Avignon Off 2015 : 1336 spectacles joués par 1071 compagnies ! Comme le disait pensivement Alter "C'est une super-nova qui a explosé et qui est en train de se transformer en trou noir du théâtre". Même si la comparaison n'est pas très sûre du point de vue astro-physique, c'est un peu l'impression que l'on a : cette inflation hallucinante laisse pantois. Et le théâtre n'y trouve pas son compte. L'affaire est devenue trop juteuse pour les loueurs et autres profiteurs sur le dos des troupes et compagnies qui rêvent d'une vitrine. On le sait, une salle est louée pour le temps d'un spectacle, temps durant lequel la troupe doit arriver, s'installer, jouer, se laisser applaudir (pas trop) et enfin démonter, et ranger pour faire la place aux suivants. Le temps était traditionnellement de 2h... mais les loueurs ont fait un calcul simple : en gagnant une demie heure par troupe on s'assure une ou deux plages horaires de plus dans la journée ... kling ! Nous avons vu ainsi des troupes de plus en plus prises par le temps, des spectacles qui avaient du mal à boucler... Une troupe nous disait avoir commis l'erreur d'annoncer un spectacle d'une heure et de s'être vu attribuer 1h 20... autant dire que c'était la panique pour s'installer et commencer, tous les soirs en retard.
Sans compter qu'il faut se loger et vivre durant tout le festival. Une maison, avec 8 chambres certes, mais située à quelques kilomètres de la ville et sans luxe aucun, se loue 8 000 euros pour les trois semaines... re-kling ! Résultat, les troupes et les acteurs doivent rentabiliser leur séjour, et joue dans deux, voire trois ou quatre spectacles. Fatigue, galère, approximation... on se demande comment certains font encore pour être aussi bons !
La ville d'Avignon n'étant pas florissante, le moindre commerce de fringues ou petit bistrot est nettement plus rentable transformé en salle de théâtre. Les salles se multiplient (127 lieux !!) et les mouchoirs de poche ... kling encore !... deviennent légion : comment s'en sortir au niveau des recettes possibles avec 50 ou 60 places ?? D'autant que les premier jours les troupes sont loin de faire le plein (nous étions souvent 5 à 10 par séance). Il est nettement plus rentable de jouer dans la rue, sans frais. La moindre chanteuse isolée avec guitare se fait une centaine d'euros par soirée, les spectacles un peu plus élaborés gagnent facilement 200€ par jour.
L'exiguïté des salles, l'étroitesse des créneaux horaires obligent les troupes à monter des spectacles raccourcis, et interdisent presque drastiquement la mise en scène de "vraies" pièces. Les troupes qui le font ont un courage énorme, car la concurrence est telle qu'elles sont noyées dans la masse, doivent supporter des charges énormes et sont sans doute terriblement déficitaires. Et tout cela fait boule de neige : car les responsables de programmation des salles qui passeront ces spectacles pendant l'année suivante viennent faire "leur marché" ici, et, de plus en plus, les centres culturels ne diffusent plus que des manifestions "dans le goût d'Avignon", courts et faciles.
De plus en plus de spectacles donc, mais pas forcément un choix énorme quand on vient faire ici sa cure de "théâtre". Nous en avons tout de même vu, avec bonheur, 25, dont voici, comme chaque année, nos impressions sous forme d'étoiles. Et comme toujours, nos goûts sont très proches.
Pour les détails :
j'admire encore une fois quelle synthèse
RépondreSupprimer... grand merci et bonnes vacances
Merci Josette, en fait je me dis que ces "critiques" (osons le mot !!) peuvent servir quand les spectacles passent dans nos centres culturels : car c'est au Off que les directeurs artistiques viennent acheter les spectacles pour 2016 et 2017.
SupprimerMerci Michelaise c'est l'exacte vérité, Avignon en juillet se fait du fric sur le dos des artistes, les loueurs de salle gagnent leur année en un mois. Les artistes s’endettent pour plusieurs années.
RépondreSupprimer30 % des compagnies plient bagages dès la 1ere semaine... Trop d'offres pas assez de spectateurs pour remplir les salles, toutes les salles...
Mais rien n'arrête l'illusion de percer en Avignon...
J'ai regardé avec plaisir l'immense Roi Lear sur mon écran d'ordinateur, une merveille ! Un grand moment de théâtre !
Vive le théâtre, merci à tous ces artistes d'y croire... Souvent à leurs dépends...
Bises du jour
Pour ce qui est du Roi Lear, nous avons déclaré forfait, quoiqu'ayant des places (vite revendues d'ailleurs) car la mise en scène ne nous a pas attirés. Seul le jeu de l'acteur principal semblait sauver la mise.
SupprimerPar contre, vu hier soir l'immense Richard III mis en scène de façon magistrale par Thomas Ostermeyer, pour lequel nous n'avions pas eu de place (et en prime, le théâtre d'Avignon, où il se jouait, est d'un grand inconfort).
Quant aux troupes qui plient bagages dès la première semaine, sans doute alertées par la faible fréquentation de cette semaine de rôdage, elles doivent, de toutes façons, subir des pénalités : ce qui montre que l'aventure est, en général, ruineuse. Les "maquignons" d'Avignon vendent du rêve, celui d'être remarqué. Merci de ton passage.
il faut en effet bien "éplucher" le programme pour découvrir quelques pépites! Heureusement, il en reste, et grâce à ces articles, je vais aller en voir quelques unes la semaine prochaine!
RépondreSupprimerJ'espère que tu ne seras pas déçue, c'est toujours difficile de partager des enthousiasmes... tu as, je pense, remarqué que nous sommes très attirés par les textes classiques, que d'aucuns peuvent trouver ennuyeux. Ces étoiles et commentaires sont nos goûts, avec tout ce que cela a de "personnel". Mais je suis certaine que tu feras vite la part des choses !!
SupprimerLe programme du OFF pèse trois kilos !
RépondreSupprimerOui, à ma connaissance, l'aventure est ruineuse pour beaucoup de compagnies, elles plient bagages après expérimentation sur le terrain...
Le moindre petit "théâtre" prend 200 euros de minimum garanti par séance, plus un partage de recettes au delà du minimum...
Vive Avignon !!!
Bises du jour Michelaise et bon festival...
Les prix de locations des salles sont ébouriffants !! entre 5 000 et ... 90 000 euros selon la taille, la réputation, l'emplacement, les équipements etc etc !! et ce, pour une petite tranche horaire.
SupprimerN'empêche que 90 000 euros à 14 euros la place (tarif off moyen cette année) cela fait 6 428 places à vendre, rien que pour payer la salle... sur 21 jours, cela fait 306 places payantes PAR JOUR, sachant qu'il y a énormément de "presse" qui rentrent gratuitement. Et tout cela rien que pour payer la salle ... on ne parle des autres frais multiples, déjà énoncés (logement, transport des décors, décors, costumes, artistes, techniciens etc etc....) Or des salles qui font 300 places, il y en a fort peu !! Enfin, bref, je me demande comment ils s'en sortent, et, surtout, s'ils s'en sortent ????
Cupidité ? Rapacité ? Même dans la culture ? Pas une découverte tout de même ! Je regarderai Richard III, que vous avez vu en live, par la grâce du 'replay' de Arte Concert qui le met à disposition pendant quelque temps. Je sais, rien ne vaut le réel. Mais cela m'évitera de payer une turne hors de prix pour entretenir un commerce pillant sans vergogne aucune les intermittents du spectacle.
RépondreSupprimerVous commencez bien votre été chère Michelaise et peut-être même inaugurez-vous bien une nouvelle ère... point géologique !!!!!!!!!!
Que non, pas une découverte, mais à Avignon, c'est palpable. Et triste, pour tout le monde.
SupprimerVous me direz ce que vous pensez de Richard III : c'est une mise en scène finalement très classique, qui, malgré une allure a priori moderne, privilégie le texte, et qui est dit d'une façon sublime : la version filmée est de très belle qualité et rend particulièrement bien le jeu des acteurs.
Je n'inaugure pas encore, malheureusement, mais je pense à cette inauguration !!
Ben voilà Michelaise, comme tu le dis beaucoup beaucoup ne s'en sortent pas !!! j'en connais plein...
RépondreSupprimerBises du jour.