Domenico Ghirlandaio - tempera sur panneau de bois-167 x 167 cm -v. 1482-85
Le retable se trouve à l'église de "Santa Trinità" à Florence et s'intitule «
L’Adoration des Bergers »... Peint par Domenico Ghirlandaio, cet artiste prolixe dont tour à tour la chapelle Tornabuoni, à Santa Maria Novella et le Saint Jérôme d'Ognissanti nous a tant séduits, l'oeuvre est un manifeste qui insiste sur l'importance historique de la naissance du Christ. Événement dont sont d'abord avertis les plus humbles, les trois bergers aux allures de bourgeois aisés qui se réjouissent à droite du tableau.
Ils n'ont rien de bien rustique ces hommes aux cheveux grisonnants qui s'abiment dans la contemplation de l'enfant nouveau-né : leur habit est confortable, et leur mise plutôt soignée. Seul un agneau bien frisé et un bonnet laineux marquent leur rôle.
Mais au loin, déjà, arrive, en rangs serrés et affairés, rutilants et en grande pompe, une horde de grands de ce monde qui n'entendent pas être exclus de la Bonne Nouvelle. L'humanité accort pour assister à l'événement qui la fonde et lui donne sens. Le cortège, qui rappelle celui des Rois Mages de Gozzoli, mais ici plus antiquisant qu'orientalisant, s'apprête à passer sous un arc de triomphe dont l'inscription évoque le respect du général romain Pompée, pour la Judée. Cela ne restera pas une affaire privée, et Joseph en est complétement éberlué. Il se gratte le front avec perplexité pendant que Marie, sereine et recueillie, contemple et adore son enfant.
Celui-ci babille, couché sur le pan du manteau de sa mère, au milieu d'un parterre d'herbes grasses et de fleurs. Inconscient encore du danger qui le guette, il repose devant un sarcophage antique, tout à fait dans le ton, orné d'une somptueuse guirlande de fleurs et de fruits, mais brisé et particulièrement sinistre en cette circonstance. L’inscription
gravée sur ce tombeau servant de mangeoire rappelle la prédiction de
Fulvius, l’augure de Pompée, qui annonce la venue du Messie*. La présence d'un sarcophage comme berceau improvisé est bien sûr une anticipation de la Passion du Christ et de l'inéluctabilité de sa souffrance. Le chardonneret épineux qui contemple la scène au premier plan est là comme un rappel du sacrifice futur, traditionnel symbole du sang versé, du fait des taches rouges qui ornent son plumage. Ces détails dramatiques font de la Nativité de Ghirlandaio un programme iconographique complexe et ambitieux, à l'image de l'oeuvre de cet artiste d'exception.
* Ces deux inscriptions, inventées par l’humaniste
Bartolomeo Fonzio à partir d’un passage de l’Histoire des juifs de
Flavius Josèphe, ont pour but d’indiquer l’union de la latinité et du
christianisme. L’arc joue ainsi le rôle d’un pont symbolique qui relierait
Juifs, Romains et Chrétiens, tandis que les inventions épigraphiques assurent
la liaison entre les différents temps de l’histoire : le passé de la
civilisation antique, le futur antérieur de la prophétie, le passé toujours
actuel de l’événement sacré et le présent du peintre. Ce dernier, en effet, en
inscrivant la date de réalisation de l’œuvre sur le pilier central, marque sa
présence aux côtés des témoins de l’Incarnation... d'après Le temps des ruines: l'éveil de la conscience historique à la Renaissance Par Sabine Forero Mendoza
Merci au site des Jésuites de France où j'ai trouvé cette excellente reproduction du tableau.
Merci au site des Jésuites de France où j'ai trouvé cette excellente reproduction du tableau.
A Florence ? la ville des Medicis...des bergers bourgeois... la laine avait une certaine importance puisque (je crois) à l'origine de leur fortune.
RépondreSupprimercette nativité est loin de la naïveté.J'apprends le symbolisme du chardonneret. Merci pour ce billet Michalaise
Bonne soirée
Pas naïfs non, du tout, les peintres de la Renaissance, mais bien au service de puissants qui les faisaient vivre par leurs commandes... d'où les bergers bourgeois !!
RépondreSupprimerEncore un très beau tableau à regarder de près car il y a beaucoup de détails qui apparaissent sur l'image agrandie..plus grande encore sur le site que tu cites :-)))..par exemple l'ange qui veille sur le troupeau,là au dessus de la colline..tous les bergers ne sont pas descendus...j'ai un faible pour le boeuf et l'âne gris...et c 'est toujours amusant de découvrir combien nos choix "iconographiques " sont différents...
RépondreSupprimerDifférents mais complémentaires ! Oui ce sont les détails qui font la saveur de l'ensemble !
SupprimerPour la taille de l'image, on peut cliquer sur les photos, cela améliore grandement la visibilité, et comme cela, on peut même zapper le texte !! pour ceux que cela barbe ...
J'aime ou je remarque les colonnes qui soutiennent d'une façon magistrale le pauvre toit de la crèche !
RépondreSupprimerAh oui, là faut dire qu'il a fait fort : de si belles colonnes pour un toit plein de gouttières ! ça sent sa démonstration : l'antique qui est la base de notre civilisation moderne !!!
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