A l'origine, quand il fut projeté à Cannes, durait 2h35... Il a été raccourci de 25 minutes et comporte encore, c'est indéniable, quelques longueurs, qui ressemblent nettement à des facilités. La fin a tendance à s'enliser, au propre comme au figuré, mais le rappel, avant le générique, qu'il s'agit d'un véritable fait divers, à l'issue somme tout assez heureuse, permet de pardonner au réalisateur ces épanchements un peu surabondants.
Ce qui m'a le plus amusée, outre le fait que l'histoire s'inspire de l'aventure réelle d'un escroc ordinaire propulsé dans une équipée qui le dépasse, c'est l'espèce de mise en abyme que représentent les avatars du tournage lui-même.
Au départ, Xavier Giannoli devait tourner sur le vrai chantier d'autoroute d'un important groupe de BTP. Et au dernier moment, juste avant le début du tournage, le vice-président - qui avait été impliqué dans la véritable histoire - s'est totalement désengagé du projet. " Panique à bord, car nous n'avions évidemment pas le budget pour construire 2 kilomètres d'autoroute, se souvient le réalisateur. A ce moment-là, nous avions tout perdu. Tout. Or, Rectangle est une société de production indépendante et c'était la ruine annoncée... A ce moment-là, j'ai bien observé ceux qui restaient solidaires, et ceux qui devenaient injoignables (...) Nous avons continué à dire à tout le monde "On y arrivera...". Mais la date du tournage approchait, et nous ne savions toujours pas comment construire notre autoroute... tout simplement le décor principal du film. "
Et puis un jour, dans le Nord, le réalisateur a fait une rencontre déterminante pour la suite du projet... Amusé et touché par son histoire, Raymond Legrand, un ancien paysan devenu loueur indépendant de machines de chantier, accepta de lui prêter ses engins pour construire un tronçon d'autoroute fictif. " Un homme pur et passionné, raconte le réalisateur. J'ai donc tourné avec ses engins, mais aussi avec ses ouvriers. Il a été mon conseiller technique, tant pour les travaux que pour me faire saisir ce milieu aussi justement que possible. Il a tracé mon autoroute avec des moyens que je n'aurais jamais pu m'offrir. " Autant dire, que, comme les protagonistes de son film qui font vivre un projet qui n'existe pas, simplement par leur volonté d'y arriver, Giannoli a forcé le destin en persévérant alors qu'il n'avait, à vue humaine, aucune chance de pouvoir réaliser son film.
Je le répète, il y a des longueurs, c'est truffé d'invraisemblances et d'approximations, et on baille assez nettement sur la fin. Mais François Cluzet est tellement convaincant dans ce rôle qui lui colle à la peau, et l'histoire tellement sympathique, qu'il serait dommage de bouder son plaisir et de ne pas suivre l'avis enthousiaste de la critique. La bataille des hommes contre les éléments est éternelle, et ce conte de la rédemption improvisée d'un homme que rien ne prédestine à être bon est touchante, voire prenante.
Pour finir, l'histoire du scarabée m'a fait pensé à celle de nos écologistes locaux qui se sont dressés face au projet méthanier de 4Gas... Sauf qu'ici, la population locale était et reste farouchement opposée aux ambitions économiques du groupe néerlandais, loin de rêver aux emplois que cela serait supposer créer. Et les charentais, Dieu garde, sont nettement plus têtus que les scarabées !!
Pour finir, l'histoire du scarabée m'a fait pensé à celle de nos écologistes locaux qui se sont dressés face au projet méthanier de 4Gas... Sauf qu'ici, la population locale était et reste farouchement opposée aux ambitions économiques du groupe néerlandais, loin de rêver aux emplois que cela serait supposer créer. Et les charentais, Dieu garde, sont nettement plus têtus que les scarabées !!
Ton billet est formidable Michelaise! Tout! Le propos du film, cette rédemption d'un voyou en homme responsable et entreprenant, mais aussi et peut-être encore plus l'anecdote du financement et tout ce qui en découlait (support technique, machineries, opérateurs des machines) à ce projet de construction d'un tronçon d'autoroute, pour faire "comme" un vrai chantier de construction, eh bien, ça m'émeut beaucoup. Il y a parfois des surprises chez les humains, comme quoi, quand on refuse de baisser les bras, la magie s'opère. J'espère que ce film sera distribué dans toute la francophonie! Je l'espère sincèrement.
RépondreSupprimerp.s.: nous avons aussi un projet de port méthanier sur le Fleuve St-Laurent (Qc, prov). Et c'est loin de faire l'unanimité ici aussi.
Etant une inconditionnelle de Cluzet et suite à la lecture de ton billet,je pense que je vais plonger le we prochain.
RépondreSupprimerJ'ai lu je ne sais plus dans quelle critique que comme tu l'expliques le film a été raccourci et remonté et que de ce fait cela le rendait plus vif et plus émouvant
"A l’heure des patrons voyous, il était intéressant de raconter l’histoire d’un voyou qui devient patron " c'est ainsi que Giannoli a présenté son film à Cannes
Je me régale de ta façon d'écrire...enfin de ton style :) (j'adore)
RépondreSupprimerJ'avais prévu d'aller le voir aussi, pour le thème, et pour François Cluzet. Il n'est pas seulement un excellent acteur, mais c'est une belle personne, il est engagé, courageux. Ce n'est pas si courant.
RépondreSupprimerMerci Chic, tu finis par me faire rougir... moi c'est toi que j'adore !!
RépondreSupprimerFrançoise et Odile, allez-y pour Cluzet, il nous livre vraiment là une interprétation au top... je l'avais aussi beaucoup apprécié dans le dernier pour la route, sur les conseils de Françoise, et il "faisait" le film !
:) Moi je rougis mais à l'intérieur ;))
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