dimanche 14 avril 2013

NOUVELLES ROYANNAISES : cartes postales à la Gare Routière - Comité de vigilance brutaliste

Pardon pour la disparition, momentanée, du billet "Le Titien non invité : l'homme au gant d'Ajaccio"... il a été mis en réserve et reparaîtra  avec vos commentaires, le 15 avril !! Il y a en effet urgence à parler de l'exposition du Comité de Vigilance Brutaliste, l'exposition se terminant le 29 avril !


Toutes les semaines arrive, dans la boîte aux lettres, un carton d'invitation en bonne et due forme, m'avertissant que le maire de Royan, l'Adjointe à la Culture et quelqu'autre personne forcément très "présidente" "seraient honorés de ma (votre dans le texte) présence au vernissage de l'exposition"... C'est fou ce que le service de la Culture de la ville est imaginatif... loin de moi l'idée de railler !! Un beau budget de la Culture : même si c'est grâce à la présence de touristes supposés avides de telles manifestations, c'est toujours bon à prendre pour les "locaux" !

Mais il y en a tant, que j'accroche avec un magnet, bien en vue, aussitôt recouvert par d'autres cartons... Et ça ne rate pas, j’oublie ! Pourtant, c'était* un peu le prétexte de ce blog : pourquoi aller chercher si loin ce que nous avons à notre porte ?? Mais, si vous faites partie des fidèles du blog, vous avez pu constater que nous cédons, nous aussi, aux sirènes de l'exotisme et allons plus souvent qu'à notre tour galoper à Paris ou en Italie : pas moyen de résister au plaisir de retrouver des racines aussi bien familiales que culturelles. Bref, la rubrique "Royan" est moins fournie que la rubrique "Rome" !!

Et il a fallu que ce soit un blogueur dont j'adore les "billets moleskine" - que je suis avec une telle ardeur qu'il m'a présentée à ses amis comme son "admiratrice de blog" - qui attire mon attention : "Vous viendrez au vernissage de l'exposition de mon ami David " ??





L'ancienne gare routière de la ville, un peu abandonnée  et dédiée parfois à des manifestations d'amateurs (j'en avais fait un billet une fois, trouvant le lieu très "suggestif", comme disent les italiens) a, dans le cadre de la volonté de mise en valeur du patrimoine architectural de la Reconstruction, été définitivement réhabilitée et dédiée à la promotion de la création artistique. On a, pour le coup, rebaptisé la salle du nom d'un des deux architectes, Louis Simon (l'autre était Pierre Grizet) qui ont construit ce bâtiment en 1953, en forme, fort appréciable pour une Galerie d'art, de rotonde.


Le hall s'articule autour d'un pilier central en creux servant de descente d'eau pluviale, inspiré nous dit-on d'une salle de bal d'Oscar Niemeyer à Bel Horizonte. L'édifice est coiffé d'une couverture en béton armé qui se prolonge par un auvent, soutenu par des piliers métalliques, courant le long des anciens quais d’embarquement pour les bus. La lumière y pénètre à grands flots, et, de l'intérieur, on est "dans la ville".


Quoi de plus naturel alors que d'accueillir ici le "Comité de Sauvegarde Brutaliste" ??!! Kesako ce truc aux consonances alternatives et vaguement violentes ? Je vous rassure, rien que de très respectable : le brutalisme est le style architectural des années 1950 à 70, en plein dans l'époque de la reconstruction de Royan, meurtrie par les bombardements, style dont le matériau de prédilection était le béton brut. Les structures brutalistes gardent souvent l'effet du coffrage, sans revêtement ni décor. Pourtant les matériaux brutalistes sont aussi, souvent, la brique, le verre, l'acier, la pierre grossièrement taillée ou organisée en gabions. L'architecte emblématique du mouvement est, bien sûr, Le Corbusier à qui l'on demanda, d'ailleurs, de faire un projet pour la reconstruction de Royan. Bref, Royan, ville entièrement repensée dans les années 50, et fort décriée dans ma jeunesse pour sa trop grande modernité et la relative modestie de matériaux, est, par excellence, le lieu privilégié de "la sauvegarde du brutalisme". D'autant que ces architectures, sommaires et parfois abruptes de formes, furent souvent réalisées dans des matériaux pauvres, de mauvaise qualité, l'industrie de l'après-guerre était encore blessée, et sont parfois dans un état de conservation bien pitoyable. Rouille des ferraillages, lèpre du béton, celle que Decoin célèbre avec une telle poésie dans John l'Enfer (enfin je crois ??), déréliction des coffrages, toutes sortes de maux atteignent ces bâtiments qui, depuis peu, ont repris lustre et prestige  en particulier depuis que quelques mordus se sont passionnés pour l'architecture des années 50 et ont reconnu à Royan, en 2011, le label de ville d'Art et Histoire à cause de l'unité architecturale de son urbanisme. Une excellente initiative qui permet d'envisager l'avenir de ces constructions avec plus de sérénité : on ne les détruira plus, comme on fit du casino en 1985, et mieux, on les restaurera comme on est en train de le faire pour l'église Notre Dame qui en a bien besoin.





Et que présentait l'ami de Claude Lothier dans ce nouvel espace imprégné de lumière ? Une collection de cartes postales, fort astucieusement présentées sur des tables de bois, installées tête bêche et regroupées par thèmes ou par affinité. Construction de Notre-Dame, chantier du marché, édification du Front de Mer, les grandes heures du Casino, j'en passe et des meilleures : chacune de ces cartes postales de collection, souvent en noir et blanc, toutes d'époque, réveille la mémoire de ceux qui ont vécu ces heures de renaissance d'une ville écrasée par les bombes en 1945 et qui mit presque 20 ans à émerger des décombres.


Les rapprochements de cartes postales sont passionnants, on y voit les différentes étapes des chantiers, le jaillissement des bâtiments, cochers ou tours du milieu des décombres, la recomposition du paysage urbain et surtout, l'utopie un peu égalitariste d'un rêve de "bonheur pour tous" qui sous-tendait le brutalisme. David Liaudet a un blog où, depuis 2007 (plus vieux de 6 mois que Bon Sens et Déraison, chapeau !!) il rend hommage, à travers les cartes postales de collection, les siennes et celles de ses multiples lecteurs, aux grands architectes des années 50 et suivantes !

Le blog a récemment changé d'adresse, mais l'esprit reste le même et les anecdotes liées aux images d'Elcé, La Cigogne  ou Billaud y sont délicieuses. Je vous rassure, il n'est pas question que de Royan dans ce blog,  très loin de là, même si la ville reste chère au coeur de David Liaudet qui y passa ses vacances d'enfant. La France entière des années 50-60 s'y offre à nos yeux nostalgiques, car ces architectures-là, nous les avons vue "pousser", et elles nous parlent encore très fort.

Dessins de Thomas Dussaix

David Liaudet fut, en outre, accueilli en résidence par la ville de Royan, pour étudier au plus près et palper, au sens strict, l'église Notre-Dame : cela nous vaut, toujours dans l'exposition, une vidéo sur le questionnement plastique de l'édifice et l'accrochage de superbes dessins à la pierre noire de Thomas Dussaix, où notre "cathédrale",  titre purement affectif, reprend forme et s’évade de son coffrage de béton pour une nouvelle vie entre rêve et utopie.


Autant dire qu'il est important que tous les gens de passage, et ceux qui habitent Royan, aillent voir de toute urgence ces tables du souvenir qui leur rappelleront les grands moments de leur jeunesse et les aideront à mieux regarder ces constructions qui n'ont de banale que leur proximité. C'est jusqu'au 29 avril, et c'est à la Galerie Louis Simon, Cours de l'Europe, autant dire à l'ancienne Gare Routière ! A bon entendeur, salut, vous m'en direz des nouvelles !!!

* après avoir voulu être le lien avec mes filles parties au loin

8 commentaires:

  1. Et ben, j'en apprends des choses sur une ville que je suis sensée connaitre par mes origines paternelles mais, il est vrai que je n'y ai jamais mis les pieds.
    Je ne savais pas Royan si riche en style brutalisme et si, quand j'entends ce mot me vient à l'esprit "la cité Radieuse" de Le Corbusier que je connais bien car, j'habitais juste à côté à Marseille, je pensais surtout au Havre.
    La maman d'Antoine étant du Havre, j'ai eu maintes fois l'occasion d'apprécier le travail d'Auguste Perret qui, finalement fut reconnu puisque la ville a été inscrite par l'Unesco au patrimoine mondial de l'humanité.
    La tour de l'église St Joseph m'a toujours fasciné. Est-ce bien du brutalisme ou je me trompe peut-être ?
    Mais pour en revenir à Royan, je ne savais pas qu'elle était un fleuron de ce style et que celui-ci soit enfin réhabilité est une très belle initiative.
    Je vais aller approfondir un peu plus ma visite sur le blog de David Liaudet.
    Encore une belle découverte grâce à toi Michelaise et, je m'excuse encore d'avoir décroché sur Titien mais ma semaine fut chargée et tu sais très bien que ma petite cervelle a besoin de concentration pour suivre tes billets.
    Bises et belle soirée

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    1. Oh MIreille, il n'y a aucune obligation de suivi et je suis ravie que tu apprécies les articles, même si tu n'as pas le temps de tous les lire, ils sont "bavards" !!! et moi-même, j'ai été absente quelques jours, d'où ma réponse tardive !!
      Oui Royan des années 50 est une ville très cohérente et qui mérite d'être réhabilitée !! ce que fait fort bien le service culturel de la ville

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    2. Je sais que tu n'as pas la télé mais mercredi soir sur France3 l'émission "Des racines et des ailes" rend hommage à ta région et un reportage est consacré a Royan, sur sa reconstruction après-guerre et sur le brutalisme réhabilité.
      Extrait du compte rendu " le périple commence à Talmont sur Gironde, un village édifié sur une promontoire rocheux préservé par Yannis suire. A quelques kilomètres de là, visite de Meschers et sa falaise, qui abrite des dizaines de grottes habitées, puis de Royan" etc, etc....
      Un lien : http://www.france3.fr/emissions/des-racines-et-des-ailes/accueil-drda_13383.
      Belle nuit.

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    3. Merci Mireille de cet avertissement, à défaut de regarder l'émission en direct (quand on n'a pas l’habitude c'est quasi impossible de se mettre devant un écran sur commande) c''est sûr que nous y jetterons un œil sur internet pour voir un peu si la présentation a été juste ! et attrayante, chance pour notre région cette émission en début de saison, cela va donner envie aux français de venir nous voir ! et la région vivant du tourisme c'est une sacré aubaine ... On supportera vaillamment les foules en prévision de l'hiver !

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  2. La pauvre adjointe à la culture si elle est comme moi cela doit la "gonfler " ce genre de "seraient honorés de votre présence"
    Ne pas faire d'impair ,ne pas oublier de dire
    bonjour à Monsieur Duchemol et Madame Trucmuche,et ne pas oublier de s'abonner à Souriez Gibbs .
    Nous avons ici un pur produit du brutalisme :l'hôpital de Corbeil-Essonnes
    Il a été construit par André Wogenscky collaborateur de Le Corbusier notamment pour les unités d'habitation de Marseille, Rézé et Firminy
    J'avoue ne pas trop avoir envie d'aller le prendre en photo
    Les hôpitaux j'ai ma dose
    Il est du reste question qu'il soit rasé,n'étant plus aux normes tous les services ont été transférés dans une nouvelle unité,genre usine à gaz tranche napolitaine!!!!

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    1. Mais que veux-tu, Monsieur Duchemol et Madame Trucmuche sont si flattés qu'on leur dise "bonjour" avec un sourire Gibbs !!
      Quant à prendre l'hôpital en photo tu en es dispensée, même si, quelque part c'est dommage de voir disparaitre un bâtiment représentatif d'une époque

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  3. Bonjour Michelaise. Enfin, je prends le temps de venir te lire... J'ai rangé ma tondeuse à gazon et je suis ravie de découvrir cette page en me reposant un peu. Je ne connaissais pas le terme "brutalisme" qui m'a -dans toute ma naïveté- fait peur, évidemment... Je comprends mieux maintenant après lecture. Comme Mireille j'ai pensé à la ville du Havre en te lisant. Je ne connais pas du tout Royan mais je vois que c'est une ville qui bouge et je comprends que tu aies du mal à répondre à toutes les invitations de vernissages.
    La présentation de cartes postales anciennes doit être très intéressantes pour ceux qui peuvent juger de l'évolution d'une ville ou d'un quartier. Ce sont de précieux témoignages.
    Grâce à toi j'ai encore appris de nouvelles choses aujourd'hui et cela ne peut pas faire de mal à ma paresseuse petite cervelle.
    Bonne soirée à toi :-)

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    1. c'est marrant de voir l'évolution des lieux au cours des années et les cartes postales en rendent fort bien compte !! quant aux vernissages je n'y vais jamais mais par contre, cela me tient informée des expos !! et je les aligne sous des magnets, dans ma cuisine, en me promettant d'y aller, et j’oublie !!!

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