lundi 12 juillet 2010

BONS BAISERS D'AVIGNON

Après "l’Amante anglaise" de Duras (Succès Avignon 2008 et 2009), la Cie vous présente sa 12ème création. Dans un atelier de recyclage de papiers, Georges et Bobby attendent Betty, amie de jeunesse, revenue au pays après 13 ans d’absence.Elle a changé, elle a réussi. Ces retrouvailles teintées de tendresse faussement romantique, de jeux puérils et absurdes laissent percevoir un terrible drame passé sous silence que les années n’ont pas effacé. L‘héroïne vengeresse tisse la toile de son macabre scénario. Et le pire c’est qu’on rit… "Une troupe à suivre et à ne pas lâcher" Avignews

La minuscule salle de l'Isle 80 était comble pour ce Horowitz cruel mais terriblement efficace, histoire d'une vengeance, histoire d'une souffrance que rien ne peut adoucir, joué avec un réel talent par un trio efficace.   Delry Guyon en bélier hargneux qui ne cesse de vouloir donner des "coups de boule", et finit en larmes sur son passé gâché, sa seule chance d'amour entrevue, gaspillée. Stéphane Bénazet, demeuré, soi-disant faible et gentil, qui se révèle une brute constitutive. Et Sylvia Bruyant, à la voix superbe, timbre velouté et diction parfaite, qui incarne avec sensibilité la femme blessée, usée, démolie par la sauvagerie des hommes. Un tel talent que nous avons envie de les revoir ailleurs !!


Deux maîtres et leurs valets échouent sur une île où on leur impose d’échanger leurs rôles. Les valets, devenus maîtres, se jettent sur l’occasion de régler leurs comptes dans une soif de vengeance et d’humiliation. C’est donc là la nature humaine ? Ressentiment, dépit, cruauté ? Oui, sans aucun doute… Marivaux déroule pour nous cette comédie philosophique avec une audace désenchantée. Car vous y rirez, effarés que vous serez de vous trouver si ressemblants. Une œuvre troublante.

Pas vraiment un marivaudage, comme le soulignait un spectateur déçu, à la sortie. Et un final tout en baisers enfin échangés, mais après une longue et douloureuse période de remise en question et de tiraillements aigus de l'ego. Et la tonalité politique l'emporte sur la tonalité comique, bien présente et parfaitement assumée par la compagnie "Ici et maintenant théâtre". L’Île des esclaves est une comédie en un acte (11 scènes) et en prose de Marivaux qui fut représentée pour la première fois le lundi 5 mars 1725 qui oscille entre l'utopie et la comédie de moeurs. Qualifiée par Beaumarchais de "petit bijou", elle a dû étonner les gens du 18ème débutant par son côté franchement visionnaire, une vision qui n'était pas encore perceptible dans l'imagination des beaux esprits de 1725. Certes L’île des esclaves exploite le thème des Saturnales, fêtes de la Rome antique où, pendant un temps très court, les esclaves étaient libérés de leur servitude et changeaient de rôle avec leurs maîtres. Cette tradition s’est perpétuée dans le carnaval qui permet, un court moment, de lever les interdits communautaires afin de libérer dans l’anonymat les frustrations dommageables à l’ordre social. La référence à cette tradition populaire adoucit quelque peu la critique sociale que contient cette comédie, placée en un temps indistinct, dans un lieu imprécis Cette île laboratoire dans laquelle on teste de nouveaux rapports sociaux fait figure de clinique où thérapeute, omniscient, pédagogue mais  un peu fou se livre à une expérience qui, heureusement, finit bien. Il s'agit de corriger les nobles de leurs frivolités et de leurs ridicules, et surtout de leur permettre de s'amender et de progresser par l'exemple d'humanité, de bonté et de raison que leur offrent leurs valets.
La mise en scène était parfaite. Articulée autour de 4 plateaux mouvants, aux marques de labyrinthe se redessinant sans cesse comme une situation en évolution, tournés avec modération par les acteurs pour modifier à loisir l'espace scénique, elle s'animait grâce à des éclairages somptueux et précis. Une musique jouée en direct sur un piano numérique à la jolie sonorité et idéalement adaptée au texte ponctuait fort à point chaque scène. Les acteurs, vifs, précis, justes, servaient avec habileté le texte de Marivaux, sans le trahir, en lui donnant relief et modernité. C'est drôle, enjoué, grave et plaisant à souhait. Encore un spectacle à voir et à recommander !


V. Havel, emprisonné de 1979 à 1982 donne une leçon de RESISTANCE face à l’oppression du régime de l’ex-Tchécoslovaquie. Comment en sortir indemne? D’images en images et de lettre en lettre, ce spectacle nous fait entrer dans l’univers mental et intime du prisonnier, sur Olga sa compagne, sur le théâtre…

Témoin de ses états d’âmes et préoccupations existentielles, le spectateur assiste aux aventures spirituelles issues du malheur de la détention et destinées à la sublimer et à bâtir un monde d’une extraordinaire liberté.
 
La compagnie de Marmande dirigée par Jean Pierre Plazas nous a déjà, les années dernières, offert quelques Havel, que nous avons d'ailleurs plus ou moins découvert grâce à elle. Le vernissage, l'audience étaient des pièces. Les lettres à Olga sont plutôt un essai. Koka, lisant l'argument, a manifesté une certaine perplexité : "Encore ?" et nous lui avons répondu "Que veux-tu, nous avons grandi et baigné là-dedans, ce sont des thèmes qui nous tiennent à coeur". Démodés peut-être et pourtant universel et qu'il faut avoir le courage de sseriner pour que l''Homme n'oublie pas ses capacités de grandeur, souvent enfouies au plus profond de lui et que seuls les événements tragiques lui font découvrir.
Ce spectacle n'est pas une pièce de théâtre, bien que Plazas soit un excellent acteur. C'est un hommage à Vaclav et à Olga, Plazas lit les lettres que celui-là écrivit à son épouse durant son deuxième internement, en 79/82. On y croise de petites angoisses, des moments d'attendrissement, des inquiétudes vite maitrisées et beaucoup d'amour, pour elle, pour la vie, pour la liberté, pour l'homme en géénral. Entrecoupée de photos et de petits montages, cette lecture vivante, vibrante, sentie, est très émouvante. En effet, le metteur en scène a recontré plusieurs fois Havel, l'a apprécié, et a monté ce spectacle par amitié. Invité en tchéquie pour présenter son oeuvre, Plazas en est revenu encore plus imprégné de l'esprit d'Havel et sa représentation y gagne encore en vérité.
Et puis, avec Lux in Tenebris, la représentation se termine toujours avec une petite déhustation de Buzet bien frais, hier soir un bon petit blanc, qui donne à cet instant partagé encore plus de valeur. Si vous cherchez un bon spectacle en Avignon, pas prise de tête, dans une salle fraiche et qui porte son poids d'humanité, n'hésitez pas... pub d'autant plus nécessaire que les organisateurs du festival ont fait une erreur sur le programme : le téléphone  indiqué est faux et cela porte un tort extrême à la troupe. Réparez cette injustice, et faites du bouche à oreille. Il faut les aider ! Alllze-y, c'est au théâtre des Vents, pas très loin de la Luna.
 
 
"Je suis juste là‚ j’ouvre les yeux‚ je les referme et je ne sais rien‚ je ne pense rien‚ je ne sais pas‚ je ne peux rien dire‚ je ne sais pas si je suis bien ou mal. Je suis juste là".J.L.Lagarce

Du pur théâtre LE FIGARO
A. Macé excelle LIBÉRATION
Drôlatique et percutant L’HUMANITÉ
les couleurs de la vie JDD
Bouleversant LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN
Du théâtre, et du meilleur FRANCE INTER
Lagarce magnifiquement servi TÉLÉRAMA
Une belle délicatesse LE FIGARO MAGAZINE
Superbe LE NOUVEL OBS
fascinant POLITIS
Exceptionnel LE POINT
Triste et drôle PARISCOPE
Lagarce dans toute sa splendeur ELLE
Remarquable LA TERRASSE

Avec Lagarce, la critique parisienne est toujours superlative et on va voir ses pièces en se méfiant toujours un peu car le consensus est terriblement habituel. La salle était archi-comble et j'ai rarement autant souffert de la chaleur à Avignon, pourtant en la matière notre expérience est riche !
C'était un Lagarce, ces phrases insignifiantes, répétées à l'infini, dérisoires mais qui, à force d'accumulation et de banalité finissent par aligner leur poids de tragédie humaine. Il est dans le coma, il sort petit à petit du coma, et décrit cet univers semin-carcéral à l'on est pris en charge, sauvé mais aussi déshumanisé. Comme un enfant, comme un imbécile ou comme un vieillard dont on n'aurait pas vu qu'il devenait sénile. L'acteur réalise, avec ce texte ingrat et répétitif, une véritable performance, le ton est sans emphase, la boucle se tortille bien autour de notre esprit engourdi, qui peu à peu partage l'horreur de la situation et les rires idiots du public en quête de vaudeville s'éteignent doucement. C'est dur, un peu angoissant, vaguement inhumain mais magnifique.

2 commentaires:

  1. J'aurais beaucoup aimé assister à ces spectacles que tu décris. Les thèmes abordés semblent riches et ton billet donne vraiment envie de découvrir ces éclairages particuliers.

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  2. NEXT TIME, penses à moi! je veux bien venir et tenir dans tes valises!

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