MARCHE PIEDS-NUS A SAINT GEORGES DE DIDONNE

Les touristes ayant (enfin !!) quitté nos plages, Alter peut retourner racler le fond de l'estuaire de son embrasseau (Roudier, comme il se doit !) sans risquer de rapporter pour l'apéritif quelque sirène égarée. Cela faisait plusieurs semaines qu'il piétinait, à l'affût de chaque marée, consterné par l'encombrement des plages et piaffant, son piment d'Espelette à la main. Je vous avoue que le sport ne me sied guère, et je laisse à mon pêcheur-cueilleur le soin de nourrir sa petite femme, à la force de ses petits bras musclés.

Donc, en attendant qu'il ait terminé sa razzia de crevettes grises, je parcours la plage. L'endroit est charmant, surtout en cette saison aux luminosités contrastées. On y croise quelques promeneurs, de rares joggeurs, des chercheurs d'or, un ou deux baigneurs et des concurrents d'Alter !

Or, j'ai appris l'autre jour que la marche furieusement tendance, en cet automne 2013, est la "marche pieds-nus". Et oui, je me tiens au courant sur mon estuaire, il ne faut pas croire ! Il faut dire que je n'y ai aucun mérite : mon amie Caroline, sans doute avec Siu et Alter la plus fidèle de mes lectrices, y veille. Caroline, chaque fois que je la vois, à vrai dire quelques rares fois l'an, m’époustoufle par sa connaissance encyclopédique de Bon Sens et Déraison ! Elle sait mieux que moi la teneur de chaque article, connait sur le bout des doigts nos moindres escapades, et pourvoit de loin, par mail ou par sms, à ma survie informationnelle. Elle m'avise des concerts, spectacles, expositions à portée de pied, m'informe sur les livres et films à voir, et surtout, me tient au courant des tendances !! Faut dire qu'elle est jeune Caroline, et en plus, elle habite "la ville" (entendez Cognac!).

Et voilà que l'autre jour, elle m'a déclaré avoir une furieuse envie de s'adonner à cette nouvelle lubie écolo-suisse. Devant mon évidente ignorance "ah oui ?? pieds nus, sans chaussures quoi ?", elle m'a immédiatement mise au parfum : "mais non, la marche Kneipp" Ben voyons !!!
Du coup, elle a voulu descendre à la plage de Meschers sans chaussures, mais n'est pas revenue enthousiasmée par sa tentative, menée dans les escaliers de l'allée du Clair de Lune, malencontreusement encombrés de crottes de chiens et de débris de canettes de bière brisées. C'est donc pour elle que j'ai testé ce chemin, qui, si mon blog était lu, devrait faire fureur la saison prochaine sur la côté Atlantique. Je sens que je vais demander des royalties à l'office de tourisme de Saint Georges !!

De la plage de Suzac au phare de Saint Georges, c'est à dire en parcourant aller et retour toute la combe de Saint Georges de Didonne, cela fait un parcours pieds-nus d'environ 4 kilomètres, absolument naturel, varié et surtout tout confort : aucun risque pour vos petits petons d'être écorchés, blessés ou intempestivement souillés ! Je sens que je vais me lancer dans le coaching des bimbos branchées dont Caroline veut toujours m'enseigner les derniers caprices !!

Adoncques, j'ai parcouru pour vous ce chemin tendance et j'en ai testé les matières et les aspérités !! Et, si l'on en croit les tenants de cette nouvelle activité nature "les sensations éprouvées varient de l’un à l’autre et sont de prime à bord plus ou moins agréables car nos pieds sont aujourd’hui habitués à être protégés par des souliers et sont donc très sensibles. Mais, après quelques minutes c’est généralement le plaisir qui prédomine et il est intéressant de sentir différentes textures sous ses pieds". Et d'ajouter, qu'outre le plaisir ressenti, les bienfaits de cette marche légère sont réels : "Très populaire en Autriche, en Suisse et en Allemagne où elle est née il y a une dizaines d’années, cette activité séduit un nombre grandissant de personnes car elle procure à la fois plaisir, relaxation et bienfaits pour la santé. Certains médecins affirment en effet que cela muscle nos pieds et leur permet de remplir leur rôle de stabilisateur pour tout le corps, que cela peut avoir des avantages pour l’équilibre et la coordination en réactivant les signaux entre les pieds et la tête et en développant le sens du toucher."

Départ ! Vous ne m'en voudrez pas, négligeant les conseils toujours éclairés de Caroline en matière de coquetterie, j'ai totalement oublié de passer chez la "vernisseuse d'ongles", qui, ma foi, doit avoir un nom beaucoup plus attractif, et je vous offre des arpions bruts de décoffrage et ne ressemblant guère à ceux qui ornent les sites vantant la "marche pieds-nus" !!

On commence bien sûr par le sable sec, où l'on croise les traces de pauvres ignorants qui n'ont jamais entendu parler du père Sebastian Kneipp, sauvé d'une grave tuberculose par des immersions répétées dans les eaux glaciales du Danube et dont les admirateurs ont revu et corrigé la méthode de marche dans l'eau par cette nouvelle formule, nettement plus variée et moins risquée !

On y  rencontre aussi quantité d'autres traces mais il ne faut pas baguenauder, car les bienfaits de la cure  s’accommodent mal de traînasseries photographiques.

Allez, premier changement de sensation : le sable humide, bien tassé sous le pied, un peu froid...

Plus loin, les coquillages brisés... il vaut mieux les choisir assez fins pour ne pas se blesser... bon ça piquouille et ça chatouille, mais courage, la santé est à ce prix-là !

Mais ce qui fait tout l'intérêt de la balade de Didonne, c'est qu'au bout de la Conche, on dispose d'une promenade fort bien aménagée et où, d'habitude, on remet ses chaussures pour rejoindre le phare. Mais aujourd'hui, en l'honneur de Caroline et au nom du prochain article de Bon Sens et Déraison, on restera pieds-nus, histoire d'apprécier le ciment "ondulé" de la pente à bateaux ...

... un petit passage en asphalte pas encore trop brûlant en cette heure matinale ...

... de-ci, de-là, des flâneries sur le bois, bien serré sous notre plante attentive ...

... des gravillons bien tranchants qui vous rétractent la peau des pieds et vous donnent des airs de danseuse malhabile ...

... quelques pavés bien ronds qui vous récompensent des passages corrosifs ...

.... et une jolie allée de pierre qui permet de pratiquer gravillons et cailloux en alternance avec sa texture douce et fraîche.

Au retour, une expérience nouvelle s'impose, celle de la boue bien collante de la marée basse, dans laquelle vous pataugez avec délice au milieu des canards et autres mouettes qui la fouillent avidement de leur bec glouton. 

Ils font un raffut de tous les diables dans leur quête gourmande et vous avez l'impression d'être dans un bain bouillonnant !!

Il est temps, après cette détente aux sensations douteuses et étranges, de passer dans la dernière matière préconisée par ce bon père Kneipp : l'eau ! La base de son traitement au départ : ce sont ses adeptes qui ont ensuite diversifié les matières sur lesquelles il fallait, selon eux, promener la peau de ses pieds !! En tout cas, après le bain de boue, la marche dans l'eau s'imposait !!

Et voilà !! des pieds bien sales mais heureux, si l'on en croit les fervents de la "marche pieds-nus" ! A pratiquer sans modération, dès lors que le chemin s'y prête !!

Dédié à Caroline