lundi 2 juin 2008

NOEL EN JUIN

C'est ça dans les familles, on s'adore, on se déteste, on se déchire, et on ne sait plus tellement pourquoi. Mais on est ensemble, on se réunit aux fêtes carillonnées, et on grave un tissu de souvenirs à égrener en désordre aux moments difficiles. J'en parle sans savoir, car nous, nous n'avons pas de famille, nos fêtes carillonnées sont intimistes et nos déchirements à usage interne. Cela nous fait toujours un peu l'effet d'un jardin exotique ces films sur le thème éternel (et apparemment convenu) de LA famille. Nos parents nous l'ont refusée, avec leur malthusianisme forcené et idéologique. C'était une volonté de rester entre soi, cellule réduite à sa plus simple expression, et refus absolu de tout rapprochement vécu comme une corvée. On fait avec, cela a des côtés agréables parfois (enfin on essaie de s'en convaincre) puisqu'on évite les chamailleries, les pesanteurs de ces moments stéréotypés, pourtant c'est un schéma aride, et les plaintes de ceux qui ont à "subir" leur famille, nous semblent parfois bien déplacées !! Mais on ne nous a pas demandé notre avis, et mère Nature, ingrate ou injuste, nous a interdit de remédier à cet état de fait en fabriquant notre propre famille nombreuse. C'est ainsi et ce n'est pas le sujet de mon article !

est un vraie réussite dans le genre chronique familiale. On a beaucoup dit qu'il était caustique, j'avoue que le ton très libre qu'il adopte m'a particulièrement séduite. Il règne dans la famille de Junon une sorte de transparence qui dédramatise tout. On se dit tout, et, disant, on dédramatise. Cela n'empêche ni la haine, ni les fureurs, mais on n'a pas de "cadavres dans le placard", on sait où on en est. Et la seule qui fait secret des raisons de ses rancœurs, est celle qui en souffre le plus. L'analyse psychologique, sociologique et affective est fine et délicate, très fouillée, et tous les personnages sont très dessinés. Celui, antique et sculptural, de Junon se dresse comme un monolithe au centre de l'histoire et elle régit la vie des siens à travers le prisme de sa propre blessure. Mais elle est très intelligente, quoique d'une froideur effrayante, et elle sait l'importance de son rôle, elle tente de ne pas en abuser. Le plus émouvant est le père (Jean Paul Roussillon, le vieux crapaud amoureux d'une sirène, est parfait), teinturier minimaliste et obstinément banal, alors qu'il est le plus riche et le plus complexe de tous ces personnages. Les autres se débattent avec plus ou moins de talent contre leurs monstres, contre leurs angoisses et leur désir d'exister par-delà la mort du premier né, Joseph, qui les a tous marqués au fer rouge.
Une caméra d'une vivacité, d'un rythme éblouissant permet de faire face à ces 2h30 où il ne se passe pas grand chose, sans un instant d'ennui, voire en étant parfois haletant devant des mystères qui n'en sont finalement pas. La musique est au top, elle joue de nos émotions et de nos espoirs, sans jamais tomber dans l'exagération. La direction d'acteurs est parfaite (les 2 gamins en sont un preuve éblouissante), au millimètre, les dialogues sont incisifs et jamais inutiles, tout est parfaitement ficelé, et le propos ne se limite pas à une chronique familiale rebattue : on y parle de maladie, des autres, de mort, de schizophrénie (celle du fils d'Elisabeth est décrite avec un talent et une justesse rares)... Ce film ne résout rien, n'explique rien et pourtant tout est clair. C'est un beau conte moderne, ouvert, tolérant et réaliste. Il ne tombe à aucun moment dans la facilité, et le rythme est parfait. On en arrive à oublier que c'est du cinéma, tant on est immergé dans l'histoire. Bref, allez le voir ! Ou le revoir, car il est tellement dense qu'on sait qu'on a laissé passer des détails ! C'est un film qu'il faut partager et dont il faut parler ensuite, car on n'a pas tout remarqué tout seul !



1 commentaire:

  1. De Michel : je n'ai pas la vision optimiste de Nicole, le film est dur. Les cadavres ne sont pas dans le placard, ils sont là, au milieu des humains. C'est sans concession.

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