mercredi 29 mai 2013

MOEC(C)HE AND CO


Il n'est pas un voyage qui ne fasse, en ces pages, l'objet d'un récapitulatif logistique, à usage interne (cela constitue en quelque sorte notre carnet d'adresses faciles à retrouver, même plusieurs années après), mais aussi pour donner nos bons plans, au cas où certains d'entre vous iraient faire un petit tour en Vénétie ! Et puis, dire du bien de ceux qui nous offrent, parfois avec un vrai talent, hébergement, bonne chère et boissons raffinées, cela ne peut faire de mal à personne !!



Notre chambre d'hôte tout d'abord, aurait mérité à elle seule un article. Située dans un quartier calme et modeste d'une de ces nombreuses villes qui émaillent le cours du Brenta entre Venise et Padoue, Bella Riviera est installée dans une maison restaurée avec goût en 2011 par un jeune couple fort sympathique. Une seule adresse pour tout le séjour, car Mira est fort bien placée pour faire de nombreuses excursions, et nous n'en avons pas épuisé les ressources !




Sylvia, notre hôtesse, était accueillante, spontanée, d'une discrétion à toute épreuve et elle nous a gâtés, choyés, chouchoutés durant toute la semaine que nous avons passée chez elle. D'une propreté méticuleuse, la chambre était vaste, meublée avec soin et s'agrémentait d'une terrasse fort appréciable lors des jours de chaleur. La salle de bain, bien équipée, ne déparait pas !


Le petit déjeuner du dimanche !! Savoureux et terriblement copieux ! Très bon aussi toute la semaine ...


Une salle pour le petit déjeuner mettait à notre disposition de quoi se faire un café ou une boisson fraîche pendant la journée (mais nous n'étions jamais là) et était surtout le lieu de nos agapes matinales (oups !! pas très matinales pour dire la vérité !!), charcuterie, crudités, yaourts, pains, confiture, viennoiseries fraîches et gourmandes, thé, café, jus de fruits frais... et le dimanche, nous avons eu un vrai festin, avec en plus des œufs, du saumon, et une torta d'enfer !! Le tout pour un prix très doux, comme vous le verrez sur le site... je vous assure que c'est vraiment une adresse précieuse pour qui a envie d'aller aux environs de Padoue ou en Vénétie, que je vous donne là !!! Et, faut-il que je vous aime amis lecteurs, je pense que l'adresse est excellente pour visiter Venise : on peut s'y rendre avec une désarmante simplicité depuis Fusina qui vous mène, d'un jet de vaporetto, aux Zattere... Certes, nous avons longtemps pratiqué un hébergement dans le centre de Venise à tout prix, mais justement le prix est devenu carrément dissuasif, le confort toujours plus aléatoire, et les restaurants franchement prohibitifs. Donc nous nous sommes dit que, la prochaine fois, nous viendrions sans doute à Mira, chez Sylvia !!

Je ne vous cacherai pas que la découverte d'un petit restaurant tout à fait de "derrière les fagots" n'est pas étranger à ce projet. Mais commençons par Padoue. Quand nous sommes sortis, à 21 heures passées, de la contemplation sévèrement limitée à 20 minutes, des fresques de Giotto, nous n'avions guère envie de retourner en ville et avons demandé aux gardiens un petit restaurant dans le coin. Ils nous ont gentiment indiqué "leur" restaurant, Gli Eremitani, 29 Via Porciglia, 29, (+39 049 875 4663) juste derrière l'espace muséal des Ermitani, et nous nous sommes ainsi retrouvés dans une salle très familiale, à déguster une cuisine casalinga, à la fois copieuse et goûteuse. Rien d'un restaurant gastronomique, un cadre plutôt rustique, mais vraiment une bonne adresse, offrant une carte de pizze particulièrement étoffée, et quelques bons "plats maison", tous particulièrement bien cuisinés. Ce fut donc, pour les autres soirs, notre adresse à Padoue !




Pour les Spritz padouans, rien ne vaut L'Enoteca Osteria Santa Lucia au 15 de la Piiazza Cavour, (+39 049 655545, le coin est superbe, les apéritifs sont bien dosés et servis avec une généreuse assiette de bouchées salées à grignoter qui évitent l'ébriété !! 

Ensuite nous avons testé trois adresses, et vous ne m'en voudrez pas si je garde la meilleure pour la fin. La première était un de ces fameux "bib rouges" que Michelin dispense en général avec une certaine justesse. Le nôtre était à Galleria Veneta et s'appelait "Al Palazzon" . Pas de doute, sans GPS nous serions encore en train de tourner dans les marais, mais quoi de plus simple aujourd'hui que de trouver un endroit improbable en obéissant juste aux ordres "faites demi-tour dès que possible", "dans 200 mètres tournez IMMÉDIATEMENT à droite"... là, vous vous retrouvez sur un chemin de terre qui est manifestement un raccourci improvisé par votre guide autoritaire, mais au bout quel bonheur !!! Après un antipasto délectable, nécessaire, une fois n'est pas coutume, pour permettre au riz de cuire, un risotto à se damner, suivi de seiches fort bien accommodées, le tout arrosé d'un petit Prosecco de la maison, pas plus mauvais qu'un autre, le petit peuple michelais était "benaise"* et le retour dut se faire à petite vitesse. 



Un autre soir, alertés par des visiteurs à peu près aussi acharnés que nous à contempler fresques et villas, autant dire des gens bizarres qui ne pensaient pas aux kilomètres mais au bien-être, nous avons découvert LA spécialité vénitienne, qui ne dure ici, comme du reste ailleurs, que quelques rares jours par an : les moecche. Notre premier essai se déroula à Mira Porte (entre Mira Talio, Mirano, Merano et Mira Porte, dont le nom désigne, non le petit port qui s'y cache mais les portes qui fermaient les écluses du lieu, il y avait de quoi devenir fou dans ce coin !!) à l'auberge Alla Vida, 31 Via Don Giovanni Minzoni (+39041 422143), un endroit joliment décoré, où la cuisine était fort bonne, mais un peu trop cher à mon sens, pour le contenu de l'assiette, assez "nouvelle cuisine" en quantité tout au moins. Mais que sont, me direz-vous, ces fameuses moe(c)che (avec deux "c" sur place, avec un seul "c" sur internet ? Tout simplement des mollets ou crabes mous, libérés par les futurs tourteaux au moment de la mue et qui, normalement, vont se cacher dans des creux de rochers pour se protéger en attendant d'avoir une nouvelle carapace, ce qui leur prend quelques jours. Sauf que, les crabes ont décidément des moeurs peu recommandables, certains mâles profitent de la situation pour s'emparer de femelles fragiles et les féconder, bon gré, mal gré, en les traînant avec eux. Ces mollets, très appréciés des pêcheurs de bar (pardon Mireille, de loup !) qui en font des appâts incomparables, sont aussi fort prisés de plusieurs gastronomies, dont la chinoise (Qui Xiao Long leur consacre des pages vibrantes) et des vénitiens qui se les arrachent à prix d'or à la Pescheria (on parle de 40 à 100 € le kilo). Il faut dire que non seulement la période où l'on peut les pêcher est brève, mais en plus, leur récolte dépend des conditions météorologiques.


Quant au mode de cuisson, il est aussi bizarre qu'efficace d'un point de vue gustatif. On plonge les moec(c)he durant deux ou trois heures dans des œufs battus, que les pauvres bestioles, ravies de l'aubaine, engloutissent goulûment, avant de mourir étouffées par leur gourmandise. Quand elles ont terminé leur dernier festin, on les passe rapidement dans un peu de farine avant de les jeter dans une friture bouillante dont il ne reste plus qu'à les extraire précautionneusement pour les servir chaudes et croquantes. Alla Vida les avait bien gavées d’œufs, mais elles étaient servies sur un lit de polenta un peu trop émollient et, quoique délicieuses, se révélèrent un peu "molles". Par contre, notre deuxième essai, mené trois jours plus tard, nous a définitivement convertis.

Désolée pour la qualité des photos : j'avais oublié mon appareil et j'ai utilisé mon téléphone portable qui a passé 8 mois sous la neige, la pluie et le soleil et qui n'est plus très opérationnel côté pixels !!


Pour trouver la trattoria Marina 54 via Ettore Tito, Dolo (+390415600303), nous n'avions, le premier soir comme indication que "c'est à Mira, au bord du Brenta"... autant dire que nous avons erré longtemps avant de la dégoter... à Dolo et non à Mira ainsi que nous le pensions au début. La carte était exclusivement composée de produits de la mer, pas la moindre trace d'une charcuterie ou d'une viande à l'horizon. La commande passée, et alors que nous dégustions de fort bons tagliolini et un brochet de première qualité, je vis soudain passer des moec(c)he. Le cuisinier consulté me dit que non, elles n'étaient pas sur la carte, réservée seulement aux clients habituels, mais il accepta assez vite de nous en réserver pour le lendemain. Le soir suivant, à l'heure dite, nous étions au rendez-vous. Et si les moec(c)he de la trattoria Marina étaient au naturel, non engraissées à l’œuf, je puis vous affirmer qu'elles étaient (malgré l'abominable photo que je vous en propose) incomparablement meilleures que les premières, parfaitement croustillantes, et pourtant délicieusement fondantes. Suivies d'un plat de tagliolini présentés dans un demi homard, et - c'était notre repas d'adieu (momentané) à la Vénétie - d'une friture de première fraîcheur,  nous avons eu du mal à regagner notre gite, tant nous étions de bonne humeur et la panse joyeuse !! 

Alter a décidé in petto de loger à Mira lors de notre prochain séjour vénitien pour venir chez Marina tous les soirs, et, seconde bonne résolution, de se précipiter vers l'estuaire au retour pour tenter d'y pêcher quelques mollets. Car, quand il va aux crevettes, il lui est parfois arrivé d'en capturer quelques uns, et les ayant jusqu'à présent rejetés avec dédain, il s'est promis de leur réserver un sort plus conforme à la gourmandise !! Mais sa première tentative, dûment équipé de balances gorgées d'entrailles de poissons pour capturer ses crabes mous, s'est terminée... que dis-je... a commencé par une jolie chute sur les rochers, et l'affaire a tourné court... pour le plus grand bonheur des crabes !


* benaise, en charentais, comme sans doute dans d'autres contrées, signifie tout simplement "bien aise", autant dire béat de contentement !

14 commentaires:

  1. Alors là je te reconnais bien Michelaise.
    Même dans la rédaction de ton guide des bonnes adresses tu nous transportes dans un monde de détails et d'humour.
    En dehors de ta description de "Bella Riviera" qui me donne vraiment envie d'y séjourner, ta "thèse" sur le crabe mou est "Pavlovienne".
    Cette bestiole succulente qui a malheureusement disparue de nos étals maralpins me ramène aux temps de ma jeunesse (pas si lointains finalement) où avec mon père nous allions les piéger dans les rochers d'Eze.
    Je t'avoue que le mode de préparation dont tu parles m'est inconnu. Je pense qu'ils finissaient vivants dans la friture.
    Quant à la polenta dans l'assiette elle ressemble plus à du tapioca qu'à notre succulente préparation régionale.
    Tes critiques avec ou sans complaisance sont savoureuses et ont au moins la franchise de dire que l'on ne tombe pas toujours bien.
    Ton deuxième essai fut donc bien transformé et je te remercie d'avoir appelé un loup un loup.
    Bises.

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    1. Ah Mireille, nous n'en finirons jamais avec ce bar-loup que les italiens nomment spigola, branzino ou ragno quand ils renoncent au simple pesce lupo !! Et sont persuadés qu'il s'agit d'un poisson rare et que nous ne connaissons pas, nous promettant à chaque fois une dégustation inédite "vous allez voir, c'est un poisson extraordinaire" et, gentiment, nous nous émerveillons ! Il faut dire que la bête est vraiment une des meilleures qui soit !
      Pour le reste merci Mireille de ta lecture pleine d'indulgence. J'avoue, en ce qui me concerne, préférer la polenta lombarde à la vénitienne, moelleuse certes mais que je trouve, assez fade. Mais il s'agit d'affaire de goût, comme je préfère le couscous à gros grains à celui à grains fins !
      La préparation des moeche gavées d’œufs est très barbare et, quoique spectaculaire, cela n'apporte pas grand chose à plat. En tout cas, si tu as pêché ceux des rochers d'Eze, je puis t'assurer que ceux des rochers de Meschers peuvent dormir tranquilles et fabriquer leur carapace en paix !! Alter préfère se limiter aux crevettes ...

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    2. Je suis plus daurade et St Pierre. Mais un bon loup de ligne au gros sel. Je suis d'accord aussi.

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  2. Bon. J'imprime ton billet pour mes pérégrinations plus si lointaines, mais j'ai une question supplémentaire : je me déplace pedibus, jambus, autobus et, quand c'est possible, trenus, donc est-ce que ces endroits que tu nous décris me seraient accessibles?

    Je sais conduire, et même depuis fort longtemps dois-je dorénavant dire, mais pas «avec les vitesses» comme on dit ici, et une absence de cartilage dans le genou droit ne m'incite guère à apprendre. De toute manière, vu la façon dont les Italiens conduisent, anche se sapevo guidare con le marce -si dice così?- je ne le ferais pas. Ma vie est déjà suffisamment menacée à chaque fois que j'essaie de traverser une rue dans ce charmant pays que j'adore par ailleurs...

    Donc, tu crois que je pourrais me balader quand même dans ces jolis endroits?

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    1. Non, sans voiture l'affaire n'est pas intéressante ! car aller à Fusina déjà demande un moyen de locomotion, et l'idée est d'en profiter pour faire à la fois Venise et la Vénétie... donc d'aller se promener ! Quand on n'a pas de voiture, Venise est tout de même plus commode !

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  3. En effet elle n'est pas très chère ta chambre d'hôtes mais hélas manifestement elle n'est pas ouverte toute l'année.
    A cela tu dois tout de même ajouter le prix du billet du vaporetto et celui du bus pour rejoindre Fusina l'un dans l'autre on arrive à peu près au prix de la nuitée de l'appartement que j'occupe à Venise et qui est d'un grand confort et d'une propreté méticuleuse.
    Aller au marché à Venise est fort plaisant ,je ne vais jamais au restaurant lorsque je suis à Venise par contre je m'offre l'apéro sur la terrasse du Gritti au moins une fois durant le séjour .
    Les moecche c'est mon régal on en mange de délicieux à Murano ainsi qu'à Burano il me semble qu'on ajoute aussi du parmesan râpé à la saumure dans laquelle on les laisse gambader.
    Mireille justement cette polenta blanche est la spécialité de la vénétie!!
    Que l'on sert avec le bacala avec un seul "c" lorsqu'on met deux "c" il est fait référence au salé.
    Quant au prosecco on a de plus en plus de mal à trouver du prosecco con fondo , on fabrique le vrai Prosecco en rajoutant du mout lors de la mise en bouteille afin de relancer la fermentation, ce qui donne un vin légèrement pétillant mais dont le fond de la bouteille est légèrement trouble.
    Loris Follador le fabrique encore ainsi c'est un des meilleurs que j'ai pu boire

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  4. Pas de doute que si on veut être à Venise seulement, il vaut mieux y loger ! Et le marché de la location saisonnière y est maintenant fort développé !

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    1. Je sais Françoise qu'elle est la spécialité de la Vénétie, et vais-je t'étonner en te disant que je sais la faire.
      Je dis simplement qu'elle est loin d'égaler celle de ma région nisso-ligure. Même à la vue il n'y a pas photo.
      Je sais je suis une farouche chauvine de mon patrimoine culinaire.
      Pffff on ne se refait pas à mon âge.
      Bises

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  5. quand il y a de bonnes adresses, c'est une bonne idée de les partager! Voilà un article qui met l'eau à la bouche en tout cas!

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    1. Et en prime, quand j'ai besoin des adresses en question, je suis certaine de les retrouver sur le net !!

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  6. Belle chambre d'hôtes ! Mira pait être une destination à ne pas manquer ! Ah ah les crabes ça m'a bien fait rire ! mais qu'y a t il a manger là-dedans ?

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    1. Ah ah Philfff : on ne mange pas dedans ! on mange TOUT !! je vous rassure, comme ce sont des crabes qui ont laissé leur carapace pour en fabriquer une autre, ils sont vraiment mous !!

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  7. Jolies chambres d'hôtes en effet, à prix tout doux. Dommage qu'il n'y ait pas de location disponible à l'automne, une de mes saisons préférées! Je m'y serais bien vu au mois d'octobre! Et pour rebondir sur la question de Marie-José, tu as une adresse de derrière les fagots pour les locations de voiture? Je ne me suis jamais risqué à loué une voiture, j'y suis toujours allé avec la mienne quand je trouvais ça nécessaire!

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  8. Alors pour la location de voitures, nous te recommandons, (et nous ne sommes pas les seuls à pratiquer et à qui ce site donne satisfaction ) :
    AUTOEUROPE
    je pense qu'il s'agit d'un site qui centralise les "inloués" des grands loueurs et les propose à des prix plutôt doux. Ils ont un système de rachat de franchise moins onéreux que les autres. Car le problème en la matière est toujours la franchise et son rachat. Résolu d'office si l'on a une carte American Express ou autre carte bancaire qui prévoit le servie. Nous louons très régulièrement et avons parfois eu la chance d'être surclassés, ce qui est sympa !

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