František Mertl, plus connu sous son « nom de pinceau » Franta, est né en 1930 à Třebíč, en Tchécoslovaquie. Il fait des études artistiques aux Beaux Arts de Parguer et au début des années 50 au cours d’un séjour en Italie, à Perugia, il rencontre sa future femme. De retour en Tchécoslovaquie, il désire la rejoindre à Paris. La police lui ayant confisqué son passeport en décidant que c’était sa première et dernière sortie du pays, Jacqueline vient le voir à Prague, mais leur mariage semble impossible : elle vient d’un pays capitaliste, elle est d’origine bourgeoise... pire, elle est née en Algérie, donc issue d’un pays « colonisateur » et, comble, elle est juive... Apprenant que l’Académie des Beaux-Arts se préparait un voyage en RDA, il s’inscrit. A l’époque le mur de Berlin n’est pas encore construit... Il réussit à se détacher du groupe et à se cacher. Il retrouve Jacqueline à Nice, où il reçoit un accueil chaleureux de la part de la famille de sa future épouse et décide de rester. Il lui faut faire refaire ses papiers. On le prend pour un espion. Mais il lui arrive une chose incroyable. Le fonctionnaire qui reçoit sa demande, voyant son nom, lui demande : « Mertl ? Est-ce que Miloš Mertl est quelqu’un de votre famille ? ». Miloš Mertl est le père du peintre, et le policier le connaissait : il avait été dans l’armée avec lui !
En France, il peut se consacrer à la peinture. Les débuts sont difficiles car dans les années 1950-1960, en France, c’est surtout la peinture abstraite qui domine. Or Franta fait de la peinture figurative. Il continue sur ce registre et peint l’Homme, ses douleurs, ses errances. Pétri d’influences classiques, il admire Michelangelo, Giotto, Mantegna. Il rencontre Picasso, Miro, Tapiès… L’œuvre de Francis Bacon l’influence nettement à ses débuts : ses premières œuvres sont farouches, virulentes, déchirées et déchirantes.
Puis dans les années 1980, alors des amis lui font découvrir en Afrique, sa vision de l’homme est totalement bouleversée. Voir l’homme dans sa version originelle, dans sa nudité, si on peut dire, voir la simplicité des rapports, mais aussi leur force, le fait revenir vers le dessin. Connaissant très bien l’anatomie qu’il a étudiée à fond aux Beaux-Arts, il recommence à dessiner l’homme dans ses détails. Et à travers ces détails, il nous parle de l'âme. Il est peintre, sculpteur, dessinateur. Son trait est fort, charnu, charnel, violent parfois. Son sujet essentiel reste la condition humaine. Autour de ces images puissantes, il développe des thèmes moins cruels qu’au début de sa carrière. Les corps amoureux succèdent aux charniers européens. L’Afrique Noire lui révèle une autre civilisation, celle de la terre des origines : un Eden nostalgique, libéré de toute trace d’occidentalisation, transparaît dans ses toiles. La peinture cruelle des années soixante-dix s’efface pour laisser place à une approche du corps moins mortifère, plus charnelle.
Puis, à partir des années 1990, il va mettre en parallèle cette Afrique avec celle de l’exil, celle de l’autre continent, l’Amérique. Ses paysages urbains du Bronx et de Harlem parlent du déracinement et de l'exclusion. L’humanité que nous montre Franta est fragile, menacée. Son regard reste critique, inquiet, comme une sorte de résistance au silence de notre sur-communication médiatisée. Il nous offre sa vision passionnée de l’homme en contradiction permanente entre désir et douleur.
« L’observation de l’homme dans toute la nudité de sa condition a toujours été pour moi la matière première : l’homme, ses rapports avec ce qui l’entoure, ses pulsions, ses motivations, efforts frénétiques pour survivre. Je n’arrêterai pas de croire que l’art reste encore un moyen de toucher les niveaux les plus profonds de notre conscience parce que, malgré les progrès de la technique, l’homme porte en lui les terreurs du primitif ».
L'exposition du Saint James présentait des toiles récentes, fortes mais apaisées, et des sculptures plus difficiles, un peu éclatées, encore déchirées. La découverte de cet artiste figuratif sans doute de premier plan dans le monde actuel a été un moment très intense et nous avons beaucoup appris en "lisant" ses toiles. Difficiles mais belles. Je vous en livre quelques photos imparfaites, mais n'hésitez pas à visiter son site, qui présente nombre d'oeuvres parmi celles que nous avons pu admirer à Bouliac.
En France, il peut se consacrer à la peinture. Les débuts sont difficiles car dans les années 1950-1960, en France, c’est surtout la peinture abstraite qui domine. Or Franta fait de la peinture figurative. Il continue sur ce registre et peint l’Homme, ses douleurs, ses errances. Pétri d’influences classiques, il admire Michelangelo, Giotto, Mantegna. Il rencontre Picasso, Miro, Tapiès… L’œuvre de Francis Bacon l’influence nettement à ses débuts : ses premières œuvres sont farouches, virulentes, déchirées et déchirantes.
Puis dans les années 1980, alors des amis lui font découvrir en Afrique, sa vision de l’homme est totalement bouleversée. Voir l’homme dans sa version originelle, dans sa nudité, si on peut dire, voir la simplicité des rapports, mais aussi leur force, le fait revenir vers le dessin. Connaissant très bien l’anatomie qu’il a étudiée à fond aux Beaux-Arts, il recommence à dessiner l’homme dans ses détails. Et à travers ces détails, il nous parle de l'âme. Il est peintre, sculpteur, dessinateur. Son trait est fort, charnu, charnel, violent parfois. Son sujet essentiel reste la condition humaine. Autour de ces images puissantes, il développe des thèmes moins cruels qu’au début de sa carrière. Les corps amoureux succèdent aux charniers européens. L’Afrique Noire lui révèle une autre civilisation, celle de la terre des origines : un Eden nostalgique, libéré de toute trace d’occidentalisation, transparaît dans ses toiles. La peinture cruelle des années soixante-dix s’efface pour laisser place à une approche du corps moins mortifère, plus charnelle.
Puis, à partir des années 1990, il va mettre en parallèle cette Afrique avec celle de l’exil, celle de l’autre continent, l’Amérique. Ses paysages urbains du Bronx et de Harlem parlent du déracinement et de l'exclusion. L’humanité que nous montre Franta est fragile, menacée. Son regard reste critique, inquiet, comme une sorte de résistance au silence de notre sur-communication médiatisée. Il nous offre sa vision passionnée de l’homme en contradiction permanente entre désir et douleur.
« L’observation de l’homme dans toute la nudité de sa condition a toujours été pour moi la matière première : l’homme, ses rapports avec ce qui l’entoure, ses pulsions, ses motivations, efforts frénétiques pour survivre. Je n’arrêterai pas de croire que l’art reste encore un moyen de toucher les niveaux les plus profonds de notre conscience parce que, malgré les progrès de la technique, l’homme porte en lui les terreurs du primitif ».
L'exposition du Saint James présentait des toiles récentes, fortes mais apaisées, et des sculptures plus difficiles, un peu éclatées, encore déchirées. La découverte de cet artiste figuratif sans doute de premier plan dans le monde actuel a été un moment très intense et nous avons beaucoup appris en "lisant" ses toiles. Difficiles mais belles. Je vous en livre quelques photos imparfaites, mais n'hésitez pas à visiter son site, qui présente nombre d'oeuvres parmi celles que nous avons pu admirer à Bouliac.
Bravo pour ce billet si complet ! Ce peintre est inconnu pour moi mais je pense qu'il nous amène à une réflexion sur la condition humaine et sa représentation du corps est originale jusque dans le choix des couleurs...
RépondreSupprimerMerci pour ce billet si érudit comme tu sais nous en offrir régulièrement !
Merci pour cette notice très riche (le plaisir que tu as eu à l'écrire est palpable), pour cette visite passionnante du Saint-James et pour la découverte des oeuvres grâce aux nombreuses photos qui émaillent ton récit. Je n'avais jamais entendu parler de cet artiste, je fais faire désormais très attention à ce nom...
RépondreSupprimerApaisées ,je trouve qu'il faut le dire vite comme on dit!!!
RépondreSupprimerMais c'est vrai que par rapport à ses débuts§
J'avais pu voir deux expositions à Paris ,il y a trois dans le Marais.
Je me souviens que j'avais été saisie par la cruauté parfois qui transpirait à travers certaines de ses toiles c'est du moins ce que j'avais noté sur mon carnet (toujours lui)
La condition humaine est son tourment majeur avait dit le directeur du Musée Guggenheim de NY
Enitram, en fait je m'"érudise" pour mieux comprendre et aussi pour partager avec vous un peu plus qu'une vague impression !!! c'est génial pour ça les blogs
RépondreSupprimerJMV l'artiste est attachant quoique difficile car son choix de la figuration est, actuellement, courageux... ses oeuvres sont dures mais fortes... si tu le croises, cela vaut la peine de vous y arrêter Pierre et toi !
Aloïs, tu t'en doutes, je n'ai pas vu pour de vrai ses premières oeuvres, j'ai feuilleté des monographies le présentant sur place. Et c'est vrai qu'il y a peu encore, ses toiles étaient déchirantes, presque gores (??? je ne sais si j'emploie le terme à bon escient, Koka a beaucoup de mal à faire mon éducation !)... A Bouliac, des toiles récentes, de sa période "vide" c'est à dire sans humain, et africaines, celles que j'ai mis sont calmes... sa maternité est poignante, même si les tons, de vert et de noir mêlés sont peu séduisants. Mais il ne peint pas pour séduire, c'est clair !
itou pour moi je ne connaissais pas ce peintre et je suis sensible à la peinture puisque je pratique aussi lorsque la photo me laisse en paix. Je viens d'acheter le livre de Gérard Garouste, peintre que j'aime beaucoup, malgré ses délires ! merci pour ce billet fourni de détails.
RépondreSupprimerAllons bon Gérard, te voilà peintre à tes heures creuses... qui doivent être rares, mais précieuses.
RépondreSupprimerBon anniversaire Gérard, que la journée te soit douce et pleine d'inspiration.
Gérard Garouste, un nom qui me disait quelque chose, peut-être simplement sa consonance du sud-ouest... je suis allée voir su le net, et j'ai aiùé de style figuratif un peu déjanté et plein d'humour !
merci Michelaise oui je peins un peu pas assez à mon goût, la photo et le cyclisme me prennent beaucoup de temps.
RépondreSupprimerMon avant dernière ;
http://photoplap.over-blog.com/article-34468873.html
Bonne nuit
Avec une vie si riche en expériences, il ne faut pas s'étonner que ses œuvres semblent si fortes !
RépondreSupprimerMerci pour cet article vraiment passionnant Michelaise.
mais ça se défend très sérieusement Gérard ce que tu fais ! bravo... vivement que tu puisses t'y consacrer un peu plus, mais le reste doit déjà te prendre pas mal
RépondreSupprimerAstheval, merci à toi de ta fidélité !!
Merci Michelaise, pour ce reportage passionnant. Je découvre grâce à vous ce peintre aux oeuvres très directes. Je pense que la peinture et la figuration ont encore des choses à dire; ces tableaux nous le prouvent.
RépondreSupprimerAnne
Moi non plus je ne connaissais pas ce peintre, si bien décrit dans ton billet.
RépondreSupprimerVive les retrouvailles !
Béatrice.
Suis allée voir son site. Son tourment fait résonance à celui de Francis Bacon.
RépondreSupprimerBéatrice
Je découvre sous ta "plume" toujours aussi précise ce peintre que je ne connaissais pas du tout. Ces oeuvres semblent peintes avec le coeur et si j'osais... avec "les tripes". Elles sont d'une force qui transparaît nettement sous le pinceau.
RépondreSupprimerMerci à toi pour cette présentation si complète et si intéressante de l'homme et de son oeuvre.
Oui Béatrice ses premières toiles sont très proches de Bacon, et dures... impitoyables
RépondreSupprimerMichelaise, ton coup de pinceau est très riche en huile! Le temps me bourrasque pis qu'une tempête, ce qui m'empêche de me nourrir de tes enquêtes et méditations. Ce peintre figuratif sait où sont les muscles tandis que tant d'autres étalent leurs inspirations tant et tant qu'on ne s'y retrouve plus.
RépondreSupprimerChaboum se "livre":
www.editionscarlbeaupre.com