L'envie m'a prise d'aller visiter le musée Ernest Cognacq quand nous avions découvert, avec un immense plaisir, le musée Cognacq Jay lors d'un récent séjour à Paris. J'avais été séduite par la nouvelle (elle date tout de même de 1990 !) installation du musée dans les salons de l'hôtel Donon et ravie par la collection d'objets d'art, de peintures, de meubles, de sculptures qu'il abrite. Ayant à cette occasion apprécié la personnalité attachante de ce couple de collectionneurs altruistes, je m'étais promis qu'un jour nous irions visiter "l'antenne" rétaise, antenne au moins du point de vue du nom, du musée, pour lequel nous avions découvert un dépliant à l'acceuil. En fait, le musée de Saint Martin est un musée municipal, installé dans l'hôtel Clerjotte, superbe batisse Renaissance, agrémentée de loggias et d'escaliers à vis du plus bel effet. Mais que vient faire Ernest Cognacq dans l'histoire ?
Portrait de Madame Séjourné, huile sur toile de William Barbotin, restaurée en 2009 par Patrick Buti
Ernest Cognacq, fondateur de la Samaritaine, s'est institué au début du XXème en véritable mécène de l'association "les Rétais de Paris" (déjà !!). Il rachète alors l’ensemble de la collection de l'ancien maire pour la donner à la commune de Saint-Martin-de-Ré et lui fait également don de l’hôtel des Cadets Gentilhommes pour que la collection puisse être présentée au public. Le musée, inauguré en 1907, est resté jusqu'en 1969 dans ses locaux d'origine avant d'être transféré, après une longue période de stockage en caisses, dans l'Hôtel de Clerjotte. Enrichi de collections du Musée National de la Marine, il a été agrandi grâce à la construction d'une aile contemporaine fort bienvenue, et réaménagé de façon spectaculaire et fort attrayante. Malheureusement sa réouverture n'est prévue que pour 2011, en attendant il abrite des expositions, dont, celle, passionnante que nous avons visitée.L'exposition "larguez les amarres" propose la description de la vie de marin au XVIIIème siècle. Elle raconte la vie difficile de ces hommes, confrontés aux éléments hostiles, aux maladies, à la malnutrition, qui vivaient au jour le jour dans un état de forte précarité, de promiscuité permamente et dont le comportement violent n'était que la traduction logique de leur mal de vivre. On y parcourt les caractéristiques de ces sociétés flottantes où tout était hiérarchisé, organisé à l'extrême pour être supportable, on apprend l'armement des vaisseaux, destiné à défendre les cargaisons ou à combattre. Une section s'intitule "une vie de chien" et présente la discipline stricte, laissant peu de place à l'improvisation et à l'ego, qui scandait les journées des équipages. Des termes quotidiens prennent soudain forme, comme le branle qui n'était finalement que le hamac que se partageaient deux marins, et qui, versé lors du réveil, a donné "branle-bas". J'avoue m'être fort amusée à suivre l'exposition armée du livret conçu par les conservateurs pour les enfants... habitude amusante et que je vous recommande, que je tiens de ma Koka, qui adore visiter avec les livrets pédagogiques, souvent fort bien conçus... Souvenir du temps où nous faisions nous-même la démarche, car il n'existait rien pour les petits !!
Alter, qui compte bien un jour embarquer comme équipage de santé sur un navire, selon une promesse qui lui fut faite, sans doute un peu imprudemment, par son futur gendre, pose fièrement devant la vitrine des "chirurgiens" de la mer : "tiens, ça c'est ce que je vais faire dans quelque temps" !!
On comprend le scorbut et ses effets dévatateurs, l'obligation qui était faite aux hommes de Ré de naviguer un an sur trois pour fournir à la Marine des personnels suffisants, les superstitions qui accompagnaient inévitablement une vie si risquée et une survie tellement aléatoire... Savez-vous que le lapin est proscrit tout simplement parce que son amour du chanvre en faisait un consommateur immodéré de cordages, donc un danger évident pour ces bâtiments où la corde régnait en maître. Le rat, bien que porteur de maladies et rongeur vorace, est toléré car son absence sur un bateau est annonciatrice de catasptrophes bien plus graves que celles que sa présence pouvait entrainer. Quant à l'anneau d'or qui ornait traditionnellement l'oreille des matelots, son usage est bien moins poétique que prévu : il servait surtout à payer les obsèques de ceux qui, et ils étaient nombreux, venaient à périr en mer.
Petite halte déjeuner dans une aimable maison du centre ville, Un air de famille, moins courru que les terrasses du port, mais où l'on mange très bien, pour un prix raisonnable.
Notre journée à Saint Martin a donc été fort intéressante : nous avons profité du temps très clément pour parcourir la citadelle, le port, les ruelles pleines de charme de la ville. Michel remarquait qu'on aurait dit une annexe du XVIème, et notait fort à propos que le lieu, revu et corrigé grâce aux pistoles apportées largement par les "nouveaux" Rétais de Paris, était très "rupin". Cette manne touristique a sans doute fait perdre à l'île une partie de son authenticité, mais aussi, et surtout, sa pauvreté et son isolement. L'urbanisme est soigné, les maisons ripolinées et rejointées à neuf, l'ensemble respire la prospérité et l'opulence, tout en respectant assez largement l'architecture locale, les implantations et l'esprit îlien. Nous avions comme projet de parcourir l'île, mais Saint Martin, ses places, ses galeries, ses cafés, ses terrasses ensoleillées envahies de consommateurs, son petit restau sympa... nous ont retenus jusqu'à la nuit tombée et nous avons décidé qu'il serait bien temps de revenir plus tard s'adonner à d'autres balades.
J'aime beaucoup ces expositions qui nous relatent la vie de nos ancêtres quels qu'ils soient,et qui nous font toucher du doigt combien nous vivons tout de même une époque privilégiée.
RépondreSupprimerLa dernière fois que nous sommes allés à Saint Martin au mois de mai 2009,le gentilhomme et moi sommes repartis en courant,tant npous avions trouvé que cette île avait perdu son âme.
Alter dit le XVIème cela pourrait le VIème ou le VIIème,bref pas mal de quartiers de Paris,boutiques semblables,mêmes objets beaucoup plus chers du reste,mais tout ce qui triple ne perd pas n'est-ce-pas?
D"après une de mes cousines parisiennes chicos,il faut aller au bout de l'île qui est restée vraie me dit-elle
Tu as sans doute raison Alter, faut dire que nous n'étions pas allés à ré depuis plus de 25 ans ! Oups... cela nous a paru bien riche par rapport à nos souvenirs... quant à dire que le bout de l'île est restée vraie, cela reste à vérifier... j'imagine qu'en mai, pour les longs WE cela doit être infernal... et je préfère ne pas imaginer l'été ! dire que cela plait !
RépondreSupprimermais bon, ne crachons pas dans la soupe, il n'y aurait pas un tel musée juste pour nous, petits provinciaux ignares; tout n'existe ici que si des parisiens viennent le consommer et le payer le triple de ce que ça coute à paris !! cela nous permet d'avoir, en hiver, pas mal d'infra structures "luxueuses" pour des endroits perdus qui n'auraient aucune rentabilité sans les touristes !
même raconté dans les détails on a du mal à concevoir la vie de ceux qui nous ont précédés, l'inconfort, la saleté, les mauvaises odeurs, les risques, la pauvreté, la faim etc... il est bon de souligner combien notre époque fait à certains d'entre nous la vie douce !
Une visite des plus riches sur la vie des marins de l'époque...n'empêche pas quelques gourmandises au goût d'un air de famille n'est ce pas ?
RépondreSupprimerJe connaissais l'histoire des lapins mais pas celle de la boucle d'oreille ! J'avais seulement entendu dire qu'on avait moins le mal de mer avec une oreille percée...?
RépondreSupprimerL'histoire du lapin je l'ai découverte un jour où un ami m'a raconté la mésaventure suivante : il avait loué une... péniche avec quelques copains, et décidé de cuisiner pour leur périple un ragout de lapin. Hurlement des copains, scandale sur la péniche, mais vogue la galère... ils partent, dégustent le ragoût et à l'escale suivante font le plein d'eau... dans le réservoir de gazole !!! de là à en conclure que le lapin était responsable de la cata qui s'ensuivit !
RépondreSupprimerHumainement très intéressante cette expo sur le quotidien des marins, Gérard ! Ce type d'expo, montée avec beaucoup d'attention et de sens pédagogique par ceux qui les font, méritent notre visite. Quant aux gourmandises, FOSKIFO !!
Une promesse est une promesse, et elle pourrait se concrétiser bientôt. La Michelaise peut donc s'attendre à passer l'automne, l'hiver ou le printemps, d'une année qui ne saurait tarder, à préparer le retour de son Michel ;)
RépondreSupprimerAllons bon, si nous transformons la Michelaise du bord de l'estuaire en femme de marin qui guette l'horizon avec son télescope pour attendre le retour de son homme qui périple en mer, que va devenir ce blog ??? un poème hugolien, je le sens... elle va se laisser aller la Michelaise aux alexandrins pathétiques !
RépondreSupprimerPS Alter, mis au courant de cette nouvelle, commence à dire que "mais si j'ai le mal de mer, ou si je suis claustrophobe ???" c'est pas donné de me transformer en "femme de marin" !!!
RépondreSupprimerHihi, je te vois bien en Pénélope (d'ailleurs, on fera les pénélopes toutes les 2 !).
RépondreSupprimerMais ne t'inquiète pas, le commandant a tout prévu : ton Alter découvrira la mer par étapes, par exemple 1 semaine pour commencer ;)
Bisous
Va être content mon Alter !!
RépondreSupprimer