jeudi 2 octobre 2014

C'ÉTAIT LE DERNIER JEUDI ...

La superbe photo du concert de Saujon n'est pas de moi (pas le droit de monter à la tribune !! et surtout pas envie de troubler le concert ...) mais du journal Sud-Ouest

Après une belle période de béatitude musicale - 4 longs mois de concerts hebdomadaires (voire bi-hebdomadaires) - la fête est finie et les Jeudis Musicaux ont plié boutique jusqu'en juin 2015. Cela fait tout drôle d'être jeudi et de ne pas être en train de faire la queue devant une de nos églises saintongeaise, coussin à la main pour affronter les bancs inconfortables et patience inaltérée pour obtenir un billet à 12 euros (1), sésame indispensable pour profiter des talents offerts à notre écoute. Le dernier concert, il y a 8 jours, nous a permis d'entendre, dans un récital Schubert-Liszt, Bertrand Chamayou dont nous sommes, Pétignac oblige, des fans (presque) inconditionnels. Ce programme, nous l'avions déjà entendu il y a à peine plus d'un an, dans le cadre du Festival de Saintes, et, pudiquement, j'avais préféré ne pas m'en faire l'écho, n'aimant pas trop exprimer ici des réticences qui, la toile est faite ainsi, laissent des traces souvent trop durables. Ce qui est admirable c'est que Bertrand, à qui nous disions après le concert l'avoir entendu à Saintes, sans oser aller plus loin qu'un pudique " le concert de ce soir était parfait", nous avoua avec la modestie qui le caractérise qu'il n'avait pas alors assez les morceaux "dans la peau", et qu'il n'était sûrement pas au mieux de sa forme pianistique. Quelle belle leçon d'humilité de la part d'un très grand artiste qui a travaillé un an, et qui sait qu'il s'est ainsi approprié ces œuvres qu'il joue maintenant avec une finesse d'interprétation, une audace et une sensibilité qui leur rendent toute leur lisibilité. Quelle belle persévérance aussi de jouer et rejouer jusqu'à atteindre une perfection, un côté "achevé" qui s'entend et se partage comme une véritable offrande musicale.

Toujurs grâce au  journal Sud-Ouest, la photo de congratulation de fin de Festival où l'on nous a promis que la communauté d'agglomérations Royan Atlantique continuera à financer le superbe travail de Yann le Calvet (à droite) : merci aux élus !!

Les Jeudis Musicaux ont donc pris leurs quartiers d'hiver et il nous faut attendre 8 mois pour retrouver ces concerts pleins de charme et d'une qualité sans cesse plus aboutie... et vivre à plein (nous faisons très attention aux dates de nos escapades durant l'été afin d'en rater le moins possible) ce qui est sans doute un des, si ce n'est LE plus long Festival de France !! Une très belle démocratisation de la musique dite "classique", offerte pour un prix très doux à tous, créant dans les "campagnes" un vrai attachement à ces manifestations qui sont, souvent, le seul concert de l'année dans de petits villages perdus. Qu'on imagine : 34 communes, de Royan, la "ville" aux plus petits endroits, comme Floirac, 321 habitants... et, chaque fois, une église pleine ! Des mélomanes, bien sûr, mais en juin et en septembre, nettement moins de touristes, des fidèles et, "pour de vrai", les habitants du village. Cela dure depuis 26 ans et les gens ont pris l'habitude de venir, plus du tout rebutés par l'aspect "classique" de la musique qui s'offre à eux. Accueillis comme de vieux amis par l'incomparable directeur artistique (bénévole) du Festival, Yann Le Calvet, qui fait là oeuvre de vulgarisation au sens noble du terme, chacun se sent chez soi dans ces concerts. Les oeuvres sont toujours présentées avec générosité par les artistes. Et le pot qui suit permet de parler en toute décontraction avec eux, offrant à tous une vraie familiarisation avec la pratique musicale. Un beau boulot qui mérite, une fois de plus, d'être salué !


Il me venait, ce matin, une interrogation, voire un agacement, en entendant parler un quelconque journaliste sans doute bien intentionné mais têtu, de "spectacle vivant". Il décrivait une initiative "culturelle" d'un genre un peu mineur, théâtre de rue et saynètes improvisées, et il en avait plein la bouche de son "spectacle vivant". Et moi de me demander si les spectacles auxquels nous assistions toute l'année, du Festival des Jeudis Musicaux au théâtre avignonnais en passant par d'autres concerts ou pièces, était du "spectacle mort". Il m'est donc advenu une curiosité légitime : mais qu'est-ce donc que ce "spectacle vivant" pour qu'on lui tresse de telles louanges et qu'on l'appelle ainsi, n'hésitant pas à jeter une suspicion de sclérose et d’encroûtement sur les autres formes d'expression. Wikipédia, à l'aide !!
"Le spectacle vivant se caractérise par la coprésence d'actants (ceux qui donnent à voir et à entendre) et d'un public (ceux qui ont accepté de voir et d'entendre)."
Misère, on commence bien avec un tel verbiage !! Continuons ...
"Il éveille un sentiment chez le spectateur : tragédie, mélancolie, joie, anxiété,... En cela, le spectacle vivant désigne de nombreux modes d'expression artistique : le théâtre, la danse, les arts du cirque, les arts de la rue, les arts de la marionnette, l'opéra et la musique live. On parle aussi d'arts du spectacle mais cette expression peut également englober le cinéma dans certaines acceptions, notamment dans les cursus universitaires adoptant cet intitulé."
Malheur, les cursus universitaires maintenant, et les vieilles badernes de mandarins qui parfois y sévissent !! Passons... Forte de ce viatique, qui ne m'a pas appris grand chose au passage, j'ai continué ma quête : pour apprendre plus loin que les derniers budgets de la Culture étaient, vous le saviez, en baisse (d'environ 4 ou 5%) "malgré une sanctuarisation du spectacle vivant". Mazette !! Quel tour de force, sauf à déclarer que la Culture, avec un grand C et le susdit spectacle, ce n'est pas la même chose. Ah bon, mais alors ce n'est guère flatteur pour lui ! Déclaration du candidat Hollande en 2012 « La Culture fait partie du patrimoine et de notre projet » martelait le futur président de la République, en insistant sur les efforts particuliers qui seraient consentis en 2012 pour le spectacle vivant même en cette période de crise. Bon, c'est donc particulier le spectacle vivant, et cela doit être protégé, sanctuarisé (oh le vilain mot en l'espèce), défendu ... contre ... contre qui justement ?? Contre le spectacle mort ? Celui qui n'est "que" culture ? Voyons, ce n'est pas sérieux tout cela, et les baisses drastiques de toutes les subventions aux divers festivals estivaux prouvent qu'on mélange un peu les notions et les genres.

Est-il assez "spectaculaire" l'éclairage du choeur de l'église pour avoir droit au qualificatif "vivant" ???

Bon, je l'avoue, je fais la bête pour avoir du foin, mais Larousse me précise que "l’appellation «spectacle vivant» désigne un spectacle qui se déroule en direct devant un public, par opposition aux créations artistiques de l’audiovisuel issues notamment du cinéma, de la télévision ou d’Internet. Elle s’applique majoritairement au théâtre (en salle ou dans l’espace urbain), à l’opéra, à la danse, au cirque et au cabaret. Elle peut être aussi employée pour désigner les diverses formes de musique (classique, contemporaine, variétés, jazz, rock, etc.). Cependant, il s’agit là d’un élargissement de la notion, car le concert de musique, mis à part quand il se déroule avec des effets spectaculaires, ne relève pas exactement de la représentation." Où l'on apprend que la musique est proprement bannie du concept car pas assez "spectaculaire". Ben voyons, allez dire cela au jeune Edgar Moreau quand il se donne à entendre après une jeunesse passée à décliner ses trilles, à Bertrand Chamayou qui a peaufiné amoureusement son Schubert pendant plus d'un an pour nous le servir à point, au quatuor Modigliani qui s'évertue à distiller la musique comme un récit parfait ... et à tous ceux Yann avait invités cet été. Pas vivants les mecs, bons pour le cimetière ! Il y a des moments où les manies langagières de notre époque bégueule et bourrée d'a priori, me porte sur le système !! Et j'aimerais bien que les élus de tous poils entendent que ce n'est pas en subventionnant tout ce qui bouge (2) au détriment de formes artistiques jugées trop "conventionnelles" qu'ils aideront à une vraie démocratisation de la culture. Tous les Festivals de Musique Classique ont vu leurs aides dramatiquement ratiboisées, alors que la grande majorité enregistrent une magnifique fidélité, voire un sérieux accroissement de leurs publics. Alors, cherchez l'erreur !!

Allez, une dernière pour la route, bleue celle-ci !!

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(1) avec une entrée offerte toutes les 6 entrées, cela ramène le prix de la place à ... 10€ (5 x 12€ = 60 € les 6 places)
(2) Je cite : "Le corps est au centre des arts du spectacle vivant ; Il est un moyen d’expression pour les artistes et un moyen de réception pour les spectateurs." 
Je cite encore "Les artistes se jouent de leur image pour entrer dans la peau d’un personnage, pour interpréter une oeuvre artistique. Un danseur qui danse nu par exemple ne fait pas qu’exposer son corps aux regards, il incarne un personnage et interprète une oeuvre en public. Dans le spectacle vivant, les artistes constituent pour eux-mêmes leur premier outil de travail ... Ainsi l’expression corporelle leur permet d’exposer artistiquement leurs mondes intérieurs."

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