J'approche doucement de l'âge de la retraite, circonstance qui me donne, vis à vis de mon travail, un recul inattendu. Et je ne participe que de très loin aux incontournables discussions de salle des profs, prévisibles et convenues, auxquelles je n'ai d'ailleurs jamais vraiment pris part. Le thème en est redondant : "ils" ne font, rien, on n'arrive pas à en tirer quoique ce soit, cela ne cesse de s'aggraver, le niveau baisse et autres balivernes de cet acabit.
Je m'essaie, parfois, à tenter de démontrer à mes collègues que notre conception de la pédagogie est totalement dépassée, et que nos méthodes qui datent du temps béni mais révolu des "hussards noirs de la République" ne sont absolument plus adaptées au public actuel. Un public qui a l'habitude de vivre branché en direct sur le net, où tout est accessible, même et y compris une information de qualité et un réservoir impressionnant de savoirs et autres connaissances, diablement mieux présentés que par des profs grincheux ou ludiques. Au mieux, personne ne me comprend, au pire je me heurte à de légitimes soucis catégoriels "Mais qu'allons-nous devenir dans un système qui me poserait comme pré-requis le primat du maître ?". Pourtant c'est indéniable : nous rafistolons, nous tentons de suivre le mouvement, franchement dépassé par lui. Nous évoluons surtout dans un monde totalement parallèle et qui ne croise guère celui de nos élèves, perclus de convictions et de certitudes, rigidifiés dans un schéma qui n'est plus de mise.
La preuve ?? Cette délicieuse anecdote racontée l'autre jour par une collègue, qui part à la retraite mais persuadée comme moi que l'avenir sera différent, sous peine d'être débordés par des marchands de savoir. Elle racontait qu'un jeune homme de ses connaissances, vient, en attendant un autre boulot, d'accepter un poste dans l'Education Nationale. Il y souffre, comme tout un chacun dans ce métier, d'une réelle agitation des jeunes, incapables de rester tranquilles le temps d'une leçon, manifestant la plus grande difficulté à concentrer leur attention, jonglant à longueur de cours entre tablette et smartphone, bavardages et distractions en tous genres. Bref, une perpétuelle effervescence anime ses cours et il a le plus grand mal à en "placer une". Et il disait à cette amie un "truc" imparable, d'une efficacité souveraine et qui lui procure un calme parfait. Un jour qu'il en avait particulièrement assez, il déclara haut et fort à sa classe "si vous continuez, si vous ne vous calmez pas toute de suite, je vous raconte la fin des séries". Et là, dans un concert de lamentations, de supplications déchirantes "pitié monsieur, pas ça, pas", le miracle arriva : le calme s'installa et notre jeune maître des temps modernes put enfin faire son cours en paix. Brandissant au besoin de nouveau la menace suprême si, par hasard, quelque rumeur imprudente venait troubler cette classe assagie.
Il fallait être soi-même jeune et imprégné de ce qui fait la vie des adolescents, leurs convictions, leurs rêves et leurs idéaux pour comprendre comment les "prendre" et trouver si simplement l'argument susceptible de les calmer ! Ce que nous sommes très loin d'avoir saisi et que nous ne pratiquerons, je le crains, que trop tard !!
On peut essayer Schola Nova, pourquoi pas?
RépondreSupprimerOn peut !! l'espoir fait vivre ....
SupprimerIl faut trouver effectivement de nouvelles formules et ce n'est point facile.
RépondreSupprimerAux jeunes generations de prendre le relais. Il y a un temps pour tout.
Michel Serres a raison sur pas mal de points.Mais vous connaissez surement sa pensee.
http://www.lelephant-larevue.fr/le-grand-entretien-avec-michel-serres/
Bien sur cela n'empeche pas d'integrer a l'enseignement une formation en parallele d'etude de philosophie et de "decorticage" suivant l'interet de tous et de chacun.
Quant à l'étude de la philosophie, elle serait bienvenue aussi pour de nombreuses autres formations, la médecine, le droit ... enfin je pense !!
SupprimerN'importe comment je fais confiance aux jeunes professeurs car c'est un métier de jeunes car ils essaient de coller à leur époque pour être crédibles auprès de ces étudiants informés mais qui attendent toujours de l'enseignement les voies du savoir...
RépondreSupprimerLes jeunes professeurs admettent aussi qu'il ne détiennent pas tout le savoir...
Et la formation de ces nouveaux professeurs?
L'informatique ne peut pas tout et on aura encore longtemps besoin d'une pédagogie intelligente et évolutive pour faire passer les savoirs...
Pas facile tout ça !!!
Pas simple en effet et, à mon sens, l'Education Nationale est devant un chantier dont elle ne mesure, malheureusement, pas l'ampleur !
SupprimerEt vive la retraite Michelaise mais tu peux continuer pour faire de la recherche, l'expérience peut servir aussi à cela !! Foi de retraitée de l'Education Nationale !!!
RépondreSupprimerMamma mia, ma retraite est encore (trop) loin !! quoique j'en dise dans l'article... quant à la recherche, j'ai d'jà donné, dans ma jeunesse, et il n'en est resté qu'une thèse fort indigeste que personne, pas même moi, n'a jamais lue !!
SupprimerBien sur le monde change et la révolution internet a sans doute plus d'effets sur les comportements que l'arrivée de la fée électricité ainsi va le monde.
RépondreSupprimerune petite anecdote de ma belle-fille prof de français : A un contrôle de bac ou brevet blanc je ne sais plus elle a dicté un texte des Misérables où il était question d'une chemise de Jean Valjean qui était rapiécée..... il y eu plusieurs copies proposant l'orthographe suivante "rat pied c'est" évidement un forçat a des fers aux pieds et côtoie des rongeurs .... logique non ?
Seigneur Robert, qui sait encore ce que rapiécer veut dire ?? J'avoue adorer, personnellement, m'adonner au ravaudage, activité qui remplit mon Alter Ego de rage : mais enfin, me dit-il, tu ne vas pas aller en haillons !! Et pourtant, quand on a un vêtement qu'on aime bien, boucher en croisant les fils, un petit trou de rien du tout, c'est plutôt jouissif !!
SupprimerEt oui! s'adapter aux djeuns! Tout un sacerdoce lorsqu'on est enseignant:il ne me sera pas possible d'expérimenter d'autres pédagogies, le temps m'étant compté pour en voir les résultats.
RépondreSupprimerCependant cette période transitoire de nouvelles manières d'appréhender le savoir et la connaissance est bien préoccupante; elle semble faire peur, retardant la mise en place de plans efficaces et adaptés vers de nouveaux apprentissages...
Je pense à P'tit Valou qui pour l'instant apprend à manger des purées de légumes toujours avec une cuillère. Un peu spéciale elle aussi... elle a su s'adapter.
Mamina de sclos
On en est déjà aux purées de légumes !! J'ai le souvenir très aigu de ma propre fille qui avait trouvé un usage fort intéressant de la susdite cuillère : elle s'en servait de fronde et nous devions, pour la nourrir, nous déshabiller sous peine d'être constellés de purée !!
SupprimerQuant aux nouvelles méthodes d'apprentissage, on a du mal à comprendre, me semble-t-il, qu'il va falloir revoir toute la pédagogie et changer radicalement les approches pédagogiques. Mes collègues me semblent coincés dans leurs certitudes et cela me semble une très mauvais attitude ! Mais ce sont eux qui assureront la suite, advienne que pourra ...