EN ECHO A KOKA

Elle parle de la nécessaire abstention aux bonnes résolutions, et souligne avec beaucoup de bon sens que cette pratique est absurde puisqu'elle a pour seul effet de nous mettre face à nos manquements et aux défaillances inavouables de notre volonté... Et elle a raison, il ne faut prendre aucune bonne résolution au mois de janvier sous peine de sombrer dans l'apathie et le désespoir de soi...

Par contre... par contre !!! La liste des désirs, des petits bonheurs encore à l'état d'ébauche dont le catalogue s'allonge au fil de ces ans qui nous dévorent en mille obligations absurdes... l'inventaire à l'état d'esquisse de tout ce dont on a rêvé sans jamais se l'accorder, pour mille raisons toutes plus légitimes les unes que les autres... les petites chimères qui seraient si faciles à réaliser si on avait l'esprit libre et le coeur disponible... ces interdits qui ont commencé il y a si longtemps avec le fameux "passe ton bac d'abord" qui nous a propulsé d'urgences en incontournables, d'indispensables en primordial avec le sentiment, toujours, de courir après le temps, ce précieux viatique qui nous laisse immanquablement sur le carreau.

Cette précieuse liste de tout ce qu'on pourra rêver quand enfin on aura le temps de s'y consacrer, et qu'on n'ose pas se formuler car on sait que tout cela n'est que vaines illusions... J'ai rencontré l'autre jour une collègue partie à la retraite depuis peu, et qui s'était juré de ne pas devenir un de ces retraités speedés et saugrenus, comme on en croise à tous les coins de rue. Elle était épanouie, lumineuse et lisse, speedée comme il se doit, et heureuse de l'être. Ayant, disait-elle, entamé une deuxième vie : elle, la petite fille trop sage, l'étudiante trop studieuse, la jeune femme trop consciencieuse, qui a passé sa vie à faire ce qu'on attendait d'elle, elle a décidé de faire ce dont elle avait toujours rêvé. Simplement. Pas du tout dans le genre "vieille dame indigne". Plutôt dans le style femme épanouie ! Dut-elle l'apprendre, le découvrir, tout reprendre à zéro. Elle n'a "fait" ni 68, ni Katmandou ni le Larzac, et vient de découvrir l'eldorado des possibles qui s'offrent, encore, enfin... à elle. Une femme sereine, gourmande, débarrassée de ses carcans, presque méconnaissable, et dont l'exemple m'a furieusement donné envie d'aiguiser ma plume pour rédiger enfin le répertoire de mes désirs.