mercredi 5 janvier 2011

UNE AUTRE ANNEE

Une "arrabiatta" dont vous me direz des nouvelles après l'avoir goûtée

Je vous rassure, je ne remets pas le couvert sur l'an 2011, il s'agit simplement de vous parler du dernier Mike Leigh, Antoher Year. QUI devient-on en vieillissant ? Celui qu'on a été, en mieux si on était quelqu'un de bien, un peu pire dans le cas contraire car on souffre de ses erreurs, sans cesse reconduites !!
Comme toujours Mike Leigh nous parle de gens ordinaires avec tendresse, bienveillance et mansuétude, et leur vie, qui est la nôtre, nous devient proche et soudain belle. Tom et Gerry, oui, vous avez bien lu c'est le trait d'humour du film, approchent d'une retraite que les anglais prennent,  de toute évidence, plus tard que nous. Leur boulot, ils y croient encore assez pour y trouver certains plaisirs, sobres, mais plus trop pour s'en émouvoir. Leur quotidien est banal sans être insignifinat. Leur couple, ils en sont fiers, émaillé de complicité, de beaucoup de tendresse et d'une petite flamme secrète dont ils ont conscience qu'il faut la protéger car elle leur est précieuse.
Ils partagent une passion paisible pour le jardinage et c'est leur hortillonnage des environs de Londres qui ponctue les saisons de cette nouvelle année. Une année dont on devine qu'elle a été comme les précédentes, et qu'elle anticipe les suivantes, faite de petits riens, d'attentions aux autres, de bonheur au jour le jour, d'épreuves surmontées main dans la main. Une sagesse émaillée de connivences, ils se connaissent sur le bout du doigt ces deux-là et partagent tout, bonheurs, soucis et amis. Accueillants à la solitude des paumés qui les entourent, ils sont attentifs, disponibles mais pas nécessairement complaisants.

Mike Leigh suit avec attention ses acteurs, la caméra est proche, capte le moindre frémissement de peau, les lèvres qui se pincent, les sourcils qui se froncent. Ils sont laids ces acteurs, mais on n'en a cure, ils deviennent beaux de leurs sentiments à travers l'oeil indulgent du réalisateur.
C'est un film sur l'amour, dans la durée, et sur la fraternité. Le choix de l'hortillonnage, alors que les protagonistes pourraient cultiver un jardin autour de leur maison, est à cet égard révélateur : c'est un jardin commun, on y voit des silhouettes anonymes qui s'y activent en même temps que Tom et Gerry, ouvert et sans barrière puisque c'est un grand terrain partagé, et on doit "y aller" après avoir chargé la voiture de tous les outils et plants nécessaires à l'activité du jour. Cet effort est particulièrement souligné dès la première scène où l'on voit nos héros embarquer sous une pluie battante pour aller gratter leur lopin au printemps. Et ce jardin d'un genre particulier puisqu'il ne sacrifie pas à l'appropriation et à l'individualisme, est l'occasion de partage, des tomates qu'on y a cueillies, des plantes qu'on y a fait pousser, des moments qu'on y passe et qu'on peut partager avec d'autres venus donne un coup de main. Une nouvelle façon de "cultiver son jardin", plus altruiste que celle de Voltaire.
C'est ainsi que sont les héros, accueillants aux malheurs de leurs amis, chaleureux et très attentifs, mais raisonnables et pas exaltés : ils reconnaissent sans se consulter les vraies valeurs, celles qui méritent effort, et savent mette le hola quand les amis dérapent. Un film superbe d'humanité, qui méritait mieux que l'indifférence totale qui lui a été réservée à Cannes. Le seul reproche serait peut-être à adresser à Lesley Manvile qui en fait, parfois, un peu trop. A sa décharge son personnage un peu hystérique et toujours entre deux vins n'est pas des plus faciles, d'autant qu'elle est un peu la trame du film. Jim Broadbent et Ruth Sheen forment un couple parfait, au diapason et sans une fausse note. Le film se termine par une idée géniale, un "fondu au silence", qui se révèle, quand on y pense, la seule conclusion possible à cette fresque qui va se reproduire pour une "another year".

Un film que vous n'auriez sans doute pas envie d'aller voir en croisant de son affiche, et qui, pourtant, mérite largement le détour. Maintenant ou quand il sortira en DVD.

14 commentaires:

  1. Yeah!
    Où SOS et RAS disputent un match de ping-pong!
    Où comment voir à travers une cigarette une lueur d'espoir?
    Tu n'y as pas retrouvé une ambiance de Tchekhov?
    Il reste tant à faire....
    Ici à voir et à revoir!

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  2. Ah oui j'ai bien aimé ! C'est un film qui m'a fait du bien !
    D'ailleurs j'ai évoqué ton billet sur mon blog.

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  3. ah bien si, moi l'affiche me donne envie pour son côté légèrement B.D. !

    Hors cadre, il y a confusion sur ma dernière publication, je vous ai répondu, il faut vite que vous reveniez voir ce qu'il en est réellement !

    Je vous embrasse.

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  4. D'accord avec votre point de vue.
    J'ai aimé ce film: est-ce son côté intimiste et profond qui a rebuté ?
    Ce qui en dit long sur une époque assoiffée de sensationnel...Nous sommes pourtant loin de l'austérité d 'Ingmar Bergman...
    L'affiche est en fait plus amusante que le film : j'avais pensé à "Smoking, no smoking" en la découvrant

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  5. Oui Enitram, c'est ça, ça fait du bien.
    Une sorte de Tchekov peut-être mais tellement humain. Les états d'âme sont les nôtres, chez Tchekov ce sont des malaises de gosses de riche ! et puis cette complicité bienveillante entre époux, moi ça m'a parlé.
    Miss Yves, intimiste, profond, conjugal, certes pas de sensationnel, ouf, mais pas de coupage de cheveux en 4 pour auant. C'est vrai que l'affiche fait penser à Smoking non smoking (clin d'oeil à propos de l'histoire de la cigarette dont parle Aloïs ??)
    Ah Mathilde, on voit bien que tu es jeuuuuune toi !!! et c'est tant mieux si l'affiche attire les jeunes car c'est un film un peu nostalgique quand même.

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  6. Je n'en avais pas entendu parler, de ce film, mais ce que tu en dis, Michelaise, me donne envie d'aller le voir...

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  7. Aller le voir ou au moins le voir quand il sortira à la télé ou en DVD, une belle humanité dans Leigh

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  8. Un film qui semble vraiment humain et ce que tu en dis ne peut que donner envie d'aller le voir. J'en avais déjà lu 2 avis positifs.
    Il ne me reste plus qu'à guetter les annonces ciné de chez moi. Merci Michelaise !

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  9. Tu en parles beaucoup mieux que moi...un film à ne pas manquer !!!

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  10. Sans aucun doute, j´irai le voir à mon prochain voyage en France.

    Merci Michelaise

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  11. Alba, les avis semblent unanimes : tu le verras en DVD sans doute ! ou sur l'étrange lucarne

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  12. Ça sera sûrement en DVD pour moi aussi car les cinémas alentours ne projettent que très rarement des films à "faible succès médiatique"... Impossible de voir une vie de chat par exemple car il fallait galoper à "Pétaouchnock" à des horaires vraiment impossibles...

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  13. J'ai lu ton bilet hier matin, j'étais à Bordeaux chez ma cadette , en sortant me promener , j'ai découvert à côté de chez elle ! le cinéma Utopia, Another year était programmé l'après-mpidi même , j'y suis allée et j'ai adoré... moi aussi la complicité du couple m'a touchée et j'ai aimé ce rythme un peu lent (formidable pour moi puisque le film était en VO, j'ai apprécié de saisir quelques dialogues en anglais...)Je n'ai pas trouvé que l'actrice qui jouait Mary en fasse trop , cela collait bien à son personnage, dans le journal de l'Utopia , ils disent que c'est elle la vraie héroïne du film, je ne suis pas d'accord avec cela mais c'est vrai qu'elle est assez extraordinaire...le tête à tête avec le frère de Tom est assez incroyable dans la dernière saison...Paumée à ce point, elle en est plus que touchante, non?j'ai aimé ce découpage en saisons... bref merci Michelaise pour cette découverte! je crois quand même que c'est un film qui plaira plus aux gens de notre génération et plus agés qu'à des jeunes, tant de détails nous parlent qui leur passeraient au dessus de la tête...

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  14. Ouaou !! Catherine, je suis vraiment contente que ça t'ait plu. C'est vrai que Mary traverse le film de part en part ! A la dernière saison elle est très juste en effet. Et ce n'est pas facile de jouer la femme entre deux vins. Oui, le film touchera moins les jeunes, c'est de notre génération, de nos enthousiasmes éteints ou encore vacillants, de nos capacités à sortir de notre nombril qu'il est question, et j'ai pensé comme toi que ce film est plus pour notre tranche d'âge. L'Utopia a toujours des programmations de bonne qualité ! Le rythme est lent, mais paisible, souligné par cette succession inéluctable et pourtant pleine d'avenir, des saisons. Ravie que tu aies aimé.

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