dimanche 31 juillet 2011

HISTOIRES DE FEMMES

Un concept original que celui de ce Festival au cœur de l'Atlantique, dont le titre "Musiciennes à Ouessant" est, à lui seul, révélateur. Bon, j'en entends parmi vous qui se réjouissent (Lulu, je te vois, tu applaudis à deux mains) et d'autres s'insurgent "C'est quoi ce féminisme ?? voire cet ostracisme ?". D'abord, la démarche de Lydia Jardon n'a rien de militant : elle s'inscrit dans le cadre historique et sociologique d'une île où, de tout temps, les femmes contraintes de gérer la maison, la famille et les affaires pendant les longues absences de leurs époux partis en campagne maritimes, ont toujours dû faire face. Sans que cela soit le fruit d'une revendication féministe mais les conséquences d'une vie qui ne faisait pas de cadeau. Donner leur vraie place aux femmes est donc, ici, une démarche naturelle. 
Par ailleurs, il est indéniable que les femmes compositeurs sont, certes, peu nombreuses, mais souvent, et sans raison objective, totalement méconnues. Et sous estimées, car si l'on parle d'elles, c'est avec une condescendance polie, voire amusée, comme de gentilles dilettantes. Feuilletant par exemple le guide de la musique de piano chez Fayard, nous n'avons trouvé que 2 femmes compositeurs citées, dont Clara Schumann saluée essentiellement pour ses talents d'interprète.
Et les autres alors ? Rien que celles auxquelles le Festival d'Ouessant rend hommage depuis maintenant 11 ans : Cécile Chaminade (2010), dont je vous ai longuement parlé l'an dernierLouise Farrenc (2009), Rebecca Clarke (2008)Marie Jaëll (2007, Fanny Mendelsohn (2006), Mel Bonnis, Germaine Taillefer, j'arrête... la liste serait trop longue... Sans compter celle à laquelle le festival 2011 est dédié : une bretonne au nom de Rita Strohl, dont j'aurais forcément l'occasion de reparler longuement. Pourquoi faut-il que, dès lors qu'une partition est signée par une femme, elle soit dédaigneusement qualifiée de "jolie", parfois "élégante", toujours "raffinée". Comme si ces adjectifs étaient réducteurs et comme si leurs auteures n'avaient eu que des talents mineurs. Certes, la composition est rarement féminine et l'on peut accuser l'ignorance plus qu'un éventuel mauvais esprit. C'est pourquoi le travail de redécouverte que permet le Festival Musiciennes à Ouessant n'en est que plus important, et les œuvres jouées, les conférences dispensées sont autant de pierres dans la reconnaissance que méritent ces femmes.
Et si, par ailleurs, Lydia Jardon a choisi de ne faire jouer durant le Festival, que des femmes, avec pour seule contrainte pour chaque ensemble présent, d'exhumer une partition écrite par la compositrice à laquelle est dédié le Festival, cela ne doit pas surprendre : rendant hommage aux femmes compositrices elle veut aussi, et c'est légitime, rendre hommage aux femmes musiciennes. Même si l'on compte parmi elles parfois un intrus, comme Arnaud Thorette (l'altiste du quatuor Raphaël que j'ai particulièrement apprécié l'autre soir) en 2007 remplaçant une musicienne en congé maternité... ou comme le ténor Paul Gaugler cette année, présent pour cause de concert consacré aux "duos d'amour". Et comme dit Alter, on ne peut guère faire de duo seule ! Ben voyons, tout est bon pour réintroduire ces messieurs dans la planète ouessantine !! Pour notre plus grand plaisir...

8 commentaires:

  1. Moi aussi j'applaudis à deux mains, depuis le pays des "seicentesche" Francesca Caccini (florentine) et Barbara Strozzi (vénitienne), mais il m'est impossible par exemple d'oublier, pour rester en Europe et en les liant par un triple saut périlleux, Hildegard von Bingen et Sofia Gubaidulina...
    Bref, grand bravo à Lydia Jardon et merci à toi, Mic, pour nous la faire connaitre.

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  2. Je crois que mon commentaire d'hier sur ton billet précédent pourrait bien aller ici.
    Bon si Lydia n'est pas féministe cela devrait me convenir.
    Cela m'amuserait de savoir si le choix de Lydia a été influencé par l'exposition Odilon Redon au Grand Palais ,il a été le mécène de Rita Strohl

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  3. La seule évocation de CLara Wieck me suffit.
    Cette femme éclaire le tout.
    Merci beaucoup.

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  4. Bravo Siu de participer à la "ronde" des femmes artistes dont il faut, sans féminisme mais par un simple souci d'équité culturelle, parler !
    Aloïs, non aucun féminisme militant ici, on se contente d'être "bien" entre femmes... Je sais que Rita Strohl était choisie dès l'année dernière car c'est une bretonne et c'est une deuxième qualité d'élection au Festival !! tu t'en doutes... Odilon Redon sera sans doute évoqué dans la conférence car les mécènes sont primordiaux dans l'art, c'est évident.

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  5. Tu as raison Herbert, il FAUT lui rendre SON nom à Clara... c'est justice

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  6. Un grand plaisir de te retrouver avec ces "histoires de femmes"...
    Très belle soirée, Michelaise !
    Norma

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  7. La côte Ouest est décidément une pépinière de festivals et manifestations musicales. ici c'est plutôt (en dehors du théâtre et de la danse) l'opéra mais La Roque d'Anthéron se défend bien. Je ne connaissais pas Lydia Jardon et son ébouriffante chevelure. Comme le dit Norma, encore le plaisir de découvrir une nouvelle histoire de femmes !

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  8. Ah tu l'as dit Roberto, la crinière de Lydia est partie intégrante de son charme, qui est immense !!
    Norma, merci de ton passage parmi nous... je te rassure quelques hommes ici aussi, surtout dans le public !

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