mercredi 21 avril 2010

EXPRESS COTIER - 6

Au réveil le ciel est nuageux mais cela reste d’une luminosité et d’une beauté égales. Journée paisible, les paysages sont moins spectaculaires et, paradoxalement, la neige est plus éparse.

Notre plus longue escale fut pour Honningsvåg, comptoir de pêche bien vivant, généralement accepté comme l’extrémité septentrionale de l’Europe. Une partie du bateau est partie Canon en bandoulière, faire l’excursion vers le Cap Nord, qui, malgré son côté mythique, ne vous a pas tentés. Toujours une certaine réserve quant aux troupes obligées et aux discours convenus.

La visite du musée du Cap Nord nous a permis de faire connaissance avec Bamse, le Saint Bernard fétiche de la ville. Son propriétaire, Erling Hafto, fut maître de port à Honningsvåg de 1932 à 1968. Le chien servait de cheval aux enfants de la ville qui adoraient monter sur son dos. Quand la guerre éclate, Hafto devient capitaine du Thorrod. En juin 1939, Haakon VII, roi de Norvège et toute sa famille embarquent à bord du Devonshire pour fuir le pays devant la menace allemande. Navigant vers l’Ecosse, il est escorté par le Thorrod, au bord duquel Bamse, le chien, mène grande vie. Adulé par les marins, il est l’objet de tous leurs soins et, véritable mascotte, est traité avec amitié par tous. Quand le capitaine se voit confier le commandement d’un dragueur de mines en 1940, l’équipage qui ne veut pas abandonner le chien, suit Hafto ! Quand le chien mourut, en 1944, il eut droit pour ses funérailles aux pleins honneurs militaires, et plus de 800 personnes suivirent son cercueil. Il reçut à titre posthume, en 1984, la médaille d’or PSDA qui est l’équivalent pour les animaux de la « George Cross ». Autant dire que la ville ne pouvait pas faire moins que de lui élever une statue, ce qui fut fait en 2006, monument inauguré par le Prince Andrew.

On y suit aussi, à travers quelques photos, quelques livres-phare comme « Voyage d’une femme au Spitzberg » de Léonie d’Aunet ou « Viaggio Settentrionale » de Francesco Negri, le moine de Ravenne qu’on tient pour le premier touriste au Spitzberg, l’histoire du tourisme vers le cap Nord de et la vie dans l’île de Mageroya, sur laquelle se dresse la ville. Mageroya signifie « l’île maigre » en sami (on ne dit pas lapon, cela a une connotation péjorative), ce qui se justifie par le fait qu’on est à 150kms au nord la ligne de végétation.

Nous avons ensuite parcouru la ville, entièrement détruite par des bombardements allemands en 1944 au moment de la retraite germanique. Seule l’église de bois a été épargnée, et si elle ne constitue pas à proprement parler un chef d’œuvre architectural, elle date de 1884, et s’élève, modeste, parée de bois blanchi, elle mérite une halte émue, pour saluer l’aviateur qui l’a épargnée, par sens religieux ou simple respect humain. Elle a ainsi pu servir d’habitation à la population pendant la reconstruction de la ville. Autant dire que cette dernière est moderne, sans cachet particulier, à part celui de ces maisons de couleurs vives qui caractérisent la Norvège, et l’ambiance industrieuse commune à tous les ports de pêche.

Honningsvåg abrite quelques commerces et nous avons, pour la première fois, pu sacrifier au rituel « cadeaux de voyage », raflant tout ce qui nous semblait correct pour ramener quelques souvenirs aux proches et amis, persuadés que nous sommes que pareille occasion ne se reproduira pas. En effet, il y a pas ou peu de boutiques à touristes dans les ports que dessert Hurtigruten et il valait mieux se contenter de ce qui s’offrait à nous. Le plus impressionnant, c’est que nous avons trouvé dans la modeste librairie du lieu, à peine plus grande que la maison de la presse à Meschers, le Petit Prince en norvégien, pour une amie qui collectionne l’ouvrage dans toutes les langues du monde.

Un peu de mer ensuite, histoire de somnoler tout engourdis dans le salon panoramique, nous a menés à Kjøllefjord, minuscule village de quelques âmes blotti au fond de son fjord pour un arrêt de 3 minutes ! Pourtant ce comptoir de pêche était déjà, avant le 16ème siècle un lieu de rencontre et de marché pour les pêcheurs, les Samis et la population locale. Plus loin, Mehamn se pose elle aussi comme la commune la plus septentrionale d’Europe, et de fait, elle est un peu plus haut que Honningsvåg, mais tellement petite qu’elle ne mérite guère le nom de ville ! On a l’impression, toute réelle, d’atteindre le bout du bout du monde, et cela donne à ce port modeste un charme singulier.

Il est temps de rejoindre le restaurant pour bénéficier des restes du buffet nordique, homards, langoustines, crevettes et écrevisses, restes copieux que nous ont laissés les hôtes du navire : la queue était dense pour prendre d’assaut cet amoncellement de crustacés, et à l’ouverture des portes à 18 heures ce fut une ruée mémorable qui nous laissa pantois, alors que nous passions par là pour prendre le programme du lendemain.

20 commentaires:

  1. "Toujours une certaine réserve quant aux troupes obligées et aux discours convenus".
    Comme je te comprends, c'est une raison qui nous fait hésiter à faire une croisière..., mais je vois que vous vous en tirez bien !

    C'est bien Brassens qui disait, je crois :
    "Bande à part, sacrebleu, c'est ma règle et j'y tiens..."
    ou encore :
    "Au-dessus de quatre, on est une bande de ..."

    Bonne soirée !

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  2. Des paysages superbes mais des photos pro...top...euh trop top ;-))

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  3. Oups Chic, c'est méli mélo mais plein d'ardeur, comme toujours petit lutin malin !
    Norma, le principal mérite de la croisière de l'express côtier c'est que c'est du canada dry, ça en a le goût, le nom, mais ce n'est pas une croisière !

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  4. Je t'avais écrit un long papier sur l'article d'hier, et pssssst! Disparrrru!Bug à gogo, c'est pas du gâteau...
    Je n'ai pas eu le courage de le refaire, il se faisait tard.
    On passe à autre chose: superbe voyage, un autre monde, c'est le rêve d'Alain de faire ce genre de périple mais moi je préfère les pays du Sud... lui il ne les aime pas les pays du Sud trop de soleil!
    Le compromis c'est ou Venise ou Sclos...on arrivera peut-être un jour à se rapprocher et du froid et du soleil. A trouver...
    Mais trêve de plaisanterie, c'est superbe comme pays, l'aurore boréale doit être un moment de majesté, on doit se sentir tout petit et comme dirait ma moité:
    -"Tu vois, Dieu existe"...
    Bon on ne va pas rentrer dans des discussions à n'en plus finir.
    Belle épopée, pour tous les deux, un beau cadeau pour Alter, il avait raison de souffler ses XX bougies.
    Bonne soirée à tous les deux.Et merci de nous faire découvrir ces lointaines contrées.
    PS:Vous pourriez peut-être aller en Grèce ou par là-bas la prochaine fois, cela déciderait peut-être qui vous savez à faire un compromis, qui sait?

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  5. Je pensais à la Turquie quand j'ai eu l'idée de l'Express Côtier... Alter n'a toujours pas compris le lien entre les deux, sauf que j'ai parfois une logique bizarre ! je crois que la Turquie au printemps c'est superbe ! La Grèce, pourquoi pas, même si son côté très touristique m'a jusqu'ici un peu rebutée, cela doit être beau. Comment faites vous alors avec Alain, quand ce n'est ni Sclos ni Venise... j'avoue que j'adore le soleil aussi mais pas la chaleur ?!

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  6. Impossible de recommencer quand les billets disparaissent, c'est marrant, on ne retrouve pas les mots, et la deuxième fois c'est terriblement contraint ! parfois je pense à faire un copié au cas où mais pas toujours !!! et souvent je peste contre l'ordi qui fait pfffft !

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  7. Et les trolls..en as-tu rencontrer ?

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  8. Oui, mais je ne peux pas l'avouer car mon troll préféré, j'ai cité Chic, serait jaloux !!!

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  9. Un intéressant reportage Michelaise illustré d'un beau montage photos. Mon personnage préféré reste définitivement Bamse le chien. J'adore son béret. Je distingue mal... est-il gradé ? ;-)

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  10. Finalement, il y avait beaucoup de neige !!

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  11. Bonjour, Michelaise.
    Je n'ai pas l'air, comme ça, mais je lis ...Et je suis fasciné par tout cet insolite et toute cette beauté...
    Je ne sais si tu as laissé la "recette" quelquepart, mais peut-être la donneras-tu à la fin du reportage...
    Merci beaucoup, pour ce partage.
    Je t'embrasse.

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  12. Bon, je commence par la fin, mais quel calme ... enfin c'est ce que je ressens, cela doit vraiment vider la tête , allez je lis la suite bisous

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  13. Je n'suis jamais jaloux c'est qui ce troll ??? ;-))

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  14. Ben c'est bourré de trolls en Norvège ! tu as raison de ne pas êrte jaloux, ils sont très vilains ! pas de concurrence
    Cela n'empêche que c'est très calme !

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  15. De toutes façons y'a qu'les trollettes qui m'intéressent ;-)

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  16. Je te reconnais bien là Chic, et tu as parfaitement raison !!

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  17. Encore un "épisode" passionnant ! J'aime beaucoup l'histoire de ce Bamse.

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  18. Merci Astheval, Bamse, mascotte de l'équipage et pacifique "cheval" des enfants, ne pouvait que te plaire !!!

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  19. Pour le moment c'est peut-être la journée que je préfère le moins.
    Je vois que tu as du mal avec une certaine population,tu les avais sur le bateau ,moi en Normandie,ils sont partout!!

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  20. L'histoire de Bamse est touchante et ton voyage est plein de découvertes plus originales et plus intéressantes les unes que les autres. Je trouve que la petite église épargnée pendant la guerre ne fait pas son âge. Elle semble très fraîche...
    Je comprends votre goût de ne pas suivre le troupeau des touristes et vous avez bien raison de garder une certaine indépendance par rapport "aux troupes obligées"
    Quant à la ruée sur les écrevisses et autres bêbêtes... c'est... décourageant... :-/

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