Je ne sais quel effet vous fait la musique contemporaine mais j'avoue que, faute de formation, d'information ou plus simplement de bases me permettant d'apprécier les dissonnances et autres constructions musicales savantes qui parfois s'offrent à nous lors des concerts, je ne suis pas une fervente de ce genre de moment. Je prends mon mal en patience, je tente vainement de connecter mes oreillettes sur ces sons déroutants et, inévitablement, je m'ennuie et attends impatiemment la fin en guettant la partition pour vous si on atteint la dernière page.
Pourtant à la Roche Posay, il faut adopter une attitude positive à l'égard de la composition moderne. Car, ainsi que je le disais dans un précédent billet, au programme de chaque concert, est inscrite une oeuvre contemporaine. Cela fait tout bizarre de noter que le compositeur est né en 1960, 1974, voire d'apprendre comme lors d'une des surprises, qu'il a 16 ans ! Le public, acquis aux interprètes, fait toujours bon accueil à ces pièces dont certaines, il faut bien l'avouer sont ingrates. Dans le sens où, pour le profane, elles sont difficiles : pas de mélodie, ryhtme haché, construction musicale sans doute très savante mais peu accessible au commun des mortels. Pourtant les applaudissements fusent avec entrain, crainte de paraître idiot si l'on avoue s'être ennuyé ? Ou simplement libération après la tension qui accompagne nécessairement ce genre d'écoute ?
Une anecdote montre que la bonne volonté du public est plus de surface que l'expression d'un réel plaisir : samedi soir, au Casino, un trio allait interpréter une oeuvre de Félix Ibarrondo. Jérôme Pernoo, désireux de la présenter, prononce quelques mots, s'emmêle un peu dans ses explications et conclut "cette oeuvre montre ce qu'on écrivait à une certaine époque, la fin des années 60". Qu'ont entendu les gens ? En ce qui me concerne, pas grand chose de plus ce que disait la phrase, neutre et sans doute sans arrière pensée. Alter prétend que cela pouvait être perçu comme un peu réservé, voire critique à l'égard d'une certaine mode des dissonances tous azimuts, et que le public s'est laché. En effet, durant toute l'interprétation, ces gens d'ordinaire si sages, si policés, ont ri, discuté, critiqué, grincé des dents et marqué, car ils s'y croyaient autorisés par la réserve supposée de la présentation, leur ennui. Il régnait dans la salle de concert un brouhaha inhabituel et assez étrange !
Malgré ces réserves, La Roche Posay ne malmène pas trop ses spectateurs et j'ai choisi de vous présenter deux découvertes qui m'ont réconciliée avec la musique contemporaine. D'abord Stéphane Delplace qui nous a interprété ses "Chronogénèses", pièces pour piano inspirées par les variations Goldberg. Monsieur Delplace a pris la peine de nous expliquer la génèse de sa partition : lisant une partition de Bach antérieure à la version définitive d'une des variations, il y découvrit un rythme étonnant, supprimé ensuite par le compositeur, sans doute parce qu'il fut alors perçu comme trop audacieux. Serge Stéphane Delplace est parti de ce rythme pour écrire à son tour des variations, savantes, et, quoique modernes, fort compréhensibles pour des oreilles non prévenues. Alter s'amusait beaucoup qu'on puisse ainsi écrire du Bach quand on a la tête de Debussy (moi je le trouve mieux que Debussy, Monsieur Delplace !!), mais il a bien dû avouer que le récital était passionnant ! La présentation par l'auteur n'était pas étrangère à l'intérêt suscité par sa partition. Et en bis, son "irrévérence" qui brodait sur l'air de la Panthère Rose a entraîné l'adhésion de tous ! Au point que les pianistes amateurs du festival cherchaient partout ses partitions "irrévérencieuses" après le concert !
L'autre découverte, saluée par l'enthousiasme sincère du public qui a exigé (et obtenu) un bis : les Heures Claires de Jérôme Ducros, un quatuor pour mezzo soprano, piano, clarinette et violoncelle. Il faut dire qu'avec des tels "instruments" et du talent, on a tous les atouts pour plaire ! La mélodie de Ducros, très "mélodie française" de la fin du XIXème ou du début du XXème (en plus nerveux), a un caractère mélodieux, charmeur, délicieusement grave et reprend avec brio la tradition très particulière du chant poétique qui marrie harmonieusement un texte sensible et une musique expressive. Il y est question de lumière, de soir qui tombe et de clairs matins, la ligne mélodique est évocatrice et les sonorités propres à émouvoir le plus blasé des auditeurs ! Jérôme Ducros a 36 ans, c'est un pianiste accompagnateur de premier plan, dont la souplesse, le caractère et le talent sont bien affirmés, mais ses compositions valent qu'on s'y arrête... qui sait, si au détour d'un programme vous lisez son nom, ne faites pas la grimace, vous verrez, vous serez très agréablement surpris !
Sur la proposition d'Oxygène, j'ai cherché un enregistrement (improbable) des Heures Claires, mais sans succès, je pense que c'était plus ou moins une création... Par contre j'ai trouvé cela dont je vous propose l'audition : Philipe Jaroussky, accompagné par ... Jérôme Ducros qui chante Flamenco Sombrero de... Cécile Chaminade (et oui !!!) et L'heure exquise de Reynaldo Hahn !
Bonsoir Michelaise. J'ai regretté que tu ne nous aies pas mis en ligne un lien musical pour que l'on puisse découvrir ces oeuvres modernes. Je ne suis pas fan de la musique moderne, loin de là mais suis toujours prête à tendre un peu l'oreille puisque tu dis qu'il faut essayer... ;-)
RépondreSupprimerD'ordinaire je ne supporte pas les sons dissonants qui me heurtent et mettent mes petits nerfs à rude épreuve. Je préfère les classiques qui m'apaisent et avec lesquels je me sens beaucoup plus en accord.
Merci en tout cas pour cet article découverte. Je n'ai pas pu le lire dernièrement par j'ai été très prise avec famille et petits-enfants. Je vais visiter d'autres copinautes et essaierai de revenir chez toi. Bonne soirée à toi !
Tu sais Oxy, moi aussi les dissonances mettent mes nerfs à vif, et je guette la fin de la partition avec espoir ! Pourtant ces deux oeuvres étaient, pour de la musique contemporaine, fort agréables à écouter, d'où mon article ! Quant au lien musical, sûr que ce serait une bonne idée mais les deux oeuvres étaient (plus ou moins, surtout le Ducros) des créations, donc, sauf à ce qu'il y ait eu une autre festivalier qui ait fait un enregistrement pirate, totalement introuvables. Ceci dit, je fais quand même un tour sur YouTube pour voir si par hasard !!! l'idée est bonne.
RépondreSupprimerChanceuse, j'espère que tu as bien profité de tout ce petit monde !
Oxy, je n'ai pas trouvé bien sûr... par contre, un peu dans l'esprit, j'ai trouvé ça :
RépondreSupprimerhttp://www.youtube.com/watch?v=38XVt9JhrFc
à 3 minutes 28 on y entend Jaroussky, accompagné par Jérôme Ducros justement, qui chante un poème de Verlaine mis en musique par Gabriel Fauré !!!
AH la musique contemporaine.
RépondreSupprimerComme tu y vas
Tu me titilles.
Je te l'ai dit l'autre jour Guillaume Vincent m'aurait presque convaincue!
Honnêtement ce n'est pas le répertoire que je préfère de Jarroussky je pousserai plus loin sur ce CD de mélodies françaises il y a des morceaux qui me "parlent" bien plus comme A Chloris
Bon...la dernière fois que j'ai écouté de la musique classique, c'était il n'y a pas très longtemps et c'est une fille qui m'a demandé son chemin qui m'y a finalement invité (c'est dingue non...on croirait pas quand on écoute la musique que j'écoute ;)) )
RépondreSupprimer"Les règles de l'harmonie classique ne sont pas une convention survécue à travers les millénaires, mais plutot la reconnaissance des caractéristiques de base de la perception, communes aux hommes de tous les temps et les pays, ainsi qu'aux animaux. La préférence pour l'harmonie classique a donc une origine biologique."
RépondreSupprimerCe sont (mal traduites par moi) les conclusions d'une expérience menée au département de physique de l'université de Rome dont j'avais entendu parler à la radio l'année dernière. J'avoue que dépuis ce jour-là je me sens beaucoup moins coupable quand mes oreilles (et mes nerfs...) se crispent à cause des dissonances et d'autres caractéristiques de la musique contemporaine (ce qui n'empeche que je l'écoute mais... de temps en temps!).
L'étude me semble intéressante, on y voit aussi que les réactions de notre cerveau ne diffèrent guère de celles du cerveau d'un chat. Si vous en avez envie vous la trouvez ici:
http://www.consiglio.regione.toscana.it/news-ed-eventi/pianeta-galileo/atti/2005/25_scienza_musica.pdf
Merci Michelaise pour le lien vers cet extrait chanté. J'ai beaucoup aimé l'hommage à Brel (quel interprète !) et aussi la voix de Philippe Jaroussky sans oublier la musique au piano. j'aime le piano... ! Mais tu vois, pas de sons discordants pour moi ici. Ça m'a vraiment beaucoup plu. Si c'est cela que l'on appelle aussi du contemporain : j'en aime donc une certaine partie. :-) Ce que j'ai entendu ne me heurte pas du tout, au contraire. Je dois avouer aussi que lorsque j'ai lu "Jaroussky" dans ton com j'ai tout de suite pensé que j'allais aimer. Je suis absolument fan de sa voix extraordinaire. Bon, mon com est la réflexion de quelqu'un qui ne connaît rien à la musique, Je te dis juste ce que je ressens autant avec le coeur qu'avec les oreilles... Un grand merci à toi. Passe une bonne journée !
RépondreSupprimerJuste pour info : Le prénom de Monsieur Delplace est Stéphane et non Serge... =)
RépondreSupprimerBien à vous,
La Bande à Haydn
Merci la bande à Haydn, j'ai corrigé (oups ! ma plume a fourché !!)
RépondreSupprimerSiu, voilà qui nous fait tous chaud au coeur, car je pense que nous sommes nombreux à prendre notre mal en patience quand les dissonnances nous vrillent les oreilles ! Enfin une étude scientifique qui nous absoud !
Pour Oxy, je pense que Hahn et Chaminade c'est plutôt de la musique "moderne", encore dans nos cordes, comme tu le dis. Le contemporain, ce sont les compositeurs vivants et certains mettent nos tympans à mal ! Pas Jérôme Ducros, surtout quand il écrit des mélodies qui rappellent les "mélodies françaises début XXème" !
Chic tout pour faire le joli coeur !! même écouter un concert classique ! je t'y prends... et je suis ravie que cette jeune fille t'y ait invité !
RépondreSupprimerAloïs bien sûr que je te titille, je fais mouche à chaque coup !!! A Chloris dis-tu, je vais tacher d'écouter pour ne pas être en reste !