mercredi 16 avril 2008

BARBARESQUES

Temps magnifique ce matin, le soleil illumine enfin Venise et le palazzo Grassi où nous allons visiter « Rome et les Barbares ».

Après un capuccino onctueux dégusté dans l’inoubliable cafétéria du palais qui surplombe le grand canal, nous parcourons en riant les variations d’un poète à l’inspiration « allaisienne », sur le thème de la barbarie.

Les différents étages du palais abritent une passionnante exposition consacrée aux rapports économiques, politiques et religieux du monde romain avec les pays avoisinants d’abord envahis puis menaçants. Une trentaine de salles égrènent d’abord les victoires de Rome puis ses revers successifs, les incursions aux noms légendaires de plus en plus nombreuses, les invasions, les massacres et l’acculturation réciproque sur un millénaire. Réciproque car les barbares ne sont pas forcément sauvages et ils développent des techniques efficaces, voire raffinées.


On assiste aussi à la naissance du christianisme, à son combat pour s’imposer par rapport à l’arianisme et enfin à son triomphe, mêlé de pragmatisme et de mélanges divers. Ce sont finalement les fondements de la culture européenne qui sont évoqués là, au travers d’un parcours muséographique et didactique de première qualité, agrémenté d’œuvres splendides, parfaitement exposées et soigneusement juxtaposées. L’exposition a emprunté des pièces dans tous les musées d’Europe, trésors déterrés de tombes nobles, monuments, livres, statues, bijoux, ivoires, monnaies… et elle est ponctuée avec humour de tableaux XIXème, issus de cette mode picturale nostalgique des temps mérovingiens, propre à flatter les orgueils nationalistes de pays en veine de racines. Le parcours est long mais passionnant et nous l’avons accompli dans coup férir.

Au bout de 5 heures de cet épuisant périple, la salle blanche sur fond de Grand Canal de la cafétéria, était bienvenue ! Michel était enchanté car les tagliatelle étaient à peine cuites, et les vongole délicieuses.

Notre après-midi fut consacrée à rechercher les rayons de soleil sur les palais, à entrer dans les églises ouvertes pour admirer au passage quelques Bellini ou des Tiepolo et à visiter la Schuola degli Armeni. Michel avait en effet lu un livre de Michel Serre consacré aux toiles de Carpaccio, et j’avoue avoir un peu douché son enthousiasme en renâclant sur les interprétations philosophico-oiseuses de ce néophyte en histoire de l’art !

Sur la riva delgli schiavoni, Michel s’extasiait sur « le Barbare de service » devant la statue équestre de Victor Emmanuel, digne selon lui, sur fond de ciel ombrageux, d’un tableau Tintoresque. Un peu plus tard, on a vu s’intensifier des hordes de touristes épuisés suivant sans trop de conviction leurs guides harassés qui brandissaient des drapeaux multicolores pour tenter de rallier tout ce beau monde dans les bateaux destinés à les ramener à bon port. C’était l’heure où Venise se vide de ses Barbares envahisseurs, et s’il faut faire fraterniser italiens et espagnols pour y parvenir, qu’importe, le tout c’est de remplir les navettes.

La dernière intervention barbaresque de la journée, hormis l'inévitable barbarie faciste placardée sur chaque lieu de mémoire, nous attendait quelques ponts plus loin. Nous avons vu tous les vendeurs à la sauvette ramasser leurs étals, entasser leurs lunettes dans de grands sacs, empoigner leurs ceintures faussement Gucci et leurs sacs mensongèrement Dior et commencer à se replier doucement vers les jardins de la Biennale. Ils hésitaient, s’interrogeaient les uns les autres, riaient, hésitaient… mais le mouvement allait s’amplifiant. Soudain, quatre carabiniers flambant rutilants ont surgi, se sont dirigés fermement vers un isolé qui n’avait rien replié, et s’emparant des sacs et autres valises qui s’étalaient devant lui, l’ont emmené sans autre forme de procès, ignorant superbement ses concurrents évanouis comme une nuée de moineaux. De l’autre bout du quai, nous avons vu une troupe rieuse dévaler le pont près duquel nous regardions les forces de l’ordre repartir nonchalamment en agitant leurs trophées. Puis, voyant que les carabiniers s’éloignaient en sens inverse, reprendre doucement le chemin de leurs places respectives pour redéployer leurs petits étalages.

Quand la nuit est tombée, la fraîcheur légendaire de Venise nous a brutalement saisis et un repli stratégique sur l’appartement s’imposait, comme s’imposait un apéro réparateur. Mais soulée au Malvoisie, vin liquoreux de Sicile qui ne titre pas moins de 16 degrés et qu’il fallait finir puisque nous partons demain, je me suis révélée incapable de rejoindre même le plus proche resto, car, comble d’ironie, c’était ce soir jour de fermeture de celui que tu nous indiqué, Marie… on n’est vraiment pas doués, et demain à midi c’est encore fermé ! Bref, on testera ton adresse une autre fois ! Comme cela, nous serons bien obligés de revenir !

2 commentaires:

  1. dis moi, il avait l'air bien agréable ce petit voyage... et si en plus vous avez réussi à trouver quelques rayons de soleil !!!
    bisous

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  2. je t'ai acheté un ti KDO... un joli petit guide de Venise pour enfants, afin de faire des progrès en italien et surtout d'organiser une virée sympa avec ton amoureux !!! parce que c'est quand même pénible tous ces gens qui vont à Venise, et Lénou qui reste dans les vapeurs parisiennes !!!

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