samedi 25 août 2012

HENRI MARTIN 5 - La fresque de Marquayrol




Après l'atelier, le chemin continuait, manifestement tracé par des décennies de promenade, en descendant légèrement vers le village. A chaque trouée de verdure, on apercevait des toiles d'Henri Martin ! Un peu envahies par la végétation certes, mais bien réelles. Un cèdre imposant nous guidait, vaillant indicateur d'un lieu habité (voir le commentaire d'Autour du Puits dans le billet sur les arbres !) : nous approchions du but.



En effet, un peu plus loin, toujours sur la gauche, côté vue, côté vallée, un ensemble de constructions, manifestement occupées se révélait parmi les arbres touffus. Une cour, une grange transformée en maison, contre laquelle reposait une échelle. Et sous l'échelle ....



... la dernière surprise de notre périple, et non des moindres ! Une fresque d'Henri Martin, sorte de fête céleste, réjouissance d'anges musiciens et de saintes concertistes ! Malheureusement sans la moindre protection, exposée au vent, au soleil et à la pluie, ce témoignage de décoration sauvé du temps risque de connaître rapidement un sort contraire ! Et il faudrait bien engager ici une campagne de sauvegarde rapide si l'on ne veut pas que ces photos soient les dernières !! Nous allons créer un comité de sauvetage de la fresque de Marquayrol !!!!


Chœur d'anges, débauches d’ailes frémissantes, visages séraphiques, on reconnaissait bien ici la patte de maître, celle des ses grandes compositions symbolistes, celle des années 20. Cette douceur monumentale qui le caractérise dans les commandes officielles, comme l'hôtel de ville de Paris, les mairies du Vème et du VIème, l'hôtel de ville de Tours, le Capitole de Toulouse, le Palais de l’Élysée, la Sorbonne, le Conseil d’État, la préfecture de Cahors et la Chambre de commerce de Béziers.

Liste plus destinée à vous démonter sa renommée de son vivant qu'à faire la savante *, et surtout avec l'intention avouée de vous indiquer où trouver des fresques du peintre, pas loin de chez vous ! Il ne vous reste plus qu'à aller découvrir ces ensembles décoratifs auxquels parfois on prête peu d'attention, l'art monumental, l'art de commande ayant à tort mauvaise presse parmi les amateurs d'art. On y voit  seulement la rigidité des thèmes, le conventionnel de leur interprétation, et moins le talent de l'artiste choisi pour les réaliser. Le mythe de l'artiste maudit a la peau dure et l'idée qu'un peintre ait pu être choisi par des notables, payés par des instances officielles, nous semble encore un indice de mauvais goût ! Allez voir les Henri Martin du Conseil d’État et donnez m'en des nouvelles, je suis certaine que vous serez, une fois les préventions d'usage oubliées, emballés par cet ensemble qui célèbre l'Industrie, le Commerce et le Travail de la terre, chatoyants de lumière et vibrants de couleurs moirées, pendant que le dernier panneau glorifie tout en demies teintes, automnales et presque mystiques, le travail intellectuel.


Et comme nous n'avons pu voir la maison du peintre, n'ayant pas osé nous avancer en passant devant la maison du gardien, je vous offre pour finir une visite en peintures, celles que le maître aimait tant faire à toutes les saisons, saisissant sous son pinceau toutes les nuances, les infimes variations, les douces vibrations de la lumière sur ces lieux aimés.


Les fenêtres où l'on reconnaît, aux volets, le bleu de la porte de l'atelier. Et la statue de la Vierge près d'un massif de fleurs.



Le salon de jardin autour duquel il fait bon se réunir, avec sur la table, un bouquet de jonquilles, quelques roses ou, l'automne venant, des feuilles mortes.


La terrasse, avec ses jardinières plantées de lauriers roses ou blancs, avec sa vue sur la vallée du Vert... Peinte depuis le salon les jours de pluie.


Le bassin en demie-lune, surmonté d'une statue à l'antique, entouré d'une débauche de géraniums en pots, sagement alignés de part et d'autre de l'allée et qui piquettent de couleurs le jardin estival. C'est le bassin devant lequel il a peint la jeune fille en contre jour, vedette de la vente de Rennes.


Le bassin rond, avec ou sans jet d'eau, et peint sous différents angles : en haut à gauche, en regardant les cyprès et la porte du potager (voir plus bas), à l'automne en y incluant la treille roussie, avec ou sans jet d'eau.


Et, le long de la terrasse, la galerie sous laquelle les femmes cousent, se promènent ou caressent le chien. Surmontée d’une treille aux teintes étincelantes, plus belles à chaque saison !


Au revoir Henri Martin !!!



* je l'ai recopiée dans un article de Luce Barlangue dans le catalogue "Henri Martin, du rêve au quotidien", Silvana Editoriale, 2008, page 65





8 commentaires:

  1. Un beau billet que j'apprécie tout particulièrement, faire le parrallèle entre la réalité et le rêve... Et me donner envie d'aller sur les traces de ce peintre dont je ne connaissais pas ses toiles sauf quelques unes ! Tu n'as pas osé demander au gardien de visiter la maison, peutêtre il y a-t-il des habitants ? quel dommage !
    Les fresques sont magnifiques ! Comment faire pour les sauvegarder ?
    Une maison de rêve avec son bassin et son portique... Je plane....
    Merci!

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  2. Un peintre qui a tellement peint sa maison que cette dernière et son village et sa region que le Lot et lui sont indissociables ... vraiment contente de ton enthousiasme.

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  3. Ben moi aussi je suis enthousiaste, quelle aventure, vive le nouveau comité de sauvetage...

    Rien n'est plus émouvant que cette découverte, loin des commissaires priseurs, loin du monde... Sur les pas d'Henri Martin, vous le touchiez de près...

    Bises à toi du lundi.

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    1. Alter me disait qu'il nous fallait saisir de toute urgence le conservateur du musée de Cahors, qui est forcément quelqu'un de dynamique, vu son expo ! Mais je n'ose pas lui envoyer un lien vers mes articles, tu vas rire, j'ai peur qu'il ne voit que le fait que je me suis permis de prendre des photos dans l'expo, ce qui n'était pas interdit, en tout cas je n'ai pas vu d'interdiction, et comme actuellement c'est un peu la parano sur les photos ! Et puis, malgré mes bientôt 60 ans, je reste très "obéissante" !!! Enfin pas toujours heureusement.

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    2. Je viens de découvrir votre blog et vos pages consacrées à Henri Martin et à mon village de Labastide, magnifié par le pinceau de ce peintre. Le travail que vous avez fait est remarquable, vos articles sont particulièrement bien écrits et je vous remercie de rendre ainsi hommage à ce peintre de la lumière fine du Quercy méconnu et pourtant exceptionnel.
      Juste deux petites remarques. Les piliers que vous avez découverts à Marquayrol, un peu au dessus de l'atelier, ne sont pas les vestiges de la pergola, mais ceux d'un pigeonnier du Quercy qui s'est écroulé dans les années soixante. Henri Martin l'avait par ailleurs souvent peint. La pergola quant à elle, se trouve toujours à l'angle du parc de la maison d'Henri Martin.
      De même, les fresques que vous avez reconnues, depuis le chemin qui même vers l'atelier, ont été en fait réalisées par son fils Jacques Martin-Ferrières, peintre lui aussi, qui a connu après guerre un certain succès, sans pouvoir toutefois atteindre la renommée de son père.
      Ceci dit grâce à vous, il n'y a pas de site internet à ma connaissance qui lui soit consacré, Henri Martin dont les toiles lumineuses et étincelantes constituent une symbiose heureuse entre la Terre et les Hommes sera mieux connu et apprécié.
      Bien cordialement.

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    3. Ah ben mince alors !!! je n'avais pas vu ce commentaire, absolument passionnant ! Merci Jérôme de votre passage sur mon blog et surtout de votre commentaire : cela me conforte dans le plaisir de faire des séries d'articles, a priori un peu austère mais voulant rendre hommage à des artistes moins sur le devant de la scène.
      Et en plus, dans votre commentaire, vous apportez de nombreux renseignements supplémentaires de première importance. Merci de votre identification des fresques qui corrige mes bêtises et me fait découvrir un peintre que je vais m'empresser de mieux connaitre, Jacques Martin-Ferrières. Et pardon d'avoir tant tardé à découvrir votre intervention

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  4. Bonjour. Je confirme que les anges sont du fils d'Henri Martin, Jacques Martin-Ferrières: merci Jérôme. Quant à saisir le conservateur du Musée de Cahors..que voulez-vous qu'il fasse? C'est une propriété privée. Et si les propriétaires sont des béotiens et laissent tout se dégrader... Si comité de sauvetage il y a, il pourrait s'adresser à l'actuel expert et ayant-droit des oeuvres d'HM, son petit-fils, dont les coordonnées doivent se trouver auprès de n'importe quel commissaire priseur?

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    1. En effet pourquoi pas ?? L'idée est à piocher et ce serait faire oeuvre utile de sauver cette fresque. Merci de la confirmation de l'attribution déjà faite par Jérôme, et en tout cas, c'est grâce à votre commentaire d'aujourd'hui que j'ai enfin pris connaissance de celui de Jérôme qui datait, ô honte de ma part, du mois d'août.

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