mercredi 2 avril 2014

TOILES RÉCENTES


Pour moi, ce film est un vrai chef d'oeuvre. Un timing idéal, pas une image de trop, une esthétique en noir et gris de toute beauté, et le passionnant sujet du rôle parfois trouble, voire ici plus que trouble, des catholiques envers les juifs durant la deuxième guerre mondiale en Pologne. C'est superbement joué, une bande son magnifique qui joue un vrai rôle dans le film !! Et en plus, je viens de découvrir qu'un des deux personnages principaux, quoique revu et corrigé par le metteur en scène, a existé !! Le personnage de Wanda a, en effet, été inspiré par l'épouse de l'ancien professeur d'économie du réalisateur Paweł Pawlikowski, lorsque ce dernier étudiait à Oxford dans les années 80. Les ayant perdu de vue par la suite, il apprit quelques années plus tard la demande d'extradition de cette femme, accusée d'avoir été dans les années 50 une procureure active dans les procès staliniens de l'époque : "Je n’aurais jamais pu imaginer cette femme si charmante avoir pu être une fanatique aveugle dans sa jeunesse et avoir vécu deux existences (trois en fait, si l'on compte son enfance juive) aussi antinomiques. Ce paradoxe m’a hanté pendant des années. J’ai d’ailleurs essayé de tourner un documentaire sur elle, mais elle était contre. Après le scandale, elle est tombée malade et est décédée. Elle m’a inspiré le personnage de Wanda qui est aussi assez paradoxal, à la fois très humaine, drôle et chaleureuse, et qui a également du sang sur les mains."
Non content d'être absolument superbe, le film traite d'une Pologne, celle des années 60, dont l'histoire nous est proche. Une Pologne qui se cherchait, religieusement parlant. Paweł Pawlikowski explique : "La Pologne a une relation particulière avec la religion catholique. On a subi l’occupation étrangère pendant près de 150 ans, les forces occupantes étaient des Russes orthodoxes ou des Prussiens protestants. Face à elles, et bien au-delà de la simple notion de foi, l’Eglise catholique était le socle de l’identité nationale polonaise. Et cela s’est encore renforcé durant la période communiste. " Une Pologne qui avait aussi du mal de se remettre des exactions de la guerre et du comportement trouble de certains de ses citoyens à l'égard des juifs.
Simple restriction, mais finalement ce n'en est pas une : le film est beau, mais pas émouvant. Mais la vie narrée est tellement cruellement vide de tendresse qu'il est normal que le réalisateur ait distancié son propos.


Un film au rythme enlevé, plein d'humour et pourtant très tendre. Wes Anderson et le scénariste Hugo Guinness confient avoir un ami en commun qui leur a inspiré, par la singularité de son esprit, le personnage de Gustave, le concierge de l’hôtel. Le réalisateur a ensuite intégré cet homme hors du commun dans une station thermale du XXème siècle, située dans un pays européen fictif : Zubrowka. D'après lui, The Grand Budapest Hotel serait un melting pot "de comédies d’avant la censure des années 30, ainsi que les histoires et les mémoires de l’auteur viennois Stefan Zweig".
Le palace rose bonbon qui sert à l'intrigue de The Grand Budapest Hotel n'est pas un décor monté de toutes pièces : il existe réellement et c'est le Görlitzer Warenhaus, un ancien grand magasin historique d'un centre commercial construit en 1912 à la frontière de l'Allemagne, la Pologne et la République Tchèque. Cet établissement qui a l'allure d'une maison de poupées emprunte son architecture à l'équivalent de l'Art Nouveau en Allemagne et s'étend sur une superficie de 10 000 mètres carrés où l'équipe du film a d'ailleurs installé ses bureaux et ses ateliers.
L'intrigue est, bien sûr, totalement loufoque, mais c'est traité avec beaucoup d'esprit. C'est un opus baroque, avec tous les ingrédients nécessaires : décors démodés et outrés, intrigue à tiroirs savamment menée, retours en arrière, courses effrénées, revirement de situation, évasions, histoires d’amour… et la sauce prend ! Le contexte historique qui n'est pas dû au hasard  et donne du poids au film en relatant la montée du fascisme dans les pays de l'Est dans les années 30. C'est ainsi qu'un comédie irrésistible, parfois à la limite du cartoon, traite d'un sujet grave avec un réel succès.


8 commentaires:

  1. IDA, oui un vrai chef d’œuvre, je suis d'accord, mais je l'ai trouvé émouvant aussi, surtout à la fin et avec le personnage de la tante, plus qu'Ida enfermée dans sa foi et sur qui tout semble glisser. Pour le Grand Budapest Hôtel, j'en attendais plus, cela ne lui enlève rien. Depuis j'en ai vu d'autres et en particulier Only lovers left alive, un pur chef d'oeuvre aussi qui revisite avec classe le film de vampires, mais c'est tellement plus que ça. J'ai un peu la flemme d'écrire sur les films que je vois, de plus en plus, je n'ai pas l'impression que mon avis intéresse beaucoup... Et pourtant je suis heureuse lorsque je lis d'autres avis, comme ici. Merci.

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    1. Heureuse aussi Françoise de partager avec vous !! D'autant que, vous avez bien vu, les articles sur le cinéma ne sont pas très porteurs ...
      Oui, vous avez raison, la tante est, quand elle pleure sur l'épaule de sa nièce, émouvante, c'est Ida, pauvre orpheline élevée sans tendresse, qui est froide.
      Pour Grand Budapest Hotel, vous avez plus de références que moi et cela complète bien l'article, merci à vous

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  2. J'ai vu ces deux film et en effet, Ida ne procure aucun émotion et moi je trouve que l'émotion est totalement indispensable pour éprouver de l'intérêt, voire de l'enthousiasme, sinon de l'attachement pour une oeuvre d'art, autrement je regarde un documentaire, bien que certains documentaires soient à mettre dans la catégorie des œuvres d'arts, je me souviens des docus magnifiques de Nicolas Philibert qui procurent ce genre d'émerveillement et d'émotion forte (La ville Louvre, Le pays des sourds, La moindre des choses, Être et avoir, Retour en Normandie.... Je pense aussi à Alain Cavalier avec ses admirables portraits de femmes au travail. Ida me rappelle formellement ce que je voyais dans les années 70/80 avec les cinéastes polonais, comme d'Andrzej Wajda par exemple, donc avec Ida rien de nouveau sous le soleil pour moi, sinon un ennui qui se distille dès le début :-))) J'ai été bien sûr très très déçue !

    Je trouve aussi que Le Grand Budapest Hôtel est un film magnifique, chaque plan est une trouvaille, les couleurs somptueuses, tous les décors impressionnants, un beau livre d'images, mais là encore, rien ne se passe vraiment, j'ai vite ressenti de l’ennui, ... Mais le film avait suscité en moi suffisamment d'intérêt pour... Me précipiter à la médiathèque de mon quartier pour prendre le DVD de son film "À bord du Darjeeling Limited" et... Je ne l'ai pas trouvé, mais je ne baisse pas les bras...

    Par contre, j’ai vu il y a quelques semaines, un film japonais qui s’appelle « Tel père tel fils » de Hirokasou Koreeda et qui m’a bouleversée, sur un thème inattendu : enfants biologiques, enfants d’adoption…Peut-être l'as-tu vu ?

    Grosses bises du jour chère Michelaise.


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    1. Oh que oui, je l'ai vu Danielle, et je l'ai trouvé ... sublime : l'émotion était au rendez-vous à chaque instant, c'était tendre, drôle, suggéré, enlevé, bref j'avais adoré !! J'y ai expédié manu militari mon amie Madeleine, dont la belle-fille est japonaise et les petites filles élevées dans l'esprit asiatique : elle l'a adoré et nous en avons parlé longuement. Tellement que j'ai oublié d'en faire un article. Merci de me donner l'occasion d'en parler et de dire combien il m'a touchée.

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  3. J'ai vu les deux, et partage tes commentaires. Vu surtout le grandissime "Tango" de Carlos Saura, (film+conférence) et acheté derechef le DVD...

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    1. Tu as raison, c'est un film qui se voit, et se revoit !!

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  4. Grand Budapest Hotel, tout le monde m'en dit du bien ! je pense que je vais me laisser tenter ce week end ;) merci pour votre billet !

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    1. L'avez-vous aimé finalement MrPhilff ?? En tout cas, vous avez passé un moment agréable !

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