vendredi 6 juillet 2012

UNE JOURNEE A CHAUMONT SUR LOIRE


Le château de Chaumont sur Loire s'intitule Domaine ! Et, de fait, on peut y passer une journée entière, en gardant le parc, ouvert jusqu'à 20h, pour la fin !! Attention toutefois de bien surveiller l'heure car on doit penser tout seul à sortir le soir : pas de rameutage intempestif des retardataires par haut-parleur  ! Et comme le parc est très grand, il faut galoper ferme si l'on s'y prend à la dernière minute !! Ce qui, vous vous en doutez, a été notre cas! 


Chaumont sur Loire, c'est donc un "vrai" château, meublé, entretenu et bourré d'Histoire. Chapelle, pièces de réception, cour, cuisines, étages désaffectés, communs, écuries, granges ... rien n'est caché et la visite est captivante !


Pour rester vivant, le château continue à acheter des oeuvres, témoin l'histoire du rachat de cette toile qui a eu lieu l'an dernier. Dans un cadre au décor exubérant dans le style XVII-XVIIIème, avec putti, coquilles, fleurs et grappes de raisins, dont la partie supérieure en volute, se termine par des fleurs, le portrait d’Anne de Bretagne (1477-1525) nous sourit à travers les siècles. L'oeuvre n'est pas majeure, loin de là, mais son histoire est intéressante. La toile, qui date de la fin du XIXème siècle et dont le peintre nous est inconnu, figurait en bonne place dans le salon de la princesse de Broglie. Mais suite à des revers de fortune et à son remariage en 1930 avec SAR Louis Ferdinand d’Orléans et Bourbon, elle vendit la toile en même temps que multiples autres œuvres d’art. Le tableau fut acquis en 1936 par une famille de Blois et réapparut sur le marché de l’art en 2011. Le fonds d’enrichissement des collections de Chaumont décida alors de le racheter et de lui redonner sa place initiale, où on l’admire de nouveau.


Chaumont, ce sont aussi des parcs immenses, aux arbres séculaires et aux parterres inventifs. Paysagé à l'anglaise, il se caractérise par un relief doucement vallonné, des pelouses ceinturées d'allées curvilignes, des arbres isolés ou groupés en bosquets, cèdres, séquoias, ou essences locales. Des percées visuelles entre arbres et bosquets orientent le regard vers la Loire, la forêt et surtout le Château. Un deuxième parc a été rajouté récemment au Domaine, le parc du Goualoup, et normalement on visite aussi le cimetière des chiens mais nous n'avons pas eu le temps !!

Chaumont, c'est le Festival des Jardins, le Centre d'Arts et de Nature où l'art contemporain règne en maître, toutes choses que je vous ai déjà contées.



Enfin, Chaumont, ce sont des découvertes, comme Nini et ses médaillons portraits, mais aussi comme ce pavement en majolique qui nous a furieusement rappelé les céramiques de Caltagirone. Là encore, l'anecdote est amusante. Le cartouche de présentation, repris de-ci, de-là sur Internet, raconte à peu près ceci : "Ce carrelage du XVIIème siècle, provient du palais Collutio de Palerme où il fut acheté par le Prince de Broglie. Composé de plus de mille carreaux, ce sol émaillé représente dans le cartouche central une scène de chasse à courre, entourée d’un décor de rinceaux et d’armoiries. Il est en majolique, faïence émaillée à partir d’émaux tendres dont la technique de fabrication fut introduite en Italie par des artisans de Majorque, aux Baléares". Je me suis, vous vous en doutez, précipitée sur internet pour retrouver trace de ces Collutio, qui, bien évidemment, n'existent pas : la famille qui vendit ces carrelages au Prince est, à n'en pas douter, la famille Colluzio.



Témoins les armes de la famille :  "D’azur, avec un château d'or crénelé, gardé par deux chiens liés d'argent, encadré par deux arbres au naturel, et la bordure cousue de rouge chargée de 8 coquilles d'or 3, 2 et 3 "(Couronne de baron) que, hormis les coquilles, l'on retrouve sur le pavement.
Cette ancienne famille noble d’origine espagnole (venant de Gerone en Catalogne), émigre en Italie vers la fin du XVIème siècle avec Gulio Colluzio, comme le révèle l’acte de naissance de son fils Luca, le 13 novembre 1600. Antonino, fils de ce dernier, achète un office de maître notaire auprès de la perception du trésor de Mazara del Vallo en 1684 et il fut le premier baron de San Giovanni. En effet, en 1682, il est nommé gouverneur de Marsala et devient capitaine d’arme de cette ville durant une guerre maritime menée par la cité, ce qui lui valut cette distinction honorifique en remerciement. Son fils, Guiseppe, capitaine de cavalerie fut lui aussi tabellion à Mazara. Un autre Antonino lui succède à cette charge. La famille s’est assagie en avançant dans le siècle, il ne fait plus la guerre mais devient supérieur de la Noble Compagnie de la Charité et 1813.



C’est à cette génération que le nom s’éteint, seules deux filles héritant des biens de la famille Colluzio, Caroline, et une certaine Maria Grazia, baronne de Montalbano (non, je n’ai pas inventé, Camilleri nous voilà !). C'est manifestement à ces derniers descendants, qui ont démantelé les aménagements du palais, qu'on doit le pavement de Chaumont. Fallait-il être rapace ou désargenté pour vendre jusqu'au sol de la maison !! Et amateur de céramiques italiennes pour acheter un si encombrant ensemble, et le faire réinstaller dans sa demeure ! L'histoire ne dit pas quel prix coûta au prince de Broglie une telle initiative mais nous savons qu'il avait les moyens de ses caprices ! Quant à la provenance des céramiques, je vous livre l'avis de LA spécialiste, Roberta C...., historienne de l'art de la Soprintendenza de Catania "Pour le carrelage, à mon avis, il s’agit d’une œuvre de l’Italie du Sud, peut être Sciacca, mais pas Faenza"



Pour finir, j'ai cherché à Palermo le palazzo Colluzio, en vain... je n'ai trouvé qu'un Vicolo Colluzio, pas très loin de la cathédrale, ce qui laisse penser qu'il ne reste plus grand chose de la famille espagnole émigrée au XVIème en Sicile !!



6 commentaires:

  1. J'ai un faible pour les écuries du domaine, qui ont eu tout le "confort moderne" avant le château , sans parler de la vue sur la Loire.. un endroit magique...

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    1. Ah oui Eimelle, complètement fascinantes ces écuries, avec une cuisine digne d'un restau !! tant d'endroits étonnants à Chaumont, mais je me suis déjà laissé aller : 4 articles tout de même !!

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  2. Un bel endroit à visiter, sans aucun doute !

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  3. Superbe ton billet, de bons souvenirs pour moi, Chaumont.
    Quand ma fille fit un master de l´Art à Paris, nous nous y sommes rencontrées, elle avait à préparer un travail sur Chaumont et Azay le Rideau.
    Imagine, dans mon pays, cette rencontre fut inoubliable.

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  4. Toujours aussi passionnant chez Michelaise!
    Un régal, merci encore et toujours.
    Miss

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