Connaissez-vous un sort plus injuste que celui du mot "gentil" ? Qualifier quelqu'un de gentil, c'est immédiatement le taxer d'être faible, voire un peu bébête. La qualité échoie souvent à ceux qui n'ont pas d'autres aptitudes à faire valoir. On admet qu'en principe ils savent pas dire non, sont incapables de s'affirmer, sont un peu naïfs ou franchement inconsistants. Bref, c'est une qualité par défaut, du genre "... oui mais, il est gentil !".
Et pourtant ... non content d'avoir exigé de nos enfants la gentillesse quand ils étaient petits, pour nous faire plaisir, pour se montrer obéissants, pour se sociabiliser tout doucement sans accroc et sans révolte, nous sommes d'accord pour dire qu'être gentil c'est, au moins, ne pas être méchant. Et quoi de pire, chez un adulte, que la méchanceté ? Cette propension à casser les autres, à chercher pour diverses raisons de saisfaction personnelle, d'orgueil, de jalousie, d'envie... que sais-je, à les déprécier. Cette faculté que certains ont de pouvoir, de vouloir, sciemment, de façon parfois perverse et réfléchie, faire mal. Piquer, nuire, blesser... La méchanceté est un défaut qu'on ose à peine accoler à quelqu'un, même s'il est patent qu'il est malveillant, tant ses effets sont révoltants et ses conséquences graves. C'est comme de dire de quelqu'un qu'il n'est pas intelligent, on n'ose pas, on a peur d'accuser à tort, car l'accusation est lourde de sens.
Donc être gentil, on l'admet, est une aptitude dépréciée, désuète et peu tendance. Attention, la gentillesse, ce n'est pas la passivité, une indifférence qui se nourrirait de bonnes intentions pour ne pas avoir d'ennuis. C'est passer à l'action, une action généreuse, altruiste, même si elle est de peu d'importance. C'est sortir de son petit confort frileux pour faire passer l'autre devant, fut-ce un instant. Et dès lors, c'est drôlement bénéfique d'être gentil. Nous avons tout à gagner à être bons pour ceux qui nous entourent, car on distribue alors, tout simplement, du bonheur. Et d'une façon ou d'une autre, cela rejaillit sur nous. Avez-vous fait l'expérience d'offrir des sourires, des mots aimables, un peu de temps, une attention à ceux que vous croisez ? Non seulement vous récoltez en retour le bien-être de l'autre, mais en plus, vous vous sentez bien d'avoir été généreux. Prendre le temps de l'autre, l'écouter, lui faire un compliment inusité, voire, pourquoi pas, lui "passer de la pommade", cela veut dire aussi, et avant, le regarder, le faire exister. Il ne peut que vous en être reconnaissant. C'est comme un cercle vertueux qui produit en synergie bien plus qu'il ne nous coûte.
Vous en avez forcément fait l'expérience quand vous faites un cadeau : c'est plus agréable de choisir un présent pour quelqu'un à qui l'on veut faire plaisir que de s'offrir quelque chose. Et si certains esprits chagrins vous disent que ce n'est que de l'hypocrisie, ces esprits-là n'ont rien compris aux rapports humains. On ne donne pas pour recevoir, on donne parce qu'on en a envie. Et c'est cela la clé de la gentillesse : c'est un choix, une liberté que l'on exerce sciemment, pleinement.
Vous en avez forcément fait l'expérience quand vous faites un cadeau : c'est plus agréable de choisir un présent pour quelqu'un à qui l'on veut faire plaisir que de s'offrir quelque chose. Et si certains esprits chagrins vous disent que ce n'est que de l'hypocrisie, ces esprits-là n'ont rien compris aux rapports humains. On ne donne pas pour recevoir, on donne parce qu'on en a envie. Et c'est cela la clé de la gentillesse : c'est un choix, une liberté que l'on exerce sciemment, pleinement.
Mais que se passe-t-il quand celui vers lequel vous faisiez des efforts finit par exiger ce qu'il croit soudain lui être dû ?? Quand belle-maman vous réclame plus de coups de téléphone ? Quand votre vieille voisine récrimine contre la brièveté de vos visites ? Quand vos ami(e)s vous critiquent de n'en faire jamais assez ? Quand votre amoureux exige toujours plus alors que vous donniez sans compter ? Vous fuyez... enfin, moi, en tout cas, je fuis.
Donner ? oui ! Avec générosité ? Encore plus ! Sans attendre de retour (enfin au moins pas à la même aune... car un minimum de reconnaissance est requis) ? Pas de problème ! Mais dès lors que mes attentions deviennent des devoirs, et que ma bonne volonté se transforme en pensum, je me sens piégée, flouée, bernée ! Car ce qui fait la grandeur de cette qualité si décriée qu'est la gentillesse, c'est qu'on l'exerce de son plein gré, parce qu'on le désire. C'est parfois naturel, c'est parfois un effort, mais dans tous les cas, c'est un choix dont on retire la satisfaction d'avoir exercé à bon escient sa liberté.
Donner ? oui ! Avec générosité ? Encore plus ! Sans attendre de retour (enfin au moins pas à la même aune... car un minimum de reconnaissance est requis) ? Pas de problème ! Mais dès lors que mes attentions deviennent des devoirs, et que ma bonne volonté se transforme en pensum, je me sens piégée, flouée, bernée ! Car ce qui fait la grandeur de cette qualité si décriée qu'est la gentillesse, c'est qu'on l'exerce de son plein gré, parce qu'on le désire. C'est parfois naturel, c'est parfois un effort, mais dans tous les cas, c'est un choix dont on retire la satisfaction d'avoir exercé à bon escient sa liberté.
Or par les temps qui courent, avec la propension que l'on a à tout vouloir standardiser, à faire de chaque comportement un processus qui requiert une fiche pour bien le normaliser, puis à en assurer la traçabilité, on décourage, me semble-t-il, ce qu'on appelait autrefois du joli nom "d'hommes de bonne volonté". Il est en de la gentillesse comme de certains ornements que l'on croit superflus : elle est le sel de la vie et une des plus belles expressions de notre liberté.
Comme l'oiseau, là-haut !!
Je sais dire non, j'ai beaucoup de tempérament, il ne faut pas me chercher des noises gratuitement et pourtant je suis une vraie gentille et je le revendique ! M'en fous pas mal si c'est désuet, mal vu, déprécié, obsolète et tout ce genre de choses !
RépondreSupprimerMais, il faut que cela vienne de moi, comme toi il ne faut rien exiger de ma personne!
On n'en fait jamais assez pour ceux qu'on aime, on le comprend lorsqu'ils ne sont plus là et si l'on nous réclame encore plus d'attentions, tant mieux, c'est la preuve qu'on les apprécie. Cela dit, il faut aussi savoir se garder du temps pour soi.
RépondreSupprimerAnne
Mathilde, j'étais sûre que tu étais une gentille à ma façon, faut pas nous embêter !!! moyennant quoi on est très, voire trop ??? gentilles !
RépondreSupprimerAnne quand on est d'un naturel à en faire trop, les réclamations arrivent comme des cheveux sur la soupe, rarement précédées de reconnaissance ! Car justement on ne sait guère garder du temps pour soi !!!
Ah quel malheur que celui de ne pas savoir dire non.
RépondreSupprimerQue celui de se sentir obligé,de devoir,faire avec,composer.....
Et en plus quand parfois il ose dire zut j'en ai assez,tout le monde le regarde comme si il descendait de sur Mars.
Tiens qu'est ce qu'il lui prend?
Oh cela va passer,juste un moment d'égarement...
Finalement les égoïstes ne connaissent pas leur bonheur!
Ils vivent leur vie et est-ce qu'ils n'auraient pas raison?
On ne vit qu'une fois
Mais nous ne sommes pas des sauvages non plus,alors il faut certainement trouver le juste milieu.Ne pas se laisser absorber mais aussi être un peu attentif à l'écoute
Tout un programme
Joli billet.
RépondreSupprimerJe ne suis pas sûr que la gentillesse soit l'opposé de la méchanceté. Elle ajoute quelque chose à la "neutralité" qui devrait guider nos pas. Ce qui ne signifie pas que l'indifférence est "neutre". Elle peut participer de la méchanceté. Je ne sais trop comment dire. Les comportements sont hélas, de + en + standardisés, comme tu le soulignes justement. Je connais peu de méchants. Peut-être le suis-je quand je suis autoritaire et cassant. Les méchants le sont aussi souvent par "procuration". La politique en donne des exemples tous les jours. Je n'aime pas cet air du temps, celui d'un certain pacifisme bêlant quand les barbares sont à nos portes. Les "gentils" sont-ils ceux qui veulent l'être avec tout le monde ou ceux qui se battront pour éliminer les méchants ? Propos simplistes et maladroits mais je suis un peu trop plongé dans la note que je suis en train dé rédiger sur "l'engagement"...Le commandant Massoud n'aura jamais eu ses Brigades Internationales...
J'aime bien ta définition de la gentillesse, Michelaise. Car il y a plusieurs formes de "gentillesse". Il y a celle dont tu parles: la gentillesse naturelle, innée. A ne pas confondre avec la gentillesse hypocrite, et intéressée.
RépondreSupprimerJe pense faire partie des "gentilles", peut-être même un peu "trop" gentilles, mais je préfère être ainsi, et tant pis pour ceux que cela agace. L'important est d'être en accord avec soi, d'être soi.
Belle fin des soirée à toi, Michelaise :-)
Belle réhabilitation de la gentillesse !
RépondreSupprimerJe me reconnais tout à fait dans le "toujours plus" de quelques personnes de mon entourage, que je ne citerai pas ici bien que l'envie me démange, pour qui ce n'est jamais assez...
Et il n'y a rien de plus usant que cette perpétuelle escalade dans la demande et cette frustration constamment affichée...
Ah, Michelaise, un bacio in fronte pour ce billet! J'aurais pu l'écrire moi aussi, mais vraiment tel quel, si j'en étais capable... e con particolare riferimento a:
RépondreSupprimer"C'est comme un cercle vertueux qui produit en synergie bien plus qu'il ne nous coûte."
"C'est parfois naturel, c'est parfois un effort, mais dans tous les cas, c'est un choix dont on retire la satisfaction d'avoir exercé à bon escient sa liberté."
Car moi aussi, la gentillesse m'est fondamentale, mais ma liberté tout à fait intouchable. Ammesso e non concesso, que assez souvent j'essaie de pratiquer la gentillesse -car c'est justement un plaisir surtout pour moi-meme- il est absolument certain que dès que je flaire qu'on prétend quelque chose de ma part, je me transforme en hérisson et... giù la saracinesca!
Pour finir, j'aime beaucoup la photo: je trouve qu'elle a quelque chose dans le sens... Friedrich Caspar David, meme. Et finalement on peut admirer ton merveilleux makhila d'honneur en action!
Roberto, je fais de la provoc en opposant gentil et méchant !! les mots ne sont pas "phylosophiquement corrects" !! ce sont des notions trop simples pour être admises dans la cour des grands ! Et pourtant ! La gentillesse justement, c'est l'action et non l'hypocrisie, ou le penser mou "pour ne pas avoir d'ennuis" ou "pour ne pas faire de vagues". Ce que veut dire l'article c'est 1) qu'il faut la réhabiliter comme une vertu 2) qu'il faut savoir se protéger de ceux qui, y trouvant leur compte, voudraient en bauser.
RépondreSupprimerEt en ce sens, Françoise, je prétends que cet apprentissage là, aussi, est primordial : car l'usure risuqe de désabuser. Donc, être gentil oui, mais recevoir la considération que cela mérite, aussi !
Usant, c'est bien le mot que tu utlisises Norma !
Aloîs, comme toi, combien de fois ai-je pensé "les égoïstes ne connaissent pas leur chance"... et c'est contre cela que mon article se révolte ! car, en plus, ils n'en ont jamais assez pour EUX et cela ne les rend même pas heureux !!
Siùdégonde, je suis ravie d'avoir fait mouche, et d'avoir dit avec mots ce que te ressens... Merci pour les compliments sur les photos, j'avoue qu'illustrer l'article n'était pas évident : j'ai donc choisi ces grilles, symboles de liberté à conquérir, un clin d'oeil au mot "gentil" avec ces portraits d'Artmisia Gentilescgi, et puis, l'oiseau, au loin, un peu en signature, ce sont bien mes idées que j'exprime là, même si cet article est (discrètement) dédiée à une amie !! qui s'est forcément reconnue dans mes propos
dédié ... sans e... l'article !
RépondreSupprimerLe 13 novembre 2010, Psychologies lançait la journée de la gentillesse et sur le site dédié il y a un manifeste qui commence ainsi"face à l'indifférence, au manque de respect et au cynisme, nous possédons l'arme la plus efficace qui soit: notre coeur. La gentillesse n'est pas un renoncement , une démission ou une soumission , c'est un choix..."tu peux aller lire la suite là http://journee-de-la-gentillesse.psychologies.com/manifeste Cela va tout à fait dans le sens de ton article...
RépondreSupprimerJe crois que les vrais gentils font trop souvent l'erreur de s'oublier au profit des autres et cela peut entrainer quelques frustrations de leur part aussi car c'est usant effectivement que cetaines choses deviennent un dû...mais la gentillesse rend heureux ceux qui la pratiquent alors tout le monde y trouve son compte finalement !
Michelaise, ton article est si bien écrit, si complet si proche de ce que je ressens que je ne sais vraiment pas comment le commenter...
RépondreSupprimerMoi aussi je pense être une "gentille"... une de celles qui ne savent pas dire non et qui parfois s'en mordent les doigts... Faire plaisir, faire passer les autres avant soi... est-ce vraiment un signe de faiblesse et de stupidité ??? Au début de ton article je me suis dit "Eh oui, c'est moi : faible et un peu bêbête..." et je me suis sentie rougir... Mais je me suis redressée lorsque tu as parlé de ces sourires communicatifs et de cette joie que l'on offre en partage. Un simple mot gentil, un simple sourire et parfois en retour, c'est toute une journée qui s'illumine.
Bien sûr il faut un juste équilibre à tout ça et ne pas se laisser "bouffer" (pardonne-moi l'expression)...
J'aime beaucoup la conclusion de ton article qui dit que "la gentillesse est le sel de la vie"... C'est tellement vrai... J'aime les gens gentils... Si seulement nous n'étions entourés que de gens qui ne pensent qu'à offrir un peu de douceur dans la vie...
Tu as un don certain pour l'écriture Michelaise et toi seule pouvait si bien parler de ce "défaut" qui est la plus belle des qualités.
Je suis une méchante sorcière, et pourtant je me fais avoir tout l'temps... en particulier par les gentilles fées(au fém ou au masc,j'ai des preuves).
RépondreSupprimerCe qui montre que si c'est une qualité,la gentillesse, ce qui reste à prouver, ce n'est absolument pas fiable.
Pfff et puis les gentils... Comment dire, faut toujours leur dire merci avant de leur avoir demandé s'il te plait...
Bon je sors avant d'en apporter la preuve, ligotée sur le bûcher, c'est pas du tout, du tout, un post pour moi....
Bises ;-)
Ben oui, je m'en doutais mes lecteurs lectrices sont des gens gentils, (sauf Lulu, bien sûr, tu parles !!) qui ont une certaine propension à "se faire avoir" (sauf Lulu, bien sûr puisqu'elle est méchante !!! et qu'elle se fait avoir par les "gentils") mais bref, on se croirait dans un bulletin juif ici !!!N'empêche qu'on fait ce qu'on peut, pas vrai, mais c'était aussi pour dire aux autres, ceux dont l'ego est un peu trop surdimensionné, qu'il ne faut pas nous mépriser !
RépondreSupprimerJ'ai admiré ta photo avec la fameuse canne et l'oiseau...pour sûre celle d'une gentille !
RépondreSupprimerBonjour, Michelaise.
RépondreSupprimerJe partage tout ce que tu écris.
Et si je n'écris que cela, ce n'est ni par paresse ni par gentillesse mais parce que je n'ai vraiment rien d'autre à dire...
Merci beaucoup.
Je t'embrasse.
moi chuis un ancien gentil
RépondreSupprimerMerci tous les 3 de votre passage, Chic je me doute que tu n'es plus un gentil, quand même !!! par contre Herbert, même s'il insiste il ne peut pas nier être un vrai gentil !!! Quant à moi, Evelyne, avec une telle arme à la main, tu te doutes, que je prétends cacher mon jeu !
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