De mon temps, pour conquérir une belle, fut-ce pour quelques instants, on partageait avec elle son parapluie :
Il pleuvait fort sur la grand-route,
Ell’ cheminait sans parapluie,
J'en avait un, volé, sans doute,
Le matin même à un ami ;
Courant alors à sa rescousse,
Je lui propose un peu d'abri.
En séchant l'eau de sa frimousse,
D'un air très doux ell’ m'a dit « oui ».
Un p’tit coin d’ parapluie,
Contre un coin d’ paradis.
Elle avait quelque chos’ d'un ange,
Un p’tit coin d’ paradis,
Contre un coin d’ parapluie.
Je n’ perdais pas au chang’, pardi !
Chemin faisant, que ce fut tendre
D'ouïr à deux le chant joli
Que l'eau du ciel faisait entendre
Sur le toit de mon parapluie !
J'aurais voulu comme au déluge,
Voir sans arrêt tomber la pluie,
Pour la garder sous mon refuge,
Quarante jours, quarante nuits.
Les meilleures choses ayant, trop vite, une fin, il arrive que la belle "Après m'avoir dit grand merci.. part[e] gaiement vers mon oubli…", mais, quitte à nous faire une Saint Valentin pluvieuse, Monsieur Doodle de chez Google aurait pu mettre nos amoureux sous le même toit. Les temps modernes sont sans illusion et il devient dur d'imaginer un couple autrement que comme l'addition de deux "ego", prêts et parés pour la séparation au plus court : chacun peut repartir sous l'ondée sans dommage ,puisqu'il a son propre abri. Ma vision du couple a sans doute du plomb dans l'aile, et je n'en suis que plus étonnée de l'importance que l'on donne aux fioritures obligées d'une fête qui, de mon temps encore, n'existait pas*. Il est sans doute nécessaire d'habiller des plumes d'un erzatz d'éternité des relations dont on sait - dont on veut - qu'elles ne seront que passagères. On chante "amour toujours" pour mieux se séparer dès qu'un nuage se profile ou qu'un désir plus fort montre le bout de son nez. Alors, dans ces temps (modernes, je vous l'assure) d'incertitude et de crise larvée, on a besoin de symboles, d'une couleur affirmée de romantisme et d'un peu de piquant. Les esseulés paniquent et se précipitent** sur les sites de rencontre dès le 12 février pour y trouver l'âme qui viendra, armée de son propre parapluie, partager leur rêve d'amour d'un jour.
Les couples "englués", quant à eux, cèdent aux sirènes du consumérisme qui rassure : bien obligé(e) au risque de passer pour un(e) goujat(e) ! Une belle réussite marketing en vérité qui remplit les restaurants, réservés une semaine à l'avance, vide les vases de fleuristes, bariole toutes les vitrines de cœurs, rouges de préférence, et d'anges extatiques... proposant tout et n'importe quoi pour que la journée soit marquée par un cadeau. Vous avez remarqué, comme moi, que le label valentinien se décline à toutes les sauces, chaque produit, orné d'un cœur, pouvant "faire l'affaire". Le plus lucratif cette année étant, bien sûr, le film issu du "porno pour maman" *** dont les producteurs se promettent de belles retombées, grâce à une campagne judicieusement orchestrée. Il n'y avait au monde que mon Alter qui n'en avait pas entendu parler et qui a pris, hier soir, un air totalement déconcerté quand je lui ai parlé du phénomène commercial et du matraquage médiatique qu'il a entraîné ces jours-ci.
Et les autres, me direz-vous ? Certains, il faut bien exister, forment de ligues "anti", envoient des cartes protestataires, proposent des idées de cadeaux affirmant leur opposition et clament haut et fort (continuons en chansons) :
Et, puisqu'il faut tout de même transformer l'essai commercial, vous trouverez le livre qui va avec cette phobie du rose fushia, et vous fera, vous promet-on, passer un bon moment de détente. D'autres s'apprêtent à passer une soirée sans médias pour éviter de se faire saper le moral au motif qu'ils n'ont pas de compagne(on) et que la solitude se supporte mieux quand on n'y pense pas trop.
Quant aux gens qui s'aiment, depuis longtemps et qui ont envie que ça dure, ils se sont dit, ce matin, comme tous les matins, que la vie était belle auprès de l'être aimé, ils ont échangé, comme chaque jour, quelque sourire, quelque tendresse un peu surannée, ils se sont frotté le nez ou caressé le museau... en un mot, ils ont pratiqué, sans rien changer, leurs petits rituels amoureux et câlins. Pas question de changer quoi que ce soit parce qu'on nous cerne avec des campagnes de pubs bien ou mal orchestrées. Et je crois que, ne connaissant personne s'appelant Valentin, ils n'ont rien à fêter de particulier aujourd'hui : c'est, heureusement, un jour comme les autres ! Plein de tendresse.
Les couples "englués", quant à eux, cèdent aux sirènes du consumérisme qui rassure : bien obligé(e) au risque de passer pour un(e) goujat(e) ! Une belle réussite marketing en vérité qui remplit les restaurants, réservés une semaine à l'avance, vide les vases de fleuristes, bariole toutes les vitrines de cœurs, rouges de préférence, et d'anges extatiques... proposant tout et n'importe quoi pour que la journée soit marquée par un cadeau. Vous avez remarqué, comme moi, que le label valentinien se décline à toutes les sauces, chaque produit, orné d'un cœur, pouvant "faire l'affaire". Le plus lucratif cette année étant, bien sûr, le film issu du "porno pour maman" *** dont les producteurs se promettent de belles retombées, grâce à une campagne judicieusement orchestrée. Il n'y avait au monde que mon Alter qui n'en avait pas entendu parler et qui a pris, hier soir, un air totalement déconcerté quand je lui ai parlé du phénomène commercial et du matraquage médiatique qu'il a entraîné ces jours-ci.
Et les autres, me direz-vous ? Certains, il faut bien exister, forment de ligues "anti", envoient des cartes protestataires, proposent des idées de cadeaux affirmant leur opposition et clament haut et fort (continuons en chansons) :
...Tout l'alcool que j'ai pris ce soir
Afin d'y puisser le courage
De t'avouer que j'en ai marr'
De toi et de tes commerages
De ton corps qui me laisse sage
Et qui m'enlève tout espoir.
J'en ai assez faut bien qu'j'te l'dise
Tu m'exaspèr's, tu m'tyrannises
Je subis ton sal'caractèr'
Sans oser dir'que t'exagèr's
Oui t'exagèr's, tu l'sais maint'nant
Parfois je voudrais t'étrangler
Dieu que t'as changé en cinq ans
Tu t'laisses aller, tu t'laisses aller
Ah! tu es belle à regarder
Tes bas tombant sur tes chaussures
Et ton vieux peignoir mal fermé
Et tes bigoudis qu'elle allure
Je me demande chaque jour
Comment as-tu fait pour me plaire
Comment ai'j pu te faire la cour
Et t’aliéner ma vie entière
Comm'ça tu ressembles à ta mère
Et, puisqu'il faut tout de même transformer l'essai commercial, vous trouverez le livre qui va avec cette phobie du rose fushia, et vous fera, vous promet-on, passer un bon moment de détente. D'autres s'apprêtent à passer une soirée sans médias pour éviter de se faire saper le moral au motif qu'ils n'ont pas de compagne(on) et que la solitude se supporte mieux quand on n'y pense pas trop.
Quant aux gens qui s'aiment, depuis longtemps et qui ont envie que ça dure, ils se sont dit, ce matin, comme tous les matins, que la vie était belle auprès de l'être aimé, ils ont échangé, comme chaque jour, quelque sourire, quelque tendresse un peu surannée, ils se sont frotté le nez ou caressé le museau... en un mot, ils ont pratiqué, sans rien changer, leurs petits rituels amoureux et câlins. Pas question de changer quoi que ce soit parce qu'on nous cerne avec des campagnes de pubs bien ou mal orchestrées. Et je crois que, ne connaissant personne s'appelant Valentin, ils n'ont rien à fêter de particulier aujourd'hui : c'est, heureusement, un jour comme les autres ! Plein de tendresse.
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* même si on nous affirme que la fête est d'origine antique : "le 14 février avait lieu le festival de Lupercus, ce dieu de la fertilité représenté couvert de poils de chèvre. Ce jour là, les prêtres sacrifiaient des chèvres au dieu et, après avoir bu du vin (beaucoup de vin), ils couraient nus ou presque dans les rues de Rome, des morceaux de peau de chèvre à la main avec lesquels ils touchaient les passants. Et que faisaient les passants à votre avis, surtout les jeunes filles ? Ils s’approchaient d'eux, car être touché par un prêtre à moitié nu était censé rendre fertile et faciliter l’accouchement. "
** nous dit-on encore : " En tout cas il est sûr que les célibataires mettent toutes les chances de leur côté pour être accompagnés ou passer un moment agréable le soir de la Saint Valentin. Sur CasualDating.fr, on observe chaque année une croissance d'activité dès le 12 février", confie encore Aude Creveau.
Augmentation des inscriptions, volume de messages échangés entre les membres, changement de photos de profils... les hommes comme les femmes s'affolent : "N'avez-vous pas remarqué ces pubs pour Meetic.fr partout en ce moment ? s'interroge notre psy. Ce n'est pas fortuit…"
CasualDating qui, au passage, table aussi sur la pluie en cette mi-février pleine de frimas !!
*** vendu quant à lui à plus de 50 millions d'exemplaires et qui va forcément bénéficier de la sortie en salle pour une regain d'intérêt, d'autant que l'affaire est telle juteuse que les auteurs, malins, ont déjà sorti deux suites : Cinquante nuances plus sombres (Fifty Shades Darker) et Cinquante nuances plus claires (Fifty Shades Freed). On ne change pas une éuiqpe qui gagne n'est-ce pas ??
Vous avez remarqué, Michelaise, sur le machin glauque de Google... dans une main le parapluie et dans l'autre main le godet de starbucks.... Ils n'ont plus rien pour ce que vous aimez... les petits rituels, les câlins et autres joyeusetés ! Laissons-les vivre avec leurs godets, leurs cartes bleues, leurs rendez-vous pseudo-galants. Ce n'est même pas avec les cinquante nuances de ce qu'ils veulent qu'ils auront les mains libres pour des simples caresses et les yeux affutés pour distinguer le joli grain d'une peau à la naissance d'un joli sein. Tout ce commerce décérébrant leur enlève la simple humanité. Tant pis pour eux et tant mieux pour ceux qui savent.... encore....
RépondreSupprimerLa pression est forte Michel et ils ont du mal à prendre le temps de faire le chemin tout simple que vous suggérez... les sollicitations sont permanentes, toujours bien "marketées" et on ne laisse pas l'imaginaire galoper et le rêve s'infiltrer : il faut tout, tout de suite !!
SupprimerBravo pour le gobelet, je n'avais pas remarqué ... pourvu qu'ils n'aient pas, en prime, la bouche pleine de pop-corn....