Ce jour-là, Gérard s'était fait lyrique sur son blog : il nous annonçait une série de concerts organisés au Domaine Musical de Pétignac autour d'un thème aussi évocateur que porteur : le Rouge et le Noir. Un peu comme les cathos font, au moment des fêtes religieuses, voyager d'une maison à l'autre des statues de saints ou de Vierge, accueillies en grande pompe et célébrées avec le faste qui s'impose par les fidèles, la maison Steinway & Sons propose à ses plus dévoués revendeurs, un piano mythique : le grand Steinway de concert, D274, rouge Ferrari, qui permet à chacun d'organiser autour de l'événement des manifestations hautes en couleur (evidemment !) et fort bien ciblées.
Accueillir cet instrument rutilant au mois de décembre aurait pu inspirer à Gérard une idée de rouge et vert, un peu genre sapin de Noël alsacien (il est originaire de cette belle région). Que nenni, notre ami Gérard est un grand romantique, enfin entre autres, et l'habitude de cotoyer le noir profond de ses claviers habituels, lui a donné cette inspiration stendhalienne, fort propre à mobiliser ses fidèles amis. Ils sont venus en masse, malgré les frimas, malgré les routes impraticcables, pour cette série de concerts privés et exceptionnels. Il faut dire que le programme était à la hauteur de l'événement : après un duel de pianiste entre Julien Opic et Olivier Rivière, il y eut un trio piano, viole et clarinette, puis une "carte rouge" au jazzman Jacky Terrasson, et hier soir, clou de l'aventure, un concert France Clidat.
Accueillir cet instrument rutilant au mois de décembre aurait pu inspirer à Gérard une idée de rouge et vert, un peu genre sapin de Noël alsacien (il est originaire de cette belle région). Que nenni, notre ami Gérard est un grand romantique, enfin entre autres, et l'habitude de cotoyer le noir profond de ses claviers habituels, lui a donné cette inspiration stendhalienne, fort propre à mobiliser ses fidèles amis. Ils sont venus en masse, malgré les frimas, malgré les routes impraticcables, pour cette série de concerts privés et exceptionnels. Il faut dire que le programme était à la hauteur de l'événement : après un duel de pianiste entre Julien Opic et Olivier Rivière, il y eut un trio piano, viole et clarinette, puis une "carte rouge" au jazzman Jacky Terrasson, et hier soir, clou de l'aventure, un concert France Clidat.
Les invités, enfin ceux qui avaient eu la chance d'avoir des places car le concert était complet depuis longtemps, s'étaient tous conformés à la directive de la soirée, et avaient, comme il se doit, revêtu les couleurs de la soirée. La salle de concert était comble et l'ambiance très recueillie. Vous imaginez volontiers que les amis de Gérard, et ceux d'Arlette Laporte qui était la cheville ouvrière de ce dernier concert, sont tous plus ou moins mélomanes. France Clidat a d'ailleurs senti cette atmosphère concentrée et son jeu s'est, de morceau en morceau, ouvert de plus en plus vers le public.
C'est une grande dame du clavier France Clidat, intelligente et sensible. Elle nous a offert un balayage judicieux du répertoire pour piano, introduisant avec humour et érudition chacune des pièces. Arlette Laporte, le professeur de piano d'Alter, qui lui voue une véritable vénération car elle la tient pour l'artisan de sa carrière pianistique, lui attribue des qualités pédagogiques remarquables. Et, de fait, sa présentation des morceaux était imagée et passionnante.
Elle nous a d'abord installés en imagination devant une rame de papier à musique, avec clés, symboles et lignes, pour, multipliant les portées presqu'à l'infini, nous présenter tour à tout Chopin qui biffait avec fureur ses partitions de corrections noires, et Listz qui les barrait non moins rageusement de rouge. Tout cela pour nous jouer une sonate de Mozart, le génie absolu qui, lui, écrivait sans reprise, sans rature et chez qui la musique jaillissait à l'état définitif sans qu'il lui fut besoin de modifier quoi que ce soit.
Elle nous a d'abord installés en imagination devant une rame de papier à musique, avec clés, symboles et lignes, pour, multipliant les portées presqu'à l'infini, nous présenter tour à tout Chopin qui biffait avec fureur ses partitions de corrections noires, et Listz qui les barrait non moins rageusement de rouge. Tout cela pour nous jouer une sonate de Mozart, le génie absolu qui, lui, écrivait sans reprise, sans rature et chez qui la musique jaillissait à l'état définitif sans qu'il lui fut besoin de modifier quoi que ce soit.
Pour introduire les "romances sans paroles", elle évoqua une amie qui lui racontait avoir visité récemment à Berlin, la tombe de Moshe Mendelsohn. Le célèbre philosophe du XVIIIème siècle, défenseur de l'émancipation juive, surnommé par ses contemporains "le 3ème Moïse", était le grand-père du compositeur. Son fils, Abraham, banquier berlinois prospère, avait coutume de dire avec un sens de l'humour savoureux "Je ne suis que le fils de mon père et le père de mon fils". Et, de fait, Félix Mendelsohn, béni des dieux, ayant reçu tous les talents, peintre, nageur, cavalier, poète et bien sûr pianiste émérite, fut très tôt reconnu et célèbre. C'est ainsi qu'à sa mort, il n'avait que 38 ans, il eut droit à de triples obsèques nationales : à Vienne, à Paris et à Londres.
Quant vint le moment de nous jouer du Listz, elle en fit pour nous, le temps de nous le présenter, une vraie rock-star ! Adulé par ses spectatrices qui se battaient pour récupérer un mouchoir ou un cigare consumé ayant appartenu au "maître", porté en triomphe par des étudiants qui tiraient à la main son carrosse après en avoir dételé les chevaux, c'était une sorte d'idole qui vécut avant l'heure le succès à la manière des people actuels, avec groupies et fans clubs. Elle nous dit aussi comment, dans la deuxième partie de sa vie, mystique et prétri de sentiments nobles, il se dépouilla de toutes les futilités de la vie, ne laissant à sa mort que deux pauvres soutanes et un coffre vide, tant il avait dilapidé ses biens en aumônes diverses.
Chacun de ces morceaux, et d'autres encore, furent interprétés avec sensibilité, élégance et émotion. Jusqu'au Satie donné en bis, dont elle nous dit en riant avant de l'entamer que c'est le seul compositeur avec Chopin à créer une telle ambiance avec seulement deux accords. France Clidat a fait un triomphe mérité et nous a offert, avec la complidité d'Arlette et de Gérard, un de ces moments précieux qui font vivre la musique autrement, loin des aléas et des inconforts des salles de concert convenues.
Le rouge et le noir sont décidément d'actualité, mais je préfère ta version à la mienne! A bientôt pour un prochain concert!
RépondreSupprimerLe D274 l'ambassadeur de la marque!!
RépondreSupprimerDis moi France Clidat l'an prochain va s'en donner à coeur joie avec l'anniversaire de la naissance de Liszt.
J'ai vu qu'elle donnait un concert à Jacquemart André le 6 mars et au fait la prochaine expo en ces lieux c'est Caillebotte le peintre et le photographe!
Stendhal devait être content!
Good morning! How are you? Your blog masses like to drop here will gladly.
RépondreSupprimerVous avez du vivre quelque chose d'exceptionnel... et je parle pas de l'ambiance tout en rouge et noir , un vrai plus...mais de cette grande dame du piano qui a su vous "conter" la musique de telle façon avant de l'interprêter...
RépondreSupprimerChère Michelaise. Tu risques de m'accuser de radoter si je te dis encore à quel point je suis chaque fois époustouflée par la qualité de tes compte-rendus de concerts... J'admire tout ce que tu sais et cette facilité à l'exprimer. Je ne connais rien à la musique, ne l'appréciant qu'avec mon coeur (je pourrais dire vulgairement "avec mes tripes"...) et ne pouvant expliquer le pourquoi de cet amour ou d'un rejet éventuel. C'est beau de pouvoir expliquer le jeu et l'expression d'un pianiste.
RépondreSupprimerAvant-hier, ma fille aînée nous a emmenés au Victoria Hall de Genève où nous avons assisté à un concert de Jazz. Les musiciens étaient excellents et j'ai pensé à Alter car il me semble que le pianiste lui ressemblait un peu. Sa maîtrise était exceptionnelle, tout comme le jeu du saxophoniste qui nous a fait planer au cours de certains morceaux... Et je ne parle pas du bassiste, ni du percussionniste que notre emplacement ne nous permettait malheureusement pas de voir mais qui avait une pêche d'enfer... Tu vois, ma façon de parler musique est un peu réductrice...
En tout cas ton article est passionnant. Les anecdotes ajoutées sont agréables à lire et je suis complètement entrée dans cet univers rouge et noir grâce à tes descriptions pleines de vie.
Merci d'avoir partagé avec nous cette soirée. J'aurais bien aimé que tu puisses intégrer à ton texte quelques morceaux choisis que nous aurions pu "déguster" à loisir...
Bonne journée à toi !
Bonjour, Michelaise.
RépondreSupprimerQuel savoureux billet tout en touches noires, blanches et rouges et ces musiques que j'entends presque comme si j'y étais.
Tu vis dans un environnement musical merveilleux .
Evidemment, avec Alter notamment.
Et toi, tu ajoutes en faisant une transposition littéraire des sons...
Merci beaucoup...
Je me souviens, quand j'étais jeune...
Je t'embrasse.
De telles soirées sont exceptionnelles, a marquer d'une pierre blanche ... ou rouge ?
RépondreSupprimerSapristi Georg (et je prononce, très teuton guéorgue !) depuis que je n'ai plus de lien direct pour aller te voir, il me faut passer par le mail qui contient le lien et du coup, c'est compliqué ! Or, nous le savons tous, en matière d'internet dès que c'est compliqué, on zappe. Bon je vais tenter une incurion vers ton rouge et noir, c'est le moins que je puisse faire tout de même car tu m'intrigues.
RépondreSupprimerRobert, en effet une pierre rouge car même la carte blanche était une carte rouge. Et, de fait, c'est vrai que ce sont des moments qui marquent particulièrement.
Aloïs, l'an dernier, le concert de France Clidat à Jacquemard fut, malheureusement, annulé, et je ne savais pas qu'elle en ait un de prévu pour cette année. Nous nous disions qu'un concert, dans le salon de musique de ce musée exceptionnel, cela doit être un grand moment. Caillebotte, le peintre et le photographe, voilà un programme bien alléchant ? à suivre donc...
En effet Catherine, ces présentations des musiciens et de leur oeuvre étaient passionnantes. C'est une tendance qui s'affirme Oxy, qui permet à ceux qui ne sont pas "mélomanes" de mieux apprécier, de mieux comprendre, et qui fait un bien fou aux mélomanes ou supposés tels, car il est rare qu'on ait une telle culture musicale qu'on puisse tout comprendre. ALors la musique réservée aux initiés, c'est un fantasme qui n'a pas de sens. C'est vrai que, quand on connait un morceau, on l'apprécie mieux mais il ne faut pas hésiter, si par hasard on ne ressent pas d'ennui en écoutant de la musique dite classique, il faut y aller : on s'offre ainsi de beaux moments de plaisir, de repos de l'esprit, de douceur des sentimens, enfin bref ça fait du bien.
RépondreSupprimerOxy, quand Alter va te lire, il va se désoler, moi qui peine tant, moi qui manque tant de virutosité... normal, ce n'est pas de la fausse modestie, la pratique du piano est ingrate et toujours insatissfaisante, et le seul objectif c'est de surmonter une difficulté pour en aborder une autre ! En tout cas, j'imagine que la ressemblance était due à la barbe !! Surtout pas de complexe Oxy, nous parlons chacun de ce que nous aimons, donc nous y sommes à l'aise et cela donne aux autres l'envie de découvrir, non ? moi, par exemple, quand je lis les recettes de Sacha, je me dis que c'est génial de faire la cuisine comme cela.
Voyons Herbert, mais tu es toujours jeune ! en tout cas tes commentaires le sont, et ton enthousiasme fait toujours mouche... les touches rouges, Gérard avait oublié cela mais nous le lui suggérerons.
RépondreSupprimerChère Michelaise, tu peux naturellement mettre un lien de ton blog vers le mien, comme avant, je n'y vois strictement aucune objection, bien au contraire! Vive la simplicité!
RépondreSupprimerBonjour, que dire de plus ! Mon regard s'est posé sur ce rouge flamboyant et j'imaginais les notes danser en farandoles toutes enluminées, toutes lumineuses !
RépondreSupprimerLe moment dut être exceptionnel !
A bientôt
Ton billet nous fait tout à fait comprendre que c'est la passion ici qui mène la danse ou plutôt la musique, le piano exactement et c'est un régal pour les auditeurs et exécutants... Merci de nous rapporter des soirées de cette qualité !
RépondreSupprimerMoun, tu as raison ce rouge faisait danser les notes... sauf pour le Mozart ! tu vas me trouver bizarre, mais j'ai trouvé que le piano rouge allait très mal à Mozart. Ce qui est parfaitement idiot bien sûr, c'est juste que France Clidat est plus à l'aise avec Liszt, Chopin ou Mendelsohn !
RépondreSupprimerCOncernant Clidat, c'est sûr Enitram, c'est une passionnée. Et forcément, elle nous a fait partager cette sensibilité remarquable.
Voilà qui est GF, adresse du blog Italians do it better MAJ !
RépondreSupprimerJulien Sorel s'est obstiné à l'ambition et à l'énergie!!! Voilà pourquoi! Joli.
RépondreSupprimerMagnifique...
RépondreSupprimerLes anecdotes que tu nous relates sont passionnantes. Ces histoires associées à la virtuosité des interprètes, cela devait donner un beau spectacle ! Merci de l'avoir partagé avec nous Michelaise.
RépondreSupprimerBon week-end !