vendredi 7 octobre 2011

ECHO : AUBAZINE 1


Echo* car elle lui a consacré un superbe article il y a peu, enrichi comme toujours de photos magnifiques et fort attrayantes, et cela a été une des raisons qui nous ont incités à retourner visiter cette abbaye cistercienne mythique et ô combien représentative de l'époque d'or de l'ordre de Saint Bernard de Clairvaux.
L'autre raison était l'envie de suivre le fameux canal des moines, remis au jour et entièrement restauré depuis 2006 et ouvert à la "visite" depuis 2010. Je mets "visite" entre guillemets car il s'agit en fait d'une charmante promenade à travers bois vers le torrent qui a été drainé au XIIème siècle par les nouveaux occupants du lieu.


L'abbaye a beaucoup souffert des avatars multiples subis par l'Ordre au cours des siècles : de la commende aux carrières de pierres, tout a été bon pour la démanteler peu à peu et, après que le cloître ait disparu pour cause de rénovation au 17ème, ce fut au tour de l'église de passer de 9 à 3 travées au cours du XVIIIème. La croisée du transept est couverte d'une belle coupole sur pendentifs de type limousin.


A l'intérieur, la sévère ordonnance des murs nus, à peine percés de triplets symboliques, a été sauvegardée et aucune sculpture "malséante" ne vient rompre l'harmonie des proportions.


On y admire des stalles en bois sculpté du 17ème, époque de renouveau de l'abbaye, un coffre du XIIème aux énormes pentures de fer forgé, fermées par de gros verrous, le superbe cénotaphe de Saint Etienne, premier abbé d'Aubazine, oeuvre raffinée d'un atelier d'Île de France qu'Autour du Puits vous expose en détail, et de vitraux en grisaille, spécifique à l'Ordre cistercien qui, eux aussi, datent du XIIème.


A la croisée du transept, reposant sur un socle carré de la largeur de la nef, s'élève un petit clocher octogonal dont les angles coïncident avec les axes de la nef et du transept. Les pendentifs de la coupole sont couverts de triangles à ressauts et c'est ainsi, par un petit miracle d'équilibre mathématique savamment dosé, que du carré le plan passe à l'octogone. Malheureusement, après des dégâts provoqués par les intempéries, on se trouva devant le dilemme suivant : il fallait soit reconstruire entièrement le clocher, soit en protéger les pendentifs par une structure de lauzes. Les méchantes langues prétendent que les maçons chargés du travail n'auraient pas été capable de refaire ce chef d'oeuvre technique et que du coup, les Monuments historiques choisirent de recouvrir les dalles XIIème de la très inélégante façon que vous pouvez observer aujourd'hui. La photo du Zodiaque numéro 16 consacré à l'art cistercien en 1974 (à gauche) montre les gradins originels et fait regretter, ô combien, cette décision pour le moins maladroite.



Les bâtiments qui jouxtent l'église sont essentiellement du XVIIème, à peine s'il subsite la salle capitulaire et le scriptorium. En fait l'aile est du cloître, seule survivante du plan initial, a été surélevée de deux étages et les magnifiques couloirs qu'on admire au-dessus des salles basses, pavés de galets incrustés en pisé, sont l'oeuvre du chapitre général qui décoda en 1667 de faire d'Aubazine le noviciat central des provinces de Bordeaux et de Poitiers. Pourtant, cette renaissance fut de courte durée puisque dès la fin du XVIIème, il n'y avait plus que 4 moins dans le couvent. C'est en 1757 que, l'église menaçant ruine, les moines décidèrent de supprimer la façade et 6 travées. La Révolution chassa les religieux, l'église devint paroisse et en 1859 les soeurs du Sacré Coeur de Marie de Treignac rachetèrent les bâtiments subsistants pour y installer un orphelinat de filles. Elles transportèrenet en 1887 leur maison-mère à Aubazine et c'est dans ce couvent que Gabrielle Chanel fut placée par son père en 1895. Elle venait de perdre sa mère, emportée par une tuberculose, et y resta 7 ans, échappant au sort de ses frères, placés comme garçons de ferme !


L'abbaye fut ensuite occupée par des soeurs de l'église grecque melkite catholique (rite pratiqué à Saint Julien le Pauvre) : d'anciennes clarisses, installées à Rabat en 1950, avaient envoyé quelques postulantes se former à Nazareth. Le patriarcat melkite mit alors à leur disposition un petit terrain pour fonder un monastère grec melkite catholique. Les postulantes, séduites par le rite oriental, abandonnèrent les clarisses. Mais on est en 1963 et le conflit israélo-arabe bat son plein, les soeurs, coupées du monde, préfèrent rentrer en France. L'évêque de Tulle, en charge de ces immenses bâtiments vides menaçant de revenir à l'Etat qui envisage de les transformer en prison ou en centre culturel (!!!) leur propose les lieux. Aubazine passe au rite oriental ! Malheureusement les soeurs melkites sont de moins en moins nombreuses et en 1987 les deux ou trois qui restent préfèrent laisser les lieux à la communauté du Verbe de Vie, du Renouveau Charismatique. Les melkites s'installent dans une petite ferme proche de l'abbaye et, dans une étable occupée par les vaches jusqu'en 1973, elles installent une chapelle byzantine qu'elles vont couvrir d'icônes très élégantes et fort chatoyantes grâce au peintre chilien Juan Echenique. De passage au monastère, alors qu'il allait se former en Grèce, Juan ne parlait qu'espagnol, et les soeurs pas du tout. La communication aurait été fort difficile si le hasard n'avait bien fait les choses : un autre hôte se révèle parfaitement bilingue et grâce à lui le projet prend forme : durant 9 mois, Echenique réalise une suite de fresque impressionnante, qui transforme l'étable en lieu de culte typiquement melkite.
Pour finir l'histoire, en 2010, à la suite d'une mésentente entre le patriarcat melkite et les nouveaux occupants, la communauté du Verbe de Vie abandonne les lieux, au grand dam de la population locale qui regrette son départ et part s'installer en Bretagne. Le sort de l'abbaye d'Aubazine reste à définir !



Et là, me direz-vous, que lui prend-il donc à Michelaise de nous afficher avec complaisance son portrait ... allons pardonnez cet écart, cela a un rapport avec ma dédicace : je suis en train de pianoter furieusement pour faire un jeu de piste (oui, oui, j'aime jouer, Alter vous le dirait "elle ne pense qu'à jouer !") à Aloïs d'Autour du Puits : normal puisque nous étions venus sur ses pas ! Je voulais qu'elle trouve où nous étions, et croyez-moi, je n'ai pas été tendre ! Alter me disait "tu es trop dure avec elle, chipie..." !!!

* Après les nénuphars non concertés, voici encore un billet sur les pas d'Autour du Puits, je ne suis qu'une vilaine "copiteuse" mais que voulez-vous, Aloïs et moi avons tant d'intérêts communs que ces redites sont inévitables !

6 commentaires:

  1. Mais quelle merveille, d'ailleurs il faut bien dire que accompagnés par toi, aussi bien que par "Autour du puits", on irait n'importe où: garanti 101%, c'est à chaque fois distraction et connaissance au meme temps, ce qui pour moi représente une des plus grandes joies sur terre.
    Et puis cette "photo dulcis in fundo", vraiment impayable: on dirait que tu es une fille agée de... 12 ans, et peut-etre le voilà, ton secret !

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  2. Chaque fois que je suis allée à Aubazine ces derniers temps c'était en fin de journée et je n'ai pas pu accéder aux bâtiments qui jouxtent l'église.
    Cette année cela s'est plutôt mal terminé,nous envisagions de cheminer le long du canal des moines mais un constructeur automobile a mis son grain de sel et nous avons converti ce moment là en appels téléphoniques vers remorqueurs et autres taxis
    A ce sujet nous sommes entrain de progresser lorsque je vais t'avoir révélé la chose je suis certaine que cela va t'émoustiller et que tu nous en sortiras un billet passionnant
    A l'intérieur j'ai complètement "raté" la photo de la très belle armoire d'époque sous le vitrail sur le mur de gauche ,ainsi que celles des peintures murales du XVème
    J'avais projeté cette semaine d'aller à Martel continuer mes investigations,puisque Martel était un des greniers d'Aubazine mais le quartier concerné était investi par une maison de production tournant un téléfilm pour France 3.

    Pas moyen de retrouver mes photos concernant la chapelle
    Elles ont dû passer à la trappe

    Ah je confirme elle a bien joué le rôle de la chipie,elle me dit deux jours avant qu'elle part en Dordogne et puis m'envoie quelques photos par MMS,me voilà cherchant une abbaye cistercienne en Dordogne...

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  3. Le canal des moines Aloïs, ce sera la "suite" forcément !!
    Martel grange des moines voilà aussi un sujet "évocateur" qui me passionne... bientôt j'espère ! avec toi, peut-être ! Quant à la Dordogne, c'est vrai que ce n'était pas un combat à la "loyale" et je t'assure qu'Alter a vraiment comptatit ! N'empêche que je me suis bien amusée à te bombarder de photos !! Suite au prochain numéro car les photos que je t'ai envoyée sont plutôt celles du canal, chipie noire je suis !!!
    Siu, tu es trop indulgente, 12 ans tu y va fort, mais en tout cas qui sait si le secret du goût de vivre n'est pas d'aimer jouer, jouer pas aux jeux, pour gagner, mais jouer pour s'amuser !! vraiment !! rire et partager !

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  4. PS et puis Siu, quand tu viendras enfin en France, on te prendra en charge, Aloïs et moi, pour un grand jeu de piste grandeur nature !!!

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  5. Merci pour la visite Michelaise ! C'est toujours très enrichissant de te suivre dans tes balades.
    Bises.

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  6. Tous les secrets des constructeur de cathédrales reposent sur la géométrie, qui à l'époque était considérée comme les secrets divins où se cachaient le grand TOUT. Ainsi naquit la philosophie pythagoricienne.

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