dimanche 8 juillet 2012

AVIGNON ÇA RECOMMENCE !


Et nous voilà repartis pour un tour ! Une année s'est écoulée, presque sans théâtre car, sur notre estuaire, on a pas mal de choses : expos, modestes certes, mais toujours de qualité... cinéma aussi, avec un ou deux temps de retard, mais assez pour ne pas se sentir frustrés... concerts, à un niveau plus que respectable en particulier grâce à nos "Jeudis Romans". Mais de théâtre, point. Alors bien sûr, il reste toujours Bordeaux ou La Rochelle... mais plus de trois heures aller et retour, cela demande de l'énergie et le risque d'un ratage est toujours réel, surtout au théâtre. Alors on reste raisonnable et d'un an sur l'autre, Avignon demeure notre refuge pour les trois coups.



Mais qui sommes-nous, nous les aficionados du Off, les maniaques de la file d'attente, les fondus du beau texte, les acharnés de la découverte ? La "norme" c'est une femme de plus de 50 ans ! Et voilà, tant pis pour Alter et Koka, cette fois-ci, la norme, c'est moi ! A ceci près que je ne suis pas retraitée, mais bel et bien cadre de la fonction publique, alors dommage pour mes ambitions à l'originalité !! 



95% d'entre nous ont leur résidence principale en France, quoi de plus naturel, sauf que ... la manie d'Avignon, enfin pour le In surtout, est d'imposer des spectacles en langue étrangère : alors quand c'est Shakespeare en anglais, passe, mais Ionesco joué en coréen, c'est déjà moins évident ! Ceci étant, vous remarquerez que l'appartenance à la Région Poitou Charentes est, forcément, inférieure à 2% et qu'elle figure dans un joli fourre-tout, "autres" où s'accumulent tous les bizarres et les lointains ! S'il s'agit maintenant de savoir si le public est composé de fidèles, le doute n'est pas permis ! 85% d'entre nous sommes déjà venus, et en moyenne 5,6 fois au cours des 10 dernières années (cela doit frôler les 9/10 pour nous). Quant à la durée du séjour, elle est respectable, 5,5 jours en moyenne, autant dire que notre semaine n'a rien d'exceptionnel et nous permet juste de participer à la norme !

Il est dit quelque part que les "programmateurs" (c'est à dire les directeurs de maison de la Culture qui viennent à Avignon "faire leur marché"), restés eux 7,3 jours en moyenne (mais aux frais de la princesse, j'imagine !!) ont vu 18,9 spectacles durant leur séjour, dont, seulement 1,2 pièces du In. C'est marrant car ces chiffres pourraient s'appliquer strictement à nous (sauf pour le In qu'on boude !!), mais nous sommes là juste en amateurs et pensons parfois que ce serait bien de pouvoir recommander des spectacles aux programmateurs de notre Région !! C'est un peu pour cela que j'aime bien faire le tour de toutes les pièces vues, me disant que, peut-être quelqu'un, quelque part, aura envie d'embaucher certaines des troupes appréciées ! Vous voilà donc condamnés au théâtre dans les prochains jours, cela vous reposera des expositions ou de la Sicile ! Les pièces dont je vous parlerai passeront peut-être un jour prochain* pas loin de chez vous, si elles ont eu l'heur de plaire à un directeur de salle, et qu'elles ont été achetées, pour la plus grande joie de la troupe distinguée !



Et qu'aimons-nous ? Les camemberts ci-dessus comparent ce que nous offrent les compagnies (au milieu), et que nous attendons (en bas). Ils nous assomment de créations contemporaines (34%) alors que cela nous intéresse mais point trop n'en faudrait (24%). Ils nous mesurent le théâtre classique (19%) alors qu'un chouïa de plus nous ferait plaisir (22%). Les spectacles pour enfants, attendus dans 4% des cas, font souvent salle vide, il y en a tout de même 11% dans l'offre. A l'inverse, la danse, proposée dans 4% des spectacles, est nettement recherchée par le public (10% des demandes). L'humour enfin, est très apprécié (19% des attentes) alors que seulement 11% des compagnies en proposent : là, je suis étonnée, car j'ai l'impression qu'il n'y a que cela, comédies légères, boulevard, franche rigolade ... Mais peut-être que, dans un souci de respectabilité, les compagnies n'intitulent pas "humour" ce qu'elles proposent ... en tout cas, l'aventure avignonnaise nous attend ... pour le pire, rarement, et surtout pour le meilleur !!



Et quel est le sort de toutes ces compagnies qui - elles sont plus de 975, pour près de 1200 spectacles - viennent chaque année croire au miroir aux alouettes ? On y vient, la fleur au fusil, l'enthousiasme au zénith, pour jouer et pour vendre. Jouer d'abord, car une compagnie moyenne, qui vend correctement ses spectacles, peut espérer une bonne année la donner en moyenne 7 fois**. Alors qu'à Avignon, une troupe est assurée de donner 24 représentations. Et elle travaille pour elle-même : c'est à dire que si le spectacle marche, elle encaisse ses recettes. Certes après avoir payé la salle  : 8000 à 20000 euros pour un créneau de 2h, certaines essaient de faire avec 1h30, mais cela impose des spectacles très courts, car dans les temps alloué à chacun, il y a l'installation du décor, la vente des billets, le remplissage de la salle, le jeu proprement dit, les applaudissements et l'évacuation de la salle en général concommittente au démontage des décors. Ensuite il faut loger la troupe : plus elle est importante, plus la logistique coûte cher ! Les prix de locations des appartements sur Avignon varie entre 1000 euros la semaine, 5000 les trois semaines, ou plus, selon la taille, le confort et tant de paramètres. Il faut se nourrir aussi, et je vous garantis que le prix des denrées subit, durant les trois semaines que dure le Festival, une inflation impressionnante. Il y a, bien sûr, des frais d'inscription au Off, il faut parfois s'offrir un régisseur ou des éclairagistes sur place, il fest nécessaire, voire vital, de financer un budget comm (les places, la pub, les flyers, les pancartes...). Pour tout cela, on peut tout faire soi-même, tracter, flyer, coller ses affiches, faire ses lumières, recevoir la presse... ou on peut le sous-traiter, moyennant finances bien sûr. Au total un budget assez faramineux que les entrées, si elles existent, ne couvrent que très partiellement. Il faut vendre, aux maisons de la culture, aux programmateurs de salles spectacles, de saisons, de festival... Un bon spectacle se vend 3000 à 5000 euros, parfois plus sans doute, mais je reste dans les moyennes. Pour se "remettre" d'un festival Off, il faut à certaines compagnies plusieurs années parfois, tant c'est une saignée dans leur trésorerie. Et pourtant, c'est ici qu'on vend vraiment ses spectacles, qu'on fait parler de soi, qu'on rencontre d'autres compagnies, qu'on fait vivre le théâtre et que, parfois, on a un coup de chance médiatique qui vous assure une certaine renommée pour quelques années.

Greg Germain, le président du Off dit que ce dernier  « est devenu à la fois le premier festival de spectacles jeune public, le premier festival d'auteurs contemporains, le premier festival d'humour, de café-théâtre et de boulevard, et surtout le premier marché du théâtre avec 20% des ventes annuelles du spectacle vivant réalisées ici, 3.600 programmateurs et prescripteurs faisant le déplacement -dont 370 étrangers-pour assister à 500 nouveautés, soit 10% des 5.000 créations annuelles de notre pays ». Alors que LE Festival, entendez le "In", avec son théâtre «d'art», ses têtes d'affiche, ses créateurs européens les plus réputés présente une quarantaine de spectacles qui seront repris par de grandes scènes, au Off, ce sont 400.000 spectateurs, 1,2 million de places distribuées, et une véritable vitrine pour toutes ces compagnies, petites et modestes, grandes et célèbres, provinciales ou régionales, subventionnées ou pas, bref, le lieu où tous ces gens du spectacle vont, enfin, sans frein et sans exclusive, se confronter au public. D'où l'incroyable variété des programmations, l'inénarrable diversité des genres, un panorama unique de ce qui se fait, du plus classique au plus fou, du plus intelligent au plus déjanté, tout est possible ici. On y trouve le pire et le meilleur, on a des déceptions et des coups de coeur plusieurs fois par jour, et on essaie de trouver son miel dans cette jungle où règne toujours un joyeux happening, même si certains salles "institutionnelles" ou instituionnalisées permettent de mieux se repérer.

* Les achats se font, en juillet 2012, pour la saison 2013-2014 ! La plupart des salles de province ont déjà annoncé leur programme 2012-2013... autant dire que le retour sur investissement est long !

** Nous ne parlons pas ici des théâtres parisiens où la programmation est continue, à l'année voire, pour certaines pièces à la décennie ! 

Voir aussi :

6 commentaires:

  1. cela fait plusieurs années déjà que je me dit "un jour j'irai"! , j'espère y arriver dans les années à venir!

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    1. Mais oui, Eimelle, un jour tu viendras !! Faut dire que, tous, nous avons tant de sollicitations, tant d'invites... mais si tu en as l'envie, tu le feras ! faut s'y prendre un an à l'avance pour les réservations de logement mais on y arrive !!!

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  2. J'aime pas les chiffres!!!!
    Contente de voir Koka !
    A bientôt pour les compte-rendus des différents spectacles !

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    1. Et pourtant, quand on est à Avignon, la curiosité du pourquoi, du comment et surtout du combien l'emporte !! te rends-tu compte ? 1200 pièces tous les jours, durant trois semaines ? Mais comment font-ils se dit-on !!!

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  3. Comme tu as raison, pour tout il faut aller à Bordeaux même les hôpitaux ! et pour les spectacles les retours de nuit sont pénibles... pour de vieux retraités comme nous....
    Etant allergique à ce genre de camembert je n'ai pas tout lu... il se fait tard !!!
    En tous cas au moins tu auras du beau temps en Avignon. Bon festival.

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    1. Ah ah !! encore un allergique au camembert !! Bon résumons, tu te doutes que nous aussi c'est Bordeaux (et le programme de l'an prochain au TNBA n'a rien d'affriolant) et les retours sont pénibles quand on travaille le lendemain et y aller est difficile après une journée de travail... Bref, comme tu dis, exactement.
      Quant au beau temps Robert, il est de bon ton de s'en réjouir, mais à Avignon cela signifie une chaleur étouffante qui est fort pénible à supporter : la ville est un chaudron ! Mais pour l'amour du théâtre ...

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