Prélude à l'Après-midi d'un faune, Pelléas et Mélisande ou le Martyre de Saint Sébatien. Plus loin, on salue Manet, Mallarmé ou Verlaine, peints respectivement par Degas, Manet et Carrière. On découvre même l'assez peu convaincant portrait de Wagner par Renoir dont il fut question à propos de Caltagirone.

 Winslow Homer Nuit d'été 1890 Orsay


La promenade s'achève par une suite de toiles ayant pris, comme le fit le musicien, la nature comme source d'inspiration Homer, Turner, Degas, Manet bien sûr, Klimt, Henri-Edmond Cross et pour finir un fort beau Kandinsky.


Une sonate en fa majeur sur le thème de la lumière, celle qui vibre au ras d'une clairière, un beau matin d'été : ça tremble, ça frémit doucement, c'est tout une symphonie légère de clarté et d'ombre, comme une émotion qui va durer l'espace d'un instant. Vu de près, les taches sont posées presque sans soin, avec de grands aplats de toile qui émaillent la surface. A quelques pas, c'est d'une précision photographique : et pourtant ce n'est pas du pointillisme, c'est l'impression précise reconstituée par nos sens alertés.

mardi 29 mai 2012

TABLES SICILIENNES

Il y a eu, d'abord, les petits déjeuners :


Ceux de "il piccolo attico"


et ceux de l'Eremo Madonna delle Grazie.
A la Casa Ruffino (excellent alternative quand on atterrit à Palerme pour passer la première ou la dernière nuit car c'est tout près de l'aéroport) aussi les petits déjeuners sont somptueux mais je n'ai pas de photo.
Il y eut ensuite les encas,
douceurs et autres gourmandises :


Les pâtisseries siciliennes sont légendaires...


... et on vous sert toujours l'apéro avec un vrai petit buffet, tout cela pour un prix variant entre 4 et 8 euros pour deux personnes. Je vous recommande la Galleria Luigi Sturzo sur la place de Caltagirone, là où aboutit l'escalier... l'endroit vaut pour son agrément et pour son décor de mosaïques à la mémoire des gloires locales : une vraie leçon d'histoire !


Et puis, LE "gastro" du séjour :
Ristorante Coria à Caltagirone
ou de l'art d'une simple huile d'olive en entrée !! parfumée, douce, irisée de saveurs et légère !! à se damner...


... huile suivie de plats savants, aux goûts naturels et bien accordés, présentés avec "art" ...


... jusqu'aux desserts, pâtisseries siciliennes traditionnelles, revues et corrigées, allégées et interprétées. Une autre table sympathique, où je n'ai pas pris de photo mais qui mérite d'être notée car elle est à Syracuse et le lieu, très touristique, est parfois un peu surfait : il s'agit de la Cambusa, une table très sérieuse, service efficace et plats de qualité, dans Ortigia, avec une jolie vue sur le port.


Ensuite les tables "familiales" ...
elles sont à profusion en Sicile et ce n'est pas un vain mot ! 
 Ici l'Arco Antico à Caltagirone, une table copieuse et bon marché, surtout si l'on prend le menu de poisson ou le menu de viande.


A la locanda Santa Marta, à Avola Antica, près de Casal Grande c'était une vraie table sicilienne : après des antipasti juste pour la gourmandise (un vrai repas) quelques pâtes faites par la maitresse de maison, la traditionnelle salade de fenouil et d'oranges, de petites brochettes grillées, une petite douceur maison  ...
On vous y régale de plats simples et d'une fraicheur parfaite, et si vous revenez le lendemain, on vous accueille comme de lointains cousins, le troisième jour, vous faites vraiment partie de la famille et c'est tout juste si l'on ne se pousse pas pour vous place à la table familiale !A éviter le dimanche ou les soirs de fêtes, il y a un monde fou et c'est la grande bouffe. Par contre, en semaine, à condition d'arriver à oser de faire ouvrir la porte car finalement c'est une maison, c'est parfait.


Il y en a bien d'autres dans ce style mais je n'ai pas tout photographié : je recommande aussi l'agriturismo Avola Antica, une autre locanda qui accueille pour le dîner, à condition de prévenir, dans un paysage sublime (mais on dîne dans la salle à manger, du moins en avril !!) : une table plus élaborée, mais où tout est fabriqué avec des produits du cru, simples et frais... et où, après avoir un peu discuté avec la patronne, je me suis vue offrir deux superbes citrons, feuilles comprises, un cadeau tellement spontané que j'en étais toute émue !
Une autre adresse si vous passez par Balestrate est celle du petit restaurant qui se trouve dans la même rue que la Casa Ruffino : Sapori di mare, tenu par une famille énergique, père, mère, fille, fils, dont la spécialité est tout simplement les moules et les poulpes, natures, simplement arrosés d'un filet de citron. On y sert aussi des spaghetti aux oursins mémorables !


Et puis, NOTRE table secrète...
 L'endroit où il faut aller, et que j'ai envie de partager avec ceux qui vont bientôt découvrir la Sicile : cela se situe à Agira, à quelque distance d'Enna, pas très loin de l'autoroute qui va vers Catane. Le village est plein de charme, comme d'habitude, on y croise encore pas mal d'églises baroques même si ce n'est plus le Val di Noto. Il faut avoir le courage de monter, monter, grimper avec ardeur en voiture tout à fait jusqu'en haut, jusqu'au château. On se fait un peu des émotions mais c'est très jouable et en haut, on se gare devant l'église San Salvatore. Elle renferme d'ailleurs, cette église, une rareté étonnante que nous n'avons malheureusement pas pu voir : une arche de la Loi en pierre. Un très rare exemplaire (ces arches sont d'habitude en bois) construit dans le style aragonais, par des juifs arrivés d'Espagne en 1454 et qui pratiquèrent ici librement leur culte jusqu'en 1492, date fatidique qui marque le fin de cette liberté. 
Mais je m'égare : mon petit restaurant s'appelle "Belvedere", c'est à gauche à partir du parking, 27 via Rametta chez Guiseppe Rubulotta (+39 0935 69 60 91 et +39 328 897 80 73) : la vue est à couper le souffle ! On s'installe sur une petite terrasse abritée du soleil et du vent, et on mange quelques spaghetti aux fèves fraiches, saupoudré comme c'est l'usage en Sicile, non pas de parmesan mais de ricotta salée et sèche, un peu d'agneau au romarin, quelques fraises... rien de bien compliqué mais quel plaisir !!


Quant au LUXE du voyage ??
C'était tout simplement les coraux d'oursins achetés sur le marché de Syracuse à des pêcheurs qui vous en préparaient un petit verre (à prix touriste : j'ai bien tenté le deuxième jour de dire que le "prix touriste" une fois, ça suffisait, car on m'avait donné le  "vrai" prix au café, rien à faire, les siciliens sont ombrageux... et après tout c'est un sacré boulot à pêcher et à préparer !). On achète ensuite une petite miche de pain, et on s'installe à la première terrasse venue où l'on commande un petit verre de blanc et une petite cuillère ! Un délice rare et qui m'émoustille encore les papilles rien que d'en parler !


lundi 28 mai 2012

COLLECTIONNEURS 2ème ÉPISODE

Le portrait présumé de Jonas Netter par Moïse Kisling : le collectionneur était si discret que ses enfants, confrontés à l'occasion de l'exposition à ce portrait durent, pour s'assurer qu'il s'agissait bien de lui, le comparer avec une des rares photographies en leur possession.

L'autre collection a été assemblée dans un esprit totalement différent, moins conventionnel, plus affectif. Constituée par un petit homme secret et effacé, Jonas* Netters, elle semble décrire tous les rêves enfouis, les audaces réfrénées et les fantasmes maitrisés de ce "représentant en marques" qui semblait d'une discrétion et d'une réserve extrêmes. Toute sa vie il découvrit de jeunes talents, peintres maudits ou méconnus de préférence, s'enflamma pour leur oeuvre, les aida, les nourrit, paya leurs cures de désintoxication ou le remboursement de leurs dettes, comme s'il vivait ainsi par procuration une vie d'artiste à l'opposé de sa propre existence rangée de notable prudent. Qualifié par l'auteur du catalogue** de "grand homme fantomatique", Jonas Netter achetait par simple amour de l'art, désireux simplement de s'offrir la contemplation d'oeuvres choisies sans souci de publicité ou de notoriété. Ami honnête et scrupuleux des artistes, il a agit tel un mécène, passionné, inépuisable, véritablement amoureux de l'art sous sa forme la plus personnelle "ça me plait, j'achète". Son métier un peu austère, pratiqué avec rigueur et conscience, demandait qu'il s'évade : il le fit en assouvissant une passion découverte par hasard, la "collectionite" ! Il n'était pas, à l'instar d'un Camondo ou d'un Rotschild, un milliardaire qui s'offre une "danseuse", ni, comme Durand-Ruel ou Vollard, un grand marchand vivant du prestige acquis par les artistes qu'il aurait imposé.
Il aima et découvrit Modigliani, Soutine, Utrillo, s'enrichit par hasard car ses goûts étaient justes, même s'il eut du mal à se débarrasser des conseils douteux de marchands d'art pas toujours très intègres, et dont la principale préoccupation était de "rouler" cet homme intègre et généreux. Son premier intermédiaire, un certain Zborowski, haut en couleur, charmeur et exubérant, le séduisit très vite et le convainquit qu'il lui serait indispensable. Le personnage, aussi inconséquent que Netter était rigoureux, sut s'imposer et se rendre indispensable dans les négociations avec les artistes, en prenant au passage une commission parfois totalement hors de propos ! On retient ce contrat de dupes dans lequel Antcher devait recevoir une mensualité de deux mille francs, payée moitié par le collectionneur moitié par son intermédiaire. Or ce dernier, dans un dialogue cité par Antcher dans ses mémoires, le prévient que si, officiellement il est censé lui donner 1000 francs, il ne lui en versera en réalité que 200, et qu'il n'a pas intérêt à révéler la supercherie à Netter.


J'ai choisi pour vous quelques uns des chefs-d'oeuvres qui émaillent cette exposition : ce Paysage à Vieux-Moulin de Suzanne Valadon m'a retenue par sa luminosité éclatante et l'opposition audacieuse entre la géométrie presque cubiste des vieux murs du village et la courbe élégante des arbres, à laquelle répond l'arrondi de la femme fanant au premier plan, posée derrière la barrière comme une virgule dans une phrase ! Quand Netter remarque Suzanne, elle a plus de 40 ans, elle vient de quitter son époux pour vivre avec un jeune homme du même âge que son fils, et, quoiqu'ayant exposé en 1909, elle n'est pas encore célèbre. Pourtant, elle nage dans le bonheur, ayant épousé en 1914 le jeune ami de Maurice, André Utter avec lequel elle sera heureuse jusqu'aux alentours des années 30. Netter a sans doute apprécié son style énergique, son tempérament, rebelle et impérieux, son caractère frondeur tellement à l'opposé de sa propre personnalité, discrète et sage. Il a aussi beaucoup aimé son fils, dont une quinzaine de toiles figurent dans sa collection. Utrillo fut d'ailleurs un des premiers artistes auxquels il consentit un revenu régulier, l'objectif étant en l'espèce de l'aider à sortir de son alcoolisme. Il paie aussi le mobilier que ce dernier détruit dans ses crises d'éthylisme, le suit, le soutient jusqu'à ce que le peintre, suffisamment reconnu, soit pris en charge par un marchand d'art, Paul Guillaume.

Le portrait de Zborowski par Modigliani

Modigliani est le premier artiste qui lie sa production par contrat à Netter, en 1915. Le peintre, déçu par les rapports qu'il entretient avec Guillaume, plus préoccupé de son oeuvre que de lui-même, le paie trop mal. Pour 15 francs par jour, plus la fourniture de matériel artistique (peintures, toiles, modèles) et le règlement de ses frais d'hôtel, il réserve au collectionneur l'essentiel de sa production. Netter, fasciné par ses toiles, décide un jour de les présenter au public : il s'ensuit un scandale et une émeute dans la rue et la police menace de saisir les nus s'ils ne sont pas immédiatement retirés. Deux dessins seulement sont vendus, 30 francs pièce : autant dire qu'en l'espèce Zborowsky n'aura pas fait fortune !


Le collectionneur quant à lui, est raillé par ses amis  qui lui demandent "pourquoi il achète toutes ces cochonneries ?". Mais il s'entête, il aime l'italien et augmentera ses mensualités régulièrement, jusqu'à la mort de ce dernier en janvier 1920.


L'exposition fut pour moi l'occasion d'apprécier Moïse Kisling, ami de Modi qui, d'ailleurs, le présenta à Netter. Un excentrique qui se battait en duel "pour une question d'honneur" ou organisait une veillée funèbre pour le décès de son chat mort d'avoir avalé un tube de peinture blanche ! Il avait, semble-t-il, un charme fou et plaisait beaucoup aux dames ! Sa peinture, légère comme lui, est sensuelle, élégante et dynamique. Fasciné par la lumière, il installe, nous dit Florent Fels, ses modèles "sur une sorte d'échafaud à roulettes assez inquiétant" qu'il tourne en tous sens, à coups de pied, pour chercher le bon éclairage. "Il tourne autour du modèle... esquisse une petite danse guerrière et, lorsque collaborent et la lumière et son inspiration, se précipite sur le châssis où il situe le tableau à grands coups". Sa facture est lisse, ses tons brillants et les toiles qui en résultent sont  sonores, sensuelles et pétries de lumière.


Pour finir, cette unique toile de Renato Paresce, un Suisse qui grandit à Florence et, dans sa carrière de peintre, d'écrivain et de journaliste, se pose toujours en italien, au point d'abandonner son véritable  nom, René Herbert pour ce patronyme plus "authentique" !

* tellement discret qu'on ignore son prénom exact ! Il se faisait appeler Jones ou Jean...
** Marc Restellini

dimanche 27 mai 2012

27 MAI 13H30 PLAGE DES NONNES MESCHERS

 
Autant hier ça secouait, ça tanguait, ça culbutait, ça dessalait, ça hoquetait sur la houle... autant aujourd'hui le vent est tombé, l'air est calme et la course s'enlise !!



La fumée du paquebot qui a fait escale en face au Verdon, était tout à l'heure absolument droite dans le ciel, phénomène totalement inédit ! Ils devaient partir ce matin à 11h et ils sont toujours là, posés sur le sable, échoués, affalés, ensablés... et ils manquent singulièrement d'arrogance. La plage est un immense campement qui ne sait pas trop à quoi s'occuper.


On joue au ballon, on mange, on écoute de la musique et sans doute attend-on le changement de marée pour avoir une petite brise afin d'aller faire des ronds dans l'eau. Les zodiaques passent et repassent, quelques surfeurs pagaient sur leur planche, allez, retour, retour et aller, certains se baignent, d'autres bronzent. Bref, l'ambiance est à la décontraction !! Et quand ils partiront, tout à l'heure, il leur faudra affronter une mer d'huile, une absence presque totale de vent et tenter d'avancer malgré l'adversité ! Pas évident le Hobie Cat ! Et dire que demain la météo annonce des vents à 10km/h !!! Je me demande comment tout cela va finir !

C'est quand même super les aléas de la nature, cela ramène à une certaine humilité, cela redonne aux décisions de l'homme un salutaire recul et cela permet de prendre du bon temps sur la plage !!!

YOUPI ! ILS SONT PARTIS... (14h30)

samedi 26 mai 2012

26 MAI 13H30 PLAGE DES NONNES MESCHERS


Le départ a été donné : nous voilà partis pour trois jours de spectacle... Meschers sur Gironde accueille sur les plans d'eau de l'Estuaire, du Banc des Marguerites et de la Baie de Royan, les épreuves de sélection pour le championnat d'Europe HC16 (entendez Hobie Cat) , et le petit vent qui souffle aujourd'hui secoue pas mal les équipages ! Les parcours à effectuer seront "de type banane" ! Ne me demandez pas ce que cela signifie mais je vous assure que ça zigzague ferme.


N'y connaissant désespérément rien, je me suis donc tuyautée et je vous livre telle quelle la définition Wikipédia du Hobie Cat : "Hobie Cat est un fabricant de catamarans de sport, principalement utilisés pour la régate, l'apprentissage de la voile, ainsi que le loisir. Il existe différents modèles, d'une longueur de 12 à 21 pieds, d'une largeur de 6,8 à 8,5 pieds, et d'une hauteur de 20 à 33 pieds. Le modèle le plus populaire, le Hobie 16, est vendu depuis la fin des années 1960.
Ces bateaux sont puissants, en raison de leur légèreté, de leur aérodynamisme et de la surface de leur voile. Les Hobie 16, en particulier, sont appréciés pour ces raisons : on peut ainsi atteindre une vitesse de plus de 20 nœuds."


Une houle de  bon aloi rend la course vraiment sportive et le spectacle promis est bien au rendez-vous. C'est vraiment enlevé comme départ ! Alter trépigne de joie : "tu crois qu'on va les voir chavirer pendant trois jours ?". Je puis vous assurer que cela n'a pas l'air de les perturber... et les redressements sont rapides et efficaces. Oups, on tire sur la coque en l'air du catamaran et on glisse sous le bateau pour sauter dessus, et repartir aussi sec. Voguez petits cats ! Et Alter de commenter "Waaouh !!" à chaque nouveau "naufrage" !!

vendredi 25 mai 2012

CHARRETTES SICILIENNES


Arrivés assez tard un soir à Palerme, nous avions réservé une chambre tout près de l'aéroport avant de partir vers l'objectif de notre voyage : le Val de Noto et Syracuse. 


Cela nous a permis de découvrir Terrasini : une de ces stations de bord de mer qui, l'été, sont envahies par les estivants en tong et n'ont guère de charme particulier hors saison que dans leurs poubelles négligées ...



... sauf qu'on est au bord de la mer, et croyez-moi, pour une michelaise, la méditerranée "ça donne" (oh le bleu... mazette !! quel festival pour nous qui conjuguons des palettes de bruns et de verts panachés) ...


Avec la collaboration de Siu:
"l'histoire de Peppino Impastato ne me laisse et ne me laissera jamais indifférente...
C'était un jeune comme tous les autres, et il animait une radio à l'époque des premières "radio libere", mais surtout il n'était pas capable de taire, et au contraire il les criait bien forts et clairs, les méfaits de la mafia dont son oncle était un représentant assez puissant, (et son père pas étranger lui non plus), à Cìnisi où ils vivaient (10.000 habitants pas loin de Palerme).
Il a finalement été tué, par la mafia bien sûr... mais pendant longtemps on a fait croire que c'était lui même, "un terroriste" donc, qui aurait fabriqué la bombe qui lui avait fait perdre la vie. A la fin, après je ne sais plus combien d'années, on a finalement éclairci la vérité.
Et une figure aussi fascinante que celle du fils est celle de la mère, morte en 2004 : petite femme sicilienne, au foulard noir et apparemment insignifiante, mais qui, bien au contraire, a peu à peu compris et su donner raison à son fils, et donc se dresser contre son propre mari, ce qu'était vraiment inouï, en Sicile, à l'époque... la grande Felicia !
Dans le très beau film de Marco Tullio Giordana "I cento passi" qui raconte son histoire, il y a aussi le frère de Peppino, qui gère actuellement le "Centro di documentazione Peppino Impastato". Il n'avait pas le même caractère de son frère... les deux sont donc les protagonistes d'une scène qui est devenue célèbre, celle des fameux "cento passi" qui séparent la maison de leur famille de celle de l'oncle-boss mafieux.



et sauf, surtout, qu'on est en Italie. Et en Italie, où que vous soyez, y a forcément quelque chose à visiter !!!


Ici, c'était le Palazzo d'Aumale, récemment (en 2001) et somptueusement restauré et consacré au Musée Régional d'Histoire Naturelle et de l'exposition permanente du Carretto Sicilien. 
Aumale ? Mais on le connait celui-là !! Après ses brillants exploits de jeune général de brigade contre le Cheikh Abd el Kader en 1843, le fils de Louis Philippe convola en juste noce en 1844 avec Carolina Augusta di Borbone Sicilia, petite fille tant de Ferdinando I delle Due Sicilie et Maria Karoline von Habsburg-Lorraine, Archiduchesse d'Autriche, que de Franz II Kaiser du Saint Empire Romain et Maria Teresa di Borbone Napoli, excusez du peu. Cet homme jeune, à qui tout souriait, hérita en outre de son parrain le dernier Prince de Condé de Chantilly, l'une des plus somptueuses résidences nobiliaires de France, mort sans descendance. D'Aumale hérita donc, entre autres, du le Palais d'Orléans à Palermo. Homme d'affaires avisé, en 1853 il se porta acquéreur d'une immense propriété agricole des Princes de Partanna lorsque celle-ci fut mise aux enchères. 330 hectares d'excellente terre, fameuse pour ses vignobles et sa polyculture trés variée. Rapidement, il mit en gestion raisonnée toute la zone comprise entre les comunes de Montelepre, Partinico et Terrasini. Il semble que le domaine ait atteint, au temps de sa splendeur, 6000 hectares.



Plus qu'une simple ferme, la propriété agricole du Zucco (on voit une photo du "feudo" au XIXème, autant dire le "fief", incrustée dans la vue actuelle) était une véritable unité de production, organisée comme un petit village en complète autarcie. Ses productions étaient stockées dans les magasins de Terrasini, où elles attendent d’être embarquées pour la France et l'Europe. Ce sont ces bâtiments qui sont aujourd'hui pompeusement appelés Palais d'Aumale. Ou plus exactement ceux où le Duc entreposait les barriques du vin, fameux, qu'il destinait surtout à sa consommation personnelle. Un vin épais, lourd en degrés et utilisé pour "couper", on devrait dire "allonger", les vins français, trop faibles en alcool. 


Aujourd'hui, le musée abrite une superbe collection d'histoire naturelle (oiseaux, papillons, coquillages ; les fossiles sont particulièrement impressionnants), d'archéologie (principalement des amphores retrouvées dans les fonds sous-marins au large de Terrasini) et surtout de magnifiques charrettes siciliennes, richement décorées, élément incontournable du folklore sicilien. Toutes ces collections sont présentées et agencées de main de maître, la muséographie moderne est passée par là : avec beaucoup de goût et de façon très aérée. 

La traversée la plus facile est celle de Naples à Palerme. On demeure surpris, en quittant le bateau, par le mouvement et la gaieté de cette grande ville de deux cent cinquante mille habitants, pleine de boutiques et de bruit, moins agitée que Naples, bien que tout aussi vivante. Et d'abord, on s'arrête devant la première charrette aperçue.
Ces charrettes, de petites boîtes carrées haut perchées sur des roues jaunes, sont décorées de peintures naïves et bizarres qui représentent des faits historiques ou particuliers, des aventures de toute espèce, des combats, des rencontres de souverains, mais surtout, les batailles de Napoléon Ier et des Croisades. Une singulière découpure de bois et de fer les soutient sur l'essieu ; et les rayons de leurs roues sont ouvragés aussi. La bête qui les traîne porte un pompon sur la tête et un autre au milieu du dos, et elle est vêtue d'un harnachement coquet et coloré, chaque morceau de cuir étant garni d'une sorte de laine rouge et de menus grelots. Ces voitures peintes passent par les rues, drôles et différentes, attirent l'oeil et l'esprit, se promènent comme des rébus qu'on cherche toujours à deviner.


Certes, les charrettes siciliennes avaient sans doute plus de sel quand Maupassant (En Sicile,1886) les vit en action : elles ne servent plus qu'à épater le touriste et à caracoler les jours de fêtes pour exhiber les statues de saints ou les jolies siciliennes en costume de fantaisie. Vrai emblême du "cadeau souvenir" à ramener dans ses bagages quand on est un touriste qui se respecte, elles peuvent avoir, de fait, une connotation péjorative à laquelle il serait dommage de s'arrêter. 


Car ce sont de véritables œuvres d’artisanat, d'art même, pour lesquelles il ne reste que peu de spécialistes : le musée de Terrasini leur rend impeccablement hommage, en montrant l'atelier d'un dernier "maître en charrettes" et plusieurs de ses réalisations. Encore un savoir-faire et une tradition qui pourraient bien être menacés, si l'on n'y prend pas garde ! Mais on est attentif à ce genre de phénomène et je suis certaine que la région Sicile consacre quelques efforts à la survie de ce travail particulier. Tout une culture à protéger...


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