lundi 12 octobre 2009

EVENTEE


Nous avions prévu de passer le dimanche à Bordeaux pour visiter l'exposition Correspondances de Matisse et Marquet, dont je parlerai plus tard, mais aussi pour sentir le vent du montage médiatique assez pharaonique d'Alain Juppé, Evento. Il veut, avec cette nouvelle manifestation qu'il souhaite reconduire selon un ryhtme biennal, créer l'événement en matière d'art contemporain. La ville s'est donc offerte à divers artistes qui l'ont, à grands frais (un budget de 3 millions d'euros, soit environ 1/20ème du budget municipal annuel en matière de culture) investie de formes plus ou moins déroutantes, rarement esthétiques, trop souvent gratuites ou formelles, dont la présence dans la ville n'est guère convaincante.




S'il s'agissait de créer l'événement, d'attirer la foule dans les rues de la ville, d'envahir les places et les quais de badauds un peu indifférents, l'affaire était réussie. La météo particulièrement favorable en ce dimanche d'octobre, la foire aux plaisirs d'automne déployée sur la place des Quinconces, la nouvelle configuration de la ville qui se prête à loisir au baguenaudage et à la déambulation insouciante étaient aussi pour beaucoup dans l'affluence de cette journée dominicale festive. Tout invitait le passant à la fête et à la flânerie. Certes une curiosité légitime entrainait les promeneurs à détailler les véhicules emboutis abandonnés sur l'herbe, les scories et déchets entassés sur des tréteaux, et autres manifestations d'une conception intellectualisée et parfois totalement vaine de l'art moderne.



Le pont de Faustino sentait bon le pin, et, enjambant la route invitait tout naturellement à l'ascension. On s'y pressait joyeusement et le côté qui finit en aplomb sur la Garonne, trop fragile pour supporter une foule intense, faisait d'autant plus attraction que l'accès en était règlementé. Mais cette construction arrondie, supportée par une forêt de pieux entrecroisés qui attiraient les photagraphes comme un aimant, avait plus l'allure d'un bel ouvrage d'artisanat que d'une véritable oeuvre d'art.
Au Grand Théâtre, l'exposition prétexte sur le Rwanda, alignait des photos mal cadrées, plus ou moins floues ou sans attrait, des plastiques déchirés et des affiches jaunies dont l'accumulation décourageait l'interprétation. Quand on a admiré, adoré, vécu un spectacle complet sur l'âme africaine comme AFRICARE il y a deux ans à Avignon, ce ramassis hétéroclite et arbitraire d'objets sans souffle laissait un peu perplexe.


A la base sous marine, l'exposition Amos Gitai avait le mérite d'animer les murs sombres de ce bâtiment désolé, et c'était sans doute le lieu le plus réussi de la manifestation. Mais le côté zapping et superficiel de cette mise en scène, où les sons et les images se mêlaient en décourageant tout approfondissement d'une oeuvre profonde avait quelque chose de facile, qui, pour Gitai était mal venu. Esthétiquement c'était séduisant, intellectuellement c'était frustrant.


J'avais espéré du discours abscons et un peu rebutant d'intellectualisme forcené qui émaillait les plaquettes de présentation d'EVENTO trouver une nouvelle expression de l'urbanisme intégré à la vie de la ville dans ce parcours mais j'ai été fort déçue, et j'ai trouvé la recette éventée...



Pour autant, nous avons passé une après-midi vraiment délicieuse à musarder dans Bordeaux. Maryse disait que l'exposition du matin nous avait ouvert l'oeil, rendus plus réactifs aux couleurs et aux formes, plus attentifs aux détails, et le ciel chargé qui donnait au soleil estival des allures de victoire fragile était pour beaucoup dans la magie de cette journée. Je n'ai pas aimé EVENTO mais j'ai aimé Bordeaux, l'amitié, la douceur partagée de ces moments uniques.


9 commentaires:

  1. Bravo au photographe qui a immortalisé la dernière image, si aérienne, d'une beauté presque onirique. Peut-être à cause de ces teintes que j'adore et de la luminosité extraordinaire du moment... Et ta joie de vivre lui imprime, en plus, un petit air de paradis !

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  2. Merci Colibri, c'est Maryse justement, qui toute imprégnée des couleurs de Matisse, avait envie de me prendre dans le miroir d'eau !! Les vapeurs s'estompent et cela donne à sa composition beaucoup de charme en effet, ce qui vaut ce cliché de Michelaise sur fond de Pont de Pierre !!

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  3. Bonjour Michelaise,

    3 millions d’euros supportés par la ville de Bordeaux pour un fiasco… Mouais ! Ça représente un bon pactole en pleine période de crise et de restrictions non ?

    Bordeaux est une très jolie ville que j’ai eu le plaisir de revoir et de photographier l’an dernier, de jour et de nuit.

    J’aime beaucoup le dernier cliché où tu apparais, me semble t’il, sur la plage. Ton naturel, le reflet bleuté, le ciel ennuagé et ce léger flou confère beaucoup d’allure à cette belle image.

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  4. J'aime beaucoup la fin : "Pour autant.." patati patata...enfin à chaque fois un plaisir de te lire, de vous suivre (cool), même si je ne trouve pas toujours un commentaire à ajouter. Il y a des photos que j'adore complètement (ça ne se dit pas ça...je crois) :)) la dernière par exemple (certainement de Michel) est fantastique

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  5. Avant de cliquer pour un commentaire je l'avais un peu préparé mais il tombe comme un cheveu sur la soupe:je vois que tu as bien aimé le miroir d'eau!!!!!
    Tout ce que tu contes fait que j'ai de plus en plus de mal avec l"art contemporain"

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  6. Nous avons découvert Bordeaux, en 2008 et nous avons été bluffés par sa beauté........
    Le miroir d'eau est féerique, jolie photo !

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  7. Bonjour, Michelaise.
    Je ne connaisais pas Bordeaux.
    J'en fais, ici, grâce à toi, une approche particulièrement réussie.
    Je fais une approche de ton style et de ta manière d'aborder les sujets...qui me plaît beaucoup.
    Et les photos sont d'une belle diversité...
    Je suis aussi en admiration devant ta "technicité".
    Donc je m'incline et je te remercie beaucoup.

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  8. La photo du pont de Faustino est très réussie. Le ciel est chargé de sentiments, il est tout simplement sublime ! En revanche, cet "EVENTO" m'a tout l'air très décevant.
    Je n'ai aperçu Bordeaux qu'une seule fois lors d'un concours et, si j'ai trouvé la ville belle d'un point de vue architectural, j'ai passé une journée affreuse à me faire insulter sans raison par les passants... eurk !

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  9. Toujours émue et étonnée de vous lire, tous, si indulgents et si réactifs !
    Oui Bordeaux est une ville qu'Alain Juppé a rendue superbe en la nettoyant des scories d'un développement mal maitrisé au début du XXème siècle. Les quais, la Place de la Bourse, le "Triangle" ont retrouvé leur allure et leur charme, et les bordelais, qui l'envahissent à pied ou à vélo, saluent cette renaissance par leur enthousiasme. Bordeaux est belle, les bordelais pas particulièrement patients Astheval, mais c'est un peu le fait des urbains au volant non ?
    Un fiasco sans doute pas, car les chiffres de la fréquentation mettront en avant une foule immense, curieuse et attirée par le temps splendide qui régnait et règne encore sur la région. Donc l'expérience sera reconduite dans un concert d'auto-congratulations, malheureusement tout cela était bien creux.
    Pourtant, Aloïs, je l'ai prouvé, j'aime l'art contemporain, sous certaines de ses formes, et sans doute pas celles là !!
    Oui, Herbert Bordeaux vaut le détour et je suis ravie de te la faire deviner, qui sait désirer un peu !!
    Merci Chic et Enitram pour les compliments sur la dernière photo, ce miroir d'eau magique face à la Bourse, qui non content d'être beau, original, et de mettre l'architecture en valeur, réjouit petits et grands dès qu'il se met en route... Le mérite de la photo revient à Maryse, à qui l'effet conjugué du ciel étonnant qui illuminait la ville et des peintures visitées le matin même donnait l'envie de "composer" !

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