jeudi 10 décembre 2009

NICO ZIK


Nous n'avons pas, en province, d'événements musique de la taille de ceux dont notre ami JMV (oui, oui, "ami" au sens des "blogueurs purs" dont je parlais hier !) nous entretient pour notre plus grande joie de badauds... enfin la mienne en tout cas : ses émotions à l'approche d'un récital de Cecilia Bartoli, ses enchantements Jacobsiens, ses délices Jarouskyens, ses déceptions Vivaldiennes... sont autant d'anecdotes, piquetées de délicieuses pâtisseries et d'expositions diverses qui ne peuvent que ravir les éloignés des scènes parisiennes dont je suis. C'est savoureux et tellement bien observé ! un peu méchant rarement, fort documenté toujours, et à fleur de peau parfois. Et vu de l'estuaire michelais, cela vous amuse autant que devait l'être la lecture des lettres de Madame de Sévigné pour ses contemporains. Lettres dont on sait qu'elles n'ont été publiées qu'à titre posthume par sa fille et pour les premières de façon clandestine ! C'est dans le badinage et dans le naturel que l'art épistolaire prend toute sa dimension et certains blogs y excellent pour notre plus grande joie. Maisvoilà que je m'éloigne...
Pas de concerts phares, peu de grands noms en tournée dans nos provinces reculées, et si l'on veut du "nanan", il faut se déplacer et monter à Paris ou courir les Festivals réputés. Pour autant, il nous advient, mon blog en témoigne, de purs moments de découverte, des émotions inédites et des plaisirs d'autant plus précieux qu'ils sont inattendus. C'est souvent au hasard des concerts d'été qu'on déplace ainsi pour notre plus grande joie, des gens talentueux qui viennent sans a priori, affronter un public parfois dérouté et souvent déroutant !

Et puis... nous avons une ressource cachée, une botte secrète, un azimuté du piano, un inconscient sidéral : Gérard. Notre mécène fabuleux est du genre de ceux qui régalent leurs amis juste pour le plaisir de les honorer. Il nous offre par-ci par-là, dans le cadre toujours accueillant de son Domaine Musical de Pétignac, et avec la complicité patiente de sa femme, Fabienne, ce qu'il est de bon ton d'appeler aujourd'hui "des concerts privés". Mais Gérard ne les nomme pas ainsi, il n'est pas snob Gérard et il nous offre l'inaccessible sans y toucher, du bout des doigts mais avec une immense générosité.
Dimanche dernier nous avons ainsi pu découvrir chez lui un espoir du clavier, un jeune pianiste talentueux et intelligent en diable : Guillaume Coppola. Je ne suis pas, loin de là, une fana de Liszt et redoute par dessus tout les briseurs d'instrument qui croient que, pour bien interpréter le compositeur, il soit nécessaire de casser une ou deux cordes par concert.
Mais avec Guillaume Coppola, j'ai changé d'avis. Sa lecture du maître est virtuose mais sobre, et surtout très cultivée. Cela change tout : le voir jouer, l'entendre vivre pour nous chaque morceau choisi, le suivre dans sa visite des pages de Liszt et respirer avec lui au rythme admirablement déchiffré qu'il impulse à la musique, est un pur plaisir.

L'affaire mérite donc que je vous la raconte : c'est vers l'âge de 14 ans qu'Arlette a rencontré Guillaume pour la première fois lors d'un de ses stages d'été avec France Clidat. La pianiste, dont les talents pédagogiques ont l'air indéniables, a détecté le talent et soutenu le jeune homme quand celui-ci a annoncé qu'il voulait tenter une carrière. Il a beaucoup travaillé, beaucoup progressé et affiche désormais un palmarès impressionnant. Mais il est venu chez Gérard en toute simplicité et en toute confiance, pour offrir à quelques uns de ceux qui l'ont connu plus jeune et à d'autres, comme nous, qui le découvrions, le bonheur d'une promenade musicale. Il vient d'enregistrer chez Calliope, "Un portrait de Franz Liszt", et a obtenu pour ce disque un Diapason Découverte qui fera sans doute beaucoup pour sa carrière.
Il nous a joué peu ou prou le programme de son disque : Liszt et la poésie, évoqué à travers 3 consolations inspirées de Sainte Beuve, Liszt et la foi, avec le monument d'émotion que représente son "Saint François de Paule marchant sur les flots", que Guillaume joue avec recueillement et conviction, Liszt et son côté plus méphistophélique avec la "bagatelle sans tonalité", d'un langage presque atonal qui surprend et séduit, Liszt des années de pèlerinage avec "la vallée d'Obermann" long poème héroïque et lyrique où notre jeune pianiste a pu donner un mesure visible de son talent et de sa virtuosité.

Et puis, comme il était bien avec nous, il nous a offert la tarentelle napolitaine fort connue que Rossini avait mise en musique avant que Liszt ne la transcrive à son tour et qu'elle ne soit portée sur toutes les lèvres et fredonnée par tous. Ensuite, il a "testé" sur nous un nocturne de Chopin, interprété de façon sportive, pas désagréable mais pas forcément comme on aime Chopin. Et pour finir, parce que nous avons fermé le piano pour lui permettre d'arrêter, Andaluza de Granados enlevé avec une énergie et un brio superbes.

Si vous aimez les pianistes qui respirent leurs partitions, si vous avez envie de découvrir un nom dont on parlera forcément dans les années qui viennent, je vous recommande Guillaume, craquant et charmeur, et surtout plein de talent.

PS vous aurez remarqué que je m'étais proposée pour tenir la caisse lors de la séance de dédicaces que Guillaume a menée avec une promptitude qui révèle une longue pratique !

10 commentaires:

  1. J'aime beaucoup les musiciens. Je trouve que ce sont des poètes. Ils ont très très souvent un petit plus, enfin bref ils sont différents.

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  2. Oui j'aime les pianistes qui respirent leur partition et oui j'aime voir ta bobine réjouie.
    D'après ce que j'en sais l'homme aux yeux d'un bleu..... a un jeu sincère et passionné,un magnifique sens de la respiration musicale...
    On peut le redécouvrir sur le lien suivant
    www.pianobleu.com
    Merci Michelaise

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  3. Oh que oui Aloïs, les yeux d'un bleu... et la façon dont il respire ses partitions est telle qu'on prend souffle avec lui... donc tu le connaissais notre jeune Guillaume !!!
    Chic, tu vois, en effet, ils ont un plus !! Pour celui-ci, outre le talent, indéniable, c'est le bleu de ses yeux qui frappe et chavire ses interlocutrices !!

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  4. Sévigné moi? Waouh! je ne vais jamais m'en remettre! C'est trop flatteur. En tout cas, ça fait plaisir de savoir que mes posts musicaux sont autant goûtés que mes post sociologiques, même si, avec le dernier, je m'en veux de t'avoir "assommé avec ma prose" (pour parler le Sévigné).
    Sympa ce concert! Je ne connaissais pas ce pianiste, je vais faire attention dorénavant, j'ai vu qu'il avait raflé un diapason d'or, dommage toutefois qu'il joue du Liszt, ce n'est pas trop ma tasse de thé! Mais bon, après Weber + Debussy + de Falla + Stravinsky ce soir à l'Opéra (soirée Ballets russes), je peux tout accepter, y compris Liszt. Je te dirai. En attendant, un scoop bien mérité : mon prochain post musical sera sur Platée de Rameau qu'il ne faut surtout, mais surtout pas rater (à la différence de Rodin)!

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  5. Oh JMV... c'est vrai que les concerts de Gérard, qui n'invite pas que des pianistes d'ailleurs, sont parfois stupéfiants. Mon plus beau souvenir est la journée que nous ont offert les Pennetier pour leurs 40 ans de mariage, pas moins de 3 concerts, et d'une variété et d'une qualité incroyables... par curiosité, je te mets le lien

    http://lepetitrenaudon.blogspot.com/2009/07/en-famille-petignac.html

    Moi non plus Liszt n'est pas ma tasse de thé, mais justement le petit Coppola, parce qu'il le vibre avec talent, me l'a fait apprécier le temps d'un concert.
    C'est Renoir qu'il faut zapper non ??? Quant à Platée, il me tarde de lire tes impressions...

    Oh Chic, bleu de chez bleu : voilà la page directe de pianobleu sur Coppola :
    http://www.pianobleu.com/guillaume_coppola.html

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  6. M. Guillaume Coppola est un pianiste de rêve c'est vrai mais attention il a du caractère le petit ! Je peux le dire, c'est mon prof ! Et là, ça ne rigole plus du tout ! Mais bon. Il joue tellement bien et c'est vrai qu'il a des yeux magnifiques ! Et puis c'est un pédagogue hors pair !

    Minou Minette

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    1. Ah ah !! j'avais lu sans m'y attarder et surtout sans répondre (honte à moi !!) votre charmant commentaire : un(e) élève sous le charme d'un prof de caractère, voilà qui me plait fort !!

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  7. On dirait les commentaires d'Astérix et Cléopâtre. Ce n'est pas le nez mais ce sont les yeux bleus de Coppola. Certes, je suis d'accord. Mais quand on l'a en prof comme moi on rigole beaucoup moins. Cela dit, c'est un très bon pédagogue. Mais froid, comme ses yeux glacier. Dommage, son jeu est si doux, si tendre ! Allez, monsieur, un petit effort pour vous chers élèves !

    Minou, Minette

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    1. Encore un(e) élève !! J'avoue que, tout doux et tout "romantique" comme nous l'avons entendu, j'adore ces témoignages qui parlent du prof terrrrrrrible dont les yeux "bleu glacier" peuvent pétrifier les pauvres étudiants ! Allez je ne me moque pas de vous, mais j'écouterai Monsieur Coppola avec plus d'attention encore mardi prochain, à Fontdouce, pour voir si parfois son regard qui tue se retourne contre lui-même : on n'est pas exclusivement parfait durant un concert, et parfois, il doit de morigéner, donc se fusiller intérieurement du regard !!

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