CONCOURS DE QUATUORS A CORDES DE BORDEAUX 2013

Les quatuors Tesla et Capriccio lors d'un concert en fin d'après-midi à la Cour Mably

Un petit détour par Bordeaux où, comme chaque année, je vous inflige le concours de quatuors à cordes ! Certes, chaque année le lieu change (Bordeaux en 2010, Reggio Emilia en 2011, Londres en 2012) mais on finit par revenir à notre point de départ, et le récit de tout cela pourrait menacer d'être répétitif !

Sauf que les jeunes talents qu'on y entend chaque année n'ont rien d'ennuyeux je vous l'assure. Et  l'ambiance, au fil des ans, entre aficionados du quatuor, finit par tenir plus de la colonie de vacances (nous nous sommes surnommés le "Clan des sept") que de la triste réunion de vieux barbons confits en musique. Alain Meunier nous appelle, à juste titre, dans son éditorial au programme, "les impénitents du quatuor à cordes".

Le jury, très illustre, si si, je vous promets ... mais les photos sont interdites !!

Pourtant, confit en musique il faut l'être pour se "tartiner", de 10h du matin à 17h (19h avec le concert du soir !) quatuor sur quatuor, en notant soigneusement les noms de candidats, les impressions et nos modestes remarques. Première épreuve : chaque candidat joue deux œuvres  une choisie dans l'opus 76 de Haydn ou dans l'opus 18 de Beethoven, l'autre "tout ou partie composée après 1830 et avant 2000, d'une durée n'excédant pas 30 minutes"... Même organisation pour la deuxième épreuve sauf qu'on remplace Haydn et Beethoven par Schumann ou Verdi, et que la seconde oeuvre est plutôt moderne (Ives, Carte, Dutilleux, Boulez ou Xenakis). Et comme si cela ne suffisait pas, le soir, on a des concerts !! Joués par d'anciens vainqueurs, le quatuor Quiroga (prix du concours de la presse en 2007), le quatuor Belcea (prix 1999) ou le grand organisateur de tout cela Alain Meunier, en duo avec Anne le Bozec.

Cette année le concours se déroule au nouvel auditorium de Bordeaux, un lieu parfait d'un point de vue acoustique et fort bien situé par rapport à notre logement où se déroulent, entre les épreuves, d'ardentes discussions ! Car cette fois-ci, pont du 8 mai aidant, nous nous sommes installés sur place, pour toute la semaine. Il ne faut pas croire que la vie de l'impénitent soit plus facile que celle de l'impétrant. Moins de stress certes que les petits jeunes, tous talentueux, tous travaillant de longue date sur les œuvres du concours, tous méritants aussi... mais pourtant quelle tension chez l'auditeur attentif : ils étaient 12 au départ, et cela fait donc déjà 24 quatuors en deux jours. Ils restent 9 en lisse après la première épreuve, donc 18 quatuors de plus ! En tachant de ne pas se laisser aller à la rêverie !! Entre les rounds, je veux dire entre chaque candidat, on se détend les jambes dans les allées, un peu sonnés et on échange. D'abord timidement, nous ne sommes pas des spécialistes, ce ne sont que des impressions, puis plus hardiment !! Quitte à, parfois, faire des impairs en parlant un peu trop fort de nos déceptions en oubliant que les parents et amis sont aussi dans la salle.

Et puis, nous avons déjà des a priori, nous en connaissons pas mal ! Depuis le quatuor Deixis rencontrés à Fayence où ils étaient en masterclass avec Miguel da Silva en passant par les GIRARD, applaudis lors des jeudis musicaux en Charente-Maritime, les SCHUMANN qui étaient parmi nos "chouchous" à Reggio, les TESLA et les VARESE que nous avons entendus, les premiers à Londres, les seconds, à Reggio, les TERCEA entendus à Saint Roch à Paris... pas simple de ne pas avoir des préférés !!

Les Allemands : Quatuor Schnitzler - Quatuor Schumann

Les Français : Quatuor Arranoa - Quatuor Capriccio - Quatuor Deixis - Quatuor Ellipse - Quatuor Girard - Quatuor Tercea,  Quatuor Varèse

Le Hollandais : Quatuor Dudok

L’Américain : Quatuor Tesla

Le Japonais - Quatuor Soleil

A l'heure où j'écris, la seconde épreuve est encore en cours. Certains sont déjà partis, ou du moins hors jeu, un peu tristes mais convaincus qu'ils auront leur chance les années prochaines (et nous serons là, si Dieu nous prête vie, pour les soutenir).

Après la première épreuve restent en lisse :

Quatuor Schumann - Quatuor Capriccio - Quatuor Ellipse - Quatuor Girard - Quatuor Tercea - Quatuor Varèse - Quatuor Dudok - Quatuor Tesla - Quatuor Soleil

Mais en l'état actuel des choses, impossible de faire un pronostic : l'histoire nous a montré que tout peut arriver et qu'une formation particulièrement brillante et fort appréciée de tous pouvait, le jour de la finale, se "vautrer" de façon incroyable. Ainsi en fut-il du quatuor Meccore en 2012 à Londres, qui après un parcours sans faute nous a stupéfiés lors de la finale par une interprétation vraiment bizarre et trop tendue du quatuor "la jeune fille et la mort", ou du quatuor Raphaël qui n'eut, en 2010 à Bordeaux "que" le deuxième prix, pour cause de dérapage incontrôlé lors de la dernière épreuve. Sans parler de l’hallucinante fin du concours 2011 où personne n'eut aucun prix au motif, fort tiré par les cheveux, qu'ils étaient tous trop bons. Et puis ce serait un peu pédant d'avoir un avis avant les membres, prestigieux, du jury !!

Pas question non plus de dire du mal de quiconque : c'est tellement exaltant de participer, fut-ce en spectateurs, à cette compétition, de profiter de ces concerts pour lesquels chaque formation a fourni un énorme travail, des efforts personnels pour répéter, se mettre au point, affronter ensuite les affres de la scène, du jury... Il serait malvenu de se permettre la moindre critique négative. D'autant que, l'expérience nous l'a montré alors que nous manifestions un peu trop notre désappointement après une prestation, il y a dans la salle ou sur la toile trop d'oreilles ou d'yeux amis, à qui nous ferions de la peine, inutilement. Tout ce généreux engagement est tellement enthousiasmant que nous n'avons pas le droit de nous montrer ingrats. D'autant que nous ne sommes que des amateurs, incapables de juger d'un point de vue technique, séduits par certaines partitions plus "faciles" ou mieux connues que d'autres, et nos impressions doivent rester discrètes et personnelles. S'ajoutent à tout cela des inégalités sur lesquelles nous n'avons guère d'informations :  inégalités de temps de préparation (certains sont en résidence, d'autres doivent travailler la nuit pour se retrouver, en plus de leur temps professionnel), des inégalités de conseils (certains ont déjà bénéficié de master-classes prestigieuses, d'autres sont plus isolés), des inégalités d'équipement (entre des instruments illustres prêtés par quelque mécène et de modestes "outils" sans sonorité particulière il y a un monde !)... toutes disparités dont nous espérons que le jury tient compte mais qui nous échappent.

Qu'il me soit permis de déplorer l'interdiction de prendre des photos ... c'est devenu un tic partout ! Et je trouve dommageable pour ces jeunes, dont certains sont à peine lancés, souvent en début de carrière, qu'il soit impossible, avec les réserves d'usage (pas pendant les morceaux et sans flash) de les photographier : une conception extensive et ridicule du droit à l'image, qui n'a aucun sens concernant des gens qui se produisent en public ! Et qui seraient sans doute fort aises d'avoir un peu de publicité sur le net ! J'en ai donc été réduite, comme dans un procès d'assises, à faire quelques croquis pour tenter de garder le souvenir de chacun : mais comme je ne sais absolument pas dessiner, je me suis limitée aux coiffures et ces vilains gribouillis sont juste là pour nous permettre de nous y retrouver entre celle qui avait un cercle et celle qui avait une queue de cheval !

VOIR suite : le palmarès