Ma petite Mandarine est de retour !! Après trois ans de sables chauds, de déserts brûlants et de climat subtropical aride, de paranoïa architecturale et de côtoiement d'une richesse "extrême"... la voici de retour en France... elle a atterri vendredi et se réhabitue tranquillement aux journées tempérées et inégales de notre doux pays, et à une certaine forme de "normalité" sociale et urbanistique. Je ne pourrai plus savoir si elle a lu mon dernier billet, mais je puis vous assurer qu'elle a été durant ses trois ans, en toute discrétion, ma plus fidèle lectrice. Allons, allons, ne soyez pas jaloux, c'est normal que Mandarine soit ma "chouchoute". Je sais que nombre d'entre vous sont, aussi, toujours assidus au poste, mais avouez que les billets de cinéma, ce n'est pas votre tasse de thé ! Et si je continue vaillamment à en faire, malgré leur évidente impopularité (1), c'est, justement, pour Mandarine. Car je sais qu'elle aime avoir des avis sur les films, cela déclenche pour elle l'envie de les voir. Mais à Abu Dhabi, elle devait attendre leur sortie en DVD. Tandis que maintenant, elle peut aller les voir en salle. C'est pour cela que cette critique lui est dédiée, cela pourrait être sa première toile toulonnaise !!
Le procès de Viviane Amsalem n'est pas celui d'un criminel, même si l'on y cite témoins et accusateurs, c'est tout simplement un divorce... qui dure 5 ans !
Viviane Amsalem demande le divorce depuis trois ans, et son mari, Elisha, le lui refuse.
Or en Israël, seuls les Rabbins peuvent prononcer un mariage et sa dissolution, qui n'est elle-même possible qu’avec le plein consentement du mari.
Sa froide obstination, la détermination de Viviane de lutter pour sa liberté, et le rôle ambigu des juges dessinent les contours d’une procédure où le tragique le dispute à l'absurde, où l'on juge de tout, sauf de la requête initiale.
Un exploit que ce film : suivre, pendant deux heures et sans voir le temps passer, des acteurs cadrés serré, enfermés dans une salle d'audience minable, c'est une vraie gageure. Et le pari est gagné, tant au niveau de la mise en scène que du point de vue du jeu des acteurs. Tout se joue dans les regards, puisqu'il n'y a ni action, ni la moindre histoire à découvrir. Il s'agit simplement de montrer, par des échanges de coups d’œil silencieux, la confrontation, le désir de dominer l'autre, la peur, la supplication ....
Ce qui est remarquable est que les deux metteurs en scène ne prennent pas position, ni pour la femme dont ils ne font pas une victime (pas de découverte scabreuse durant le "procès", pas la moindre révélation croustillante), ni pour le mari qui, tout rigide qu'il soit est tout de même fragile, ni même pour les juges qui, quoiqu'imparfaits, sont humains et honnêtes, enfin surtout bien embêtés !! Et nous sommes, de "trois mois plus tard" en "six mois plus tard", pris, nerveux, accrochés... parfois un éclat de rire nous échappe, tant le film est bouleversant et demande un peu de respiration.
Dans ce huis-clos sans concession, les deux réalisateurs ne souhaitaient pas se positionner comme des observateurs qui assistent à un fait de justice mais plutôt retranscrire à l'écran le point de vue de leurs personnages : "La caméra est toujours positionnée du point de vue d’un des personnages, qui regarde un autre personnage. Celui qui n’est pas regardé n’est pas visible. Nous, les réalisateurs, nous ne racontons pas notre histoire en imposant un point de vue unique sur l’histoire, mais par le prisme varié des personnes présentes dans l’espace devant nous. Un point de vue subjectif dans un lieu supposé objectif."
Spoiler:
Ce n'est pas un film "pièce de théâtre", c'est vraiment du cinéma, avec des comédiens exceptionnels et une caméra intelligente. Tout autant que l'histoire d'un divorce, c'est une impressionnante histoire d'amour et de possession dans le couple, qui décrit de façon impitoyable comment l'amour peut se transformer en haine. C'est enfin une lecture sans concession de la législation israélienne et de la condition des femmes dans la religion juive : l'absurde est tellement inconcevable qu'on ne sait finalement plus s'il faut en rire ou en pleurer. Vraiment un film à ne pas rater cet été.
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(1) Mes malheureux billets libellés "cinéma" plafonnent, dans le meilleur des cas, à 2 ou 300 visiteurs, la norme étant plus près d'une toute petite centaine... alors que mon article phare, ce brave Lucian Freud à la "carrière" tonitruante (je n'ai toujours pas compris pourquoi celui-là plutôt qu'un autre, mais avec Google, cela fait boule de neige) a dépassé les 12 000 clics. Autant vous dire qu'écrire sur le cinéma n'est pas encourageant, sauf à savoir qu'on sera lu, au moins une fois !
Un grand "BENTORNATA !" à Mandarine donc... Je ne pourrai d'ailleurs jamais oublier le moment bolonais où tu as reçu son coup de téléphone annonçant le retour en France : disparue par politesse dans le couloir, pendant un temps de plus en plus et quand meme un peu étrangement long... ben voilà qu'à ton retour parmi nous on a bien compris que le contenu de la conversation valait bien ton absence :-)) (ce dont je ne me rappelle plus trop c'est si on a bien trinqué à cette nouvelle avec du jus de fruits...).
RépondreSupprimerQuant à tes articles sur le cinéma je crois les avoir lus (presque...) tous ; lus et appréciés bien sur, ce dernier en particulier me donne en effet grande envie d'aller voir le film, j'espère qu'il débarquera aussi chez moi.
Pour finir, je félicite Lucian Freud que j'adore, je l'avoue, plus que tes hits historiques, la mertensia maritima et la mique sarladaise, mais peut-etre seulement parce que je ne les ai (surtout la deuxième...) jamais goutées, et maintenant va savoir si Mandarine t'apprendra quelques nouvelles recettes provenants du Moyen-Orient !
Oui c'est vrai, j'étais chez Jacopo quand Mandarine m'a appelée pour la fête des mères ... et, je l'avais oublié, j'ai donc annoncé son retour en revenant vers vous !!
SupprimerDécidément, ce Moyen Orient fait rêver les papilles, tu fais comme Michel, tu me parles cuisine aussi !! Donc Mandarine, outre ses souvenirs de là-bas, est requise pour y ajouter quelques recettes locales ...
On vous laissera toute à la joie de retrouvailles et aux plaisirs de la mère de famille retrouvant sa couvée. Vous y avez bien droit... J'aimerais quand-même que vous nous fassiez une petite interview de celle qui nous revient. On entend tellement de choses sur ces pays si différents que cela nous donnerait une petite idée de la vie d'une expatriée, de la vie locale (même dans ses détails les plus triviaux : type de nourriture - températures - possibilités ou non de déplacements - contraintes consulaires éventuelles) ainsi que de sa perception de la vie des femmes locales. Prenez ceci comme une idée éventuellement idiote et pas comme un devoir de vacances chère Michelaise.
RépondreSupprimerBonne vacances et bonne cuisine... Il semble que vous deviez vous installer devant votre fenêtre pour travailler des produits locaux, histoire de marquer le retour !
Sûr qu'elle aurait beaucoup à raconter ma Mandarine, et qu'il faudrait le faire vite avant que tout cela s'estompe !! Si ce n'était pas ma fille, je lui proposerais ce que j'espère bien mettre en oeuvre rapidement avec un ami qui dirigeait un hôtel et auquel j'ai proposé d'écrire ses mémoires à quatre mains, enfin à deux mains et à deux bouches : je ne sais si vous me suivez, il racontera et j'écrirai ses souvenirs. Faut dire, vous l'avez compris Michel, que j'ai une hantise : l'oubli et que ces lignes montrent combien j'aime à fixer les moments pour éviter qu'ils ne m'échappent ensuite ! Mandarine n'a sans doute pas les mêmes angoisses... pourtant je souhaite qu'elle lise votre requête et ait envie d'y répondre !
SupprimerQuant à la cuisine, si vous saviez Michel : en ce moment, c'est tomates à tous les repas, et sous toutes les formes possibles, faut bien varier ! Mais mon modeste potager est généreux et j'essaie d'inventer. Allez je vous quitte pour aller faire un sorbet, qu'en dites-vous ??
Tomates, tomates... et un sorbet ! à la tomate ? Pourquoi pas ; j'imagine assez bien des tomates bien mûres, pétantes d'un soleil de fin d'après-midi préparées en sorbet avec un brin d'huile d'olive, à peine de sucre... pour le sorbet il le faut bien... un peu de basilic. Ou bien alors, un gaspacho turbiné pour l'avoir juste onctueux et frais... Vous me triturez les papilles et je ne suis pas cuisinier ! Je file à un petit Sancerre frais... le temps orageux est lourd et l'heure d'un petit apéritif arrive... Voilà ce que j'en dis... Belle cuisine... Vous me direz... pour le sorbet à la tomate... si jamais vous osez ! Mais si j'avais l'équipement... je crois que j'oserais !
SupprimerBonjour! Je les aime, tes présentations cinéma, et je suis souvent d'accord avec toi. Mais là, je me suis cassée le nez hier à la porte du Créa: la séance de 17h était annulée.
RépondreSupprimerNoune.
Pas croyable !! trop peu de monde peut-être ?? en tout cas, là, ils exagèrent car pour une fois qu'il y avait un film visible...
SupprimerBonjour Michelaise ! Quel bonheur ce doit être en effet pour toi de retrouver Mandarine :-). Je suis vraiment ravie pour vous et comme le suggère Michel de Lyon, j'avoue que je serais très intéressée par des informations sur ce pays qui, de loin, me semble un peu fou. Evidemment la condition féminine là-bas m'intéresse énormément car je suis souvent outrée par le mépris et les pressions que subissent les femmes dans certains pays. Le film dont tu nous parles semble être un peu le reflet de ces problèmes de ségrégation. Le thème est fort et même les images que tu proposes semblent lourdes de sens. Tu dis que parfois "Un éclat de rire nous échappe"... J'imagine que cela doit surprendre celui-là même qui rit et que c'est peut-être une façon de détendre une atmosphère pesante à travers tous les problèmes qu'elle soulève.
RépondreSupprimerChère Michelaise, je ne suis pas une vraie fidèle car je suis rarement présente sur tes pages et encore moins en ce moment où les enfants et petits-enfants envahissent la maison.... Ce matin j'ai profité d'une partie de pêche à laquelle je ne participais pas pour me balader un peu sur les blogs et je suis très contente de t'avoir lue.
Belle semaine à toi :-)
Oui, chère Michelaise j'ai moi aussi vu ce film, hier, j'ai été tout d'abord frappée par tout ce qui se jouait dans ce tribunal rabbinique, avant de m'intéresser plus profondément à l'histoire de ce couple, je me suis interrogée sur cette tradition radicale qui se pratique encore dans ce pays, comment les femmes, les hommes peuvent-ils supporter une telle épreuve ? Je n'ai pas la réponse... Si ce n'est celle que je réserve à toutes les nations qui ont installé la religion comme pouvoir civil pour se maintenir au pouvoir : vive la séparation des églises et de l'Etat.
RépondreSupprimerUne fois passé ce choc des cultures, j'ai pu vibrer moi aussi aux jugements derniers !
Les comédiens exceptionnels, s'ils m'ont touchée bien sûr, n'ont pas réussi à effacer, à contenir mes réflexions sur notre monde d'aujourd'hui...
Don, je suis sortie de là mi figue-mi raison...
Grosses bises Michelaise et vive l'été...
Danielle