Orgueil en son abri d'un carillon qui tinte
Sur les ailes du vent qui m'apporta la plainte
Qu'exhalait dans le soir l'âme d'un troubadour.
Vous irez voir Gimel, le fief des Ventadour...*
Poème de Jean des Teindes
Gimel, en Corrèze, près de Tulle, ce sont bien sûr les cascades : la Montane, dans une gorge sauvage, se fraie un chemin au milieu des rochers et se précipite en trois superbes chutes : Le grand saut, La redole et La queue de cheval, qui dévalent une hauteur totale de 143 mètres. Le site est agrémenté de promenades verdoyantes et entre les vestiges du château médiéval, le pont à péage et le circuit des cascadelles, le village qui a choisi de s'appeler Gimel-les-Cascades, mérite largement le détour.
La surprise nous est venue de l'église du bourg. L’église St Pardoux (fin 15ème siècle) possède un mobilier remarquable dont un trésor qui comprend, entre autres, une châsse-reliquaire du 12ème siècle en émail de Limoges consacrée à Saint-Etienne, le premier martyr, et qui offre une richesse de décoration et une fraicheur des couleurs tout à fait surprenantes.
On remarque au passage que les ors des boiseries refaites au 18ème, ont été, par mesure d'économie, cantonnés aux parties hautes de l'autel, les artisans ayant simplement imité le bois doré dans les moulures basses, en les peignant en jaune ! Cela se voit d'ailleurs beaucoup plus nettement sur les photos qu'à l'oeil nu !!
On peut aussi admirer un siège de célébrant en bois sculpté (époque Louis XIII), une chaire à prêcher du 17ème siècle en bois polychrome, qui fait penser à celle de Gourdon dans le Lot, une Vierge de l'Annonciation en bois du XVème à l'air altier et enfin une pietà de facture plus modeste mais tout aussi précieuse.
Mais le plus surprenant est une toile mal éclairée qui orne le bas côté droit de l'église. Intitulée "les fidèles au pardon", on apprend qu'elle fut peinte en 1903 par un certain Cesare Saccaggi. Le peintre, élève d'Andrea Gastaldi et de Pier Celestino Gilardi à l'Académie Royale Albertina de Turin, réalisa plusieurs décors pour les églises de cette ville et certaines de ses toiles figurent au musée de Turin. Une exposition intitulée "Saccaggi entre Eros et Pan" lui fut consacrée en mars 2009, permettant de mieux connaitre ce peintre mineur mais talentueux. Il paie par un certain oubli son éclectisme, passant du préraphaélisme au style pompéien à la Alma Tadema, du néogothisme au néorenaissance, de l'Art Nouveau au vérisme. La première partie de sa production est dédiée aux portraits "mondains" de la "bonne société" milanaise et turinoise, et cela constitue pour lui un excellent tremplin pour se faire connaître. Son art ensuite trouve son inspiration dans le monde des idées, la renaisance d'un Orient mythique, le symbolisme floral, le classicisme poétique, une éternelle recherche de beauté mâtinée de religiosité et d'un brin de sensibilité sociale (témoin son tableau l'excommuniée", portrait d'une mère et de son enfant, suivant de loin une procession religieuse, mise à l'index car elle est mère célibataire). Renommé pour ses aquarelles et ses pastels, souvent inspirés de l'Antiquité, il exposa régulièrement en France de 1895 à 1927.
Les fidèles au pardon reçut d'ailleurs une médaille de troisième classe au Salon des Artistes français de 1903. La composition en "plan américain" (c'est à dire cadrant les personnages à mi-cuisses pour les rendre plus proches du spectateur) est traditionnelle chez cet artiste et on la retrouve dans ses oeuvres les plus célèbres telles que l'Alma Natura Ave (1898), pastel récompensé par une médaille de bronze à l'Exposition Universelle de 1900. La toile de Gimel est remarquable par la série de portraits qu'il présente, la minutie des costumes et les détails, comme ce reliquaire néogothique tenu par la jeune fille du centre. Proche par son style de l'Ecole préraphaélite, il s'apparente, par son mysticisme et ses divers plans de lecture de l'Ecole symboliste de la fin du XIXème.
Les fidèles au pardon reçut d'ailleurs une médaille de troisième classe au Salon des Artistes français de 1903. La composition en "plan américain" (c'est à dire cadrant les personnages à mi-cuisses pour les rendre plus proches du spectateur) est traditionnelle chez cet artiste et on la retrouve dans ses oeuvres les plus célèbres telles que l'Alma Natura Ave (1898), pastel récompensé par une médaille de bronze à l'Exposition Universelle de 1900. La toile de Gimel est remarquable par la série de portraits qu'il présente, la minutie des costumes et les détails, comme ce reliquaire néogothique tenu par la jeune fille du centre. Proche par son style de l'Ecole préraphaélite, il s'apparente, par son mysticisme et ses divers plans de lecture de l'Ecole symboliste de la fin du XIXème.
Le pardon dont il est fait mention dans le titre est la procession de la Saint Jean dont on connait une manifestation particulière à Tulle : la "fête de la Lunade", cortège remontant au 14ème siècle et qui est mentionné sur le cadre. Le petit enfant tenu au bras est vêtu d'une peau de bête et la jeune fille au hénin porte un agneau. Cette oeuvre fort raffinée a été donnée à la paroise par Jean (eh oui !!) de la Pradelle, puis offerte à la commune de Gimel. On ne peut affirmer que les paysages figurant à l'arrière-plan de la scène soient ceux des monts de Corrèze, mais leur allure y fait fortement penser. Un détail technique savoureux : dans l'église, la toile paraît assez terne mais les photos rendent parfaitement sa richesse chromatique et l'élégance de la touche ! Autant dire que la photo est parfois un plus ! Notons enfin que Sacaggi, mal référencé dans les histoires de l'art est très apprécié des collectionneurs, une de ses toiles ayant atteint il y a quelques années la somme record de 42 000 000 lires (environ 25 000 euros).
* Je me suis permis de reconstituer une sorte d'alexandrin, l'affiche qu'on lit à l'entrée du village étant légèrement différente ! Au passage, le blason de Gimel a perdu ses bandes bleu d'azur, que l'on peut encore admirer sur une photo prise par un autre internaute en 2006 !!
So many wonderful images!
RépondreSupprimerEncore une fois tu m'as fait chercher dans mes petits carnets.
RépondreSupprimerPour moi cela remonte aux journées du patrimoine de 2009 ,le CR avait du reste édité une superbe plaquette
Je tremblais en déroulant ton billet car même si je ne me souvenais pas de tout je me souvenais très bien du Plat des morts.
Dieu merci tu nous en as fait grâce!
J'avais noté une très jolie Vierge de pitié ainsi que la Vierge des cascades,mais je me suis peut-être trompée dans mes notes.
Par contre je suis sûre d' avoir eu du mal à trouver le petit personnage agenouillé, en position de donateur, qui aurait pu être Antoine Rigolle, archiprêtre de Gimel de 1448 à 1470 !!
Quant au tableau j'avais noté qu'il avait été présenté au Salon de 1903
Je sens qu'on va mettre du temps pour rejoindre le Lot la semaine prochaine on pourrait bien faire un détour
Merci Helen !! j'aime particlièrement le vase vert sur lequel joue un rayon de soleil !
RépondreSupprimerLe plat des morts ne m'a pas semblé mérité mention, un objet anecdotique tout au plus, comme tu le dis. La vierge de piété est sur une des photos, elle est assez rustique mais pas sans intérêt en effet. Quant à la vierge des cascades sans doute m'a-t-elle échappé. Au profit de cette vierge annunziata, seule puisque son vis à vis manque, mais fort altière et pleine de caractère.
En fait j'ai surtout voulu faire un billet sur Saccagi, un style de peinture plein d'allant qu'on redécouvre avec plaisir actuellement. D'où le titre "autrement", car je suis personnellement heureuse d'avoir, au cours des années, appris à élargir mon regard.
Votre article est passionnant, les photos sont superbes! Je ne connaissais pas Gimel et j'inscris de programmer sa visite. Merci, Michelaise!
RépondreSupprimerMoi c'est certain mon regard ne s'élargit pas beaucoup!!!
RépondreSupprimerMais je suis plus jeune!!!!
Patience!
Oups pardon je n'avais vu la photo de la Vierge de piété je n'avais vu que celle de l'Annonciation
J'ai oublié ce style de peinture me rappelle un peu Emile Friant que j'aime beaucoup peut-être parce que ses tableaux sont très proches d'une photographie
RépondreSupprimerBelles découvertes pour moi que ce village et son église , et ce peintre... j'avoue une vraie attirance pour ce tableau dont j'aime la douceur et le raffinement...
RépondreSupprimerJe ne connaissais pas Gimel. Destination notée dans mes tablettes...Les artistes italiens sont partout !
RépondreSupprimerPS: vu ce jour "The Artist". Ce doit être mon côté fleur bleu: j'ai adoré ce film !
Merci Catherine, oui ce peintre est, disons "séduisant"... et j'essaie de retenir son nom !!
RépondreSupprimerBon Roberto, on le voit demain, je te dirai ce que j'en pense. Gimel est surtout connu pour ses cascades !
À Autourdupuits,
RépondreSupprimerSur la route entre Gimel et le Lot, vous pouvez également faire un détour par le petit village de Lostanges qui a également un des plus beau retable de la Corrèze :
retable de Lostanges.
Merci Eric pour cette visite et cette info soigneusement notée
RépondreSupprimerDe plus je remarque que vous avez réussi à mettre un lien dans un commentaire, voilà qui est super !! si vous repassez par là, pouvez dire comment on s'y prend ?
Kikou, je repasse.
RépondreSupprimer(Au fait, j'espère que l'église est ouverte, appelez la mairie.)
Comme indiqué, les balises html sont activées (certaines, pas toutes). Ça veut dire que vous pouvez taper du code informatique en langage html dans les commentaires et le blog sait les interpréter. Allez sur un tutoriel de html pour en savoir plus en tapant "balise html a".
Sinon je re-repasserez. :-)
@ Eric
RépondreSupprimermerci beaucoup mais Dieu sait si je connais Lostanges!
J'allais y dîner avec mes parents il y a près de 40 ans dans un délicieux restaurant dont j'ai oublié le nom où l'on dégustait entre autre un merveilleux ragoût de foie gras servi dans une brioche.
Chaque fois que j'accompagne mon mari au golf du Coiroux c'est avec nostalgie que je regarde cette petite pancarte Lostanges.
Je suppose que vous connaissez la mise au tombeau de Reygades
Comme vous pouvez le voir je connais bien le coin
Bon je fais un essai :
RépondreSupprimerEssai
Oups j'ai bien un lien mais j'ai dû faire une erreur sur l'adresse... à suivre !!! merci Eric pour votre aide
RépondreSupprimerun extrait de ce tableau orne la 1ère de couverture de l'édition format "Poket" du livre "Corruption" de l'excellent auteur CJ SANSOM auteur de polars médiévaux. Cela veut dire que ncet extrait de tableau sur la couverture fait connaître ce tableau au delà des frontières de la belle Corrèze. BDF à Limoges -10/10/2014
RépondreSupprimerGénial votre info !!
SupprimerJ'ai eu la curiosité de chercher la couverture de ce bouquin (un nouvel auteur de polar médiéval pour moi que je vais avoir plaisir à découvrir grâce à vous en prime !!) et, en effet, la jeune joueuse de viole (??) en bas à gauche a été détourée et sert de couverture à Corruption !! Bravo pour ce détail qui est drôlement pointu !!!!
Voir ici la couverture du livre
Et merci de votre visite !!!
Géniale votre info !!
SupprimerJ'ai eu la curiosité de chercher la couverture de ce bouquin (un nouvel auteur de polar médiéval pour moi que je vais avoir plaisir à découvrir grâce à vous en prime !!) et, en effet, la jeune joueuse de viole (??) en bas à gauche a été détourée et sert de couverture à Corruption !! Bravo pour ce détail qui est drôlement pointu !!!!
Voir ici la couverture du livre
Et merci de votre visite !!!