Alter prétend que je vais être la risée de la toile car "tout le monde doit connaitre ça, sauf toi !"... De fait, lui non plus n'en avait jamais entendu parler, mais bon, c'est culinaire, voilà qui est censé excuser son ignorance. Moi, j'aurais dû savoir ! J'ai en vain évoqué mon statut de "petite fille des banlieues", rien à faire, Alter avait l'air fort déçu par mes limites gastronomiques. Je vais donc, au risque de me couvrir de ridicule, vous narrer comment j'ai découvert il y a peu les "rognons blancs d'agneau". Car ce blog est destiné à mes filles, il faut bien que je fasse leur éducation et que je compense enfin mes insuffisances à leur endroit !
Cherchant des joues de porc pour une petite fricassée de saison, j'étais au rayon tripier de mon petit supermarché, un rayon qui compte un "vrai" boucher, donc une viande certes assez banale mais somme toute correcte. J'avise une barquette de "rognons blancs d'agneau". Tiens des rognons !! pourquoi n'en faire que quand Koka est là (elle en est friande et je lui en fais à chaque séjour...)... pourquoi pas... Blancs, dites-vous... oh, ils sont bien clairs en effet.
Je tourne la barquette sous tous les angles, intriguée, puis j'aperçois le chef du rayon.
- Hep, monsieur le boucher, pourquoi sont-ils blancs ces rognons ??? Que leur a-t-on fait ?
Plié de rire mon boucher : il s'amuse un instant de ma mine déconfite, et s'adressant à la cliente qu'il était en train de servir, une dame assez nettement plus âgée que moi :
- Vous savez, vous madame, ce que c'est ?
- Oh oui, quand j'étais petite, on se battait à la maison pour les avoir, c'est tellement fin.
- Alors madame, expliquez-moi ??
- Et bien ce ne sont pas des rognons, mais autrefois on n'osait pas les appeler par leur nom...
- Ah (Michelaise confuse, faut-il être sotte, j'aurais dû m'en douter à l'air réjoui du boucher !!) oui, oui, mais maintenant on appelle un chat un chat, on devrait leur donner leur nom !! Et c'est bon ? ça se prépare comment ?
Suit la recette et la description gourmande du goût particulier de la chose. Légèrement poivré me dit le boucher d'un air ravi (là, je suis un peu septique, voire carrément rougissante, mais qu'importe, je tente l'achat !) Et comme mon blog doit faire attention à ce qu'il dit afin de ne pas se trouver envahi de lecteurs importuns, je n'appelle pas un chat un chat, je nommerai donc animelle (du latin ou de l'italien animella qui signifie "glande") ou encore "gonades reproductrices mâles des animaux" le mets en question !!
Après avoir fait dégorger les "rognons" dans de l'eau fraiche, éventuellement citronnée ou vinaigrée, on se contente de les ouvrir par la moitié dans la longueur, de les fariner très légèrement avant de les faire revenir dans un fond d'huile d'olive. Sel, poivre puis on assaisonne tout simplement d'ail et de persil. Nous les avons dégustés avec quelques rattes et une purée de pois chiches, légèrement citronnée et assaisonnée d'huile d'olive : c'est vraiment délicieux, délicat comme du ris de veau, léger comme de la cervelle, bref vraiment très raffiné. Cette préparation persillée est fameuse, mais la prochaine fois, je les ferai plutôt revenir dans un simple beurre noisette, sel et poivre du moulin, je pense qu'on dégustera encore mieux la saveur particulière de ce morceau peu commun. A réserver aux amateurs d'abats en tous genres, que la perspective de manger toutes sortes de morceaux étranges ne rebute pas !
Meme si je suis quelqu'un "que la perspective de manger toutes sortes de morceaux étranges ((ne)) rebute ((pas)) !" je trouve que ta description de la scène avec le boucher et la vieille dame est amusante et très savoureuse!
RépondreSupprimerMichelaise, ce mets est plutôt rare de nos jours et personne n'aura l'idée de se moquer de vous. On le cuisinait naguère à la campagne ainsi que vous le recommandez. Je n'en ai goûté qu'une seule fois, sans savoir au départ ce que c'était (ma grand-tante ne me l'a dit qu'après la dégustation). J'avoue que mon jeune enthousiasme était plutôt tempéré, mais plus à cause de l'idée que du plat qui s'était avéré plutôt bon.
RépondreSupprimerBonne semaine!
Anne
Manger celles des autres c'est déjà mieux que "se bouffer les siennes" , non ?
RépondreSupprimerJamais goûté. Peut-être un goût de noisette si la bête était un freluquet...La Vache Folle oubliée nous pouvons redécouvrir cervelle, langue, rognons et roustons. Il me revient que ceux du taureau, puissants et parfumés, sont recherchés les soirs d'après-corrida.
Le fait de cuisiner les roubignolles est révélateur d'une certaine élévation d'esprit: le commun fait la moue (devant le mou aussi) persuadé de "s'humaniser" en dédaignant ce qui en fait lui rappelle sa propre animalité.
Oui, Roberto, tu ne crois pas si bien dire !! la bête est jeune puisque c'était de l'agneau, et cela un goût de noisette ! Quant à l'élévation d'esprit liée à la cuisine des abats, pourquoi pas !
RépondreSupprimerAnne, après dégustation on doit se sentir tout bizarre... mais merci de votre témoignage pour confirmer que c'est bon !
Siu, la consommation (et la délectation) des abats est typiquement française et, tu le vois, nous n'hésitons devant aucun morceau !
J'adore tes acrobaties côté vocabulaire pour ne pas récupérer tous les obsédés de la toile ! Je suis assez rebutée par la viande en général, alors là .. je ne pense pas essayer un jour.
RépondreSupprimerJe suis entièrement solidaire de ton ignorance, je ne connaissais pas non plus, mais en cuisine, je ne suis vraiment pas un cadeau...
RépondreSupprimerBelle journée !
Norma (toujours pressée...)
Savoureuse ton histoire.
RépondreSupprimerChez nous on appelle cela des amourettes et ils se trompent car c'est la moëlle épinière qui se nomme amourette.
Mais à vrai dire je n'aime pas beaucoup
Je me souviens que Maman ne les salait jamais avant la fin de la cuisson comme les lentilles.
Je me suis toujours intéressé à la culture culinaire et plus généralement aux usages alimentaires. Mine de rien ce billet permet de réfléchir largement, à nos pratiques, nos vécus, notre formatage par la société ou au simple rappel de notre "omnivorité" dénuée de tous a priori. Je viens de passer qq jours du côté d'Andorre, dans le calme d'une montagne où paissent, entre les plaques de neige, ces jolis petits chevaux, des sortes de poneys gras et doux, de race Pottok. Cri d'horreur autour de moi quand je signale qu'ils sont élevés pour leur viande largement consommée encore dans l'Espagne voisine...cris poussés par ceux-la même qui se régalent de plantureux steaks-frites...
RépondreSupprimerCeci dit, manger des c...interpelle un peu, non ?
Bonjour, Michelaise.
RépondreSupprimerPourquoi ne pas appeler un chat un chat ?
Et depuis quelque temps j'entends de la musique très classique.
C'est fait pour me plaire...
Merci beaucoup.
Je t'embrasse.
Oui Aloïs, ta maman avait raison, à ne saler qu'en fin de cuisson : j'ai trouvé et appliqué le même conseil ! Quant au goût, il n'est finalement pas très éloigné de celui de la cervelle ou des ris de veau. Et si on n'est pas fana de tout cela, il ne faut pas se forcer ! Il y a des amateurs qui mangent la part des autres.
RépondreSupprimerAvec un petit rien de provoc, oui oui Roberto, d'autant que, hors blog on appelle un chat un chat ! Herbert pas de problème ! Tu as vu Aifelle, on a réussi encore à éviter tout terme raccoleur... pas simple la toile, mais ça oblige à faire preuve d'imagination, cela développe la culture (les gonades reproductrices mâles des animaux, ça a des relents de cours de biologie fort lointains !!!) et ça permet à Roberto de s'approcher au plus près du sujet sous toutes les formes possibles, points de suspension compris !!
Norma, merci de ton passage, malgré la presse et le stress. Cool, le printemps arrive !!
Rassure-toi Mic, aussi de ce coté des Alpes on a l'habitude de manger tout... ça, et les virevoltes verbales ne nous manquent pas non plus: "gioielli di toro" par exemple.
RépondreSupprimerQuant à moi, je ne mange presque plus de viande depuis plusieures années, mais ça n'empeche que quand mon fils était petit et je lui préparais la cervelle, j'en mangeais moi aussi... (beurk!)
Je ne connaissais pas non plus mais il faut dire que je ne suis pas friande des abats...
RépondreSupprimerLe pire c'est que j'aime la cervelle et les ris mais je ne sais pas ce doit être psy!!
RépondreSupprimerJe me tais car je ferais une plaisanterie un peu limite
Aloooooooooooïs, j'adorerais que tu te laches !!!
RépondreSupprimerSiu, on mange même les bas morceaux à Trieste ???
Astheval, normal pour ta génération... encore que !!! vois les rognons pour Koka... mais je ne sais si elle est mordue du reste
Si toi tu es une oie blanche, moi je suis les Beatles !!! Alter ne devrait pas se moquer de toi comme cela, même si la scène chez le boucher est une rigolote anecdote !!!
RépondreSupprimerCe que je ne suis plus depuis longtemps !!!
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