Deuxième film d'une jeune réalisatrice qui s'était auparavant intéressée à l'adolescence, Tomboy a été réalisé dans l'urgence. Tournée en 20 jours pour faire simple et efficace, cette improbable chronique sans histoire, qui semble ne pas pouvoir retenir notre attention tant son thème est ténu, est une vraie réussite. La qualité de la direction des jeunes actrices, leur spontanéité, leur incroyable fraîcheur et leur naturel époustouflant sont autant d'atouts qui nous tiennent accroché à l'écran, sans un instant de lassitude. Pas de psychologie à deux sous, pas d'essai de justifier ou d'expliquer savamment ce qui n'est qu'un jeu qui se prolonge, parce qu'il est savoureux, et dont il est difficile de sortir. Rien n'est caricatural, tout sonne juste et le ton est ... transparent ! Seuls les adultes jouent un peu raide, particulièrement Sophie Catani qui semble assez peu concernée par son rôle.
Pourquoi est-ce finalement si amusant d'être un garçon, dans un monde enfantin qui instaure déjà des règles trop limitatives pour les petites filles ? Ces dernières, forcément des nunuches qui ne savent pas faire grand chose et doivent être défendues par les garçons, s'ennuient ferme. Ce film m'a rappelé que je voulais écrire un billet sur le terrorisme actuel qui sévit auprès de la gent féminine, entretenu par les médias, cultivé par les penseurs décérébrés, et qui me semble parfois une régression au regard des avancées de la fin du siècle dernier en matière de ce qu'on appelait alors l'égalité sexuelle.
J'entendais l'autre jour une auteure italienne s'insurger contre le résultat d'une génération entière de "télé Berlusconi", où les femmes sont belles mais réduites à l'état de décor, de marchandise, s'auto-censurant pour rester à la place qu'une armée de machos libidineux ont décidé de leur imposer. Elle soulignait l'effet sur les fillettes des années 90, devenues les adultes de notre début de siècle, de ce discours avilissant mais ô combien prégnant. Incitées dès l'enfance à n'être que décoratives, à l'image des dindes télévisuelles qui ne sont là que pour faire mousser des présentateurs pas toujours très fins, des politiques pas toujours très honnêtes ou des industriels pas forcément vertueux, les femmes italiennes subissent la censure de leur intelligence provoquée par l'exposition et l'abondance médiatique de leurs corps. Pourtant elles sont plus diplômées, plus mûres, plus intelligentes que les hommes mais se restreignent, limitent leurs ambitions et leur carrière pour sacrifier au rite de la femme-objet. Pays des femmes potiche, des femmes jetables prêtes à consommer, l'Italie est le lieu où le taux d'emploi des femmes est le plus bas d'Europe et leur représentation dans les institutions et les lieux de pouvoir se réduit chaque année un peu plus.
La superbe indienne qui fut, paraît-il miss Monde en 2000 (Priyanka Chopra ) et qui, d'opération en opération, n'a plus grand chose d'indien
En Chine, où le physique constitue un critère important d'employabilité des femmes, la chirurgie esthétique pratique le même nivellement sur un modèle physique occidental qui serait la norme d'une nouvelle "race aryenne", hors laquelle point de salut ! Et le phénomène s'aggrave quand il s'agit d'augmentation mammaires, jugées indispensables par un nombre croissant de chinoises (210 000 en 2010) pour trouver mari, boulot et amis.
Je ne parle même pas des femmes opprimées, écrasées, méprisées, avilies voire détruites. Partout, c'est une calamité, parfois déguisée d'oripeaux exagérément décoratifs, de n'être "qu'une femme". Alors faut-il s'étonner si, dans une petite cité tranquille où les enfants attendent sagement la rentrée des classes en coulant des vacances paisibles, on est mieux accepté, on s'intègre plus facilement, on s'amuse vraiment mieux quand on est un garçon ?
Le film n'a rien de doctrinal ou d'idéologique. Il ne fait ni récrimination, ni prosélytisme. Il se déroule sans prétention et avec évidence, joué avec brio par de petites gamines futées, qui nous font rire aux éclats. Ce n'est pas un sujet grave, même si, dessous, s'exprime un malaise vieux comme le monde : pour être de la fête, il vaut mieux avoir un petit boudin de pâte à modeler entre les jambes !
* Petite précision langagière pour nos "lecteurs étrangers" (waouh vous avez vu, elle "s'y croit" Michelaise euh... elle s'y croit = elle pense que le succès est arrivé) : "pour de rire" est, bien sûr, incorrect, on dit "pour rire", mais on peut admettre l'expression dans un sens enfantin, comme si c'était dit par un enfant dans une cour de récréation !
* Petite précision langagière pour nos "lecteurs étrangers" (waouh vous avez vu, elle "s'y croit" Michelaise euh... elle s'y croit = elle pense que le succès est arrivé) : "pour de rire" est, bien sûr, incorrect, on dit "pour rire", mais on peut admettre l'expression dans un sens enfantin, comme si c'était dit par un enfant dans une cour de récréation !
Ce sujet m'intéresse vraiment même si je ne suis pas très tentée par le cinéma en ce moment où les journées sont si belles et où les soirées donnent des envies de traîner au jardin.
RépondreSupprimerTu parles parfaitement de la condition féminine et du scandale de la beauté à tout prix, de la "standardisation" de l'apparence... Il y a tant de choses à dire sur ce sujet, tant de luttes à faire, tant d'avertissements à donner à nos filles et petites-filles pour qu'elles ne soient pas des victimes d'une mode destructrice aussi bien physiquement que moralement.
Mais au fait Michelaise, quel est le titre exact du film ? Est-ce que c'est "Pour de rire" ?
Oh oui, la régression de notre statut féminin est bien amorcée, hélas !
RépondreSupprimerCe que tu écris sur la chirurgie esthétique en Inde et en Chine me terrorise !
Une civilisation fondée sur l'apparence et aux normes fortement occidentales, qui plus est, il y a de quoi avoir peur pour les composantes identitaires de ces jeunes femmes...
Bonjour, Michelaise.
RépondreSupprimerCe n'est pas aussi grave...
Et pourtant tout le laissait à penser.
Les illustrations sont très belles, dont la première.
Merci beaucoup.
Bon dimanche.
je t'embrasse
Article que je partage jusqu'à sa dernière ligne et virgule, sa partie concernant l'Italie y comprise. Bien sur. En passant, on vote ici pour des administratives aujourd'hui et demain, donc j'ai quelques difficultés à taper sur mon clavier à cause de mes dix doigts tous les dix croisés, jusqu'à demain soir. Devrai-je les décroiser, au moment où on saura les résultats, seulement pour les disposer en guise d'un revolver à pointer sur ma tempe? Las, ça ne m'étonnerait pas, ça ne m'étonne plus... il y a quelques jours l'ISTAT, notre institut national de la statistique, nous a fait savoir que dans le "beau pays de l'art et de la culture" 53% de la population ne lit meme pas un seul livre pendant une année. Pas difficile à imaginer, et d'ailleurs on le sait très bien, que par contre ils regardent beaucoup de télé, une télé dans sa quasi-totalité trempée de berlusconisme.
RépondreSupprimerPetite consolation -sur l'onde justement de ce billet- les femmes lisent beaucoup plus que les hommes, et les jeunes plus que les personnes agés.
Mais bon, basta con le tristezze, je vais te faire rire un peu... Tu as dit rire..??.. grrhh!! J'ai du lire et relire 3 fois ton article, à la recherche de ce "pour de rire", pour (un peu trop) à la fin découvrir que c'était dans le titre. Jamais négliger les titres! En tout cas merci de tes précisions, chère Mic.
Et bon dimanche.
Mais, tu as le droit de dire "pour de rire", tu écris ce que tu veux d'abord et surtout garde ton âme d'enfant, c'est primordial ! A propos "d'enfants" justement, il parait que c'est toujours beaucoup plus facile de les faire jouer que des adultes, ils seraient à la base bien meilleurs acteurs que les grands !!! Ceci dit, à y regarder à deux fois, on comprend bien pourquoi avec leur spontanéité bien plus évidente que celle des adultes !!!!
RépondreSupprimerAttention OXY : le sujet du film n'est ni la défense de l'égalité des sexes ni la dégradation du statut de la femme : beaucoup plus sobre, mais tellement drôle c'est l'histoire d'une petite fille qui déclare qu'elle s'appelle Mickaël, et qui trouve ainsi plus facilement des copains. Elle peut jouer, courir, être admise dans le groupe. C'est vraiment frais et bien mené. Le titre du film c'est Tomboy qui signifie "garçon manqué". Rien de dogmatique. Juste que ça m'a inspiré des réflexions sur l'évolution du statut des femmes dans nos sociétés hyper mondialisées.
RépondreSupprimerOUi NORMA, l'envahissement de la planète entière par nos normes occidentales fait froid dans dos. Ce serait l'effet d'un doctrinaire qu'on cirerait au scandale et là, c'est revendiqué et consenti par tous. Etrange effet de l'uniformisation des cultures.
MATHILDE, tu vois c'est pour SIU que j'explique que "pour de rire" est une expression admise, mais enfantine, pas pour faire ma maligne !! Car si notre maie SIU, qui parle un français éblouissant se met à faire des fautes de français à cause de Bon Sens et Déraison, cela ne va plus aller !! Quant au jeu des acteurs, c'est sans doute vrai qu'on fait mieux jouer des enfants, mais il faut être un bon directeur d'acteur !! cela peut, parfois, être totalement cata ! EN tous cas, dans Tomboy, c'est lumineux !
SIU je suis contente que tu nous donnes ton témoignage d'italienne, ton ressenti. Et on croise les doigts avec toi !! J'aime bien la façon dont tu utilises tes mains !!! AU moins tu sais en tirer le meilleur profit !!!!
La tyrannie de l'apparence, tout le monde la fustige mais rares sont ceux qui en font vraiment fi.
RépondreSupprimerJe savais que les chinoises se faisaient étirer les os des jambes pour être plus grandes, qu'est ce qu'on pourrait se faire allonger ou arranger nous Michelaise?
Rires.
Bon dimanche.
bonjour, je viens vous remercier pour m'avoir fait découvrir encore de merveilleux Blogs et tout particulièrement La France vue du ciel, j'aimerais bien aller faire un tour dans ce petit avion......
RépondreSupprimerMONICA
Coucou.
RépondreSupprimerRevoici *la petite suisse*, comme disent les orpailleurs Français.
Se séparer de l'ordi pour quelques jours engendre du retard. Heureusement, la faute était à un défaut de série.
Ensuite... la machine à coudre... qui a besoin d'un bon coup de *poutz*... nettoayge.
Le cinéma je le regarde à la télé... et pourtant, j'étais une fan... ciné club i tuti cuanti. Analyses de films par Fredy Buache. Je deviens flemmarde ! A mon âge... j'ai le droit ! Pristoche.
Trève de plaisanterie.
Il a fallu *nourrir* le site... que je trouve très beau !
Du retard, du retard.
Cent pour cent d'accord.
RépondreSupprimerJ'ajouterai mon grain de sel,à tout ce que tu décris,je trouve que en plus dans tous les magazines de mode les mannequins ont toujours un regard de bovin à l'encéphalogramme plat,le dos voûté,l'épaule basse.....
J'ai assisté l'autre jour en plein Paris à une séance de photos de mode vraiment l'image de la femme n'était pas à son avantage!
J'ai pris des photos elles ne sont pas flatteuses!!
Boh !! Miss Lemon, parfois, sans doute à cause de cette autre tyrannie des temps modernes qui est le culte de la jeunesse, aimerait-on voir diparaitre comme par magie les offenses du temps ! Mais bon, on se reprend et on assume !
RépondreSupprimerAh Monica c'est vrai qu'il est sympa comme tout ce petit Quebec deux fois !! Chaque fois qu'un Cesna passe au dessus de Meschers, je me dis que c'est peut-être lui
Pristoche Beatrice, y pas le feu au lac, retard non !! Autre rythme. BOn tu as retrouvé ton ordi ou un nouvel ordi, ton site et tout va mieux !!
ALOIS tu nous as, j'imagine, concocté une observation digne de ton oeil de fine observatrice ! Pas du tout bovin l'oeil de notre puisatière. Te voilà rentrée de tes agapes golfiques...
Comment ne pas être d'accord avec ce que tu écris ? comme d'habitude , c'est juste, réfléchi et çà met le doigt là où çà fait mal... nous vivons dans une société normative o l'échelle du monde, que de dégats et de ravages... des beautés ? figées et normalisées, le contraire de la diversité physique qui est la richesse de l'humanité... cela ne durera pas , ce n'est ps possible !!!
RépondreSupprimerJe passe un peu tard, du coup je bénéficie de tous les commentaires. J'espère que Catherine a raison, je pense aussi quelquefois que devant tant d'excès et de retours en arrière il y aura un mouvement de balancier et que les petites d'aujourd'hui se rebelleront. Mais çà fait peur.
RépondreSupprimerAvec tous ces ennuis de blog en panne je n'avais pas vu cet article! Tout à fait d'accord et il y encore et toujours un combat à mener...
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