"L'amour est dans... le spray..." dixit Funky Meschers, triste aphorisme des temps modernes !
Ombres portées, la lumière était notre alliée aujourd'hui
Reportage sur téléphone Nokia !!



Alter, imperturbable, m'assène :
La pêche est très répandue le long de l'estuaire. On retrouve de nombreuses cabanes sur pilotis le long des rives permettant de descendre un filet carré (le carrelet) à l'eau. Le terme de carrelet s'applique également à la cabane de pêche. C'est une pêche au hasard (on remonte régulièrement le filet et on n'utilise aucun appât) pratiquée par les amateurs.

Comme le dit VenetiaMicio, nous avons tou(te)s une Alice comme cela dans notre vie... "Des gestes comme celui d'Alice réchauffent instantanément le coeur et rassure sur l'être humain." rajoute Aifelle... Lena renchérit "Ça réchauffe le coeur d'entendre parler d'Alice...tant d'humanité..."






Mais, malgré son enthousiasme et celui d'autres amateurs, rien à faire, cela ne nous plait toujours pas !! Désireux aussi d'attirer le chaland sur des noms qui font mouche (même Alter m'a dit en rentrant, "mais c'est un chanteur ça !!" et Dieu sait qu'Alter n'y connait rien en people), il accroche à ses cimaises plusieurs oeuvres de CarlElie Couture (photos retouchées de larges coups de pinceaux éparpillés au hasard de l'inspiration), qui doivent faire vibrer de bonheur certains amateurs mais nous ont laissés de glace.
La toile qui nous avait attirés, reproduite dans le journal local des sorties mensuelles, s'est avérée peinte par une autre tenante de l'abstraction lyrique, Monique Orsini. Cette artiste d'origine corse mais qui tient à indiquer qu'elle a quelques gènes asiatiques fort bienvenus étant donné son style, peint avec une étonnante aisance et une élégance raffinée. Ses teintes rarement vives (sauf sa série Shanghai) donnent à ses oeuvres un ton presque calligraphiques, grâce à une souplesse dans le geste qui emporte le spectateur dans un tourbillon d'inédit et de rêves. Nous avons donc eu envie de connaitre mieux Monique Orsini.
Elle déclare que "plus le geste est rapide, plus il est assuré et juste. Ses tracés aériens, dont elle retire encore de la matière pour donner une "ossature" à ses sujets, reposent sur la spontanéité du geste et ce travail proche de l'écriture accroche par son côté impulsif et fervent.
Et comme un apprentissage n'arrive jamais seul, la mairie de Meschers s'est mise de la partie, en nous offrant une exposition d'une artiste locale, Laetitia Lecque. Si l'on en juge par les cotes atteintes par ces différents artistes, nous avons carrément parcouru le chemin à l'envers, commençant avec Cheng par celui que la critique a déjà consacré, et terminant par une délicieuse inconnue, sans doute pleine de promesses. Mais, de fait, il nous a semblé que Laetita se cherche encore et que son style, attirant au premier abord, est en fait encore mal abouti. Ses compositions semblent plus le fruit du hasard que d'une réelle réflexion artistique. Mais sommes-nous aptes à juger ? Va savoir, sans doute sommes-nous, bien que nous nous en défendions, le jouet des illusions et des critiques. C'est à cela que je voulais en arriver : comment se faire une véritable opinion, parmi ceux qui sont "consacrés" trier ceux qui ont un réel talent de ceux qui sont "montés en épingle" par une spéculation d'autant plus aisée qu'en la matière ce sont les marchands qui font et défont les réputations ? Et surtout comment parmi les jeunes artistes détecter ceux qui seront un jour reconnus ? Leur talent suffira-t-il, dans l'offre pléthorique qui se déploie actuellement, pour leur permettre d'être distingués, s'ils sont trop modestes pour avoir accès au saint des saints des galeries qui ont pignon sur rue ?
En cherchant Zao Wou Ki, Alter a trouvé un de ses disciples, ou tout au moins un autre chinois très en cour actuellement dans les milieux de l’art : Wang Yan Cheng. Plus calligraphe qu’abstrait, l’artiste offre un travail exaltant et exalté qui sublime la nature et, à travers un trait fougueux, dit avec élégance le frémissement de l'eau, l'immensité du ciel et l’infini richesse de la Création. Il nous fallait le voir « pour de vrai », après que les photos de ses œuvres nous eussent séduits. Nous avons profité de notre récent séjour à Paris pour aller voir les toiles qu’expose de lui la Galerie Protée, qui l’a lancé dans les années 90 et a fait de lui une coqueluche des milieux bien documentés. Nous avons craqué, en théorie tout au moins car notre compte en banque ne saurait y pourvoir, pour une toile du lui sobrement intitulée "Juste mauve et or", qui fait vibrer en une superbe symphonie lacustre une palette riche, foisonnante, bien que parfois un peu trop empâtée.
Comme le dit Anne fort justement, "Le discours n'est pas l'oeuvre et le discours sur l'oeuvre peut nous en éloigner." ... Je me méfie comme de la peste, en matière d'art contemporain, des discours verbeux et des considérations oiseuses qui me rappellent à n'en pas douter les dissertations filandreuses que je pondais durant mes études de droit quand je ne savais pas grand chose sur un sujet, et qui, allez savoir pourquoi, parvenaient à duper ainsi mes correcteurs, me valant parfois des notes mirobolantes. Maniant le verbe avec une certaine aisance (pardon de ce manque de modestie mais comme c'est à peu près mon seul talent, je préfère ne pas feindre), je sais comment on peut parfois se noyer dans le babillage et d'éblouir son lecteur au motif qu'on lui bassine sans aucune retenue des mots ampoulés et des tournures savantes. Pourtant, comme le dit Anne "... l'émotion ressentie face à - ou parfois dans - l'oeuvre s'affine avec la réflexion que le discours contient sans perdre sa force première. C'est la subtilité qui donne à l'émotion sa durée". Il faut donc avoir un support raisonné pour apprécier vraiment, et que ce support ne soit pas un salmigondis destiné à remplir le vide et à feindre l'important où il n'y aurait que broutilles. Art difficile s'il en est, surtout quand on est dans un domaine ductile et mal fixé.
Or, je cite encore Anne " il ne faut pas confondre l'art et le marché de l'art. Que restera-t-il? Comment trier? Quelles seront les "valeurs sûres"? Est-ce plus important de le savoir que de penser aux conséquences de l'oeuvre, les modifications qu'elle a opérées dans l'âme du "regardeur"? Que vise l'artiste? Est-il vraiment intéressé par son passage à la postérité ou, à l'instar de Duchamp, cherche-t-il à faire de sa vie une oeuvre d'art?".
"Reste que les paysages chinois classiques sont froids. En les rendant mentaux, les peintres chinois les ont aussi décharnés. Or, qaund on regard les abstractions de Zao Wou-ki, de Chu Teh-Chun et de Wang Yan Cheng, on a tout sauf froid. Nous avons affaire au plus haut degré d'expression." Il revient ensuite sur la notion d'abstraction froide qui, selon lui, est à l'opposé de l'abstraction lyrique. "C'est en réaction à la charge de tous les sacrés qui le dépassent que l'homme a fait appel à des formes abstraites pour transcender le monde extérieur qu'il renie". Les abstraits froids, comme Mondrian, s'adressent à la forme mathématique, à l'invisible pour tenter de révéler des lois intérieures, au-delà du visible. Alors que, selon l'auteur, avec Cheng "l'abstraction n'est aucunement le résultat d'une angoisse... C'est cette capacité extrêmement orientale (je dirais extrême-orientale) de combiner les contraires et d'entrer dans la matière qui nourrit le travail de Wang. Avec son ouverture au monde au lieu de le transcender, Wang Yan Cheng dote ses tableaux d'une force physique extraordinaire, pour ainsi dire nourrie du monde."
Et de fait, si l'on apprend (il faut se former n'est-ce pas ?) que les tableaux d'il y a une douzaine d'année manquaient encore de caractère (zut... a priori c'étaient ceux qui me plaisaient le plus), son oeuvre actuelle est musclée, énergique et reflète une intériorisation du paysage qui, paradoxalement, explose et vibre pour notre plus grand bonheur : celui de la contemplation pure. Celle qui est sur la voie du "scotchage" du spectateur !!! Puisque c'est finalement ce que nous espérons tous d'une oeuvre d'art, qu'elle nous retienne, qu'elle nous séduise, voire qu'elle nous éblouisse.