mardi 7 décembre 2010

TOUT UN ART !

Miss Lemon nous propose pour entamer la semaine un parcours initiatique, destiné à nous donner du coeur à l'ouvrage. Fin de week-end, c'est effectivement le collier à reprendre, les idées à remettre en état de fonctionnement rationnel, plus de laisser-aller, on quitte le jean, on chausse les escarpins et à l'attaque.
Fin de week-end, c'est aussi le frigo qui ressemble à un placard à l'ancienne mode, tout encombré de petits bols. Peut-être pratiquez-vous le Tupperware, j'avoue y avoir, très jeune, fait une allergie monumentale car maman était une ardente de ces réunions entre dames où l'on papotait autour d'un gros gateau, en achetant à prix d'or des tonnes de boîtes en plastique aux vertus supposées magiques. Etrange cette mode des boîtes de haute conservation à une époque où la vertu domestique n'était déjà plus à l'art d'accomoder les restes. Tant et si bien d'ailleurs, que le fabricant en question se reconvertit très vite vers le moule, le pichet, la cave à fromage et le presse-purée. Les placards de maman débordaient d'ustensiles multicolores, qui chutaient dès qu'on ouvrait la porte. A l'époque c'était d'ailleurs plutôt à dominante blanche, ça vieillissait mal, le plastique devenait pisseux, se rapait et prenait vite des odeurs suspectes.
Donc pas de Tupperware à la maison, et je range tout dans des "petits bols", même pas recouverts d'une feuille de scellofrais, car mon frigo est ventilé et que moi, je suis flemmarde. Aucun problème d'odeur ni d'imprégnation réciproques de saveurs. Et après un week-end ordinaire, où l'on s'est "mise en cuisine" de différentes manières, c'est le royaume du petit bol. Car, éducation traditionnelle oblige, on ne jette pas. Au point que les quignons de pain transitent par un sac spécial avant de se transformer en soupe pour le chien, patée pour les poules du voisin ou parfois fond de farce pour des plats délicieux.
Les restes, c'est en fait tout un progamme : il y a ceux qu'on grignote tels quels, froids, sur le pouce, parce qu'on n'a pas le temps de se préparer quelque chose, pilon de poulet froid dévoré à la barbare ou fin de salade à manger debout dans un coin de cuisine en faisant autre chose.
Il y a ceux qu'on ressert le soir ou le lendemain, sans autre forme de procès, ou avec une simple mise en forme pour les rendre plus attrayants : reste de quiche recyclé en bouchées apéritif,  légumes de pot au feu assaisonnés en salade, gratin réchauffé en rallonge au légume du jour, bref on trouve chaque fois une idée nouvelle. Parfois on les réchauffe, parfois même on les mange froid, cela donne une entrée facile et rapide, et le goût est totalement différent : une ratatouille froide avec quelques olives noires et un filet d'huile d'olive, un reste de brandade avec un zeste de citron, un gratin de chou-fleur avec quelques brins de ciboulette, un bol de bouillon bien dégraissé mais glacé, le choix est vaste !
Il y a ensuite ceux qu'on rallonge : le bol de soupe aux carottes, rajouté à la nouvelle soupe du jour qui, elle, est aux broccolis, c'est une façon évidente de "noyer le poisson". Le seul inconvénient, c'est que si l'on fait ça chaque jour, à la fin de la semaine votre soupe a une couleur peu engageante et finit par se composer de restes fort anciens et un peu dépassés. Je cite la soupe parce que c'est de saison, mais l'usage est le même avec les salades composées qui, à force d'être rallongées finissent par présenter une gamme incroyablement compliquée d'ingrédients. Et si c'est particulièrement bon, pas moyen de retrouver la recette, elle était aléatoire !
Il y a aussi les restes qu'on mijote : ceux mêmes qu'on a prévu dès la confection inititale du plat, car l'usage veut que "ce soit encore meilleur quand c'est réchauffé". Il en est ainsi de la cuisine traditionnelle de plats en sauce, daubes, ragoûts et autres blanquettes. L'accessoire devient le principal, et plus c'est recuit, meilleur c'est. Le seul souci étant qu'en général, cela disparait trop vite de nos étagères frigorifiées. Koka vous dira que les restes de rognon au madère sont icic tellement insignifiants que nous avons dû édicter une régle absolue et incontournable : ils sont et restent sa propriété exclusive, ce qui est une nécessité, car il y en a rarement plus d'une part pour le lendemain.

Et enfin, cerise sur le gâteau, il y a les restes qu'on accomode. Nous avions toutes, dans les livres de cuisine de notre jeunesse, un chapitre exclusif sur l'art d'accomoder les restes. Du hachis parmentier à base de pot au feu du lendemain, au pain perdu avec ou sans confiture de groseille, mon dernier billet sur les légumes farcis a prouvé s'il en était besoin que nous avions tous appris cette subtile façon de faire du neuf avec du vieux. Il suffit souvent d'un peu d'imagination pour combiner les tombées de la veille, et les résultats sont à la hauteur de l'économie réalisée. Et ce reste cuisiné, bien souvent aussi attendu que le plat principal, ne vous avisez pas de l'oublier au risque de vous faire rappeler à l'ordre. Alter à midi m'a sussuré, l'air de ne pas y toucher, "je croyais qu'il y avait un reste de mique". "Oui, oui, ce sera pour ce soir !"
Car c'est finalement le reflet d'une époque un peu révolue, celle d'un sens de l'économie qui réprouvait le gaspillage, celle aussi d'un temps où l'on ne tremblait pas sans cesse de provoquer des catastrophes sanitaires, alors qu'on n'avait pourtant pas des moyens de conservation aussi sophistiqués qu'aujourd'hui. Une époque où l'on prenait aussi le temps d'apprêter les aliments pour en faire une fête pour les convives, malgré la pauvreté du matériau de base. Bref, c'est vaguement démodé mais tellement réjouissant de jongler avec 6 bols pour concocter un riz qui n'a plus que de cantonnais que le nom. Et j'avoue humblement que j'ai toujours du mal à maîtriser un mouvement de recul chaque fois que je croise les poubelles débordantes de mets non entamés derrière le self service du lycée. J'ai beau savoir qu'elles iront tout droit à la SPA la plus proche, je ne peux m'empêcher de penser que dans nos pays riches 30 à 40% de la nourriture est jetée sans avoir été consommée. Et je ne parle pas des produits déclassés pour "limite de date" que certains récupèrent, avec ou sans honte, dans les containers de supermarchés, quand ceux-ci leur en laisse le loisir.

 
Je suis désolée, c'est précédé d'environ une minute de publicité, mais c'est édifiant ! Si vous avez le temps... cette vidéo dure environ 6 minutes.

15 commentaires:

  1. Il y a ceux qu'on ressert le soir ou le lendemain,

    Il y a aussi les restes qu'on mijote

    quelle différence entre les deux ?

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  2. Nous avons appris, vécu le "On ne jette rien" et il est vrai que rarement, je jette quelque chose.
    C´est tout simplement une organisation.

    Bonne semaine.

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  3. Et voilà comment avec six bols qui se battent en duel notre Michelaise nous fait saliver!!!
    Je ris franchement car tu entrerais dans ma cuisine tu ne serais pas dépaysée.
    Moi qui suis encore plus flemmarde ces restes sont dans des raviers sur le plan de travail.
    Self service,help yourself!!
    Ce soir au menu un reste de potage d'hier additionné de restes de potages d'il y a .....Mis dans des pots à confiture et au congélateur!!
    Soyez gentils Alter et toi,attendez moi j'arrive pour les restes de mique,et là tout le monde va se demander après quoi je cours?
    C'est une histoire de lotois!

    Les dates de péremption,cela me hérisse....
    Quand aux produits qui parce qu'ils ont été sortis du froid ont éventuellement croisé le sale doivent passer aux oubliettes...
    J'ai mis en place un système qui ne fonctionne pas trop mal.
    Je demande que les étagères du self soient approvisionnées au fur et à mesure et que ce qui reste de compotes,fromages,desserts soient proposés au goÛter,j'ai ainsi évité les pots de pâte à tartiner à la noisette et autres cochonneries pour la santé et le porte- monnaie
    Bon ce n'est pas tout,mais il faut que j'aille accommoder les restes!

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  4. AH si Gérard, y a une différence ; ceux qu'on ressert, c'est parce qu'on ne les avait pas terminés et on les présente tels quels. Les "qu'on mijote", on avait soigneusement évité de terminer le plat parce qu'on sait que "cest meilleur réchauffé" !!! bien sûr je plaisante, mais les premiers sont pour tous les plats, les seconds ce sont ces fameux plats en sauce qui recuisent si bien !
    Mais oui, ALba, c'est une question d'organisation mais aussi d'habitude : certains jettent les restents et il ne leur vient même pas à l'idée qu'on puisse en faire autre chose que poubelle !
    Aloïs, je te reconnais bien là, les dates de péremption ici c'est la bouteille à l'encre... c'est le nez qui fonctionne ! sauf pour les "z'invités", surtout quand je sais qu'ils jettent les yaourts la veille du jour de péremption, je soigne mon frigo en leur honneur. Pour la mique, ma belle, je suis DESOLEE (faux cul oui !!!) mais y en a plus ... deux tournées en pain perdu du lendemain, quel délice ! on t'attend pour la prochaine ou une prochaine, car on s'entraine en t'attendant. C'est même toi qui la pétrira comme ça, tu sauras faire !

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  5. J'ai adoré ton article Michelaise ! j'aurais pu écrire la même chose ou presque (la mique exceptée !!!) parce que c'est toute mon enfance qui me revient à la mémoire, mais tu le fais tellement mieux que je n'aurais pu le faire... curieusement j'ai rarement des restes sauf quelques plats dont on sait qu'ils seront encore meilleurs réchauffés et que tant qu'à cuisiner ce genre de plat, blanquette et autres mijotés, autant en faire pour plusieurs fois, sinon je fais sans vraiment le calculer toujours ou presque juste ce qu'il faut, mes filles et mon mari m'en taquinent d'ailleurs parfois...

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  6. Quand je visite une cantine scolaire et que je vois tout ce qui est gaspillé par les gamins, en dépit des choix proposés, tout ce qui, en conséquence, va être jeté, cela me met dans une rage folle...
    Il y a bien 2/3 de la population mondiale qui ne mange pas à sa faim, non ?

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  7. c'est fou Norma, l'éducation culinaire est vraiment difficile à assurer : ici, nous avons une "chef" remarquable, qui fait une cusine originale, savoureuse, équilibrée, un vrai cordon bleu... une formation aux goûts fantastique. Si tu savais les refus qu'elle essuie de la part des jeunes ! ils ne veulent que des frites. Bref, un vrai carnage en matière de poubelles.
    Catherine, je ne sais comment tu fais pour faire "juste" ce qu'il faut, mais je dois avoir tendance à avoir "peur de manquer" car il y en a toujours trop ! faut dire que quand on est que 2, les quantités ce n'est pas évident. Bref, vivent les restes !

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  8. Nous avons les mêmes colères devant ces gaspillages. Mais, comment "éduquer" nos jeunes pour qui les privations, la guerre, la faim, ne sont le plus souvent que virtualité ?
    Les pubs pour McDo ou Quick, pour le grignottage, ont fait des ravages: elles ont participé de la "marchandisation" de la nourriture. On la prend, on la jette, comme n'importe quel objet.

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  9. Quand j'étais petite, on ne jetait rien, et maman faisait en sorte qu'il ne reste pas grand chose ! Je crois avoir gardé cette habitude et quand j'ai des restes, je les accommode d'une autre façon le lendemain. Je suis plutôt Tupperware !

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  10. Comme chez Catherine, il n'y a pas de restes ou rarement.
    J'envie vos qualités culinaires...ici c'est plutôt diététique, mais on ne gaspille pas.

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  11. Bonjour, Michelaise.

    Finalement, ce sont les restes qui comptent....
    Heureusement qu'il y a l'essentiel pour les créér...
    De l'Art d'accommoder les restes...
    Lire ton billet.
    Savoureux.
    Je t'embrasse.

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  12. Ah... cet art d'accomoder les restes... je n'ai pas trop l'occasion de l'appliquer en ce moment, mon frigo étant quasiment vide à part du fromage et quelques pots de confiture !
    Bisous

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  13. J'ai bien pensé à toi à midi en sortant mon petit reste de sauce tomate maison du frigo, je l'ai simplement tartiné sur une tranche de pain et savouré tel que...

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  14. A la maison aussi, il y avait un placard à Tupperwares. C'était une catastrophe ! Non seulement la moitié des boîtes en tombait dès qu'on l'ouvrait mais en plus, il fallait retrouver le couvercle adapté qui bien sûr, restait caché dans le fond ! Une fois le couple couvercle/boîte retrouvé, il fallait encore remettre ce qui était tombé dans le placard puis parvenir à faire coulisser la porte, ce qui n'était pas une mince affaire puisqu'un Tupperware choisissait toujours de se placer sur le rail...
    Une vraie galère !!!!

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  15. C'est vrai Astheval, j'avais oublié la sage des couvercles !! et en plus, stressante la quête du bon couvercle car si c'était pour finir par mettre le tpperware non fermé dans le frigo, on avait l'air idiot ! d'autant que ces machins étaient hors de prix, enfin de mon temps, aujourd'hui je n'en sais rien

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