mardi 8 octobre 2013

QUELQUES TOILES EN VRAC

La saison cinématographique reprend tout doucement. Quelques impression sur les derniers films vus. 


Celui-là, je l'ai tellement détesté que j'avais même oublié le titre. Et l'histoire, et tout !! Heureusement j'avais posté une critique sur Allociné, que je me contente de rapporter ici (1). 
Furieuse d'être restée jusqu'à la fin, car en prime, et doublement, la fin est stupide : issue qui se veut maligne mais qui est juste sotte, (on dirait que Claire Denis, ne sachant comment conclure, invente une sortie qui n'a rien d'honorable) et, s'y ajoute un "bonus" tout à fait inutile sous la forme de mauvaises images vaguement porno. J'ai détesté, rythme irrégulier et qui se donne des airs de lenteur pour faire intellectuel, musique exaspérante et répétitive, faux polar, faux drames, tout donne l'impression de "se donner un genre". Intrigue sans intérêt, personnages caricaturaux, même et y compris le "bon", joué avec un talent évident par Vincent Lindon qui, seul, sauve ce navet du naufrage.



ILO ILO ****
Ce soir-là, nous allions voir Jimmy P.(Psychothérapie d'un indien des plaines). Au bout de quelques minutes, on trouvait que l'indien avait les yeux bien bridés, que le Kansas ressemblait à Singapour, et que tout cela était étrange. Mais nous sommes restés et bien nous en a pris. Ilo Ilo est vraiment un très beau film : des cadrages sublimes (on a ensuite appris qu'il avait eu la Caméra d'Or à Cannes et c'est amplement justifié), un rythme très juste, une histoire simple mais attachante et des acteurs parfaits. Que demander de plus ? Ce qui est particulièrement réussi ici, c'est que pour traiter un sujet de société délicat, l'emploi des étrangers crevant de faim, obligés de laisser famille et enfants pour permettre à tous de survivre, Anthony Chen ne fait pas dans la caricature. La jeune philipinne n'est pas maltraitée, le gosse dont elle s'occupe s'attache à elle, le père est respectueux, voire très humain, et la mère, toute stressée et fatiguée qu'elle soit, reste très convenable dans sa relation avec sa "maid". Le drame est ailleurs, il est chez les employeurs, il est dans la société de Singapour, il est dans les non-dits, dans les tensions qui écrasent les personnages. La complicité qui naît entre cette jeune mère, obligée de servir pour assurer le quotidien de son fils et ce jeune garçon, gâté mais dont les avantages sont fragiles et qui souffre de ce qu'il ne comprend pas du monde des adultes, cette complicité qui trouve son point d'orgue au moment de leur séparation est salvatrice. Pour tous. Un très beau film, à voir absolument.



Voir Catherine Deneuve, quand on a la soixantaine, quelques kilos en trop et des nostalgies à voir "la vie envelopper de son étrange rotondité la matière éthérée de nos rêves" (2), ça vous re-booste très efficacement. Elle est belle, elle est drôle, elle est juste, on sort de ce film avec un super moral ! D'abord, c'est amusant, et même si c'est un tout petit peu long, on rit souvent et d'un rire gai. Pas d'ironie, pas de gagas éculés, pas de blagues foireuses, juste un quotidien qui sort de ses rails avec un certain panache. Bon d'accord, on nous y présente une image très, (trop ?) stéréotypée de la "province", celle où l'on s'ennuie d'une façon tellement glauque que c'en est pittoresque. Les personnages sont un peu caricaturaux, mais finalement si proches de la réalité !! Mais pas question de cracher dans la soupe : la talent de notre Grande Catherine illumine de bout en bout, par son naturel, par sa simplicité, par la mobilité sublime de son visage toujours très expressif, ce road-movie qui se décline sur le registre de la fragilité.


Mais que sommes-nous venus faire dans cette impasse ?? On nous avait promis monts et merveilles, parlé d'émotion, d'originalité, d'inventivité... Certes, le propos était, a priori, séduisant... mais n'est pas Philibert qui veut. Un saupoudrage soporifique et confus de saynètes sans grand relief, des acteurs secondaires qui jouent terriblement mal, des dialogues d'une lourdeur indigeste, quelques lieux communs en cerise sur le gâteau... Rien n'accroche le spectateur qui baille à s'en décrocher la mâchoire et finit par jeter l'éponge. Si l'on ajoute à cela des répétitions, comme la scène de l'escalier vide soudain envahi par la foule, et des maladresses récurrentes de tournage avec passants qui se décrochent le cou pour voir les vedettes, on trouve les deux heures très, très longues. Le pire c'est que le film se prend terriblement au sérieux et nous tisse une historiette insipide en trame de fond de cette soi-disant étude sociologique, qui n'est qu'une succession de faits divers, à peine ébauchés... Bref, après avoir entendu moult critiques enthousiastes, et pris acte que nous allions voir un chef d'oeuvre, nous sommes ressortis l'oreille basse, regrettant de n'avoir pas vu un "bon" documentaire sur la Gare du Nord.


Le phénomène n'a rien de bien nouveau : quand un Woody Allen sort, on avait beau s'être promis de n'y point retourner au motif qu'il est trop bavard, ou qu'il ne se renouvelle pas, on y va ! Et on n'est pas les seuls : "le dernier Woody Allen" est une valeur sûre pour remplir les salles. Et, finalement, on aurait tort de bouder son plaisir : c'est du bon cinéma, c'est bien fait, c'est tourné avec brio et les acteurs sont bons et impeccablement dirigés. Le dernier opus de l'américain chouchou des français est une comédie dramatique assez sombre, le personnage principal étant franchement dépressive et pas particulièrement sympathique. Car le discours est ici vraiment noir : les personnages sont assez insupportables, leurs motivations pas franchement honorables et il en résulte une vision amère d'une certaine société américaine.
Mais, comme souvent avec Woody Allen, c'est un peu trop agité et finalement, dans cette histoire plus grave qu'il n'y parait, c'est un peu gênant. Car il m'a semblé qu'une partie du propos du réalisateur était une réflexion que les liens familiaux, sur l'hérédité (il y est souvent question des "bons" ou des "mauvais" gènes, de la filiation biologique ou non) et sur la fatalité d'un certain "inné". Cependant, à cause des feed-back très fréquents qui brouillent un peu le récit, à cause des bouffées d'humour noir qui, forcément, distraient le spectateur, à cause surtout de l'excitation incontournable des personnages qui hache le rythme, ces arrières pensées évidentes ne sont pas développées et on ne saisit pas trop ce qu'Allen veut démontrer. Or son avis en la matière est forcément, sinon éclairé, au moins averti. Pour autant on passe un agréable moment, même s'il ne reste rapidement pas grand chose de cet épisode un peu superficiel. 

(1) D’habitude c'est le contraire, je fais dans Allociné un copié collé de mes critiques de blog.
(1) Citation !! celui qui a écrit cela se reconnaîtra !!!

8 commentaires:

  1. Pauvre Michelaise,
    Déçue parfois, déçue en bien d'autres fois (comme disent nos amis d'outre outre-Quiévrain). Heureusement que vous prenez le parti de vous faire votre opinion par vous-même ('s' si on ajoute Alter). Ne vous avais-je pas écrit il y a quelque temps que les critiques parlaient beaucoup plus d'eux-mêmes que des œuvres dont ils parlaient. Vous semblez le confirmer. C'est presque plus drôle de vous lire que d'écouter ou de lire des critiques... restez critique... parce que, si jamais vous deveniez critique, je me demande si vous ne finiriez pas par faire comme les autres critiques.
    Belle soirée.
    Michel de Lyon

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  2. Décidément Michel l'automne vous met en verve. Après vos démêlés avec Brioude et les affres des fenêtres ouvertes ou fermées ... vous voici aux prises avec la critique !! Et, de fait, vous avez tristement raison : les gens qui en font métier tournent un peu en rond autour de leur nombril ou autour de ce qui les rassure en étant culturellement correct, tendanciellement dans le sens du vent et intellectuellement consensuel. Donc si on les écoute d'un peu trop près, la déception n'est jamais bien loin.
    Quant au risque présumé que je succombe à des tels travers, vous connaissez trop ma supposée naïveté alliée à une réelle candeur pour craindre vraiment que cela me menace !!
    Mention particulière pour votre outre outre Quiévrain... qui, à vue de nez, pourrait désigner le Canada ?? À moins que, résidant à Lyon, vous n'ayez décidé de doubler le outre pour marquer votre éloignement de la Belgique ...
    En tout cas, un grand merci pour commentaire plein d'indulgence !!

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    1. Ohhh punaîîse... "outre outre"... foutu correcteur orthographique. Je l'avais écrit sans tiret ni majuscule à quiévrain. Petit souligné rouge et toc... je vérifie et valide (et pourtant, vous pouvez me croire, j'ai relu et rien vu). Du coup, il y a bien un tiret entre outre et Quiévrain.ainsi que deux outres qui vont bien à un buveur, même modéré. Et non, Michelaise, je ne pensais pas au Canada. Mon patronyme est issu du Hainaut ou des Ardennes Belges... alors... le Quievrain.... c’est tout de même pas le Saint-Laurent. En ce qui concerne Brioude et mes démêlés avec les persiennes... ne jugez pas trop vite les vieux messieurs ; vous verrez ce que c'est lorsqu'on bouscule leurs habitudes !
      De nouveau... Belle soirée... Les choses modernes de votre article suivant n'ont point encore excité ma verve automnale.

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    2. Ah Michel, je me disais bien qu'il s'agissait d'un tour pendable de votre clavier ! Mais j'ai voulu imaginer que ce Quiévrain là était revu et corrigé par vos soins.
      Quant à vos remarques coquettes sur le vieux monsieur que vous êtes censé être, elles sont là pour attirer une fausse compassion, que je ne vous offre pas, mais par contre je vous propose l'article de ce soir, écrit par une vieille dame qui était, hier, aux anges !! Je comprends parfaitement que Plensa ne vous "parle" pas, il faut, je crois, le voir in situ, ce soir-là sous une pluie battante, ce qui ajoutait au charme de ses œuvres.

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  3. Et bin paf moi je dégrigole de mon rêve ayant toujours cru que l'outre-quiévrain baudelairien faisiat allusion à une rivière peut être appelée Quievre. Que non, c'est lout mochement l'Hogneau qui sert de frontière et le Quièvrain est une contrée. Heureusement il reste des choses à fixer sur la toile,et l'oeil exercé de Michelaise donne envie de revoir encore une Catherine Deneuve,même devenue gironde.

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    1. Grionde Deneuve, en effet, et qui rassure toutes les girondes (dont je suis, voir l'article suivant !!!) : elle vous fait sortir du ciné le ventre plat, le regard conquérant et le sourire enfin sans arrière-pensée. Ce n'est pas un film qui se prend au sérieux, mais ça fait du bien, pour de vrai ! Tant pis pour les petites naïvetés dont il est parsemé...
      Quant à l'outre-Quiévrain, Michel a fait chauffer les moteurs de recherche !!!

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  4. Je reprends le fil du blog après quelques semaines off pour raisons de santé qui devraient me permettre d'aller + souvent au cinéma! Ilo ilo me tente beaucoup, il faut que je me dépêche.
    J'ai des amis qui vivent à HK et qui ont donc une maid. C'est très particulier comme relation, dans tous les cas, avec le meilleur, le pire, et un mélange des deux dans leur cas : à la suite d'un drame familial, le mari de cette jeune femme habite maintenant à HK, ils ont un bébé qui est élevé assez largement avec les enfants de mes amis.

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    1. Coucou Blandine, j'espère que ces ennuis de santé ne sont pas trop graves. Ilo Ilo devrait te plaire, c'est un film admirablement filmé (oups, mais bon, la caméra est superbe !!) et très humain. Il ne verse à aucun moment dans le manichéisme ou la simplification : ma fille a, elle aussi, une maid mais juste quelques heures par semaine. Et c'est vrai que cela rend encore plus sensible à ce genre de situation.

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