samedi 18 février 2012

LEONARDO A MILANO


J'y étais ... ou presque !! Comme vous, séduite par les chroniques qui, dès novembre dernier, nous vantaient cette exposition qu'aucun superlatif ne semblait pouvoir définir, j'ai fait un tour sur la toile ! Sait-on jamais, avec des billets d'avion vers Londres à 10€ au départ de La Rochelle, ce n'était finalement pas une telle folie. Mais ce qui était fou, c'était la fréquentation... oui, je sais, je vous ai déjà juré "on ne m'y prendra plus" après nos derniers avatars, Manet, Fra Angelico et tant d'autres, mais qui a bu, boira, et toutes ces résolutions n'étaient que serment d'ivrogne !! D'ailleurs, dès l'ouverture, tout était vendu. A guichet fermé !! Depuis le premier jour ou presque, on ne trouvait même pas de billet au marché noir, enfin je veux dire sur Ebay ! Dans ces cas-là, chez les Alter Michelais on se fait une raison," bof, finalement on le connait Léonard, on en a vu plein, on n'a pas besoin de ces grands messes où les dos accumulés vous empêchent d'apercevoir le plus petit sourire ou de distinguer ne serait-ce que  l'ombre d'un sfumato, où il faut subir le bruit et l'agitation parfois si mal adaptée au contexte artistique qui demanderait concentration et méditation au lieu d’excitation et effervescence "... Bref, on positive, et on se fait une raison. Pas de regret, on se trouvera bien une petite expo de derrière les fagots, moins médiatisée, pour se venger de n'avoir pas admiré en tête à tête la Dame à l'hermine ou la Belle Ferronnière !!

Et voilà que notre cinéma préféré (oups, pas vraiment, imaginez un multiplex dans la banlieue glauque de la zone commerciale saintaise, vous voyez l'ambiance!! mais qui retransmet les opérations PathéLive), proposait hier une retransmission par satellite de la visite guidée de l'exposition. Et même là, les places étaient rares !! Pas de direct mais un film de 80 minutes pour admirer les 60 œuvres du maître que regroupait l'exposition. Regroupait car cette dernière est fermée depuis le 5 février et cette visite filmée intervenait comme un dernier clin d’œil à ce qui fut, de toute évidence, un événement artistique de premier plan. Présenté par l'historien de l'art Tim Marlow, "Leonardo Live" nous promenait dans l'exposition avec force plans rapprochés et analyses d'experts. Les organisateurs promettaient "une intimité exceptionnelle avec l’œuvre du maître italien" de la Renaissance", et, de fait, il y a eu quelques gros plans sur un choix limité de peintures mais globalement nous avons trouvé cette "retransmission" fort décevante.

D'abord parce que l'événement en question n'était, au final, qu'une banale émission de télévision. Au format télé. Donc agitée (la caméra n'arrivait pas à se fixer sur un détail, avec ce diktat commun à tous les formats télé qui découle de la peur de lasser le spectateur et de risquer de le voir zapper), bavarde (avec cette manie qu'on a sur l'étrange lucarne, de remplir l'espace sonore pour ne pas risquer le défaut majeur ; le silence) et frivole. Ce besoin d'interroger des "gens", toutes sortes de gens pas très au fait de l'histoire de l'art et encore moins des subtilités de la palette de Vinci, pour leur demander leur "avis", comme si on avait un avis sur la façon dont l'art de Léonard a évolué durant son séjour milanais. Nous avons eu ainsi un prêtre, un DJ, une danseuse, un musicien, une actrice qui, plantés devant une toile tentaient de prononcer quelques paroles profondes, alors que la caméra oscillait entre eux, la peinture et le présentateur. Le tout lié par une parfaite bimbo qui orchestrait les très brèves interventions de "spécialistes" avec un sourire conventionnel et figé. Demander à un expert de vous résumer en 45 secondes son avis sur l'attribution du Salvador Mundi en provenance de New York que la critique a, fort opportunément, décidé d'attribuer au maître, relève de l'exploit ou de l’inconscience. Je pencherais plutôt pour la seconde !

A l'opposé de Leonardo Live, ce petit film, presque muet, qui montre sobrement et s'attarde sur les toiles et dessins de l'exposition

Ensuite, et c'est lié à ce format ni documentaire ni film, l'approche de l'exposition était trop superficielle : après nous avoir savamment expliqué que la manifestation en question, fruit de 5 ans de travail et de savantes approches, n'avait nullement pour but de créer l'événement et la presse médiatique, mais bien au contraire de faire progresser, grâce aux nettoyages des tableaux requis pour y figurer, la connaissance de la période milanaise de Vinci, on restait largement sur sa faim. Quelques poncifs, quelques stéréotypes énoncés sur un ton sentencieux, nous n'avons rien appris de cette suite de platitudes et de banalités qu'on nous a égrenées sur un rythme par trop syncopé. La caméra était trop mobile, surtout préoccupée de ne pas ennuyer, mais au final nous avons fort mal vu les toiles. Et surtout, alors que l'exposition présentait une collection passionnante de dessins préparatoires qui auraient pu nous éclairer sur l'art du peintre, ils étaient là pour cela, nous n'en avons aperçu brièvement que quelques uns. C'était d'autant plus dommage que le dessin se prête particulièrement bien à l'examen détaillé par une caméra. C'est même, pour la "visite" un plus énorme car les dessins sont toujours très difficiles à examiner dans la foule, l'inconfort et la lumière tamisée nécessaire à leur bonne conservation.

Quelques bons points cependant : l'initiative de montrer les dessous de l'exposition, la préparation technique, les à-côtés pratiques qui intriguent et qu'on ignore toujours ; le fait de consacrer à chaque toile étudiée une petite présentation dans une salle déserte et en voix off, malheureusement trop courte ; le parti-pris d'interroger aussi le restaurateur, l'encadreur ; et enfin l'idée de terminer le film par un "dernier" tour pour la route des principales œuvres ... Au total, nous avons passé un agréable moment mais le concept reste, très largement, perfectible.


Et notre chemin de retour s'est égrené sur le mode nostalgique : entre l'évocation des inimitables émissions d'Alain Jaubert, Palettes, capables de consacrer une demie-heure entière à la seule Vierge à l'enfant Jésus et Sainte Anne, sans provoquer une seconde d'ennui et le souvenir ému d'une découverte qui nous parut alors hallucinante, celle de la Madonna dei Fusi à Vinci en 1982....

19 commentaires:

  1. Donc à t'en croire je n'ai pas à regretter de n'être pas allée voir le film qui passait pas loin d'ici ! J'avais lu dans télérama une mauvaise critique qui m'en avait déjà dissuadée...
    Du coq à l'âne ou plutôt de Vinci à tes petits ziozios... je les trouve charmants tes copains ailés (encore en retard d'un métro !)

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    1. merci pour les piafs, quant au film c'était bof, visible mais pas à faire 40 kms comme nous avons fait !!

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  2. Je songeais justement à Jaubert, et tu le mentionnes en conclusion! J'ai adoré cette série, mais elle est malheureusement difficilement accessible au Québec.

    Écoutes-tu les podcasts de la National Gallery? Ils sont à base de diapositives, je les trouve généralement bien faits, et ce sont des experts qui font les commentaires.

    Et puis, tu sais quoi? nous nous sommes peut-être croisées à Milano en 1982. Mais, dans mon souvenir, cette exposition était surtout consacrée aux machines dessinées par Leonardo que des ingénieurs avaient réalisées... à moins qu'il n'y ait eu plusieurs expositions, cet été-là, à Milan.

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    1. Nous nous sommes offert toute la collection des Palettes et c'est toujours un vrai plaisir de les visionner.
      Non je ne connais pas les podcasts de la National Gallery, à découvrir donc
      Quant à l'expo de 1982, j'en parle dans mon prochain billet, il y avait en effet des expos à Milan avec des machines, mais aussi le Codex Hammer (ex et futur Leicester) à Firenze et à Vinci, la madonna dei fusi américaine !!!

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    2. Je regrette beaucoup d'avoir pris aussi peu de notes à l'époque où je voyageais beaucoup, au début de la vingtaine. Je me reprends maintenant, mais je suis plus sédentaire.

      Il faut que je me renseigne, car je ne sais pas ce qu'est le Codex Hammer...

      Bonne semaine! La mienne sera casanière et studieuse!

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  3. Pour avoir fait à peu près les mêmes serments d'ivrogne je me régal de ce billet
    je n'avais pas vu cette possibilité de faire une visite à distance, heureusement car je me serai fait piégé de la même façon
    par contre ce petit film est plutôt réussi dans le genre simple, il reflète bien l'expo sans grandiloquence ni effet de manche (si je peux le dire comme ça)

    Cela me donne envie d'aller ouvrir mon gros bouquin de Daniel Arasse !

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  4. Ah! Michelaise, j'aime tes enthousiasmes autant que tes saintes colères, surtout quand elles sont liées comme ici! Je ne sais pas si j'aurais fait 40 km pour voir ce film, mais j'imagine très bien après t'avoir lu ce à quoi il a dû ressemblé et combien j'aurais pesté moi aussi devant la bimbo et les propos sentencieux! Mais je pense que j'aurais été moins sévère micro-trottoir et que je me serais laissé attendrir par les "avis" du DJ, du prêtre et de la danseuse, dans la mesure où ce sont des gens à qui on ne donne jamais la parole! Bon, et puis je vais te dire, pas besoin d'aller à Londres ou à Milan pour voir les Léonard! Il y en a plus au Louvre que dans toute l'Italie! Et justement, à propos du Louvre, il sera possible, à partir du 29 mars, de revoir la Vierge et Sainte Anne entièrement restaurée!!! On attend cela avec impatience et ce sera gratuit!!!

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    1. Oui les avis, bon, en effet mais tout de même cela ne faisait pas un brouet méritant le déplacement
      Quant au Louvre, il reste bien sûr le refuge !!

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    2. Je dis n'importe quoi : La Vierge au rocher et non la Vierge et sainte Anne!

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    3. Non non GF tu ne disais pas n'importe quoi, c'est bien de la vierge et sainte anne qu'il s'agit :
      Gsaint anne redécouverte
      la vierge au roche était à londres et n'a pas (encore ??) été restaurée !!

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  5. Bonsoir Michelaise. Les portraits de Leonard de Vinci me fascinent et m'émeuvent tout autant. il y a tant de douceur et d'expression dans les regards que je suis impressionnée par le travail de l'artiste.
    Mais je voudrais te poser une question à toi qui es très au fait de tout ce qui est art. Dans la vidéo des tableaux pris en photo à la National Gallery j'ai vu le portrait de la Belle Ferronnière. Y a t-il plusieurs toiles qui la représentent ? J'ai vu ce portrait au Louvre il y a deux ans. Le Louvre aurait-il prêté son tableau à Londres ?
    Merci pour cet article et les magnifiques tableaux dont tu nous offres les reproductions.
    Bonne semaine pour toi

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    1. Alors Oxy, la belle ferronnière, à droite, a été en effet prêtée par le Louvre, tandis que la dame à l'hermine (Cecilia Gallerani) l'a été par Cracovie : le montage qui les met en "regard" a été trouvé sur le net, pour tout dire sur un site qui proposait le voyage à Londres !!!
      De même que le Louvre a prêté sa vierge au rocher, mise en parallèle avec celle de la NG !! Le louvre y a eu d'autant plus de mérite que la vierge de la NG vient juste d'être restaurée et que celle de Paris est assez abimée !

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  6. Chère Michelaise, moi qui ne vais plus jamais dans les gros trucs (expos super médiatisées) je trouve que l'idée du film, (comme les retransmissions des Opéras) est une bonne idée, reste la forme à trouver, dixit Palette, pour les expos d'art.. Bien sûr, jamais rien ne vaudra le direct si je puis dire, mais comment faire autrement ?

    Vive les petites expos de derrière les fagots :-)))

    Je te bises fortes du matin.

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  7. Nous avions également envisagé un petit aller-retour Bergerac Londres finalement sans suite. Même avec tous ses défauts je crois que j'aurais aimé voir ce film mais comment trouves tu tout cela rien de tel ne passe dans notre pays de croquants.

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    1. Mais Robert, ici aussi c'est un pays de croquants et je suis sûre que Pathé Live existe pas loin de chez toi

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  8. Bonjour, Michelaise.
    Mais oui, du théâtre il faut connaitre les coulisses.
    Tes images sont remarquables.
    Merci beaucoup.

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    1. Merci Herbert, je n'y ai aucun mérite, si ce n'est de les avoir choisie sur internet !

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  9. J'ai le coffret DVD de la série "Palette". Si tu veux en revoir... J'aimais bien aussi sur Arte "Grand Art" avec l’œil original et percutant de Victor Obalk

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