Le musée de Bologne, dont je vous ai déjà présenté la salle consacrée aux citadines célèbres, est installé dans un palais ancien dont un architecte talentueux, Mario Bellini a réhabilité la structure intérieure de façon impressionnante. Une tour en acier et en verre de 22 mètre de haut, qui ressemble à une chambre optique gigantesque tournée vers le ciel, a été dressée à l'intérieur du Palais Pepoli et joue le rôle de hall d'accueil et de lien entre les différentes sections de l'édifice.
Le musée est installé dans un palais qui remonte à 1344 et qui a été bâti par la famille qui a gouverné la ville pendant la renaissance et dont il est resté la propriété jusqu’au XX siècle.
À partir de 2005 l’immeuble a été restauré par Mario Bellini avec l'idée de distinguer le conteneur, c’est-à-dire l’immeuble, du contenu, c’est-à-dire les expositions. C'est ainsi que cette tour d'acier aux allures futuristes accueille une exposition lumineuse sur le temps. Sur les rapports de la ville de Bologne avec le temps.
Au Moyen Age, à Bologne comme ailleurs, le temps ce sont les Livres d'Heures, illustrées dans de précieux manuscrits par des miniatures, dont celles-ci, extraites d'un cycle de 12 consacré, vous vous en doutez, aux mois. Elles ont été réalisées par Niccolo da Bologna (actif de 1353 à 1401, chef d'un florissant atelier qui exécutait, à la demande de riches commanditaires, une grande variété de manuscrits : textes universitaires, forcément à Bologne, textes liturgiques, livres de dévotions privée ou de poésie profane.
Toutes les scènes, ornées d'un soleil rouge, décrivent les travaux du mois (selon vous ??) et se doublent, selon la tradition du signe zodiacal correspondant.
Buste du Pape Grégoire XIII, 1580, par Alessandro Menganti (1531-1594)
C'est par une bulle du 24 février 1582 que le pape Grégoire XIII, au civil Ugo Boncompagni, décréta la réforme du calendrier qui porte son nom, remplaçant le précédent créé par Jules César. Pour adapter le nouvel écoulement du temps au rythme des saisons, il supprime 10 jours, et le jeudi 4 octobre (jour de la fête de San Petronio, patron de Bologne justement !) fut suivi du vendredi 15 octobre de façon à ce que l'équinoxe de printemps tombe désormais le 21 mars, au lieu du 11.
Grégoire XIII était diplômé en droit de l'Université de Bologne, docteur de jurisprudence, et après une jeunesse plutôt "libre" (il eut même un fils), il devint prêtre à l'âge de 40 et fut élu pape en 1572.
Tout aussi primordiale dans l'histoire de la mesure du temps est la grande méridienne que construisit Gian Domenico Cassini, docteur en astronomie de l'Université de la ville, en 1655. Elle mesure 67.72 et est, à ce titre, la plus longue du monde (Wouah !! les italiens aiment ça !!). Je ne vous expliquerai pas en quoi elle est exceptionnelle, d'autres sites le feront mieux que moi (et vous pourrez même, sur cette page, l'agrandir autant qu'il vous plaira pour la parcourir en détail) ! Mais la réputation qu'elle valut à Cassini fit qu'il fut appelé à la cour de Louis XIV pour participer à la réalisation de l'Observatoire Royal, dont il fut le premier directeur.
Un autre bolognais qui œuvra pour faire évoluer le décompte du temps est Quirico Filopanti : patriote, homme politique mais aussi scientifique. Il joua un rôle non négligeable dans l'histoire du Risorgimento : député, il était convaincu de la nécessité d'accorder de meilleurs conditions sociales au peuple et prônait, en outre, une vulgarisation de la science. Garibaldi l'appelait "le professeur de l'infini" et on lui attribue l'invention, sous le nom de "jours longitudinaux" des fuseaux horaires.
Le temps sous toutes ses formes est donc évoqué dans l'entrée du musée... thème de prédilection des natures mortes, comme celle de Bordoni où il figure sous la forme d'un calendrier lunaire (fin du XVIIème), il y symbolise la vanité de la vie, sa finitude et la nécessité de ne pas céder aux sirènes des plaisirs et aux excès du monde....
... toujours du XVIIème, cet autoportrait d'Agostino Carracci le représente, devant une étagère où figure une pendule et montrant au spectateur une montre de gousset : une autre façon de mettre l'homme en garde de la brièveté de la vie et de la proximité toujours inquiétante de la mort.
Autant donc rester maître de ses jours et de ses heures, ainsi que propose de le faire ce calendrier de Carême, réalisé par Claudio Porroni (1705-1769). Réalisé pour organiser la vie quotidienne d'une communauté religieuse durant la période du Carême, il détaille les 40 jours de ce cycle : à droite figurent les jours de jeûne durant lesquels il faut s'abstenir de viande, à gauche sont illustrées toutes les cérémonies liturgiques de la période, comme la procession de la Madonne de San Luca ou les célébrations du Vendredi et du Samedi Saints.
Toutes ces circonstances un peu particulières font donc de Bologne, avec Genève et Greenwich, l'une des capitales mondiales de mesure du temps. Dès les débuts de l'industrialisation la ville se peupla d'horloges publiques qui devinrent des éléments caractéristiques du paysage urbain, rythmant la vie quotidienne de tous et marquant les heures sombres de la ville.
Témoin la pendule de la salle d'attente de la gare, définitivement arrêtée à 10h25, heure de l’innommable attentat qui, le 2 août 1980, faucha 85 vies et blessa plus de 200 personnes. Siù nous l'avait montrée quand nous sommes allées l'accueillir à la gare, et ce symbole discret nous avait permis, l'espace d'un instant, de rendre un hommage fugace aux victimes et de "faire mémoire". Pour ceux qui ont suivi en direct, il y a beintôt 34 ans, ces événements dramatiques, le symbole est fort.
Lorsque la bombe éclata, jour de départ en vacances, la salle d'attente était bondée, ce qui explique le très lourd bilan de cet épisode qui reste parmi les plus horribles moments des "années de plomb". L'explosion fut si violente qu'un train en partance pour Chiasso situé au-dessus de la salle d'attente fut renversé et partiellement détruit... la gare toute entière n'étant plus que ruines. Malgré plusieurs procès qui impliquèrent divers leaders politiques , les instigateurs du massacre n'ont jamais été découverts. Le 2 août est considéré en Italie comme la journée de la mémoire de tous les massacres terroristes. La reconstruction de la gare a préservé le trou causé par l'explosion dans la salle d'attente et, nous l'avons dit, l'horloge, qui indique éternellement 10 h 25.
... toujours du XVIIème, cet autoportrait d'Agostino Carracci le représente, devant une étagère où figure une pendule et montrant au spectateur une montre de gousset : une autre façon de mettre l'homme en garde de la brièveté de la vie et de la proximité toujours inquiétante de la mort.
Autant donc rester maître de ses jours et de ses heures, ainsi que propose de le faire ce calendrier de Carême, réalisé par Claudio Porroni (1705-1769). Réalisé pour organiser la vie quotidienne d'une communauté religieuse durant la période du Carême, il détaille les 40 jours de ce cycle : à droite figurent les jours de jeûne durant lesquels il faut s'abstenir de viande, à gauche sont illustrées toutes les cérémonies liturgiques de la période, comme la procession de la Madonne de San Luca ou les célébrations du Vendredi et du Samedi Saints.
Toutes ces circonstances un peu particulières font donc de Bologne, avec Genève et Greenwich, l'une des capitales mondiales de mesure du temps. Dès les débuts de l'industrialisation la ville se peupla d'horloges publiques qui devinrent des éléments caractéristiques du paysage urbain, rythmant la vie quotidienne de tous et marquant les heures sombres de la ville.
Témoin la pendule de la salle d'attente de la gare, définitivement arrêtée à 10h25, heure de l’innommable attentat qui, le 2 août 1980, faucha 85 vies et blessa plus de 200 personnes. Siù nous l'avait montrée quand nous sommes allées l'accueillir à la gare, et ce symbole discret nous avait permis, l'espace d'un instant, de rendre un hommage fugace aux victimes et de "faire mémoire". Pour ceux qui ont suivi en direct, il y a beintôt 34 ans, ces événements dramatiques, le symbole est fort.
Lorsque la bombe éclata, jour de départ en vacances, la salle d'attente était bondée, ce qui explique le très lourd bilan de cet épisode qui reste parmi les plus horribles moments des "années de plomb". L'explosion fut si violente qu'un train en partance pour Chiasso situé au-dessus de la salle d'attente fut renversé et partiellement détruit... la gare toute entière n'étant plus que ruines. Malgré plusieurs procès qui impliquèrent divers leaders politiques , les instigateurs du massacre n'ont jamais été découverts. Le 2 août est considéré en Italie comme la journée de la mémoire de tous les massacres terroristes. La reconstruction de la gare a préservé le trou causé par l'explosion dans la salle d'attente et, nous l'avons dit, l'horloge, qui indique éternellement 10 h 25.
Je dédie aux victimes de la barbarie du 2 août 1980
cette évocation d'un temps qu'il ne leur pas été permis de vivre.
cette évocation d'un temps qu'il ne leur pas été permis de vivre.
Merci Michelaise, de tout mon coeur, pour l'hommage que tu rends ici de façon si sincère et sensible aux victimes de la Strage di Bologna.
RépondreSupprimerA la place de mes mots, qui ne seraient qu'absolument inadaptés et insuffisants, je me permets de recourir à des images, à deux séries de photos qui font assez bien comprendre, je crois, aussi bien la portée de la tragédie du 2 aout que la participation chorale de la ville de Bologne à la journée de commémoration, chaque année, depuis 24 ans le prochain mois d'aout. Une participation qui n'a rien ou très peu de formel, tellement elle est profonde et d'une qualité humaine et civile vraiment extraordinaire, qui se traduit dans un long défilé qui se termine et a bien évidemment son clou sur la place de la gare. Et inlassablement, en devant de tout, toujours la meme banderole, à la fois si correcte et déchirante :
BOLOGNA NON DIMENTICA.
Un sentiment ému et profond de reconnaissance, d'admiration et de solidarité c'est ce que j'éprouve envers les infatigables proches des victimes de ce massacre, qui en 1981 ont fondé l'"Associazione tra i familiari delle vittime della strage alla stazione di Bologna del 2 agosto 1980".
Voilà son site : http://www.stragi.it/
Et voilà les deux séries de photos devant lesquelles je me tais :
http://bologna.repubblica.it/cronaca/2012/08/02/foto/bologna_non_dimentica_quella_bomba_alla_stazione_32_anni_fa-40204020/17/
http://bologna.repubblica.it/cronaca/2012/08/02/foto/due_agosto_il_ricordo_il_corteo_e_la_piazza-40210196/1/?ref=NRCT--1
Pardon je dois corriger, les années passées ne sont pas 24 mais bien sur 34.
RépondreSupprimerJ'en profite pour dire encore une fois à Michelaise combien notre rencontre bolonaise était pour moi intense et agréable... Encore un grand merci !
Et une bonne journée.
Merci Siù pour ces adresses que je me permets de remettre avec un lien actif :
RépondreSupprimerBologna non dimentica
série de photos 01
Série de photos 02
Un souvenir terrible en effet, même pour nous...