J'avais lu, chez Italians do it better, un article sur une exposition d'Académies qui m'avait donné envie d'en savoir plus, et regret de ne pouvoir visiter celle dont GF nous parlait. Suite à divers remaniements de son site, impossible de remettre la main sur ce billet, dont la lecture m'aurait intéressée avant d'aller visiter l'exposition sur le même thème organisée au musée des Beaux Arts de Bordeaux, exposition qui, c'est décidémment une manie chez nous, se terminait le jour où nous la visitâmes. Mais, contrairement à Bruxelles, la fréquentation en était plutôt paisible, et la visite en fut donc agréable. Une école de jeunes espagnols, armés de détails à retrouver dans les dessins, s'égayait les salles du musée, et leur ardeur à trouver faisait plaisir à voir !
D'ordinaire réservée à la consultation par les spécialistes, chercheurs et historiens de l'art, la collection du musée des dessins Jean Bonna s'ennorgueillit d'environ 20000 pièces, et ce fonds peut raisonnablement revendiquer la deuxième place française après le Louvre, tant en termes quantitatifs que qualitatifs. L'obligation faite aux professeurs de dessin de déposer un dessin par mois d'enseignement donné, dans le fonds de l'école des Beaux Arts, et ce dès 1664, explique la richesse de cette collection. Désireux d'accueillir un public plus nombreux, la fondation Jean Bonna a créé en 2005 une association, le Cabinet des amateurs de dessins de l’Ecole des Beaux-Arts, qui a pour mission d’enrichir les collections, mais aussi de faire connaître ce fonds. L'exposition de Bordeaux entre dans le cadre de ce projet de vulgarisation.
On y apprend qu'un modèle était choisi selon des critères particulièrement stricts, parmi lesquels la "propreté" qu'elle soit physique ou morale, était certainement l'un des plus importants. Leur travail consistait, bien entendu à poser, par séance de deux heures, et selon des positions plus ou moins complexes ou fatigantes, décidées par le maître de dessin. Les élèves, quant à eux, devaient rendre un dessin terminé après trois séances de pose, soit 6 heures de travail, ayant tout de même le droit, voire le devoir, de le terminer et de le peaufiner "à la maison" !!
Lorsque les poses se compliquent jusqu'à être de véritables épreuves d'équilibre, on met au point une machine, le "stabilaire" qui, composée de cordages et de tringles, évite les crampes et permet de tenir plus longtemps les postures alambiquées qu'imposent certaines professeurs. De plus en plus tortueuses et manquant de naturel durant le XVIIIème siècle, plus impudiques aussi, insistant sur l'effort et la musculature. En plus de ce travail, le modèle nettoyait l'atelier, entrenait le poële, faisait office de gardien, de concierge, en un mot d'homme à tout faire à l'école des Beaux-Arts. Certains y passèrent toute leur vie comme le fameux Deschamps, bien identifié dans les registres de comptes et qui y vécut 48 ans. De l'éphèbe au vieillard, pas de toute, vous avez forcément eu quelque chance de le rencontrer en figurant dans quelques scènes historiques ou de genre, car il a travaillé pour tous les peintres français du XVIIIème passés par l'école de dessin !
Les cours de dessin étaient complétés par des cours de perspective et même d'anatomie. Parfois on installait les élèves autour d'oeuvres, scultpure ou peinture, provenant des collections royales et s'ensuivaient des débats et séances de critiques, pour tirer leçon de la manière des anciens.
On découvre aussi dans ce parcours, l'évolution du genre et des conceptions de la pédagogie. De la sanguine qui s'impose dans les années 1663/75, puis la pierre noire ou matita qui se gomme facilement, jusqu'aux trois crayons mis à l'honneur par De La Fosse, on suit parfaitement la mutation des goûts et des rendus. Certains comme Diderot, ont fermement critiqué, voire vilipendé, ce mode d'enseignement de l'art de dessiner : l'auteur de l'encyclopédie se disait perturbé par les "fantômes maussades" que lui avaient laissé ses 7 "cruelles et pénibles" années passées à l'Académie... autant dire qu'il n'aimait guère ces exercices obligés.
Au-delà de l'anecdotique, l'exposition vaut enfin pour l'apprentissage de la lecture des "talents" : si l'exercice se révèle cruel pour certains, dont le trait est laborieux, mou et manque de verve, tout empêtré qu'il est dans l'application à réussir une "belle figure", d'autres comme Boucher, Van Loo, Nattier dévoilent à nos yeux ravis leur aisance naturelle, leur talent à manier la lumière et à croquer des portraits, en un mot leur virtuosité que rien n'entrave, pas même le côté articifiel de l'apprentissage.
Et enfin, pour finir par un petit jeu, il faut parmi des 4 dessins trouver l'intrus, c'est à dire le croquis exécuté par un sans-grade au talent limité, les trois autres ayant été réalisés avec brio par Van Loo...
PS la réponse au précédent jeu de l'intrus était le détail du haut à droite, le petit morceau de paysage ne provenant pas de la Nativité de Martin Schongauer. Les autres détails, savoureux, du chapeau de paille, des sacs de toile et de la bourse en cuir de Saint Joseph ayant été piqués sur le tableau lui-même.
On y apprend qu'un modèle était choisi selon des critères particulièrement stricts, parmi lesquels la "propreté" qu'elle soit physique ou morale, était certainement l'un des plus importants. Leur travail consistait, bien entendu à poser, par séance de deux heures, et selon des positions plus ou moins complexes ou fatigantes, décidées par le maître de dessin. Les élèves, quant à eux, devaient rendre un dessin terminé après trois séances de pose, soit 6 heures de travail, ayant tout de même le droit, voire le devoir, de le terminer et de le peaufiner "à la maison" !!
Où l'on voit que le modèle Saint Germain gagnait en une année ce que percevait le professeur de dessin pour une leçon, qu'il fallait prévoir l'huile de lampe et le charbon du poële, et où l'on retouve des noms de professeurs reconnus, comme Coypel...
Les cours de dessin étaient complétés par des cours de perspective et même d'anatomie. Parfois on installait les élèves autour d'oeuvres, scultpure ou peinture, provenant des collections royales et s'ensuivaient des débats et séances de critiques, pour tirer leçon de la manière des anciens.
L'un de ces deux dessins est l'oeuvre de Nattier, l'autre je ne sais plus trop !
A vous de trouver le Nattier dans ces deux poses identiques ou presque !
Et enfin, pour finir par un petit jeu, il faut parmi des 4 dessins trouver l'intrus, c'est à dire le croquis exécuté par un sans-grade au talent limité, les trois autres ayant été réalisés avec brio par Van Loo...
PS la réponse au précédent jeu de l'intrus était le détail du haut à droite, le petit morceau de paysage ne provenant pas de la Nativité de Martin Schongauer. Les autres détails, savoureux, du chapeau de paille, des sacs de toile et de la bourse en cuir de Saint Joseph ayant été piqués sur le tableau lui-même.
Passionnant, et si l'ambiance a un peu changé, les salles de dessin ne sont pas si différentes !
RépondreSupprimerJe vais essayer de remettre la main sur le dessin qu'en a fait mon fiston.
Sauf que pour le prix de la scolarité, les modèles sont nettement moins... comment dire...sexy ;-)
Je suis bien incapable de mettre un nom sur ces nus (c'est sympa d'avoir mis que des garçons ;-)))
Pour ton quizz numéro un, le second dessin est plus réussi que le premier.
Pour ton quizz numéro deux, faudra me revoir le genou du deuxième et ce pied qui passe derrière la jambe du troisième, c'est un peu raté aussi. Quant au talon du quatrième, je plains le sabotier.
PS : Merci pour la réponse du quizz d'avant, je le sentais bien que ce n'était pas l'âne et pourtant l'âne louche, ce qui n'est pas fréquent.
Oh là là, terrible Lulu comme prof de dessin !! Je sens qu'on ne peut guère t'en conter !
RépondreSupprimerPour le quizz d'avant, t'as raison avec ton âne qui louche, mais est-ce si rare un âne loucheur ?? je blague, c'est rare qu'on regarde les ânes dans les yeux ! Mais j'en crois tes talents de sorcière, forcément observatrice.
Pour l'intrus, je donne ma langue au chat ! (quoique celui en haut à droite...)
RépondreSupprimerJ'ai visité cette expo (après une nuit-halte à Saintes). Nous devions bien être 3 visiteurs, dont deux (ma pomme et Mme) présents par hasard: nous croyions être au Musée des Beaux Arts et nous n'étions que dans son annexe...Un peu répétitifs tous ces nus. Faute de temps nous avons visité trop rapidement. Je lis donc, à tête reposée, avec plaisir ces commentaires.
Ah! Mais pourtant il est toujours en ligne mon article, en voici le lien : http://italiansbetter2.blogspot.com/2010/01/lhomoerotisme-mis-nu.html
RépondreSupprimerCe que je pense, en lisant ton billet, c'est que nous avons vu, à peu de choses près, la même exposition, qui a itinéré de Paris à Bruxelles. Ce sont les mêmes dessins, à quelques variantes près, et autant le Biagi d'Isabey m'a fait de l'effet, autant tu l'éludes en faisant mine de ne pas te souvenir du peintre! Quand même! C'était le plus beau dessin des trente exposés! Les dessins venaient de la même collection, néanmoins je t'invite à relire mon billet car il est intéressant de voir comment à partir d'une même exposition nous avons retenu des choses semblables mais aussi différentes!!! Quant à l'intrus, c'est trop facile, il y a les signatures qui apparaissent sur les 3 Van Loo... Merci pour ton billet et ton souvenir à mon ancien article...
Passionnant articles.
RépondreSupprimerJe suis toujours admirative lorsque je suis dans un musée et que je vois tous ces jeunes d'écoles de dessin essayer de reproduire telle ou telle partie d'un tableau.
Moi qui ne sais presque pas tenir un crayon
Lorsque j'ai visité l'expo de Nittis ils étaient une dizaine et leur prof passait de l'un à l'autre j'ai entendu un de ses conseils
"et surtout n'hésite pas,de la fermeté,car lui (le peintre)c'est la période où il ne se pose pas de question,il sait ce qu'il fait"
Je dirais que l'intrus est celui en haut à droite
Bonjour, Michelaise.
RépondreSupprimerQuelle abondance, encore...Je repars avec un sac rempli de culture , comme bien souvent, chez toi.
Pour la devinette.
C'est le dessin de droite, en haut.Il est vulgaire....
Bonne journée.
Merci beaucoup.
Je t'embrasse.
Je suis toujours surprise de ce que l´on peut faire ressentir avec un crayon...
RépondreSupprimerDécidemment le "en haut à droite" n'a pas beaucoup de succès. Allons, GF c'est facile pour toi parce que tu l'as vu !!
RépondreSupprimerBon GF c'est normal qu'on n'ait pas la même approche de ces académies, ce n'est plus de l'histoire de l'art mais bien, comme ton article l'annonce, de l'érotisme ! donc on n'a pas la même perception et les mêmes ressentis ! Quant à retrouver ton article, c'est mieux avec l'adresse, je suis de plus en plus maladroite avec les archives !!
Alba, et Aloïs aussi, ressentir avec un crayon, voilà bien l'important : d'où la nécessité d'apprendre à gribouiller, grifonner, peu importe le résultat, l'important c'est de vouloir "écrire" ce qu'on voit. Que les maîtres qui nous ont faché(e)s avec le crayon, au motif que nos traits étaient malhabiles, soient ici maudits ! Cela nous prive du plaisir de "ressentir"
Décidemment le "en haut à droite" n'a pas beaucoup de succès. Allons, GF c'est facile pour toi parce que tu l'as vu !!
RépondreSupprimerBon GF c'est normal qu'on n'ait pas la même approche de ces académies, ce n'est plus de l'histoire de l'art mais bien, comme ton article l'annonce, de l'érotisme ! donc on n'a pas la même perception et les mêmes ressentis ! Quant à retrouver ton article, c'est mieux avec l'adresse, je suis de plus en plus maladroite avec les archives !!
Alba, et Aloïs aussi, ressentir avec un crayon, voilà bien l'important : d'où la nécessité d'apprendre à gribouiller, grifonner, peu importe le résultat, l'important c'est de vouloir "écrire" ce qu'on voit. Que les maîtres qui nous ont faché(e)s avec le crayon, au motif que nos traits étaient malhabiles, soient ici maudits ! Cela nous prive du plaisir de "ressentir"
Dis-donc Roberto vous n'êtes pas passés bien loin de mes falaises ! Le musée de Beaux Arts avaient d'autres trésors que vous visiterez la prochaine fois que vos pas vous mèneront dans notre belle région (oups !!)
RépondreSupprimerNous n'aurions su trouver les falaises au travers d'un brouillard si épais qu'il nous a fallu une plombe pour trouver notre hôtel à Saintes !
RépondreSupprimerNous avons pu visiter les autres trésors. Avec deux anecdotes : au fond d'une salle un Marquet manifestement peint à Alger est situé, sur l'écriteau de présentation, dans un lieu parfaitement fantaisiste. Et puis, dans l'Entrepôt (CAPC) le cheminement (nous étions perdus) dans couloirs et réserves de ce très beau lieu, sans que personne ne se manifeste.
Van Loo: je n'avais même pas remarqué la signature.
J'ai aimé ce détail du décompte "pour l'huile à charbon (?) qui se consume". Nus mais frileux !
Pliée de rire Roberto, voilà donc l'explication de ton jugement météorologique sur la Charente Inférieure (ben oui, la Maritime !!)... Le CAPC oui le lieu est beau. Point. Comme dirait Aloïs !
RépondreSupprimerQuant au détail du décompte, c'était en effet pour dire qu'il fallait les chauffer ces malheureux modèles. Cela ne doit pas être marrant de poser nu en plein hiver, au XVIIème ! j'emploie volontairement cet anachronique présent car j'essaie d'imaginer !
Finalement GF c'est mieux que je n'aie pas trouvé ton billet avant d'écrire le mien, cela permet justement ces regards croisés et de montrer que, dans une expo, on réagit chacun différemment. Ce qu'on savait bien sûr mais c'est interessant à constater de visu !
RépondreSupprimerCoucou ! J'arrive un peu tard mais je vais essayer de jouer avant même de lire si tu as donné la réponse à ta question. Je me demande si "l'intrus" n'est pas le deuxième dessin en haut à droite...
RépondreSupprimerQuant au bel homme du tout premier dessin... Tu as ses coordonnées ...??? ;-)))
Je viens de lire en diagonale commentaires et réponses et je vois que nous sommes plusieurs à avoir pointé le même dessin... Pas de réponse de ta part encore... Je reviendrai donc voir. Quant à ta réponse pour le précédent dessin, je n'avais pas imaginé qu'il s'agissait du paysage. Un moment j'avais cru que c'était le sac de Joseph...
RépondreSupprimerOxy, je donnerai la réponse lors du prochain "jeu" !! avec renvoi vers l'article !
RépondreSupprimerTu as raison, la plastique du premier est vraiment woaouahhhhhh ! J'ai oublié de demander ses coordonnées aux gardiens de l'expo et l'expo est terminée, c'est bine moi ça, aucun sens pratique !!
J'avais tout faux !!!!
RépondreSupprimerMerci pour les réponses :-)