mardi 22 juillet 2008

DANSE

Enfin, nous l'avons vu... il passait un soir, pas une fois de plus, au cinéma de la Côte d'Argent... mais c'est connu, l'été ici ce sont les nanards de service qui font recette, et les films classés Art et Essai sont relégués en fin de soirée, et distillés au compte-goutte. En plus, on les a déjà tous vus, mais bon, cessons de geindre nous avons quand même eu
Valse avec Bachir
Nous qui ne restons jamais au générique (une manie de fuite de foule !) nous sommes restés scotchés dans nos fauteuils jusqu'aux ultimes images. C'est un film qui appelle le silence et le respect. Tout est profond et parfait. L'idée du cinéma d'animation d'abord, explicitée par une remarque d'un ami du metteur en scène dont il vient sollciter les souvenirs et qui, lorsque celui-ci lui demande l'autorisation de le dessiner, répond "Tout ce que tu veux, du moment que tu ne me filmes pas". Ensuite, le graphisme, genre bande dessinée animée : des images hyper réalistes et qui pourtant font la part belle à l'esthétique et à l'onirisme. Le rythme des images, qui désoriente un peu au début par son côté saccadé et lent, est celui de la mémoire au travail, laborieux et vaguement répétitif, comme les arcanes du cerveau quand il tente de saisir ou d'oublier. Le ton est totalement juste, celui de l'amitié, de l'interview confiante, avec des retours arrière et des confidences surgies du fond de l'oubli (par exemple quand le réalisateur apprend que son ami était amoureux de la même fille que lui) : c'est à la fois familier, rassurant et poignant. La mise en scène est impeccable, les effets sonores dans affèterie, parfaitement adaptés aux sentiments, aux circonstances et aux états d'âme. Pas d'amplification excessive, mais une dramatisation discrète et à bon escient. La musique, enfin, est judicieusement adaptée, au service des perceptions et des sensations.
Mais le plus important c'est la justesse et la pudeur du propos. Dieu sait pourtant que le sujet pouvait être difficile et traité de façon partisane ou manichéenne. Tout est évoqué : le traumatisme de la guerre, l'absurdité des situations, l'incompréhension ravageuse de certaines réactions, la peur, l'espoir, tant de thèmes sont abordés, évoqués, ressentis avec une subtilité jamais prise en défaut. Il n'est jusqu'à l'agression des images d'archives finales que, nous aussi aurions préféré ne pas revoir, qui ne soit adroitement amené. Belle et forte anamnèse, qui nous implique et nous rappelle combien le devoir de mémoire est fort, quand même on a besoin, et c'est nécessaire pour survivre, d'oublier certaines horreurs. C'est, au sens classique et d'étymologique du terme, une véritable "restauration" du souvenir qui s'effectue sous nos yeux, et à laquelle nous participons car, nous aussi nous avons devoir de ne pas occulter ce qui blesse nos sensibilités au motif que nous ne sommes pas responsables. Un moment de silence est donc nécessaire quand l'image s'éteint pour repartir vers un demain différent.

J'ai longuement hésité dans le choix de l'image pour illustrer cet article. J'avais bien sûr envie de mettre celle, diffusée et immensément émouvante, de la femme rêvée et idéalisée, qui permet de fuir les horreurs de la guerre en offrant en refuge l'intensité sensuelle de sa féminité. Mais j'ai résisté (presque !!) et choisi celle de l'aéroport, scène qui traduit avec tellement de pertinence l'égarement de ces vies basculées, dévastées par l'absurdité de la guerre qui détruit ce qui hier était le simple bonheur quotidien. Tellement mieux que le spectacle complaisant, "Le jour où Nina Simone a cessé de chanter" qui tente de parler de ce sujet grave et qui nous menace tous avec une telle maladresse, ce que je lui ai mal pardonné.

2 commentaires:

  1. tu donnes vraiment envie d'aller le voir !!

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  2. oui et la bande annonce est super ! Bon j'ai cherché il ne passe en Suisse pour l'instant... il va falloir attendre :-(

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