mardi 15 juillet 2008

DES LARMES AU RIRE

Nous avions l'intention en ce dernier jour d'aller voir Raymond et Ginette à Marseille, mais ils n'étaient pas chez eux et nous avons donc décidé de nous offrir un jour de théâtre supplémentaire. D'autant qu'il y avait deux pièces que nous voulions voir absolument, et qui furent, c'est l'ironie de ce genre d'activité, les 2 plus mauvaises du séjour. Enfin à notre goût...
Après avoir couru les hôtels dès potron-minet (à 7 heures j'attendais la patronne terrifiante du Kyriad pour tenter de réserver des chambres que j'ai fini par obtenir de haute lutte à 10h, en usant d'arguments divers pour la convaincre de me les louer), nous sommes allés voir
"Enfermée dans un asile par sa famille, une libanaise trop délurée y égrène entre rires et larmes l'impossibilité d'être une femme libre." Fabienne Pascaud - Télérama
"L'actrice libanaise livre un récit d'une impiété impitoyable." Brigitte Salino - Le Monde
"Darina Al Joundi capte le public dès le début du spectacle." Clare Shine - Financial Times
"Cette figure du théâtre et du cinéma se livre avec une intensité rare." C. Makereel - Le Soir (Belgique)
"Avec la complicité de l'écrivain Mohamed Kacimi et du metteur en scène Alain Timar, Darina Al Joundi porte à la scène une vie de révolte et de combat pour la liberté. La sienne." B. Bouvet – La Croix
"Un récit bouleversant." M-J Sirach – L'Humanit é

La rumeur dans les files nous avait chaudement, chaleureusement, et de multiples fois recommandé cette pièce, que nous avons détestée. Un texte pauvre, une mise en scène indigente, et une femme peu convaincante en tant qu'actrice (et pourtant c'es t de sa vie qu'il s'agit) , cela faisait déjà beaucoup pour justifier notre manque d'enthousiasme. Si l'on ajoute à cela l'enthousiasme rigolard du public, sur un sujet dramatique, et les complaisances inadmissibles de l'auteur pour caresser l'auditoire dans le sens de son mauvais poil, celui du rire gras et du fantasme malséant, c'était carrément la mauvaise humeur. La petite tirade sur les différentes sortes de "bites" a été le sommet de la démagogie de bas étage qui exaspère, quand le thème, comme ici, est grave, et doit bouleverser. La guerre du Liban, la dest ruction du bonheur et des idéaux qu'elle a gravée au cœur de ceux qui ont grandi avec elle comme seul horizon, l'hallucinante capacité de survie de l'homme (ici une femme, et cela a son poids de larmes et de douleurs) au cœur du pire et de l'insupportable, tout cela mérite plus de respect que cette misérable mise en scène complaisante. Cela marche, tant mieux car le message passe quand même, mais c'est vraiment dommage que ce soit a minima du point du vue théâtral, ça écorne l'humain.
Puis, nous sommes allés déguster l'un des deux Horovitz de l'année :

A BOUT DE COUPLE déroule trois rencontres, à différents âges de la vie, d’un homme et d’une femme. Chacune de ces rencontres donne à vivre, dans un mélange d’humour et d’émotion, leurs espoirs et leurs blessures. Tour à tour tendres, drôles, pathétiques, ils se font vieux, égarés, médiocres, acrobates, aimants. Leur vie ? Un réservoir d’illusions ! Des univers semés d’embûches propres à aplatir chacune de nos certitudes! C’est toute la force de la mise en scène de Patrice Vion. C’est toute la vigueur de l’écriture d’Horovitz.
Trois petites pièces interprétées avec rigueur et souffle par deux comédiens qui se révèlent, en outre, d'excellents acrobates. Justes et sensibles, ils nous ont dit avoir reçu, lors d'une visite qu'il fit en Avignon (il y revient cette année, et va voir ses pièces, ce qui est symp athique et courageux) l'entière approbation de l'auteur pour leur mise en scène de la troisième pièce. Il s'agit d'un couple d'acrobates qui se déchirent et se séparent et se retrouvent. Elle est souvent jouée simplement sur le ton du dialogue, ou au contraire le spectacle est concentré sur les acrobaties. Ici, ils mêlent parfaitement les deux et cela donne tout son relief à cette situation cocasse des acrobates en pleine scène de ménage qui doivent sourire et composer avec le public, sourire quand tout s'effondre. Caustiques, comme sait l'être Horovitz, sans concession mais sans caricature, ces pièces sont l'exacte et douloureuse révélation des entêtemen ts absurdes qui mèneraient nos couples à la dérive, si nous n'y prenions garde .

C'est en fin d'après-midi, après un joli déjeuner sous les platanes du Petit Louvre et l'achat de sandales pour Hélène (ah les soldes !) que nous sommes allés voir
Dans L’Anniversaire, on voit confrontés deux univers antinomiques : d’une part des personnages apparemment banals qui vivent tant bien que mal dans une sorte de cocon grisâtre, faux refuge contre le monde extérieur ; et d’autre part, des inconnus apparemment dangereux, exécuteurs de quelque mafia toute puissante ou plutôt, agents impitoyables sous des dehors débonnaires d’un mystérieux pouvoir totalitaire digne de Big Brother et qui font irruption dans ce sanctuaire pour s’emparer d’une victime terrorisée et, étrangement, presque consentante. Le rire prend souvent le pas sur l’angoisse et le tragique sur le burlesque. C’est dans cette ambiguïté qu’Harold Pinter aime à plonger ses personnages.
Nous étions désolés de rater cette pièce pour cause de relâche le 14 juillet et vraiment contents de pouvoir la voir grâce à cette rallonge improvisée de notre séjour. Là encore, foule et salle comble. Hélène et moi avons détesté, absolument et sans circonstance atténuante, l'interprétation du propos de Pinter par le metteur en scène. Transformer en théâtre burlesque, voire ridicule, une pièce d'angoisse existentielle, cela nous a semblé mal à propos. Hélène est partie au moment du viol, moi je l'ai suivie au moment (encore une de ces complaisances coupables qui émoustillent le public à bon compte, choquer pour choquer et non pour servir un texte) de l'enc... bref y pas d'autre mot... Avant nous avons, encore, subi les rires gras et à contre sens des éclairagistes qui se gondolaient littérelement et bruyamment aux exploits décalés d'une pouffiasse rose qui jouait à contre jeu un texte naïf. Michel, qui déteste partir, est resté. Pour voir la fin, pour comprendre le propos du metteur en scène. Il n'était pas vraiment convaincu, mais il a vu. Il a eu raison. Hélène aussi a eu raison de partir, c'est bon de pouvoir dire non, quand on n'est pas d'accord. Quant à moi, je suis sortie en me disant que j'aimerais bien, un jour pas trop lointain, revoir cette pièce mise en scène avec intelligence et l'apprécier, car ainsi c'était du massacre démago.
Pour finir la soirée et le Festival, nous sommes allés voir
Les amoureux de Goldoni se déchirent et se réconcilient, puis se déchirent et se réconcilient de nouveau avant de se déchirer et de se… c’est redondant. Redondant, mais très excitant. Cette mécanique touche, au delà même de l’histoire vive, émouvante et terriblement drôle de ces deux amoureux magnifiques d’humanité, quelque chose de plus profond encore, qui doit se rattacher à un ordre du monde bien plus vaste, en nous et hors de nous. Nous avons voulu jouer cette folie de la comédie italienne comme un enfant qui marche dans la vie.
Voir une comédie légère, et rire pour rire, c'est bon... le jeu surjoué de l'oncle c'était gai et enlevé... les exagérations du texte de Gooldoni, les redondances et répétitions de gags, les situations cocasses et les démesures du propos, tout cela était joyeux, bien enlevé, bien troussé et parfaitement adapté à l'heure tardive et à notre désir de nous distraire. Parfait point d'orgue de notre séjour.

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